1 – l`évaluation des facteurs de risque et de protection chez
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1 – l`évaluation des facteurs de risque et de protection chez
Ce texte a été publié dans la Revue internationale de l’éducation familiale. Recherche et interventions, 4, (2), (2000), 103-127. L’ÉVALUATION DES FACTEURS DE RISQUE ET DE PROTECTION CHEZ LES ENFANTS DE MATERNELLE ET DU PREMIER CYCLE DE L’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE: L’ÉCHELLE DES COMPÉTENCES ÉDUCATIVES PARENTALES (ECEP) François LAROSE*, Bernard TERRISSE**, Marie-Louise LEFEBVRE** et Vincent GRENON* Université de Sherbrooke* et Université du Québec à Montréal** Québec, Canada RÉSUMÉ Dans cet article, les auteurs présentent le contexte théorique ainsi que les paramètres de restructuration d’un instrument d’évaluation des attitudes et des pratiques éducatives parentales destiné à observer le caractère plus ou moins stimulant des interactions parentsenfants dans le cadre de la socialisation. Cet instrument doit notamment permettre d’évaluer la présence de caractéristiques psychologiques (variables proximales) favorables ou défavorables au développement psychosocial de l’enfant dans une perspective de prédiction des forces et des déficits de ce dernier sur le plan de l’insertion en contexte d’éducation préscolaire et scolaire. Après un bref rappel sur les construits théoriques (attitudes et pratiques éducatives, «locus» de controle) et sur les origines de l’Échelle des compétences éducatives parentales (ECEP), les auteurs exposent les différentes étapes de validation effectuées. Ils concluent en insistant sur l’intérêt d’utiliser ce type d’instrument pour mieux cerner certaines variables proximales du microsystème familial dans le cadre des mesures d’éducation préscolaire développées auprès des enfants des groupes vulnérables afin de pouvoir y associer les parents. Il permet, en particulier, l’étude et l’identification de facteurs de résilience à des conditions environnementales «adverses». L’annonce en 1997 de la réforme du curriculum scolaire québécois (Ministère de l’éducation du Québec (MEQ), 1997) et de l’élargissement de l’accessibilité à l’éducation préscolaire par le passage de temps partiel à temps plein, d’une part, des classes de maternelle quatre ans pour les enfants de milieux défavorisés et, d’autre part, des classes de maternelle 5 ans pour les autres enfants (M.E.Q., 1998a, 1998b), pose à nouveau avec acuité la question de l’arrimage entre l’école et le milieu familial. Ces mesures remettent à l’ordre du jour, de façon toute particulière, les fonctions de préparation, d’appui ou, au contraire, d’interférence des attitudes et des pratiques éducatives parentales au regard de l’égalité des chances de succès dès l’insertion des enfants dans le système scolaire québécois. –1– L’ÉVALUATION DU RISQUE D’ÉCHEC SCOLAIRE CHEZ LE JEUNE ENFANT: QUELLES VARIABLES DOIT-ON MESURER? Dans une perspective caractéristique d’une approche behavioriste ou néo-behavioriste, les variables distales, par exemple le niveau socio-économique et la scolarisation des parents, ont été systématiquement identifiées pour la prédiction du succès ou de l’échec scolaire, notamment dans la littérature scientifique nord-américaine (Nelson et Pearson, 1992; Peterson, 1995). Depuis quelques années, cependant, nous constatons l’émergence d’un fort courant portant sur l’étude des facteurs de résilience, c’est-à-dire sur l’étude des conditions faisant en sorte que des enfants vivant dans des environnements défavorables, voire «adverses», réussissent quand même sur les plans scolaire et social (Wang et Haertel, 1995). La prise en considération des variables proximales, notamment l’étude des attitudes et des pratiques d’interaction et de socialisation précoce, occupe une part de plus en plus importante de la recherche portant sur l’identification des facteurs de protection (Dyer et McGuinness, 1996; Prévot, 1997). Cependant, le discours des autorités scolaires, tant au Québec qu’ailleurs en Amérique du Nord, tend encore à accorder une place prépondérante à l’effet des variables distales en tant que facteurs de risque prépondérants d’échec scolaire précoce (Moreau, 1995; Ministère de la Sécurité du Revenu (M.S.R.), 1996). En font foi les critères et indicateurs du Conseil scolaire de l’île de Montréal (CSIM, 1993) en matière d’attribution d’un statut de zône défavorisée et, par conséquent, les critères d’admissibilité ou d’accessibilité des enfants d’âge préscolaire aux mesures de scolarisation en maternelle quatre ans à temps partiel et en maternelle cinq ans à temps plein (du moins jusqu’en septembre 1997). La logique qui soustend ces positions est une logique d’exclusivité. Une ou quelques variables indépendantes expliqueraient à elles seules un phénomène complexe. Certaines recherches récentes, menées notamment sur le territoire de l’île de Montréal, démontrent les limites de ces conceptions réductionnistes (Terrisse, Trottier et Chevarie, 1994; Terrisse, Roberts, Palacio-Quintin et Larose, 1998). Pour notre part, nous ne nions pas l’importance de certaines variables distales, telles l’indice de pauvreté «économique» ou la sous-scolarisation des parents en tant que facteurs de risque, d’échec, de retard ou de décrochage scolaire. Néanmoins, nous considérons que ces variables à