conseil de discipline - Ordre des ingénieurs du Québec

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conseil de discipline - Ordre des ingénieurs du Québec
CONSEIL DE DISCIPLINE
ORDRE DES INGÉNIEURS DU QUÉBEC
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
N° : 22-07-0353
DATE : Le 16 mars 2009
______________________________________________________________________
LE CONSEIL : Me Jean-Guy Légaré, avocat
Président
M. Gilles Dussault, ing.
Membre
M. Miville Gagnon, ing.
Membre
______________________________________________________________________
JEAN-PIERRE RAYMOND, ingénieur, ès qualité de syndic adjoint de l’Ordre des
ingénieurs du Québec
Partie plaignante
c.
DENIS HOULE, ingénieur
Partie intimée
______________________________________________________________________
DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SUR SANCTION
______________________________________________________________________
[1] Le Conseil de discipline de l’Ordre des ingénieurs du Québec (ci-après « Le
Conseil »), s’est réuni, à Montréal le 26 février 2008, pour entendre et disposer d’une
plainte disciplinaire ainsi libellée :
« 1.
2.
er
À Laval, district de Laval, entre le ou vers le 1 février 2004 et le ou vers le 23 février 2004,
l’ingénieur Denis Houle a, dans le cadre d’un mandat portant sur un projet d’aménagement du
système de ventilation d’un local commercial loué par la firme «Lane Home Furnishings» situé
dans l’édifice «Centropolis» à Laval, signé et scellé un plan préparé par un non-ingénieur,
concernant l’aménagement de la ventilation de cet édifice, et en ce faisant, il a exprimé des avis qui
étaient incomplets ou ambigus, contrevenant ainsi à l’article 3.02.04 du Code de déontologie des
ingénieurs;
er
À Laval, district de Laval, entre le ou vers le 1 février 2004 et le ou vers le 23 février 2004,
l’ingénieur Denis Houle a, dans le cadre d’un mandat portant sur un projet d’aménagement du
système de ventilation d’un local commercial loué par la firme «Lane Home Furnishings» situé
dans l’édifice «Centropolis» à Laval, signé et scellé un plan préparé par un non-ingénieur,
concernant l’aménagement de la ventilation de cet édifice, sans se baser sur des connaissances
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suffisantes ou sur d’honnêtes convictions pour ce faire, contrevenant ainsi à l’article 2.04 du Code
de déontologie des Ingénieurs;
er
3.
À Laval, district de Laval, entre le ou vers le 1 février 2004 et le ou vers le 23 février 2004,
l’ingénieur Denis Houle a, dans le cadre d’un mandat portant sur un projet d’aménagement du
système de ventilation d’un local commercial loué par la firme «Lane Home Furnishings» situé
dans l’édifice «Centropolis» à Laval, signé et scellé un plan préparé par un non-ingénieur, alors
que ce plan n’a pas été préparé sous sa direction et surveillance immédiate, contrevenant ainsi à
l’article 3.04.01 du Code de déontologie des ingénieurs;
4.
À Laval, district de Laval, entre le ou vers le 1 février 2004 et le ou vers le 23 février 2004,
l’ingénieur Denis Houle a, dans le cadre d’un mandat portant sur un projet d’aménagement du
système de ventilation d’un local commercial loué par la firme «Lane Home Furnishings» situé
dans l’édifice «Centropolis» à Laval, signé et scellé un plan préparé par un non-ingénieur, alors
que ce plan n’a pas été préparé sous sa direction et surveillance immédiate, et en ce faisant il
commettait un acte dérogatoire à la profession d’ingénieur en participant ou en contribuant à
l’exercice illégal de la profession, contrevenant ainsi à l’article 4.01.01 a) du Code de déontologie
des Ingénieurs;
5.
À Laval, district de Laval, entre le ou vers le 1 février 2004 et le ou vers le 23 février 2004,
l’ingénieur Denis Houle a, dans le cadre d’un mandat portant sur un projet d’aménagement du
système de ventilation d’un local commercial loué par la firme «Lane Home Furnishings» situé
dans l’édifice «Centropolis» à Laval, signé et scellé un plan faisant incorrectement mention que la
firme «Tremblay l’Écuyer associés» était responsable de l’architecture et que la firme «Plante &
Associés» était responsable de l’ingénierie dans ce projet, et en ce faisant il se prêtait à des
procédés malhonnêtes ou douteux ou il tolérait de tels procédés dans le cadre de l’exercice des
ses activités professionnelles, contrevenant ainsi à l’article 3.02.08 du Code de déontologie;
6.
À Laval, district de Laval, entre le ou vers le 1 février 2004 et le 18 août 2006, l’ingénieur Denis
Houle a omis de conserver correctement une pièce essentielle de son dossier, à savoir une copie
du plan qu’il a préparé, contrevenant ainsi aux articles 2.01 a), b) et c), 2.03 et 2.04 du Règlement
sur la tenue des dossiers et des cabinets de consultation des ingénieurs;
7.
A Longueuil, district de Longueuil, entre le ou vers le 26 mai 2004 et le ou vers le 3 juin 2004,
l’ingénieur Denis Houle a faussement affirmé qu’il n’exerçait pas la profession d’ingénieur en
dehors de son emploi principal auprès de la firme «Rochon Bougie & Associés inc.» à M. Marcel
Fortin, ing. et/ou à M. Gérald Lamoureux, ing. alors que ceux-ci agissaient à titre d’inspecteurs
mandatés par le Comité d’inspection professionnelle de l’Ordre des ingénieurs du Québec dans le
cadre d’une enquête qui le concernait, contrevenant ainsi à l’article 114 du Code des Professions;
er
er
er
ET LE PLAIGNANT DEMANDE JUSTICE »
[2] La plainte disciplinaire, en date du 29 juin 2007 est accompagnée d’une affirmation
solennelle du plaignant du même jour.
