Cour de cassation de Belgique Arrêt

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Cour de cassation de Belgique Arrêt
5 FÉVRIER 2015
C.14.0074.F/1
Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° C.14.0074.F
IMMO SLINA, société anonyme dont le siège social est établi à Anderlecht,
avenue Clémenceau, 5,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le
cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de
domicile,
contre
BROUWERIJ HAACHT - BRASSERIE HAACHT, société anonyme dont
le siège social est établi à Boortmeerbeek, Provinciesteenweg, 28,
défenderesse en cassation,
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représentée par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont le
cabinet est établi à Bruxelles, rue de Loxum, 25, où il est fait élection de
domicile.
I.
La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le
10 septembre 2013 par le tribunal de commerce de Bruxelles, statuant en degré
d’appel.
Le 27 novembre 2014, le premier avocat général Jean-François
Leclercq a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Michel Lemal a fait rapport et le premier avocat général
Jean-François Leclercq a été entendu en ses conclusions.
II.
Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée
conforme, la demanderesse présente trois moyens.
III.
La décision de la Cour
Sur le premier moyen :
Contrairement à ce que soutient le moyen, il ne ressort pas des
considérations du jugement attaqué visées au moyen que la défenderesse avait
« donné le bien loué en sous-location à une société dirigée par monsieur M.,
seul détaillant directement en contact avec le public », ni que « monsieur M. [a
poursuivi] l’exploitation du fonds de commerce, après la résiliation du contrat
de gérance libre conclu avec la défenderesse et jusqu’après le refus de
renouvellement du bail par la demanderesse ».
Par ailleurs, le jugement attaqué constate qu’après la résiliation de la
convention par laquelle la défenderesse avait sous-loué les lieux à une société
M.M., « l’exploitation du débit de boisson fut reprise par une société Pipino
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représentée par son gérant M. M. » et que la demanderesse « s’en réfère, sur ce
point, au texte du contrat de gérance libre de fonds de commerce du 24 août
2005 ».
Il considère que « l’instrumentum du 24 août 2005 portait sur 100 p.c.
du fonds de commerce de café taverne mais [qu’] un des zéros du 100 p.c. a été
biffé, dans des circonstances suspectes, pour devenir 10 p.c. et paraphé
illisible », que la défenderesse « n’a pas contresigné ce texte qui prétendait
réduire sa portion dans le fonds de commerce à 10 p.c. », « qu’il est donc
inopposable à cette dernière » et que la demanderesse « échoue au plan de la
preuve de son moyen en défense, à savoir que le fonds de commerce aurait
appartenu au gérant et non à la [défenderesse] ».
Ce faisant, le jugement attaqué ne dénie pas les effets légaux de la
résiliation de la convention de gérance libre par le curateur à la faillite de la
société Pipino et ne fait pas perdurer les effets légaux de cette convention audelà de sa résiliation mais s’attache à déterminer, en fonction du contenu de
cette convention, les droits des parties à celle-ci sur le fonds de commerce qui
en est l’objet.
Dès lors, le jugement attaqué, qui considère ainsi qu’outre sa qualité de
preneur, la défenderesse justifie sa qualité de propriétaire du fonds de
commerce exploité dans les lieux loués, décide légalement que la défenderesse
a qualité pour réclamer l’indemnité d’éviction prévue à l’article 25 de la loi du
30 avril 1951 sur les baux commerciaux.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le deuxième moyen :
Quant aux deux branches réunies :
Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen, en chacune de ses
branches, par la défenderesse et déduite du défaut d’intérêt :
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Le moyen, en chacune de ses branches, fait grief au jugement attaqué
d’avoir condamné la demanderesse à payer la somme de 59.031 euros,
équivalant à trois années de loyers, sur la base de l’article 25, alinéa 1er, 3°, de
la loi du 30 avril 1951 sur les baux commerciaux.
Le jugement attaqué, qui relève que la demanderesse a « reloué
[l’immeuble litigieux] à un tiers en vue de l’exercice d’un commerce
similaire », considère que ce fait « la rend redevable de l’indemnité de trois
années visée à l’article 25, [alinéa 1er], […] 6°, de la loi du 30 avril 1951 ».
Cette considération, qui n’est pas critiquée, suffit à fonder la décision
du jugement attaqué de condamner la demanderesse à la somme précitée.
Le moyen, qui, en aucune de ses branches, ne saurait entraîner la
cassation, est dénué d’intérêt.
La fin de non-recevoir est fondée.
Sur le troisième moyen :
Le jugement attaqué fonde sa décision de condamner la demanderesse à
une indemnité de trois années sur l’article 25, alinéa 1er, 3° et 6°, de la loi du
30 avril 1951.
L’article 25, alinéa 5, de cette loi, en vertu duquel le bailleur peut se
pourvoir devant le juge si l’indemnité apparaît manifestement exagérée en
raison de l’état d’abandon ou de déclin du commerce au moment de la reprise,
n’est applicable que dans les cas visés à l’article 25, alinéa 1er, 2o et 5o.
Le jugement attaqué n’était dès lors pas tenu de répondre à la défense
fondée sur l’article 25, alinéa 5, précité figurant aux conclusions de la
demanderesse reproduites au moyen, devenue sans pertinence en raison de sa
décision.
Le moyen ne peut être accueilli.
Par ces motifs,
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La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de huit cent cinquante-trois euros trente-neuf
centimes envers la partie demanderesse et à la somme de deux cent quarantecinq euros onze centimes envers la partie défenderesse.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où
siégeaient le président de section Albert Fettweis, les conseillers Didier
Batselé, Martine Regout, Mireille Delange et Michel Lemal, et prononcé en
audience publique du cinq février deux mille quinze par le président de section
Albert Fettweis, en présence du premier avocat général Jean-François Leclercq,
avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.
P. De Wadripont
M. Lemal
M. Delange
M. Regout
D. Batselé
A. Fettweis

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