Jupiler s

Transcription

Jupiler s
Vu les pièces de la procédure et, en particulier :
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la citation introductive d'instance enregistrée le 5 août 2004,
les conclusions et les dossiers déposés par la partie demanderesse et la deuxième
défenderesse ;
Entendu en leurs dues et moyens les avocats de la demanderesse et de la deuxième
défenderesse, la première défenderesse ne comparaissant par ni personne en son nom ;
Vu les dispositions de la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière
judiciaire;
Attendu que la demande a pour objet d'entendre :
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Dire pour droit que les défenderesses se rendent coupable de publicité trompeuse
et d'actes contraires aux usages honnêtes en matière commerciale, d'une part,
par l'usage du signe Jupiler constituant une infraction aux droits exclusifs de la
demanderesse sur la marque Jupiier qui fait l'objet des enregistrements Benelux
no 82.620, no 495.106 et no 731.570, ainsi que des enregistrements comme
marque Communautaire no 958.918 et no 964.205, et, d'autre part, par le
comportement qui induit le consommateur en erreur sur l'origine et la nature de
la bière qui lui est servie dans l'établissement de la première défenderesse ;
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Condamner les défenderesses à la cessation de l'usage incriminé de la marque
Jupiier pour de la bière qui ne provient pas de la demanderesse, ainsi que des
comportements qui induisent ou peuvent induire le consommateur en erreur sur
l'origine et la nature de la bière qui lui est seMe dans l'établissement de la
première défenderesse ;
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Ordonner à charge de la première défenderesse la cessation immédiate desdits
actes sous peine d'une astreinte de 1.000 Euros par acte commis en infraction du
jugement à intervenir après la signification de ce jugement ;
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Ordonner à charge de la seconde défenderesse la cessation de livraisons de bière
Romy Pis à la première défenderesse sans livraison préalable d'une quantité
suffisante de verres portant la marque « Romy Pils » (min. 60 verres), sous peine
d'une astreinte de 1.000 Euros par acte commis en i&action du jugement à
intervenir après la signification de ce jugement ;
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Autoriser l'affichage de ce jugement tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de
l'établissement de la première défenderesse en application de l'article 99 de la
loi du 14 juillet 1991 sur les Pratiques du Commerce et l'information de la
Protection du Consommateur, le tout aux kais de la première défenderesse ;
Attendu que la S.P.R.L. Bibendum conclut au non-fondement de la demande à son
égard ;
Attendu que la demanderesse est titulaire des enregistrements Benelux no 82.620 du 24
novembre 1971, no 495.106 du 15 février 1991 et no 731.570 du 25 mars 2003, ainsi
que des enregistrements de marque communautaire no 958.91 8 du 3 1 mars 2000 et no
964.205 du 25 avril 2000 de la marque Jupiier ;l'enregistrement Benelux no 73 1.570
concerne en particulier la marque de forme représentant un verre de bière Jupiier ;
Attendu que les marques Jupiler sont déposées notamment pour des produits de la
classe 32, en particulier des « bières » ;
Attendu que la demanderesse fait depuis des nombreuses années un usage intensif de
ses marques ;
Attendu qu'en vertu des enregistrements indiqués, la demanderesse dispose d'un droit
exclusif sur la marque Jupiler ;qu'en application de la Loi Uniforme Benelux sur les
Marques et en particulier des articles 13 et 13 bis de cette loi, la demanderesse est en
droit de s'opposer à toute atteinte à ses droits ;
Attendu que la demanderesse a constaté que la première défenderesse, exploitante d'un
café à l'enseigne «Le 1960 », sert aux clients qui commandent une pils, de la bière
provenant d'un fût contenant de la bière d'un tiers (en l'espèce de la bière Romy
provenant de la S.A. Brouwerij Roman) et qui est tirée d'une pompe qui ne porte
aucune mention mais qui est située à côté de la pompe Jupiier ; qu'elle indique
cependant au client qu'il s'agit de la bière de la marque Jupiler ;que la demanderesse a
également constaté que la première défenderesse sert cette bière Romy dans des verres
portant la marque Jupiier ;
Que ces agissements ont fait l'objet d'un constat d'huissier (procès-verbal établi par
l'huissier Leleux le 27 janvier 2004) :
Dans cet immeuble est installé un débit de boisson dont l'enseigne est «Le 1960 » et
qui reprend la marque « Stella » sur la façade ;
Je pénètre alors Ù l'intérieur de l'établissement ;
Je m'approche alors du bar et commande une pils à la tenancière ;
Quatrepompes sont visibles dem'ère le bar ;
Etant devant le bar, de gauche Ù droite, la première tête de pompe porte la mention
« Hoogaerden », la deuxième pompe porte la marque « Kriek Lindemans », la
troisième, ù partir de laquelle la bière que j'ai commandée est tirée, ne porte aucune
mention et la quatrième porte la marque « Jupiler » ;
Cette bière m'est sewie dans un verre portant la marque « Jupiler » ;
Je constate que le tarif affiché dans l'établissement est un modèle reprenant la marque
«Siella» et qu'une horloge décorative attachée au mur reprend la marque
« Jupiler » ;
Il n'estfait aucunement mention d'une pils d'une autre marque sur le tarif;
Je constate cependant que les sous-verres en carton reprennent la marque (( Romy » ;