[3] Le plaignant était présent devant le Conseil et était représenté par son procureur,
Me Charles Dupuis. L’intimé était également présent et se représentait seul.
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[4] Au début de l’audition, le procureur du plaignant a fait part au Conseil de l’intention
de l’intimé de plaider coupable sur l’ensemble des chefs de la plainte disciplinaire à
l’exception du chef no 5 du paragraphe 5 de la plainte. Il a également expliqué que le
plaignant avait l’intention de demander le retrait dudit chef no 5.
[5] Le procureur du plaignant a souligné au Conseil que les parties avaient l’intention de
formuler des recommandations de sanction communes et que l’intimé acceptait
d’assumer l’ensemble des déboursés.
[6] Le Conseil a alors mis en garde l’intimé concernant les conséquences possibles de
ses plaidoyers de culpabilité.
[7] L’intimé a déclaré qu’il comprenait les conséquences possibles de ses plaidoyers de
culpabilité et a déclaré qu’il avait tout de même l’intention de plaider coupable aux huit
(8) chefs de plainte des paragraphes nos 1, 2, 3, 4, 6 et 7 de la plainte disciplinaire du 29
juin 2007.
Preuve du plaignant
[8] De consentement avec l’intimé, le procureur du plaignant a déposé une preuve
documentaire au soutien des reproches formulés dans la plainte :
SYN-1
Lettre datée du 24 février 2004, expédiée à M. Hamid Belhadfa, ing. du « Groupe MLC Associés »
par M. Jasmin Caron de la firme « Léonard Caron et fils Ltée », entrepreneur général.
SYN-2
Bordereau de transmission de télécopie adressé le 4 août 2006, à M. Jean-Pierre Raymond ing.,
syndic adjoint, O.I.Q. par M. Jacques Gagné de la firme « Ivanhoé-Cambridge ».
SYN-3
Copie d’un plan intitulé « PLAN DE REZ-DE-CHAUSSÉE ET DE LA MEZZANINE » dessiné par
Luc Jobin, conçu en février 2004 par M. Claude Viel et vérifié par M. Michel St-Pierre, signé et
scellé, sans date précise par l’ingénieur intimé Denis Houle, pour « les Entreprises PRO-MATH
inc. » dans le cadre du projet « LANE HOME FURNISHINGS-CENTROPOLIS LAVAL, QUÉBEC ».
SYN-4
Lettre datée du 24 février 2004, expédiée par M. Hamid Belhadfa ing. du « Groupe MLC et
Associés » à Mme Johanne Villeneuve de la firme « Ivanhoé-Cambridge » (en liasse).
SYN-5
Bordereau de transmission de télécopie adressé le 24 février 2004 à M. Jasmin Caron de la firme
« Léonard Caron et fils ltée », entrepreneur général; expédié par M. Hamid Belhadfa inc. du
« Groupe MLC Associés ».
SYN-6
Bordereau de transmission de télécopie adressé le 24 février 2004 à M. Hamid Belhadfa inc. par
M. Jasmin Caron de la firme « Léonard Caron et fils ltée », entrepreneur général.
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SYN-7
Bordereau de transmission de télécopie adressé le 9 mars 2004 à M. Jean Roberge, président de
« Plante et associés, ingénieurs », par M. Robert N. Cloutier de la firme « MLC », en liasse avec
une partie du plan pièce SYN-3.
SYN-8
Copie du rapport (18 pages) préparé par M. Marcel Fortin ing. et M. Gérald Lamoureux,
inspecteurs du Comité d’inspection professionnelle de l’Ordre des ingénieurs du Québec, portant
sur l’inspection effectuée par le C.I.P. au sujet de l’ingénieur Denis Houle, signé le 30 juin 2004 par
l’ingénieur Marcel Fortin.
SYN-9
Compte rendu de conversation entre le syndic adjoint Jean-Pierre Raymond et les ingénieurs
Robert Cloutier et Hamid Belhadfa en date du 06/08/07.
SYN-10 Copie du cahier technique fourni par l’intimé Denis Houle à l’inspecteur du C.I.P. monsieur Gérald
Lamoureux, ing. concernant le projet Centropolis de Laval (incluent notamment les critères de
conception CVAC, la superficie de plancher de l’édifice, des calculs datés de mars 2004 (en
liasse).
SYN-11 Copie d’une facturation du 17 mars 2004 adressée à « Les Entreprises Pro Math » concernant et
portant sur les honoraires professionnels facturés par l’ingénieur intimé pour « Projet : Magasin de
meubles, Lane Home Furnishing, Centropolis, Laval » en liasse avec copie du talon de chèque
#3489 émis par « Pro Math » à l’attention de l’intimé.
SYN-12 Compte rendu de conversation entre le syndic adjoint Jean-Pierre Raymond et M. Jean-Luc Dion
en date du 06/08/08.
SYN-13 Compte rendu de conversation entre le syndic adjoint Jean-Pierre Raymond et l’ingénieur Denis
Houle, intimé, en date du 06/08/18.