elles seules ont une fonction de prédiction relativement limitée et qu’il est nécessaire de tenir compte d’interactions complexes, conjoncturelles, entre variables distales et proximales –2– afin d’établir un profil de risque réaliste et de pouvoir mieux cibler les sous-populations qui bénéficieraient le plus d’une intervention éducative précoce (Larose, Terrisse et Lefebvre, 1998; Terrisse, Lefebvre et Larose, 1998). Dans l’optique d’une approche de prévention primaire des difficultés d’adaptation sociale et scolaire, la mise en valeur des caractéristiques de l’environnement familial qui peuvent s’avérer à la fois des facteurs de protection et de réussite à long terme pour l’enfant s’avère une tâche incontournable (Fergusson et Lynskey, 1996; Hawley et DeHaan, 1996). Dans cette perspective, l’identification des attitudes et des pratiques parentales favorables est souvent considérée comme potentiellement plus rentable que l’intervention compensatoire indiscriminée fondée sur l’appartenance à une catégorie socio-économique ou socioculturelle (Gadivia et Stoneman, 1997; Wang et Haertel, 1995). LA RÉSILIENCE ET LE CONCEPT DE COMPÉTENCES ÉDUCATIVES PARENTALES Plusieurs études longitudinales (Werner et Smith, 1989, 1992) menées auprès d’enfants nés et élevés dans des conditions défavorables ou adverses démontrent qu’entre la moitié et les deux tiers de ces enfants se développent en tant qu’adultes socialement adaptés. Ces enfants ne présentent pas de trouble d’adaptation sociale ou scolaire et une proportion importante d’entre eux performent bien tout au long de leur scolarité. Pourtant les enfants suivis dans ces études proviennent de familles où au moins l’un des parents peut souffrir de troubles mentaux graves, manifester des conduites sociales chroniquement inappropriées (alcoolisme, toxicomanie, conduites abusives ou pratiques antisociales et criminelles) ou encore ils peuvent avoir été élevés dans des milieux affectés par la pauvreté, la sous-scolarisation et la violence chronique (Gamezy, 1991; Heath et McLaughlin, 1993; Werner et Smith, 1989, 1992). Cette capacité de résistance, identifiée en tant que concept de résilience, décrit généralement un ensemble de qualités qui permettent à un individu de vivre avec succès un processus de développement, de transformation et d’adaptation, notamment sur le plan social et scolaire, malgré la présence de circonstances adverses et même l’exposition stable et durable à un certain nombre de facteurs de risque de mésadaptation (Benard, 1991). Les recherches portant sur le construit de résilience font une part prépondérante à la qualité ainsi qu’à la forme des interactions entre l’enfant et les parents durant la petite enfance. Elles tendent donc à identifier la qualité de certains paramètres de socialisation en tant que prédicteur important de la capacité de résistance de l’enfant à des circonstances adverses –3– (Freitag, Belsky, Grossmann et Scheuerer-Englisch, 1996; Odom, 1996; Wichstrom, Anderson, Holte, Husby et Wynne, 1996). Ces recherches identifient notamment un certain nombre de compétences dont les parents doivent faire preuve dans le cadre de leurs interactions avec leurs enfants et qui peuvent être observées parmi les caractéristiques identifiées en tant que facteurs de résilience chez les enfants scolarisés aux niveaux préscolaire et primaire (Baker et Heller, 1996; De Luccie, 1996). Parmi celles-ci figurent la capacité d’empathie, les habiletés de communication verbale et non-verbale et les habiletés de résolution de problème ainsi qu’un certain nombre de variables de la personnalité dont l’internalité du sentiment de contrôle ainsi qu’un sentiment de compétence éducative personnelle élevé. La présence de ces caractéristiques favoriserait le développement d’un profil d’autonomie et de relatif détachement (être capable de se distancier d’une situation dysfonctionnelle ou agressante) chez l’enfant. Nous retrouvons d’ailleurs ces mêmes caractéristiques dans les écrits traitant du construit d’appropriation («empowerment») chez les individus provenant de milieux socioéconomiquement et socioculturellement défavorisés (Zimmerman, 1990; Zimmerman, Israel, Schultz et Checkoway, 1992) LES ATTITUDES, LES PRATIQUES ET LE «LOCUS» DE CONTRÔLE La majeure partie des auteurs définissent «l’attitude» en tant que disposition ou tendance à réagir positivement ou négativement à l’exposition à une réalité (opinions d’autrui, objets, situations, personnes, contextes environnementaux et sociaux, etc.). En général les attitudes sont considérées comme des structures intégrant les opinions et les croyances des individus et construites à partir de l’intégration subjective de leurs expériences ou de l’effet de leurs conduites (Heider, 1959; Triandis, 1971). Nous avons publié précédemment nos analyses sur la définition et le rôle respectif, d’une part, des croyances en tant que variables individuelles et, d’autre part, des représentations en tant que sources socialisées des croyances. (Larose, Audette et Roy, 1997; Larose et Lenoir, 1998) et nous n’y reviendrons donc pas ici. L’attitude peut donc être considérée en tant que variable modératrice située à la charnière de l’univers de la cognition et du comportement. Comme tel, le concept d’attitude peut être considéré en tant que variable conative. La théorie de l’action