Les jeunes et la citoyenneté : Identité, appartenance et autonomie

Transcription

Les jeunes et la citoyenneté : Identité, appartenance et autonomie
Les jeunes et la citoyenneté :
Identité, appartenance et autonomie
Fondé sur l’étude de Caroline Beauvais, Lindsey McKay et Adam Seddon,
A Literature Review on Youth and Citizenship (RCRPP, 2001).
Identité et appartenance
L’identification et le sentiment d’appartenance à une
communauté sont des éléments fondamentaux de la
citoyenneté chez les jeunes. Toutefois, il existe de
nombreux domaines dont les jeunes se sentent exclus,
ce qui signifie qu’ils ne participent pas pleinement à la
vie communautaire.
Comment alors un sentiment d’identité peut-il se
former chez les jeunes ? Quelle est la raison qui
explique le faible taux de participation des jeunes à la
vie politique ? Si, dans les faits, ils ne s’intéressent pas
aux affaires politiques, est-ce attribuable à une
conviction parmi eux selon laquelle ils ne peuvent pas
faire grand-chose pour influencer le débat public et
l’élaboration des politiques publiques ? Ou les jeunes
expriment-ils leurs visions politiques par des moyens
différents de celui de voter au moment d’une
élection ?
Les chercheurs concluent qu’en dépit de la notion
populaire du « village global », la plupart des jeunes
continuent à s’identifier avant tout au milieu dans
lequel ils ont noué leurs premières relations sociales.
Les conflits relatifs à l’identité surviennent donc peutêtre dans le contexte des efforts visant à réconcilier
différents sentiments d’appartenance.
Par exemple, les jeunes de couleur sont peut-être aux
prises avec des conflits entre leurs sentiments
d’appartenance à leur identité familiale et à l’identité de
la culture dominante des Blancs avec lesquels ils vivent
désormais. Une étude portant sur des Autochtones qui
avaient quitté le foyer familial sur la réserve pour aller
s’établir en milieux urbains a révélé que ceux qui
réussirent à maintenir leurs visions culturelles ont eu
tendance à développer une meilleure estime de soi et à
mieux s’adapter psychologiquement que ceux qui
devinrent coupés de leur héritage culturel.
Si des jeunes continuent à s’identifier à leur culture,
qu’est-ce qui explique leur manque d’intérêt apparent à
l’égard de la vie politique ?
Autonomie des jeunes et
participation politique
Selon les chercheurs, les jeunes sont très respectueux
des institutions politiques et ils ont tendance à accepter
les valeurs et les idéaux de la société adulte canadienne.
Et à mesure qu’ils deviennent économiquement
autonomes, ils ont tendance à adopter les visions
politiques des membres plus âgés de la société. Mais,
comme l’autonomie économique prend de plus en plus
de temps à se produire, il s’ensuit que l’acceptation par
les jeunes des préoccupations partagées par les autres
adultes se manifeste aussi plus tard dans la vie.
L’accès à des emplois de qualité a un effet important
sur les sentiments d’appartenance des jeunes et, donc,
sur leur aptitude à participer à la vie communautaire. La
participation à la vie politique est associée à l’intégration
sociale. Par contre, les jeunes qui sont sans emploi et
qui vivent dans la pauvreté éprouvent un sentiment
d’exclusion. Les jeunes de la rue, en particulier, sont
marginalisés par leur manque d’accessibilité à des
services sociaux ou à des soins de santé adéquats, à une
alimentation saine, à l’éducation et à des ressources
financières, ce qui se traduit chez eux par un accès
limité ou nul aux courants dominants de la vie politique.
2
Même si des dispositions furent prises récemment pour
permettre aux itinérants de voter au moment des
élections, lorsque la participation nécessite de l’argent
(pour acquitter des frais d’adhésion à des organisations
politiques, par exemple), les jeunes itinérants sont
moins en mesure et moins susceptibles de participer.