SYN-14 Lettre de l’ingénieur Stephan Rowland adressée le 19 octobre 2004 à M. Louis Tremblay ing.,
Syndic de l’O.I.Q.
SYN-15 Attestation de l’Ordre des ingénieurs du Québec au sujet de l’intimé.
SYN-16 Plans (en liasse), pour le projet « Meubles in style living Centropolis » par : Jacques Morin, ing. –
Gemec Experts-conseils et daté de février 2004.
[9] Après avoir été assermenté, le plaignant a d’abord déposé l’attestation de l’Ordre
des ingénieurs du Québec confirmant que l’intimé avait été inscrit au Tableau de l’Ordre
comme ingénieur junior le 13 décembre 1984 et qu’il avait été reclassé comme
ingénieur le 1er mai 1986 (pièce SYN-15).
[10]
Le plaignant, qui est syndic adjoint, a indiqué qu’il avait amorcé son enquête au
sujet de l’intimé suite à plusieurs demandes d’enquête, qui ont été faites par différentes
personnes. L’une de ces demandes provenait de monsieur Robert Cloutier, qui était le
consultant du propriétaire du centre commercial situé à Laval. Une autre demande
provenait de la firme d’ingénieurs Plante & Associés.
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Le plaignant a d’abord référé le Conseil à la lettre datée du 24 février 2004,
expédiée à monsieur Hamid Belhadfa, ing., du groupe MLC associés inc., par monsieur
Jasmin Caron de l’entrepreneur général Léonard Caron & fils ltée (pièce SYN-1). Dans
cette lettre, l’entrepreneur général transmettait à l’ingénieur Belhadfa une série de plans
destinés à la construction du commerce Lane Home Furnishings, situé dans le centre
commercial Centropolis, à Laval.
[12]
Le plaignant a ensuite référé les membres du Conseil à la copie du plan V-1,
intitulé « Plan du rez-de-chaussée et de la mezzanine », dessiné par Luc Jobin, conçu
au mois de février 2004 par monsieur Claude Viel et vérifié par monsieur Michel StPierre (pièce SYN-3). Ce plan est signé et scellé, sans date précise, par l’intimé pour
Les Entreprises Pro-Math inc.
[13]
Selon les informations qui ont été obtenues par le plaignant, monsieur Robert
Cloutier était mandaté par Ivanhoé Cambridge, propriétaire de l’édifice, afin d’assurer la
coordination et la construction de l’ensemble des locataires du centre commercial
Centropolis.
[14]
Il semble qu’à un certain moment, monsieur Cloutier a tenté de joindre les
ingénieurs Plante & associés, dont le nom figure sur la feuille de plan V-1 (pièce SYN3,) pour obtenir certaines informations. Les ingénieurs de Plante & associés l’ont
informé que l’intimé n’avait pas été mandaté par eux. Monsieur Cloutier a obtenu la
même confirmation de la part des architectes Tremblay L’Écuyer & associés.
[15]
Monsieur Cloutier a d’abord cru qu’il s’agissait d’une erreur commise lors de
l’impression des plans faits par Autocad, qui est un logiciel de dessin.
[16]
Cependant, lorsqu’il a poursuivi son enquête, il a découvert que les plans
avaient été conçus en février 2004 par monsieur Claude Viel, qui n’est pas ingénieur.
[17]
Par la suite, toujours selon le plaignant, il semble que l’ingénieur Belhadfa, qui
était responsable de la « coquille » du centre commercial, a réalisé, en prenant
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connaissance des plans, que l’unité de climatisation n’apparaissait pas sur les plans qui
avaient pourtant été signés et scellés par l’intimé. Il a également réalisé qu’il y avait des
problèmes de dessin, puisque la vue en coupe ne correspondait pas à la vue en plan.
[18]
Les plans, qui avaient été à l’origine scellés et signés par l’intimé, ont été rejetés
et confiés à un autre ingénieur. Le plaignant a référé les membres du Conseil aux plans
qui ont finalement été utilisés pour le projet Meubles in style living Centropolis, qui ont
été préparés par l’ingénieur Jacques Morin (pièce SYN-16 en liasse).
[19]
Il a ensuite référé le Conseil à une lettre datée du 24 février 2004, expédiée par
l’ingénieur Hamind Belhadfa de MLC associés inc. à madame Johanne Villeneuve de
Ivanhoé Cambridge (pièce SYN-4). Dans cette lettre, monsieur Belhadfa précise à
madame Villeneuve qu’à l’exception du plan V-1, qui a été révisé par un ingénieur, tous
les autres plans provenant des entrepreneurs étaient nettement incomplets et ne
permettaient pas une évaluation adéquate des travaux.
[20]
Le plaignant a ensuite référé le Conseil au rapport des inspecteurs du Comité
d’inspection professionnelle du 30 juin 2004, au sujet de l’intimé (pièce SYN-8). A la fin
du rapport, les inspecteurs notent que l’intimé n’avait pas averti l’Ordre des ingénieurs
qu’il exerçait en pratique privée en dehors de son emploi principal. Ils ont également
souligné que l’intimé leur avait délibérément menti concernant sa pratique du génie en
dehors de son emploi principal et qu’il avait scellé un plan avec un cartouche d’une
firme d’ingénieurs-conseils non impliquée dans le projet.
[21]
Le plaignant a également référé le Conseil au résumé de conversations du 6
août 2007 avec les ingénieurs Robert Cloutier et Hamid Belhadfa (pièce SYN-9).
