Y A-T-IL UN ÂGE LIMITE

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Y A-T-IL UN ÂGE LIMITE
NÉPHROLOGIE ET GRAND ÂGE
Y A-T-IL UN ÂGE LIMITE
LA MISE EN DIALYSE ?
1/ Introduction
Débuter la dialyse quelque soit l’âge
a pour objectif de maintenir en vie les
patients insuffisants rénaux tout en
leur préservant une qualité de vie la
meilleure possible. A l’opposé, faire
le choix d’un traitement conservateur
est synonyme de décès à court terme
du patient. Avec le vieillissement de
la population, de plus en plus de patients très âgés arrivent au stade de
l’insuffisance rénale terminale. C’est
alors au néphrologue d’envisager ou
non une prise en charge en dialyse.
2/ Données épidémiologiques
Les données du registre REIN
montrent que l’âge médian des patients incidents en dialyse en 2009
était de 70.2 ans et que la prévalence
des patients de plus de 75 ans en dialyse était de 38 %. Par ailleurs, entre
2005 et 2009, l’incidence des moins de
75 ans stagne alors que sur la même
période, elle augmente de 12 % pour
les plus de 75 ans et de 74 % pour les
plus de 85 ans(9). Force est donc de
constater que l’âge n’apparaît donc
pas comme un facteur limitant au
commencement de l’épuration extrarénale.
La dialyse du sujet âgé est donc une
routine dans nos centres mais leur
rend-on service ? Des réponses sont
apportées par D. Joly en 2003 qui
a repris dans un centre, de façon
rétrospective, les patients de plus
de 80 ans pour lesquels une dialyse
DR FRANÇOIS PROVÔT
(CHRU de Lille)
40 /// Reins-Échos n°13 - www.rein-echos.fr
L’OBJECTIF DE CETTE REVUE
N’EST CERTAINEMENT PAS
DE DONNER UNE RÉPONSE
PRÉCISE À LA QUESTION
POSÉE MAIS PLUTÔT DE
FOURNIR DES PISTES DE
RÉFLEXION.
était débutée en les comparants à
ceux pour lesquels une décision de
traitement conservateur était validée. Il met en évidence une médiane
de survie meilleure dans le groupe
dialyse versus le groupe traitement
conservateur (28.9 mois vs 9.9 mois
p < 0.0001)(8). Biensur, les patients
du traitement conservateur accumulaient bien plus de co-morbidités.
Néanmoins, cela montre que lorsque
la décision de dialyse est prise chez
ces patients de plus de 80 ans, elle
leur apporte une survie satisfaisante.
Cette survie reste néanmoins variable, Tamura et coll rapportent aux
états unis des survies médianes en
dialyse de 0.6 ans pour les plus de 90
ans et 1.3 ans pour les 80-84 ans(15).
D’autres données plus récentes, retrouvent sur 1781 patients de plus de
75 ans débutant la dialyse une survie
à 2 ans de 60%(7).
Une fois le choix de la dialyse effectué, ces patients âgés doivent ils avoir
des paramètres de dialyse différents
des patients plus jeunes (séances
plus courtes, etc..). A ce sujet, les
avis convergent vers des modalités
de dialyse équivalentes à celles des
patients plus jeunes. C’est ce qui est
retrouvé dans DOPPS : un temps de
dialyse équivalent, des KT/V identiques, une hémoglobine similaire
mais une albuminémie plus basse
traduction de la dénutrition(3). Dans
cette même étude, il est rapporté
que l’abord vasculaire chez ces patients âgés débutant la dialyse est
plus souvent un cathéter qu’une fistule. Ceci s’explique en partie par les
références tardives mais peut être
aussi par la crainte du néphrologue
de créer une FAV qui ne servirait pas
longtemps ! Quelque soit les raisons
de ce surplus de catheter, il est corrélé à un sur-risque de mortalité(11).
La FAV reste donc le gold standart.
Cependant, quelque soit les bons
soins que nous procurons aux patients, il faut garder en mémoire que
par rapport à une population appariée
non dialysée, il existe lorsque l’on
est dialysé une diminution de 50 %
de la qualité de vie globale(3). Alors,
s’il n’apparaît pas déraisonnable
de débuter la dialyse chez nos patients âgés, quelle qualité de vie leur
offre-t-on ? Malgré les contraintes
de la dialyse, on note un meilleur
ressenti psycho-social des patients
âgés par rapport aux sujets jeunes
alors que c’est l’inverse pour le ressenti physique comme on pouvait s’y
attendre(1-10). Des données similaires
sont retrouvées dans DOPPS(3).
En résumé, l’âge ne constitue certainement pas un élément suffisant
pour contre indiquer une prise en
charge en dialyse. Les paramètres
cliniques, en particulier l’état cognitif
et de dépendance ainsi que l’anamnèse du patient sont autant d’éléments capitaux pour choisir de dialyser ou non. Un score pronostic de
mortalité à 6 mois du début de la dialyse a été proposé chez ces patients
de plus de 75 ans et peut-être une
aide à la prise de décision(6). Enfin, il
faut rappeler qu’il n’y a aucun intérêt à débuter la dialyse trop précocement, les signes cliniques doivent
primer au calcul de la clairance surtout chez ces patients(2- 5).
3/ le traitement conservateur
L’alternative à la prise en charge en
dialyse est le traitement conservateur. Ce choix doit être issu d’une
décision pluridisciplinaire (gériatres,
néphrologues, médecin traitant,
équipe de soins palliatif). Pour que
le confort de vie de ces patients soit