raisonnée de Fishbein et Ajzen (1975) représente probablement un des modèles théoriques les plus puissants définissant la relation entre les attitudes et les probabilités d’émission de comportements ou de structuration de conduites en psychologie sociale. Dans ce modèle, l’attitude est considérée comme ayant une valeur prédictive relative –4– et non linéaire par rapport aux comportements et conduites, donc aux pratiques. Cette valeur prédictive est modérée par le sentiment de contrôle de l’individu au regard de ses propres comportements et, bien entendu, de leurs conséquences (Kokkinaki et Lunt, 1997; Terry et O’Leary, 1995). Le terme «locus» de contrôle réfère à une traduction intermédiaire proposée par Dubois (1987) en tant que descripteur de l’expression «internal or external locus of control » (Rotter, 1966). Dubois (1987, 1994) distingue le «locus» de contrôle du «sentiment» de contrôle qu’elle définit en tant qu’attitudes généralisées d’un individu au regard de l’ensemble des situations qui affectent sa vie. Le sentiment de contrôle correspond au concept d’attribution causale externe ou interne, globale ou généralisée, développé par Abramson, Seligman et Teasdale (1978). Le construit de «locus» de contrôle, développé originalement par Rotter (1966), se définit généralement comme la tendance que les individus ont à considérer que les événements qui les affectent sont le fait ou le résultat de leurs actions ou, au contraire, qu’ils sont le fait de facteurs externes sur lesquels ils n’ont que peu d’influence, par exemple la chance, le hasard, les autres, les institutions ou l’État. Dans le premier cas, l’individu manifeste un «locus» de contrôle interne alors que, dans le second, il manifeste un «locus» de contrôle externe. Phares (1976) considère que la théorie du contrôle interne / externe du comportement, telle que développée par Rotter (1966), forme un modèle prédictif en psychologie sociale. En effet, les individus qui manifestent un «locus» de contrôle interne seront, selon toute vraisemblance, plus proactifs que les individus qui manifestent un «locus» de contrôle externe. D’où évidemment l’intérêt de considérer cet aspect dans le cadre d’une étude sur les compétences éducatives parentales. Les attitudes correspondant à des structures conatives construites par les individus au travers du temps et donc de leur propre développement, elles sont moins «adaptatives» ou moins directement contextualisées que les pratiques. En conséquence, la relation entre l’attitude et la conduite ne peut être considérée comme linéaire ou directe, la fonction de prédiction d’une variable par rapport à l’autre est donc une fonction de prédiction probable, relative. Cette fonction de prédiction devra être estimée en tenant compte du poids relatif de variables modératrices, appartenant généralement à l’univers des variables de personnalité. C’est là le rôle que nous accordons à la mesure du sentiment de contrôle dans le cadre de notre instrument. –5– LES ATTITUDES ET LES PRATIQUES ÉDUCATIVES PARENTALES Les compétences éducatives parentales ou parentage, en particulier les attitudes et les pratiques éducatives, ont fait l’objet de nombreuses études depuis les années cinquante, tant au États-Unis qu’en Europe. Ces études se sont surtout situées dans le cadre des recherches tendant à préciser les facteurs prédictifs des performances du jeune enfant. La plupart se sont donc déroulées auprès de parents d’enfants d’âge préscolaire et essentiellement auprès des mères. • Les attitudes éducatives parentales sont des traits stables de leur personnalité qui reflètent une disposition à réagir à une situation ayant un caractère éducatif. Elles peuvent être pour la plupart regroupées en deux catégories: celles qui sont reliées aux aspects affectifs de la relation parent-enfant et celles qui sont reliées au plan comportemental de celle-ci. Le concept d’attitude éducative réfère donc plus aux composantes affective et conative des attitudes qu’à la composante cognitive (Gauthier, 1984; Pourtois, 1978). Depuis les travaux d’Osterrieth (1957) en Europe, de Shaefer et Bell (1958) et de Shaefer et Bayley (1963) aux États-Unis, les attitudes éducatives ont été étudiées selon un modèle d’axes bipolaires où les extrêmités des axes représentent les attitudes soit les plus favorables, soit les plus défavorables au développement et à l’adaptation de l’enfant. Depuis les travaux de ces précurseurs, la synthèse des études dans ce domaine (Banner, 1979; Baumrind, 1967; Laosa, 1982; Lautrey, 1973; Martin, 1975; Pourtois, 1978, Sheintuch et Lewin, 1981; White et Watts, 1973) montre que le pôle positif est constitué par «l’acceptation» qui englobe les attitudes (dimensions) telles que la tolérance, la confiance (autonomie), l’amour (chaleur), la souplesse. À l’inverse, le pôle négatif est constitué par l’«inacceptation» qui englobe des attitudes de défiance, de restriction, de domination (surprotection), d’hostilité, de froideur, de rigidité. Le pôle négatif caractérise chez les parents une attitude générale de contrôle de l’enfant, et, à l’inverse, le pôle positif traduit une attitude générale favorisant l’autonomie. C’est à partir de la synthèse de ces travaux que le Questionnaire d’évaluation des attitudes et des pratiques éducatives parentales (QEAPEP) avait été élaboré. Nous avions retenu un