Derrière le bar, je constate la présence de verres à pils portant uniquement la marque
« Jupiler s ;
Jepaie ma consommation et, la tenancière m'ayant remis le verre « Jupiler » sans rien
préciser, lui demande de qu'elle bière il s'agit ;
Celle-ci me répond qu'il s'agit de « Jupiler » ;
Je lui décline alors mon nom et qualité ainsi que l'objet de ma mission :
Je lui demande si la pompe dont la tête ne reprend aucune mention débite également de
la « Jupiler » ;
Elle me répond qu'elle le croit car elle utilise la pompe sans mention et la « Jupiler »
indzréremment ;
Je lui demande alors l'accès aux caves afin de vérifier les jUts mis en perce, ce qu'elle
accepte ;
La tenancière m'accompagne donc au sous-sol ;
Dans les caves, je constate la présence de quatre fûts mis en perce sur chacune des
quatrepompes ;
Dans lefond de la cave, connecté à la pompe dont la tête mentionne « Hoogaerden »,je
constate qu'il s'agit d'un fût de Bière Blanche de Hoogaerden portant les marques de
la demanderesse :
Le deuxième fût connecté sur la pompe «Xriek Lindemans » est effectivement un fût
reprenant la marque de la luiek «Lindemans » ;
Le troisième fut connecté sur la pompe dont la tête ne mentionne rien est un fût
reprenant la marque ((Roman» ;
Le quatrièmefut, connecté à la pompe dont la tête mentionne la marque « Jupiler w, est
u n fût reprenant les marques de la demanderesse, avec une pastille rouge où je lis
« Interbrew 2 » :
Je constate également la présence de deux fûts de réserve :l'un porte la marque de la
demanderesse avec la même pastille rouge évoquée ci-avant, l'autre porte la marque
((Roman» ;
Attendu qu'il résuite des faits précités qui ne sont pas contestés, que la première
défenderesse fait usage de la marque Jupiler de la demanderesse, sans son
consentement, pour indiquer des produits identiques à ceux pour lesquels cette marque
est enregistrée, à savoir des bières ;
Que la demanderesse est dès lors en droit de s'opposer à l'usage par la première
défenderesse de la marque en question en vertu de l'article 13, A, 1 a de la Loi
Uniforme Benelux sur les Marques ;
Attendu que la demanderesse a également constaté que la bière Romy provenant de la
Brouwerij Roman n'est même pas mentionnée sur la carte des tarifs mise à la
disposition des clients par la première défenderesse ;
Que par ce fait et par l'usage trompeur des verres « Jupiler », la première défenderesse,
induit le consommateur en erreur sur l'origine et la nature de la bière qui lui est servie ;
Que ce comportement est constitutif de publicité trompeuse interdite par l'article 23, 1'
et 8" de la loi du 14 juillet 1991 sur les Pratiques du Commerce et l'information et la
Protection du Consommateur ;
Attendu qu'en vain, la demanderesse soutient que la deuxième défenderesse participe au
comportement trompeur de la première défenderesse dans la mesure où elle a placé le
fût Romy en question dans l'établissement de celle-ci, en l'attelant à une pompe
anonyme à côté d'une pompe portant la marque Jupiler ;
qu'en effet, la demanderesse ne démontre nullement qu'au-delà de la livraison de la
bière Romy, la deuxième défenderesse participerait de quelque manière que ce soit à la
distribution de ladite bière a la clientèle de la premiére défenderesse ;
PAR CES MOTIFS,
Nous, Michèle LAURENT, Vice-Président au Tribunal de Commerce de Bruxelles,
siégeant à l'audience publique des Actions en Cessation - Salle E, rue de la Régence, 4 à
1000 Bruxelles, en remplacement du Président légalement empêché, assistée de Hilde
VAN DER POORTEN, Greffier adjoint délégué;
Statuant contradictoirement à l'égard de la 2"medéfenderesse et par défaut à l'égard de
la lk" défenderesse,
disons la demande recevable et fondée dans la mesure ci-après :
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constatons que la première défenderesse se rend coupable de publicité
trompeuse et d'actes contraires aux usages honnêtes en matière commerciale,
d'une part, par l'usage du signe Jupiier constituant une infraction aux droits
exclusifs de la demanderesse sur la marque Jupiler qui fait l'objet des
enregistrements Benelux no 82.620, no 495.106 et na 731.570, ainsi que des
enregistrements comme marque Communautaire no 958.918 et no 964.205, et,
d'autre part, par le comportement qui induit le consommateur en erreur sur
l'origine et la nature de la bière qui lui est servie dans l'établissement de la
première défenderesse ;
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condamnons la première défenderesse à la cessation de l'usage incriminé de la
marque Jupiier pour de la bière qui ne provient pas de la demanderesse, ainsi
que des comportements qui induisent ou peuvent induire le consommateur en
erreur sur l'origine et la nature de la bière qui lui est servie dans l'établissement
de la première défenderesse ;
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ordonnons à charge de la première défenderesse la cessation immédiate desdits
actes sous peine d'une astreinte de MILLE Euros par acte commis en M c t i o n
du jugement à intervenir après la signification de ce jugement ;
disons l'action non fondée à l'égard de la deuxième défenderesse ;
condamnons la demanderesse aux dépens de la deuxième défenderesse liquidés à
CENT SEIZE Euros CINOUANTE ET UN Cents et la première défenderesse à ses
dépens et à ceux de la demanderesse liquidés à TROIS CENT OUARANTE TROIS
Euros D M HUIT Cents ;
Ainsi jugé et prononcé en audience publique des actions en cessation du
H. VAN DER POORTEN
[g 7 -01- 2005
M. LAURENT