[22]
Il a ensuite fait référence au cahier technique fourni par l’intimé aux inspecteurs
du Comité d’inspection professionnelle concernant le projet Centropolis, qui donne la
charge de refroidissement minimale requise pour le projet (pièce SYN-10). Le plaignant
a expliqué que l’intimé aurait dû, en principe, utiliser ce document afin d’effectuer les
calculs en considérant les gains ou les pertes thermiques en fonction de la fenestration,
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de l’organisation des lieux, de l’équipement et de la quantité de clients pour le
commerce en question.
[23]
Le plaignant a expliqué que pour faire ce genre de calcul, l’intimé aurait dû
rencontrer le client, afin de s’assurer de ses besoins et de regarder avec lui la façon
dont serait aménagé le local en question.
[24]
Or, selon le plaignant, il semble que l’intimé aurait uniquement fait ses calculs à
partir du taux de 0,003 tonne/pieds carrés qui se trouvait à la page 4 dudit cahier
technique (pièce SYN-10).
[25]
Le plaignant a souligné aux membres du Conseil que l’intimé avait facturé, le
17 mars 2004, un montant de 400,00 $ à titre d’honoraires professionnels à Les
Entreprises Pro-Math, pour le projet du magasin de meubles Lane Home Furnishings à
Laval.
[26]
L’enquête du plaignant a révélé que l’intimé avait reçu un mandat verbal de la
part de monsieur Claude Viel de Pro-Math, afin d’effectuer les calculs de ventilation et
de signer et sceller les plans.
[27]
M. Viel est également le concepteur du plan V-1, tel qu’il appert dudit plan
produit comme pièce SYN-3.
[28]
Le plaignant a également référé le Conseil au compte rendu de la conversation
qu’il avait eue avec l’ingénieur Jean-Pierre Dion le 8 août 2006 (pièce SYN-12) ainsi
qu’au compte rendu de sa rencontre avec l’intimé en date du 18 août 2006 (pièce SYN13).
[29]
Le plaignant a expliqué que dans le cadre de son enquête, l’intimé lui a indiqué
qu’il avait consulté des plans de Gemec inc. experts-conseils qui étaient sous format
électronique chez Pro-Math et qu’il a seulement effectué les calculs pour le système
d’air climatisé; les calculs pour le chauffage et la ventilation ne faisant pas parti de son
mandat. Le plan pièce SYN-3 signé par l’intimé ne montre donc que l’air climatisé.
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[30]
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Selon le plaignant, il manquait à l’intimé des informations. En effet, celui-ci
n’avait pas rencontré le locataire et il n’avait, par conséquent, répondu à aucune des
normes de vérification existantes.
[31]
Le plaignant a référé à une lettre de l’ingénieur Stephan A. Rowland, qui est
secrétaire suppléant du Comité d’inspection professionnelle de l’Ordre des ingénieurs,
soulignant à l’ingénieur Louis Tremblay, syndic de l’Ordre, que l’intimé a entravé le
travail des inspecteurs, qui étaient dans l’exercice de leurs fonctions et les a trompés
par une fausse déclaration.
[32]
Pour le plaignant, avant de signer et de sceller le plan produit comme pièce
SYN-3, l’intimé n’a pas identifié les besoins réels de son client. En effet, jamais l’intimé
n’est allé sur les lieux. Il a admis que l’intimé avait bien identifié les caractéristiques
essentielles de la solution qu’il avait choisie. Cependant, il n’a jamais effectué les
calculs nécessaires, ni élaboré et vérifié les plans qui ont été préparés par d’autres. Par
conséquent, selon le plaignant, l’intimé a exprimé son avis quant à l’aménagement du
système de ventilation, sans en avoir une connaissance factuelle.
[33]
Le procureur du plaignant a de nouveau mentionné au Conseil qu’il renouvelait
sa demande de retirer le chef de plainte no 5 et que l’intimé souhaitait, de son côté,
enregistrer un plaidoyer de culpabilité sur les huit (8) chefs d’infraction restants
contenus aux paragraphes 1, 2, 3, 4, 6 et 7 de la plainte disciplinaire du 29 juin 2007.
[34]
Le Conseil s’est ensuite assuré que l’intimé comprenait bien les conséquences
possibles de son plaidoyer de culpabilité.
[35]
L’intimé a confirmé les propos qui avaient été tenus par le procureur du
plaignant.
[36]
Le Conseil a accepté la demande de retrait, telle que formulée par le procureur
du plaignant et il a déclaré, séance tenante, l’intimé coupable des chefs d’infraction nos
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1, 2, 3, 4, 6, 7, 8, et 9 contenus aux paragraphes 1, 2, 3, 4, 6 et 7 de la plainte
disciplinaire du 29 juin 2007.
[37]
Le Conseil a ensuite accepté d’entendre les représentations des parties sur la
sanction, séance tenante.
Représentations du procureur du plaignant
[38]
Le procureur du plaignant a rappelé au Conseil que, dans le cadre de
l’imposition d’une sanction, il devait considérer les critères objectifs et subjectifs.
[39]
Il est d’avis que la proposition qui sera soumise par les parties respectera le
critère essentiel de la mission de l’Ordre, qui est la protection du public.