axe bipolaire «autonomie-contrôle», subdivisé en 2 sous-échelles, l’une concernant la polarité «rigidité/souplesse», reflétant un construit centré sur les dimensions cognitivocomportementales des attitudes, l’autre concernant la polarité «défiance/confiance» reflétant un construit centré sur les dimensions affectivo-comportementales. –6– • Les pratiques éducatives parentales peuvent être définies comme l’ensemble des comportements verbaux ou non verbaux des parents en interaction avec leurs enfants. La plupart des recherches sur les pratiques éducatives ont été menées dans le cadre des travaux sur les attitudes cités précédemment. Il faut aussi se référer plus particulièrement aux recherches des précurseurs dans ce domaine, tels que Baldwin, Kolhorn et Breese (1945); Brophy (1970); Hess et Shipman (1968); Sears, Maccoby et Levin (1959) et Sigel (1983). Il existe évidemment une infinité de comportements éducatifs. Pourtois (1979) en observe pas moins de 21 586 dans son étude sur les styles d’enseignement des mères. La plupart des chercheurs ont également regroupé les pratiques éducatives sur des axes bipolaires. La synthèse de leurs travaux montre qu’il est possible de dégager un pôle positif favorable, constitué par des pratiques «élaboratives» et un pole défavorable, constitué par des pratiques «limitatives». Dans le premier, nous retrouvons des pratiques (dimensions) démocratiques, indulgentes, acceptantes, chaleureuses, élaborées sur les plans de la communication, avec un mode de contrôle personnel ou rationnel. Dans le second, nous retrouvons des pratiques autocratiques, sévères, rejettante, froides, restreintes sur le plan de la communication, avec un mode de contrôle impératif et normatif. Pour le QEAPEP, nous avions donc retenu un axe bipolaire «limitation/élaboration», sudbivisé en trois sous-échelles de pratiques: «normatives/élaborées», «sévères/libérales» et «chaleureuses/ froides». Lorsqu’il s’agit d’évaluer les attitudes et les pratiques éducatives parentales, il faut aussi noter, d’une part, que certaines de celles-ci peuvent être favorables au développement de l’enfant à un certain âge et défavorables à un autre. Ainsi, il est normal que les parents soient plus protecteurs avec un enfant de 2 ans qu’avec un enfant de 9 ans. D’autre part, différents études ont montré que les attitudes et les pratiques n’étaient pas les mêmes selon le sexe des parents, par exemple, les pères sont moins démocratiques que les mères (Vijatrasil, 1980), ni selon le sexe de l’enfant (Palacio-Quintin et Terrisse, 1997). LES ORIGINES DE L’ÉCHELLE DES COMPÉTENCES ÉDUCATIVES PARENTALES (ECEP) L’Échelle des compétences éducatives (ECEP) (Terrisse et Larose, 1998) s’inscrit dans la continuité du Questionnaire d’évaluation des attitudes et des pratiques éducatives parentales (QEAPEP) qui avait été conçu par Terrisse et Rouzier (1986), puis validé par Rouzier (1986) au Québec. Il était composé de deux échelles générales mesurant respectivement les attitudes des parents au regard de l’éducation des enfants d’âge préscolaire ainsi que leurs pratiques éducatives. –7– Le QEAPEP a été utilisé depuis sa création dans de nombreuses recherches au Québec et sa structure ainsi que ses qualités métrologiques ont été décrites dans plusieurs publications (Terrisse et Pineault, 1989; Terrisse, Rouzier et Trudelle, 1997; Tieide, 1996; Trudelle, 1991). Rappelons que l’échelle d’attitudes était subdivisée en deux sous-échelles mesurant autant de construits. La première polarité, «rigidité/souplesse», reflétait un construit centré sur les dimensions cognitivo-comportementales de l’attitude. La seconde polarité «défiance/confiance» reflétait un construit centré sur les dimensions affectivocomportementales de l’attitude. Quant à l’échelle de pratiques, pour sa part, elle était subdivisée en trois sous-échelles. La première reflète la dimension de soutien cognitif présente dans les interactions parentsenfants, la seconde reflète les dimensions de gestion ou de contrôle du comportement et des conduites qui définit souvent de façon directe les interactions intra-familiales. Enfin, la troisième reflète les dimensions plus spécifiquement affectives de la relation entre parents et enfant. Tous les instruments reflétant des réalités socialement déterminées, comme c’est le cas du QEAPEP, sont soumis aux effet d’évolution et d’ajustement des pratiques sociales de référence des individus (Wadsworthx, 1997). Nous avons donc procédé, dans un premier temps, à la réévaluation de sa structure scalaire à partir d’une base de données composite intégrant différents résultats de mesure effectués depuis de début des années 90, tant dans la région de Montréal qu’en régions périphériques. L’analyse factorielle en composante principale effectuée à partir de la base de données disponible (N = 309) faisait effectivement ressortir une partition de l’échelle d’attitudes en deux facteurs principaux expliquant 36 % de la variance observée. Les items composant ces facteurs correspondaient bien aux deux continuums des sous-échelles originales, «rigidité/souplesse» et «défiance/confiance» mais seuls 15 des 17 items de l’échelle d’attitude originale présentaient des saturations satisfaisantes. L’élimination de ces deux items permettait d’observer un cœfficient de consistance interne satisfaisant établi par l’Alpha