Des emplois marginaux, le chômage et la pauvreté
peuvent aussi mener au développement de sentiments
d’aliénation et, en bout de ligne, inciter des jeunes à
rester en retrait des affaires communautaires. Ils
blâment la société pour leurs sentiments de désespoir
et ils choisissent de ne pas participer. Un sentiment de
contrôle est donc important pour la participation à la
vie politique. Lorsque les jeunes ont l’impression, à
tort ou à raison, qu’ils n’ont pas de droits, ils sont
moins enclins à participer à la vie communautaire ou à
accepter des responsabilités sociales. Le manque de
participation peut aussi être le reflet d’une
insatisfaction à l’égard de l’univers dont ils héritent. Ce
sentiment d’aliénation et d’exclusion peut aussi mener
à la formation d’autres identités ou de sous-cultures,
comme le mouvement rock des « punks ».
Les jeunes ne croient pas que le système politique
répond ou est en mesure de répondre à leurs intérêts
ou de tenir compte de leurs préoccupations. Les
recherches indiquent que les jeunes d’aujourd’hui
n’ont pas moins d’intérêt à l’égard de la vie politique
que ceux des générations précédentes. Le principal
motif du désengagement relatif des jeunes à l’égard des
affaires politiques est l’échec des grands courants du
monde politique de s’intéresser à des enjeux que les
jeunes jugent importants, comme l’environnement, la
pauvreté et la discrimination raciale. Les chercheurs
soulignent que les jeunes peuvent être renseignés
concernant les questions politiques et s’intéresser à la
vie politique, tout en ne votant pas et en n’affichant
pas une forte affiliation à un parti politique.
Le faible taux de participation des jeunes reflète peutêtre aussi un manque de confiance à l’égard de
l’aptitude des gouvernements à réaliser des
changements sociaux, une impression que de
nombreux adultes partagent aussi. Par conséquent, des
nombres croissants de jeunes expriment leurs opinions
politiques de façons différentes – au sein de
mouvements sociaux ou de manifestations à caractère
politique. Les jeunes ont été actifs au sein de
manifestations récentes contre la mondialisation, la
hausse des frais de scolarité et la question des aliments
génétiquement modifiés. Tous ces enjeux sont liés à la
hausse de l’influence des entreprises, qui est perçue
comme une menace aux domaines de la vie dans
lesquels les jeunes ont des intérêts acquis, comme la
démocratie,
l’accessibilité
à
l’éducation
et
l’environnement. Des gens de tous les âges participent
aux mouvements de protestation, mais la présence
active des jeunes à ces démonstrations contribue à
rejeter la notion selon laquelle les jeunes ne sont pas
intéressés par les questions politiques.
En réponse aux préoccupations suscitées par le
manque de participation des jeunes à la vie politique
structurée, on reconnaît maintenant que, afin d’assurer
la présence d’une démocratie saine et dynamique, il
faut donner aux jeunes de plus nombreuses occasions
de participer. Plusieurs organismes s’engagent dans
cette voie, en faisant la promotion de la participation
des jeunes aux décisions qui ont des incidences sur
leur vie. L’habilitation des jeunes est de plus en plus
considérée comme importante, non seulement parce
qu’il s’agit d’une question de droits, mais aussi d’un
moyen de favoriser le développement des jeunes en
tant que citoyens.
Conclusions
™ La citoyenneté comporte une relation entre
l’individu et l’État. Les sentiments d’aliénation par
rapport à la collectivité peuvent souvent résulter du fait
que les gens éprouvent un manque d’intérêt ou
d’aspiration en vue d’améliorer et de parfaire la
communauté dans laquelle ils vivent.
™ Il est essentiel de considérer ce que la communauté
peut faire pour soutenir le mouvement des jeunes vers
l’autonomie.
™ L’accès au marché du travail est extrêmement
important, mais la famille et la communauté ont aussi
des rôles importants à jouer en vue de faciliter la
transition vers une citoyenneté autonome.
™ La volonté des jeunes de participer à la vie politique
structurée est peut-être fonction de mesures visant à
3
s’attaquer aux causes fondamentales de leur manque de
participation.
™ La réponse à la question de savoir si la participation
des jeunes aux grands courants de la vie politique
nécessite la mise en place de programmes ciblés ou si
elle peut se régler tout simplement en incluant les
enjeux relatifs aux jeunes dans les programmes
politiques des partis, reste encore à déterminer.