[40]
Le procureur du plaignant a rappelé que l’enquête de son client a révélé que les
fautes qui ont été commises par l’intimé n’étaient pas dues à un manque de
connaissance technique. De même, il a souligné que l’intimé, qui est ingénieur depuis
22 ans, n’a jamais eu de problèmes déontologiques dans le passé.
[41]
Le procureur du plaignant a indiqué au Conseil que son client était convaincu
que l’intimé avait appris de cette expérience et que la leçon avait portée fruit. Selon lui,
ses chances de récidive sont nulles.
[42]
Le procureur du plaignant a également souligné que, bien que l’intimé ait
collaboré «sur le tard», il avait finalement collaboré de façon adéquate avec le syndic.
[43]
À la décharge de l’intimé, il a toutefois souligné que celui-ci avait initialement
plaidé non coupable puisqu’il croyait, à tort, que l’infraction quant au chef numéro 2,
fondé sur l’article 2.04 du Code de déontologie des ingénieurs, visait un manque de
connaissances techniques de sa part.
[44]
Le procureur du plaignant a expliqué que son client avait fait comprendre à
l’intimé qu’il avait omis de prendre les informations nécessaires avant de signer et de
sceller un plan.
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[45]
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Le procureur a réitéré que selon son client, l’intimé ne représentait pas de
risques de récidive et qu’il avait appris sa leçon. Cependant, même dans ces
circonstances, les infractions commises par l’intimé méritent des sanctions.
[46]
Le procureur du plaignant a rappelé que le but du droit disciplinaire n’est pas de
punir l’intimé, mais bien de prévenir, afin que d’autres actes du même genre ne se
reproduisent pas. À ce sujet, il a rappelé au Conseil les dispositions de l’article 23 du
Code des professions, qui rappelle que chaque ordre professionnel a pour principale
fonction d’assurer la protection du public.
[47]
Le procureur a également souligné que, dans le cadre de l’imposition des
sanctions, le Conseil devrait tenir compte de l’aspect de globalité de celles-ci, bien qu’il
devait se prononcer sur chaque chef individuellement.
[48]
Quant au chef no1, dans lequel il est reproché à l’intimé d’avoir signé et scellé
un plan préparé par un non-ingénieur concernant l’aménagement d’un édifice, le tout
contrevenant à l’article 3.02.04 du Code de déontologie des ingénieurs, la suggestion
commune faite par les parties au Conseil est une amende minimale de 600,00 $.
[49]
Le procureur a référé le Conseil aux affaires Rollin1, Rughani2, Plante3 et
Lapointe4.
[50]
Dans ces affaires, le procureur du plaignant a souligné que les Conseils de
discipline avaient attribué uniquement une amende de 600,00 $ sur les chefs fondés sur
l’article 3.02.04 du Code de déontologie des ingénieurs.
[51]
Quant au chef no 2, dans lequel on reproche à l’intimé d’avoir signé et scellé un
plan par un non-ingénieur concernant l’aménagement et la ventilation d’un édifice, sans
se baser sur des connaissances suffisantes ou sur d’honnêtes convictions pour ce faire,
1
2
3
4
o
Latulippe c. Rollin, CDOIQ, n 22-01-0002, 13 septembre 2001
o
er
Alaurent c. Rughani, CDOIQ, n 22-00-0020, 1 février 2001
o
Tremblay c. Plante, CDOIQ, n 22-02-0263, 18 mars 2003
o
Alaurent c. Lapointe, CDOIQ, n 22-05-0304, 9 juin 2006
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PAGE : 11
contrevenant ainsi à l’article 2.04 du Code de déontologie des ingénieurs, la suggestion
commune faite par les parties au Conseil est une réprimande.
[52]
Le procureur a référé le Conseil à l’affaire Major5.
[53]
Au chef no 3, on reproche à l’intimé d’avoir signé et scellé un plan par un non-
ingénieur alors que ce plan n’avait pas été préparé sous sa direction et surveillance
immédiate, contrevenant ainsi à l’article 3.04.01 du Code de déontologie des
ingénieurs.
[54]
La suggestion commune faite par les parties est l’amende minimale de 600,00 $.
[55]
Le procureur a référé le Conseil à l’affaire Vallières6.
[56]
Toujours en s’appuyant sur cette même affaire Vallières7, le procureur du
plaignant a formulé comme suggestion commune, quant au chef no 4, qu’une amende
de 600,00 $ auquel s’ajoute une réprimande soit imposé à l’intimé, puisque celui-ci a
commis un acte dérogatoire en contribuant à l’exercice illégal de la profession en
contravention de l’article 4.01.01 a) du Code de déontologie des ingénieurs.
[57]
Quant au chef no 6 du paragraphe 6, fondé sur l’article 2.01 a), b) et c) du
Règlement sur la tenue des dossiers et des cabinets de consultation des ingénieurs, le
procureur du plaignant a proposé au Conseil, comme suggestion commune, une
amende de 600,00 $.
[58]
Quant aux chefs nos 7 et 8 du paragraphe 6, fondés respectivement sur les
articles 2.03 et 2.04 du Règlement sur la tenue des dossiers et des cabinets de
consultation des ingénieurs, les parties ont proposé, à titre de suggestion commune,
une réprimande pour chacun de ces chefs. Les recommandations communes,
5
6
7
o
er
Latulippe c. Major, CDOIQ, n 22-00-0031, 1 août 2001
o
Raymond c. Vallières, CDOIQ, n 22-02-0266, 2 juillet 2003
Précité note 6
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formulées par les parties à l’égard des chefs nos 6, 7 et 8 du paragraphe 6, trouvent leur
inspiration dans la décision Clouâtre8.