de Cronbach (α = 0,725). Par contre, l’analyse factorielle appliquée aux 54 items de l’échelle de mesure des pratiques parentales nous amenait à observer une dispersion importante de ces derniers. Les trois premiers facteurs, certes cohérents avec les construits originaux au niveau des items les composant, n’expliquaient que 30 % de la variance totale. Nous devions tenir compte des –8– saturations sur 6 facteurs pour pouvoir expliquer plus de 40 % de la variation totale. Enfin, seuls 30 des 54 items originaux saturaient de façon satisfaisante sur les trois premiers facteurs. Par contre, l’élimination des 24 items résiduels permettait de calculer un cœfficient de consistance interne tout à fait satisfaisant (α = 0,838). Nous avons donc procédé à la révision de l’instrument en conservant, après vérification du libellé, les items du QEAPEP dont les saturations étaient suffisantes, tant en ce qui concerne l’échelle d’attitudes que l’échelle de pratiques et en y ajoutant des items originaux réécrits afin qu’ils reflètent plus adéquatement la réalité familiale québécoise contemporaine. Il en résulte un instrument dont la structure de construit ainsi que les dimensions originales respectent fondamentalement celle qui caractérisait le QEAPEP, mais qui est actualisé en ce qui concerne la présentation des stimuli. Par ailleurs, certains des items originaux du QEAPEP, notamment dans la structure de l’échelle de mesure des pratiques parentales, saturaient sur un quatrième facteur et reflétaient une dimension de sentiment d’impuissance au regard de la gestion des conduites enfantines. Comme ces items s’avéraient marginaux dans la structure de l’instrument, nous avons décidé de les remplacer de façon spécifique par un groupe de 5 items composant originalement la sous-échelle d’évaluation du «locus» de contrôle parental au regard du comportement enfantin de l’échelle «Parental locus of control» de Campis, Lyman et Prentice-Dunn (1986). La «Parental locus of control scale» est un instrument originalement validé auprès d’une population de 250 parents présentant un profil «normal» ou ayant eu recours à des mesures de soutien à l’interaction parentale (Lefcourt, 1991). La sous-échelle retenue présente, en version originale, un cœfficient Alpha de 0,92. L’échelle générale se comporte de façon autonome par rapport aux instruments de mesure de la désirabilité sociale telle que l’échelle de Crowne et Marlow (1964) (corrélation négative significative r = -0.38; α < 0.01). LES ÉTAPES DE VALIDATION DE L’ECEP L’instrument final obtenu pour fin de validation se répartit en deux échelles générales. Une première échelle mesure les attitudes parentales. Elle comporte 14 items respectant la polarité des construits originaux. Une seconde échelle mesure les pratiques éducatives parentales. Elle comporte 29 items respectant aussi les trois construits originaux. Enfin, nous avions ajouté une troisième échelle centrée sur la mesure du sentiment de contrôle interne ou externe du comportement au regard des interactions parents-enfants, intégrant les 5 items –9– issus de la sous-échelle du «Parental Locus of Control Scale » (Campis, Lyman et PrenticeDunn, 1986). L’ECEP fut administrée à un échantillon composite de 164 parents répartis en trois catégories générales. La première catégorie regroupait 75 parents d’enfants fréquentant les milieux de garde. La seconde catégorie regroupait 39 parents d’enfants fréquentant des classes de maternelle 4 ans ou 5 ans. Enfin, la troisième catégorie regroupait 50 parents dont les enfants fréquentaient le premier cycle du primaire (1re à 3e année). Un premier traitement général de la base de données permettait d’identifier deux facteurs composant principalement l’échelle d’attitudes et trois facteurs composant l’échelle de pratiques. Les deux premiers facteurs de l’échelle d’attitudes expliquent 40 % de la variance totale observée alors que les trois premiers facteurs de l’échelle de pratiques expliquent 42 % de la variance totale. L’analyse factorielle, en composante principale effectuée à partir des scores spécifiques aux items de «locus» de contrôle, permet d’identifier un facteur principal expliquant 52 % de la variation totale. Après analyse de la covariance, il nous est apparu que les items de l’échelle de «locus» de contrôle et ceux qui saturaient originalement sur la dimension «cordialité-froideur» de l’instrument original covariaient systématiquement. Les cœfficients de consistance interne, calculés à l’aide du Lambda 2 de Guttman s’avéraient relativement faibles pour chacune des deux sous-échelles d’attitudes ainsi que pour les souséchelles de pratiques (λ 2 > 0, 450; λ 2 < 0,520). Seul le Lambda 2 calculé pour l’échelle de mesure du «locus» de contrôle s’avérait satisfaisant (λ 2 = 0, 682). Nous avons donc procédé à une seconde analyse factorielle en composantes principales (rotation varimax) sur l’ensemble des échelles et sous-échelles de l’instrument en tenant compte, cette fois, du niveau scolaire fréquenté par les enfants des parents de l’échantillon, ce niveau correspondant par ailleurs à une tranche d’âge chez les enfants. Nous devons indiquer que nous avons opté pour le calcul du cœfficient Lambda 2 plutôt que de l’Alpha de Cronbach pour deux raisons. D’une part, la littérature scientifique démontre la stabilité du Lambda 2 en tant