[59]
Quant au chef no 9 du paragraphe 7 de la plainte, fondé sur l’article 114 du Code
des professions, les parties, en s’inspirant des affaires Toutant9 et Chouinard10,
recommandent aux parties l’imposition d’une amende de 600,00 $ à laquelle s’ajoute
une réprimande.
[60]
Le procureur du plaignant a indiqué que l’ensemble des suggestions formulées
par les parties tenaient compte du plaidoyer de culpabilité de l’intimé pour la plupart des
chefs et du fait que celui-ci acceptait d’assumer l’ensemble des déboursés du dossier.
[61]
Le procureur du plaignant a également mentionné au Conseil qu’il n’avait pas
d’objection à ce qu’un délai de six (6) mois soit accordé à l’intimé afin d’acquitter les
amendes et les déboursés.
Représentations de l’intimé
[62]
L’intimé a souligné au Conseil qu’il était repentant et qu’il ne souhaitait pas
qu’une telle situation se reproduise à nouveau. Il a assuré le Conseil que cette audition
disciplinaire était une erreur de parcours et qu’il souhaitait ne jamais devoir revenir
devant le Conseil de discipline.
[63]
L’intimé a, de plus, souligné au Conseil qu’il devait assumer des pensions
alimentaires relativement importantes et que, par conséquent, il lui semblait raisonnable
de demander un délai de six (6) mois afin d’acquitter l’ensemble des amendes, de
même que les déboursés.
8
9
10
o
Alaurent c. Clouâtre, CDOIQ, n 22-01-0004, 13 septembre 2001
o
Alaurent c. Toutant, CDOIQ, n 22-02-0002, 29 mai 2002
o
Tremblay c. Chouinard, CDOIQ, n 22-00-0023, 22 mars 2001
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Le droit
[64]
Le Conseil croit utile de reproduire les articles sur lesquels l’intimé a reconnu sa
culpabilité.
CODE DE DÉONTOLOGIE (L.R.Q., c. C-26, a.87)
2.04
L’ingénieur ne doit exprimer son avis sur des questions ayant trait à l’ingénierie,
que si cet avis est basé sur des connaissances suffisantes et sur d’honnêtes
convictions.
3.02.04
L’ingénieur doit s’abstenir d’exprimer des avis ou de donner des conseils
contradictoires ou incomplets et de présenter ou utiliser des plans, devis et
autres documents qu’il sait ambigus ou qui ne sont pas suffisamment explicites.
3.04.01
L’ingénieur doit apposer son sceau et sa signature sur l’original et les copies de
chaque plan et devis d’ingénierie qu’il a préparés lui-même ou qui ont été
préparés sous sa direction et sa surveillance immédiates par des personnes qui
ne sont pas membres de l’Ordre.
L’ingénieur peut également apposer son sceau et sa signature sur l’original et
les copies des documents prévus au présent article qui ont été préparés, signés
et scellés par un autre ingénieur.
L’ingénieur ne doit ou ne peut apposer son sceau et sa signature que dans les
seuls cas prévus au présent article.
4.01.01
En outre des actes dérogatoires mentionnés aux articles 57 et 58 du Code des
professions, est dérogatoire à la dignité de la profession le fait pour un
ingénieur :
a)
de participer ou de contribuer à l’exercice illégal de la profession;
(…)
RÈGLEMENT SUR LA TENUE DES DOSSIERS ET DES CABINETS DE CONSULTATION DES INGÉNIEURS (C.
I-9, R.14)
2.01
Sous réserve de l’article 2.06, l’ingénieur doit tenir, à l’endroit où il exerce sa
profession :
a)
un registre où figurent, au fur et à mesure des mandats qu’il reçoit, les
renseignements suivants :
i.
la date de l’entente intervenue entre lui et son client relativement à ses
services professionnels;
ii.
les nom et prénoms du client, son adresse et son numéro de téléphone;
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iii.
une description sommaire du mandat;
iv.
la désignation du projet, le cas échéant;
v.
l’inscription du temps utilisé par l’ingénieur et ses employés à la
réalisation d’un projet ainsi que la copie de toutes notes d’honoraires et de
paiement;
b)
le dossier général relatif à un projet comprenant la correspondance
échangée avec le client ou des tierces personnes dans le cours du
développement du projet et relative aux études, estimations, rapports, plans,
devis ou autres documents pertinents;
c)
le dossier technique d’un projet comprenant les données fournies par le
client ou colligées par l’ingénieur, les charges pour lesquelles les calculs sont
effectués, ainsi que les calculs eux-mêmes avec indication des méthodes
utilisées, s’il y a lieu.
2.03
L’ingénieur doit classer ses dossiers et les plans et devis de façon à les
conserver en bonne condition d’utilisation durant l’exécution du projet dans un
endroit où le public n’a pas librement accès. Lorsque, suivant l’article 1.03,
l’ingénieur utilise l’informatique ou toute autre technique pour la constitution et la
tenue de ses dossiers, il doit s’assurer que leur confidentialité soit respectée.
2.04
Les dossiers de l’ingénieur doivent être conservés pour une période minimale de
10 ans, à partir de la date du dernier service rendu ou, lorsque le projet est
réalisé, à partir de la date de la fin des travaux.
CODE DES PROFESSIONS (L.R.Q., C. C-26, A.87)
114
[65]
Il est interdit d’entraver de quelque façon que ce soit un membre du comité, la
personne responsable de l’inspection professionnelle nommée conformément à
l’article 90, un inspecteur, un enquêteur ou un expert, dans l’exercice des
fonctions qui lui sont conférées par le présent code, de le tromper par des
réticences ou par de fausses déclarations, de refuser de lui fournir un
renseignement ou document relatif à une vérification ou à une enquête tenue en
vertu du présent code ou de refuser de lui laisser prendre copie d’un tel
document.
Le Conseil de discipline de l’Ordre des ingénieurs du Québec tire sa raison d’être
de l’article 23 du Code des professions. L’Honorable Juge Gonthier a bien fait état de
cette situation en ces termes :
« Depuis déjà plusieurs années, le législateur québécois assujettit l’exercice de
certaines professions à des restrictions et à différents mécanismes de contrôle.
Adopté pour la première fois en 1973, le Code des professions, L.R.Q., ch. C-36
(C.P.), régit maintenant les 44 ordres professionnels constitués en vertu de la loi.
Il crée un organisme, l’Office des professions du Québec, qui a pour fonction de
veiller à ce que chacun d’eux accomplisse le mandat qui leur est expressément
confié par le Code et qui constitue leur principale raison d’être, assurer la
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protection du public (art. 12 et 23 C.P.). Dans la poursuite de cet objectif
fondamental, le législateur a accordé aux membres de certaines professions le
droit exclusif de poser certains actes. En effet, en vertu de l’art. 26 C.P., le droit
exclusif d’exercer une profession n’est conféré que dans les cas où la nature des
actes posés par ces personnes et la latitude dont elles disposent en raison de la
nature de leur milieu de travail habituel sont telles qu’en vue de la protection du
public, ces actes ne peuvent être posés par des personnes ne possédant pas la
11
formation et la qualification requises pour être membres de cet ordre».
[66]
Dans l’affaire Malouin12, le Tribunal des professions a établi certains paramètres
qui doivent être respectés lors de recommandations communes :
«10. La Cour d’appel s’est prononcée très récemment sur l’attitude à adopter
lorsque des procureurs, après de sérieuses et intenses négociations, présentent
de façon conjointe au tribunal leurs recommandations quant aux sanctions à
imposer.
11. Après avoir écrit:
39. I think it is important to emphasize that the joint submission in this
case was the object of lengthy and detailed negotiations over a
considerable period of time by experienced and conscientious counsel
of both sides, (…) and clearly contingent on a plea of guilty by the
appelant.
La Cour d’appel, sous la plume de l’honorable juge Fish, fait un tour d’horizon de
la jurisprudence canadienne sur le sujet et conclut :
«44. Appellate courts, increasingly in recent years, have stated time and
again that trial judges should not reject jointly proposed sentences
unless they are «unreasonable», «contrary to the public interest»,
«unfit», or «would bring the administration of justice into disrepute».
(…)
52. In my view, a reasonable joint submission cannot be said to «bring
the administration of justice into disrepute». An unreasonable joint
submission, on the other hand, is surely «contrary to the public interest».
53. Moreover, I agree with the Martin Report cited earlier, that the
reasonableness of a sentence must necessarily be evaluated in the light
of the evidence, submissions and reports placed on the record before
13
the sentencing judge (…).»
11
12
13
Barreau c. Fortin et Chrétien, 2001, 2 R.C.S. 500, paragraphe 11
Maloin c. Notaires (Ordre professionnel des), Tribunal des professions, 760-07-000001-010, 2002
QCTP 015
Douglas c. La Reine, C.A.M. 500-10-002149-019, 18 janvier 2002
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12.
En l’instance, le Tribunal n’a aucune raison de croire que la
recommandation commune des parties soit déraisonnable, qu’elle porte atteinte
à l’intérêt public ou qu’elle jette un discrédit sur l’administration de la justice.»
[67]
Le Conseil partage l’opinion émise par le juge Chamberland de la Cour d’appel
qui s’exprimait ainsi en regard des critères devant guider le Conseil lors de l’imposition
d’une sanction.
« La sanction imposée par le Comité de discipline doit coller aux faits du dossier.
Chaque cas est un cas d’espèce.
La sanction disciplinaire doit permettre d’atteindre les objectifs suivants : au
premier chef la protection du public, puis la dissuasion du professionnel de
récidiver, l’exemplarité à l’égard des autres membres de la profession qui
pourraient être tentés de poser des gestes semblables et enfin, le droit par le
professionnel visé d’exercer sa profession (Latulippe c. Léveillé, Ordre
professionnel des médecins) [1998] D.D.O.P., 311 ; Dr J.C. Paquette c. Comité
de discipline de la Corporation professionnelle des médecins du Québec et al,
[1995] R.D.J. 301 (C.A.) ; et R. c. Burns, [1944] 1 R.C.S. 656).
Le Comité de discipline impose la sanction après avoir pris en compte tous les
facteurs, objectifs et subjectifs, propres au dossier. Parmi les facteurs objectifs,
il faut voir si le public est affecté par les gestes posés par le professionnel, si
l’infraction retenue contre le professionnel a un lien avec l’exercice de la
profession, si le geste posé constitue un acte isolé ou un geste répétitif, …
Parmi les facteurs subjectifs, il faut tenir compte de l’expérience, du passé
disciplinaire et de l’âge du professionnel, de même que sa volonté de corriger
son comportement. La délicate tâche du Comité de discipline consiste donc à
décider d’une sanction qui tienne compte à la fois des principes applicables en
matière de droit disciplinaire et de toutes les circonstances, aggravantes et
14
atténuantes, de l’affaire.»