qu’estimateur d’une limite inférieure de cohérence. D’autre part, dans un contexte de construction d’échelle sans possibilité de mesure de fidélité en test-retest et à partir d’une échantillon relativement restreint (N = 164), ce cœfficient s’avère plus conservateur, donc plus robuste que l’Alpha de Cronbach ou que le cœfficient de KR20 de Kuder-Richardson (De Vellis, 1991; Spray et Welch, 1990; Traub, 1994). Différentes recherches tendent à démontrer que les attitudes parentales ainsi que le sentiment de contrôle évoluent de façon concommitante chez les parents de jeunes enfants, selon – 10 – notamment que ces derniers sont en âge de fréquenter l’école ou non (Morton, 1997). Cette évolution affecte notamment les dimensions particulières des interactions parents-enfants, tant sur le plan affectif que comportemental, et en particulier, de façon concomitante, le sentiment de contrôle réciproque exercé sur la relation, tant de la part de l’enfant que de celle du parent (Carton et Nowicki, 1996). Nous avons donc décidé d’intégrer les items à saturation optimale de l’échelle de «locus» de contrôle ainsi que ceux qui référaient à une dimension affective sous la forme d’une sous-échelle spécifique d’«internalité/externalité» du sentiment de contrôle. La seconde analyse de la structure des échelles et sous-échelles, en considérant cette fois les profils de chacun des sous-échantillons, permet de dégager un profil de consistance interne des instruments satisfaisant pour l’ensemble des sous-échelles et tenant compte du profil d’évolution des attitudes à travers le temps (cf. tableau 1). Cela, notamment, dans la mesure où les interactions parents-enfants sont, entre autres, soumises aux effets des contraintes de socialisation externe de l’enfant, tout particulièrement sur le plan des exigences nouvelles que pose la fréquentation de l’école. TABLEAU 1 Cœfficients de consistance interne des sous-échelles de l’ECEP selon l’âge des enfants de l’échantillon (n=164) Échelle et Sous-échelles Attitudes Rigidité-souplesse Défiance-confiance Pratiques Normativitéélaboration Sévérité-libéralisme Locus de contrôle Internalité-externalité N.B.: (1) (2) (3) 2-4 ans(1) Milieu de garde (n=75) 4-6 ans(2) Maternelle (n=39) 6-9 ans(3) Premier cycle (n=50) Λ2 0,630 0,600 Λ2 0,500 0,540 Λ2 0,650 0,510 0,810 0,750 0,620 0,790 0,792 0,589 0,590 0,600 0,610 De 2 ans, 15 jours à 4 ans, 14 jours De 4 ans, 15 jours à 6 ans, 14 jours De 6 ans, 15 jours à 9 ans, 14 jours – 11 – STRUCTURE SCALAIRE DE L’ECEP L’ECEP (Terrisse et Larose, 1998) se veut un instrument qui tient compte de l’évolution du profil des attitudes et des pratiques parentales selon divers paramètres. La répartition ainsi que la structure des sous-échelles découle de ces prémisses. Il est normal, en conséquence, que nous obtenions des distributions scalaires différentes selon que les sous-échelles reflètent les attitudes et pratiques d’enfants en âge de fréquenter les milieux de garde (2-4 ans), les classes de maternelles (4-6 ans) ou le premier cycle de l’enseignement primaire (6-9 ans). Les statistiques descriptives de la distribution scalaire de chacun des blocs d’échelles selon le groupe d’âge de référence des enfants sont exposées au tableau 2. Comme le suggère la littérature scientifique, il n’y a pas de relations linéaires directes ou, si l’on préfère, de corrélations systématiques entre les scores obtenus aux échelles de pratiques ainsi qu’aux échelles d’attitudes (tableau 3). Seule l’échelle mesurant les attitudes parentales en fonction du sentiment de contrôle est corrélée significativement au moins avec une échelle de pratiques éducatives pour chaque groupe d’âge. Pour les parents d’enfants âgés de 2 à 4 ans, les échelles d’attitudes mesurant une polarisation «défiance-confiance», «rigidité-souplesse» ainsi que l’échelle de mesure du sentiment de contrôle présentent toutes des corrélations positives significatives avec l’échelle de pratiques éducatives dont les polarités vont de la sévérité au libéralisme (laxisme). TABLEAU 2 Statistiques descriptives. Distribution des sous-échelles de l’ECEP selon l’âge des enfants de l’échantillon Variable Âge Moyenne Écart-type Défiance-confiance 2-4 05,83 0,929 Défiance-confiance 4-6 07,40 1,850 Défiance-confiance 6-9 08,87 1,154 Sentiment de contrôle 2-4 11,62 2,170 Sentiment de contrôle 4-6 08,16 1,954 Sentiment de contrôle 6-9 16,92 2,373 Rigidité-souplesse 2-4 09,31 1,250 Rigidité-souplesse 4-6 06,11 0,917 Rigidité-souplesse 6-9 06,27 0,935 Normativité-élaboration 2-4 05,11 0,334 Normativité-élaboration 4-6 10,93 1,112 Normativité-élaboration 6-9 12,73 1,108 – 12 – Sévérité-libéralisme 2-4 11,09 1,087 Sévérité-libéralisme 4-6 04,08 0,300 Sévérité-libéralisme 6-9 09,28 0,827 TABLEAU 3 Matrice des corrélations de Pearson entre les sous-échelles de l’ECEP selon l’âge des enfants de l’échantillon 2-4 ans Sentiment de contrôle Rigidité/souplesse Normativité/élaboration Sévérité/libéralisme 4-6 ans Sentiment de contrôle Rigidité/souplesse Normativité/élaboration Sévérité/libéralisme 6-9 ans Sentiment de contrôle Rigidité/souplesse Normativité/élaboration Sévérité/libéralisme Défiance/ confiance Sentiment de 0,046 0,213** 0,121 0,187* — 0,188* -0,131 0,263*** 0,062 0,140 0,105 -0,016 0,046 0,365*** 0,012 0,138 contrôle Rigidité/ souplesse 0,188* — -0,109 0,227*** Normativité/ élaboration -0,131 -0,109 — 0,132 — 0,068 0,180* -0,009 0,068 — 0,026 0,034 0,180* 0,026 — 0,109 — 0,118 0,191* 0,019 0,118 — 0,081 0,050 0,191* 0,081 — 0,236** p < 0,05 = * p < 0,01 = ** p < 0,001 = *** Inversement, aucune corrélation n’est observée entre les mesures d’attitudes, d’une part et les pratiques polarisées entre la normativité et l’élaboration, d’autre part. En clair, à cet âge, un lien beaucoup plus systématique est observé entre les attitudes éducatives et les pratiques de gestion ainsi que le contrôle du comportement et des conduites sociales de l’enfant qu’avec les pratiques centrées sur son développement cognitif. Pour les parents d’enfants âgés de 4 à 6 ans, (âge de fréquentation des maternelles) ainsi que pour les parents d’enfants âgés de 6 à 9 ans (âge scolaire de fréquentation du 1er cycle primaire), nous n’observons de corrélation qu’entre le sentiment de contrôle interne ou externe du parent et les pratiques soutenant ou non le développement cognitif de l’enfant. LES VARIABLES DISCRIMINANTES OU PRÉDICTRICES Afin de confirmer ce qui précède, nous avons procédé à une série d’analyses de régression hiérarchique des scores obtenus aux échelles d’attitudes pour chaque groupe d’âge sur les – 13 – scores obtenus aux échelles de pratiques parentales. La régression de l’ensemble des variables d’attitudes sur la variable «sévérité-libéralisme» pour la catégorie 2-4 ans permet d’identifier une structure de prédiction significative (F = 6,015 (2, 73); p < 0,003), mais la régression n’explique que 8 % de la variance totale. Ce sont les variables résultats à l’échelle de «sentiment de contrôle» (β = 0,193; t = 2,307; p < 0,02) et résultats à l’échelle «rigiditésouplesse» (β = 0,179; t = 2,146; p < 0,03) qui ressortent en tant que principaux prédicteurs. La régression des scores aux échelles d’attitudes sur la variable «pratiques normativesélaboratives» pour la catégorie 4-6 ans permet d’identifier une structure de prédiction significative (F = 4,415 (1, 38); p < 0,04), mais la régression n’explique, dans ce cas, que 2 % de la variation totale observée. C’est la variable «sentiment de contrôle» qui ressort en tant que principal prédicteur (β = 0,173; t = 2,101; p < 0,04). Nous observons un phénomène similaire lors de la régression des variables d’attitudes sur l’échelle de «pratiques normatives- élaboratives» pour la catégorie 6-9 ans. Encore une fois, la structure de régression significative (F = 4,160 (1, 49); p < 0,04) n’explique que 2 % de la variance, le prédicteur s’avérant exclusivement le «sentiment de contrôle» (β = 0,172; t = 2,04; p< 0,04). Pour terminer, nous avons tenté de vérifier l’impact des variables sociométriques et socioculturelles sur la distribution de nos échelles. Pour les parents d’enfants âgés de 2 à 4 ans, l’analyse de variance multivariée (Manova, test F de Roy-Bargman) ne permet d’identifier d’effets qu’entre deux séries de variables: d’une part, l’interaction entre le «niveau de scolarité du père» et le «sexe de l’enfant» (F = 4,639 (2,19); p < 0,027) et, d’autre part, l’interaction entre les niveaux de scolarité de la mère et du père (F = 2,758 (8,15); p < 0,043) affectent la distribution de la variable «pratiques normatives-élaboratives». Chez les parents d’enfants âgés de 4 à 6 ans, l’interaction entre les niveaux de scolarité du père et de la mère affecte la distribution de l’échelle d’attitudes polarisée «défianceconfiance» (F = 67,19 (5,15); p < 0,003). Enfin, chez les parents des enfants âgés de 6 à 9 ans, c’est l’interaction entre le niveau de scolarité du père et le sexe de l’enfant qui affecte la distribution des échelles d’attitudes polarisées «défiance-confiance» (F = 7,754 (2,17); p < 0,017) et «rigidité-souplesse» (F = 4,694 (2,17); p < 0,05). Sur le plan des attitudes, nous constatons chez les parents d’enfants d’âge préscolaire, une faible variation allant vers une plus grande tendance à la défiance lorsque le père et la mère sont relativement peu scolarisés. Chez les enfants d’âge scolaire, nous retrouvons cette tendance chez les pères peu scolarisés au regard de leur fille. Enfin, chez les parents d’enfants d’âge préscolaire (2-4 ans), nous constatons une plus grande tendance aux pratiques éducatives élaboratives lorsque les deux parents sont plus scolarisés et lorsque les – 14 – interactions éducatives s’adressent aux filles. En aucun cas le statut socio-économique (revenu et stabilité d’emploi) n’intervient en tant que variable discriminante. CONCLUSION Notre étude tend à confirmer qu’un instrument de mesure des attitudes et des pratiques éducatives parentales, aussi valide et fidèle soit-il, subit l’effet des variations liées à l’évolution temporelle des pratiques sociales de référence (Allison, Locker et Feine, 1997; Wadsworthx, 1997). Ainsi, comme tout instrument, les échelles de mesure des attitudes et des pratiques devraient être réévaluées et réajustées régulièrement dans le temps, en tenant compte notamment de la stabilité relative des construits qui reflètent des normes sociales de référence (attitudes) ainsi que des pratiques, dans la mesure où ces dernières sont liées à la nature, à la structure et à l’évolution des interactions sociales. Nos données tendent aussi à confirmer l’importance de tenir compte des ajustements que les parents, comme tout individu vivant en société, doivent apporter à leurs pratiques lorsque le contexte de socialisation de leur enfant évolue. Dans une perspective à la fois écosystémique et interactionniste, tant les parents que les enfants apprennent à adapter leurs interactions en fonction de l’impact de l’élargissement progressif des zones d’exposition de l’enfant à de nouvelles contraintes sociales (Bronfenbrenner, 1979). Lorsque l’importance des interactions de l’enfant avec les composantes du mésosystème, puis de l’exosystème, croissent, tant l’enfant que les parents modifient leurs attitudes et surtout leurs pratiques, notamment au regard du contrôle que ces derniers croient pouvoir ou devoir exercer sur les conduites enfantines, notamment à l’intérieur d’une aire sociale (microsystème) où ce contrôle peut sembler plus facilement exerçable (Barnett, Vondra et Shonk, 1996; Witt, 1997). Ceci est particulièrement vrai pour les parents des communautés ethnoculturelles immigrés, confrontés aux normes et valeurs de la société d’accueil, souvent différentes de celles de la société d’origine. Nos données suggèrent aussi que l’effet particulier d’une variable ou d’un nombre limité de variables indépendantes sur le profil d’attitudes et de pratiques parentales s’avère très limité. Conformément à une optique socioconstructiviste ainsi qu’aux postulats qui sous-tendent la majeure partie des études de résilience, l’effet des variables généralement identifiées au contexte socio-économique dans lequel la famille évolue n’a de valeur prédictrice du risque qu’en fonction de la prise en considération des effets médiateurs ou modérateurs d’un certain nombre de variables socioculturelles. Concrètement, en ce qui concerne notre échantillon de validation, l’effet de ces variables de contexte sur la définition ainsi que sur l’évolution du – 15 – profil d’attitudes et de pratiques parentales s’avère minime. Lorsque nous observons un effet, c’est l’interaction de la scolarité des parents et, secondairement, de la scolarité du père et du sexe de l’enfant qui affecte ce profil d’attitudes et de pratiques. L’observation et l’évaluation des attitudes et des pratiques éducatives parentales se justifient particulièrement dans le cadre des études qui tentent de cerner les éventuels facteurs de protection dans l’environnement des enfants des groupes vulnérables confrontés à des conditions socio-économiques adverses. Comme l’a montré Belsky (1984), les compétences parentales sont certainement mutlimodèles et les attitudes et pratiques n’en constituent que deux de leurs aspects. Toutefois, plusieurs recherches, dont celle de Laosa (1982), ont montré que les valeurs socio-éducatives, incluant les attitudes et les pratiques éducatives maternelles, constituent les variables qui exercent un influence prépondérante sur le développement des enfants d’âge préscolaire. Quant à Hess et Shipman (1968), ils ont également prouvé que les pratiques éducatives des mères étaient beaucoup plus influentes que leur classe sociale sur le développement cognitif de leurs enfants. Dans le contexte actuel des mesures éducatives précoces développées en direction des enfants des milieux socio-économiquement faibles, il semble donc particulièrement opportun de s’interroger sur les retombées éventuelles de celles-ci si les parents n’y sont pas étroitement associés et ne font pas l’objet d’interventions concertées ciblant l’actualisation ou la consolidation des attitudes et des pratiques éducatives favorables au développement de leur enfant. Si le contexte actuel d’élargissement de l’accessibilité aux mesures d’éducation préscolaire se définit réellement dans une perspective de justice sociale et d’augmentation des probabilités de succès et de persévérance scolaire pour tous, nos résultats soulignent l’importance d’accompagner ces mesures dirigées vers l’enfant de mesures dirigées vers les parents et portant sur l’acquisition, l’actualisation ou la consolidation de compétences éducatives favorables à l’adaptation de leur enfant. Dans une telle perspective, il ne suffit pas de déterminer que la pauvreté ou la sous-scolarisation des parents servira de critères d’accès aux maternelles quatre ans ou cinq ans. Il devient nécessaire d’évaluer, entre autres, systématiquement les attitudes et pratiques éducatives parentales dès l’admission de l’enfant en milieu d’éducation préscolaire. Ceci permettrait de déterminer le profil de coopération école-milieu qui doit être développé afin que, d’une part, les attitudes et pratiques adéquates des parents puissent être mises en valeur et que, d’autre part, les intervenants(es) des milieux sociaux et scolaires puissent partir de ce potentiel afin d’aider les parents à actualiser positivement leurs compétences éducatives. – 16 – RÉFÉRENCES ABRAHAMSON, L.Y, SELIGMAN, M.E.P. et TEASDALE, J.D. (1978). «Learned Helplessness in Humans: Critique and Reformulation». Journal of Abnormal Psychology, 78 (1), 49-74. ALLISON, P.J., LOCKER, D. et FEINE, J.S. (1997). «Quality of Life: a Dynamic Construct». Sociological Science in Medicine, 45 (2), 221-230. BAKER, B. L. et HELLER, T. L.(1996). «Preschool Children with Externalizing Behaviors: Experience of Fathers and Mothers». Journal of Abnormal Child Psychology, 24 (4), 513-532. BALDWIN, A.L.; KALHORN, J. et BREESE, F.H. 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