[68]
Le Conseil souligne qu’il n’est pas lié par les recommandations des parties, s’il
en vient à la conclusion que celles-ci sont déraisonnables et contraires à l’intérêt public.
D’ailleurs, le Tribunal des professions s’exprimait ainsi dans l’affaire Normand :
« Quant à l’argument de l’appelant concernant le fait que le comité a erronément et
sans justification légale omis de retenir les recommandations des parties, rappelons
comme l’allègue l’intimé que le comité n’est aucunement lié par de telles
recommandations. Si le comité y donnait suite en dépit de la gravité des infractions,
lesquelles justifieraient par ailleurs des sanctions plus sévères que celles
14
Pigeon c. Daigneault, (2003) R.J.Q. 1090 (C.A.)
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suggérées, le Tribunal devrait alors conclure que dans de telles circonstances, le
15
comité n’a pas exercé judiciairement son pouvoir discrétionnaire.»
DÉCISION
[69]
L’intimé a plaidé coupable à des actes dérogatoires qui touchent à la quiddité
même de la profession.
[70]
En terme de gravité objective, les gestes reprochés sont sérieux.
[71]
Toutefois, le Conseil a pris en considération que l’intimé a avoué sa culpabilité à
la première occasion.
[72]
Le Conseil doit prendre en considération les représentations et les suggestions
communes sur la sanction, lorsque celles-ci sont justes et raisonnables.
[73]
Le Conseil rappelle que son rôle n’est pas de punir le professionnel, mais de
s’assurer que les sanctions ont un effet dissuasif dans un objectif de protection du
public.
[74]
Le Conseil croit au repentir de l’intimé et qu’il a bien compris la gravité des
gestes reprochés.
[75]
L’ensemble des amendes imposées totalise la somme de 3 000,00 $.
[76]
Le Conseil, après avoir analysé les faits du présent dossier et pris en
considération les remarques pertinentes du procureur du plaignant, est d’opinion que
15
Normand c. Ordre professionnel des médecins, 1996 D.D.O.P. 234
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les recommandations qui lui sont soumises sont justes et raisonnables dans les
circonstances.
[77]
Le Conseil a aussi analysé la jurisprudence concernant les sanctions rendues
antérieurement dans des dossiers ayant des éléments analogues. Or, ces suggestions
communes sont justes et appropriées dans les circonstances, tout en étant conformes
aux autorités citées par le procureur du plaignant.
[78]
Elles ont de plus le mérite d’avoir un effet dissuasif auprès de l’intimé, tout en
rencontrant les objectifs d’exemplarité pour la profession et de protection du public.
POUR CES MOTIFS,
INGÉNIEURS :
[79]
LE
CONSEIL
DE
DISCIPLINE
DE
L’ORDRE
DES
DÉCLARE l’intimé coupable des reproches formulés au chef no 1 du paragraphe
1 de la plainte.
[80]
DÉCLARE l’intimé coupable des reproches formulés au chef no 2 du paragraphe
2 de la plainte.
[81]
DÉCLARE l’intimé coupable des reproches formulés au chef no 3 du paragraphe
3 de la plainte.
[82]
DÉCLARE l’intimé coupable des reproches formulés au chef no 4 du paragraphe
4 de la plainte.
[83]
PREND ACTE du retrait du chef no 5 du paragraphe 5 de la plainte.
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[84]
DÉCLARE l’intimé coupable du chef no 6 du paragraphe 6 de la plainte;
[85]
DÉCLARE l’intimé coupable des reproches formulés au chef no 7 du paragraphe
6 de la plainte;
[86]
DÉCLARE l’intimé coupable des reproches formulés au chef no 8 du paragraphe
6 de la plainte;
[87]
DÉCLARE l’intimé coupable des reproches formulés au chef no 9 du paragraphe
7 de la plainte;
[88]
IMPOSE à l’intimé, sur le chef no 1, une amende de six cents dollars (600,00 $).
[89]
IMPOSE à l’intimé, sur le chef no 2, une réprimande.
[90]
IMPOSE à l’intimé, sur le chef no 3, une amende de six cents dollars (600,00 $).
[91]
IMPOSE à l’intimé, sur le chef no 4, une amende de six cents dollars (600,00 $)
et une réprimande.
[92]
IMPOSE à l’intimé, sur le chef no 6, une amende de six cents dollars (600,00 $).
[93]
IMPOSE à l’intimé, sur le chef no 7, une réprimande.
[94]
IMPOSE à l’intimé, sur le chef no 8, une réprimande.
[95]
IMPOSE à l’intimé, sur le chef no 9, une amende de six cents dollars (600,00 $)
et une réprimande.
[96]
CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés.
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[97]
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ACCORDE à l’intimé un délai de six (6) mois, à compter de la date de
signification de la présente, pour le paiement des amendes ainsi que des déboursés, le
tout conformément à l’article 151 du Code des professions.
__________________________________
Me Jean-Guy Légaré, Président
_________________________________
M. Gilles Dussault, ing., membre
M. Miville Gagnon, ing. membre
Me Charles-A. Dupuis
Procureur de la partie plaignante
M. Denis Houle, intimé
Date d’audience : 26 février 2008