Un levier pour les start-up
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Un levier pour les start-up
ACTUEL 32 MICROTECHNIQUES Un levier pour les start-up Patrick Delarive. C’est ce financier et promoteur qui a créé Jade Invest à Pully. Objectif: favoriser l’éclosion des spin off du célèbre CSEM à Neuchâtel. P atrick Delarive est à l’origine de la création de Jade Invest, une société d’investissement visant à favoriser l’éclosion des start-up du Centre Suisse d’Electronique et de Microtechnique (CSEM), à Neuchâtel. «Depuis un certain nombre d’années, le CSEM cherchait des partenaires financiers sans succès. Les discussions avec Xavier Arreguit, actuel CEO d’InnoBridge – la société de consulting du CSEM –, m’ont convaincu de l’intérêt d’investir dans des sociétés innovantes suisses, bien gérées et qui ont survécu à l’explosion de la bulle technologique de la fin des années 1990», précise Patrick Delarive. Il met donc en contact le CSEM avec une relation d’affaires, Thomas Amstutz, ancien membre de la direction générale de Credit Suisse et qui dirige notamment la société d’investissement Absolute Private Equity, à Zoug. Les trois parties se mettent d’accord et Jade Invest est créée fin décembre 2005 avec 50 millions de francs, dont 30 proviennent d’Absolute et de Delarive – qui n’a injecté que l’argent du groupe et pas celui de la clientèle – et 20 du CSEM. Si Patrick Delarive a mis des fonds dans Jade, c’est parce qu’il croit dans le potentiel de ces jeunes pousses suisses et PME Magazine / avril 2006 DR SYLVIE JEANBOURQUIN ARRAYON TECHNOLOGY, NEUCHÂTEL. Le laboratoire de bio et nano-ingénierie est une des spin-off du CSEM qui a bénéficié du soutien de Jade Invest. qu’il est convaincu de l’effet de levier important de son investissement. Une augmentation de capital n’était initialement pas à l’ordre du jour, mais les sociétés recherchant des fonds et d’autres investisseurs se pressent à la porte de Jade et pourraient inciter les créateurs à revenir sur leur décision et augmenter le capital voire de vendre à terme une partie de leurs actions. ATYPIQUE. Sans fortune personnelle et un apprentissage effectué dans une banque comme formation de base, Pa- trick Delarive, aujourd’hui 44 ans, aurait pu suivre le parcours classique de l’employé modèle. Son ambition était autre. D’abord collaborateur de la Banque Populaire Suisse, il entre ensuite à Credit Suisse. Le Vaudois se met alors à gravir les échelons hiérarchiques, en même temps qu’il approfondit ses connaissances à la prestigieuse International Banking School de New York. Fort de ce nouveau bagage, il œuvre pour une société fiduciaire puis pour une entreprise lausannoise. Enfin, il jette les amarres. «J’ai décidé d’écouter mon cœur et mon estomac – siège de l’intuition – et pas seulement ma tête, qui favorise uniquement l’égo, la stratégie et l’image», se souvient Patrick Delarive. Il crée alors sa propre société à Pully avec un capital départ de cinq clients – d’anciennes relations professionnelles – et 15 millions de francs sous gestion, tout en exerçant en parallèle une activité de courtier financier à Genève. RELATIONNEL. Dès le départ, Patrick Delarive tient à faire la différence avec ses concurrents par la qualité des rela- • • • ACTUEL 35 Photos: DR ••• tions avec sa clientèle. «Comme je ne suis pas une marque connue, chaque nouveau client relève pour moi du miracle. Et pour conserver cette clientèle et que le bouche à oreille fonctionne, il faut travailler dans son intérêt, le mien passe bien après.» Le gestionnaire de fortune s’est, par exemple, astreint à ne pas effectuer les mêmes placements boursiers pour ses clients et pour lui-même, afin d’éliminer toute dimension «émotionnelle». GOTTA D’OR À LUTRY. Une des réalisations immobilières gérée par le groupe Delarive. A force d’acquisitions le pôle immobilier s’est placé parmi les plus importantes agences de courtage et de gérance de Suisse romande. PATRICK DELARIVE. Il a lancé sa propre affaire avec cinq clients et 15 millions sous gestion. Son activité financière porte aujourd’hui sur 80 comptes et 450 millions de francs. Il décide aussi de ne pas conserver comme gain personnel les rétrocessions sur le volume d’affaires données par des banques et autres fournisseurs. «Mes honoraires sont peut-être légèrement plus élevés que ceux d’autres gestionnaires in- dépendants, même si dans l’ensemble j’ai négocié de bonnes conditions avec les établissements bancaires. Tous les avantages que je peux obtenir profitent aussi à mes clients.» Son attitude et son tempérament aidant, la confiance des nouveaux clients lui permet rapidement d’abandonner son activité de courtage. Début 2006, son affaire comptait quelque 80 clients dans le secteur financier, dont des familles nanties, des personnes entre 40 et 50 ans ayant fait fortune et trois institutionnels – des multinationales. Les deux tiers de la clientèle sont suisses et les fonds sous gestion se montent à 450 millions de francs. POLARISATION. En parallèle, le pôle immobilier du groupe Delarive s’est imposé «presque naturellement», selon son initiateur. Car Patrick Delarive, qui se dit davantage motivé par les projets que par l’argent, décide en 1996 de réaliser sa première opération immobilière sur les hauts de Lutry. Il développe par la suite cette activité de promoteur immobilier pour ses affaires personnelles et rachète progressivement entre 2004 et 2005 la régie de la Couronne à Lutry. En février 2006, il acquiert également la société Cofideco, une des plus anciennes et importantes agences immobilières du canton de Vaud. Ces acquisitions permettent au groupe Delarive de se positionner parmi les trois plus importantes agences immobilières courtage et gérance du canton. Avec une participation de 50% dans l’affaire Chappuis & Delarive, le groupe est même devenu le premier promoteur immobilier romand. Ses promotions en cours s’élèvent à quelque 250 millions de francs. La plus célèbre et la plus grosse opération immobilière s’est jouée sur les sites des ex-ateliers de constructions mécaniques de Vevey, sur lesquels il va développer 50 000 mètres carrés de surface de plancher brute de logements locatifs et de surfaces commerciales. Pour faire fonctionner ses deux pôles d’activité, immobilière et financière, le groupe Delarive emploie 105 personnes. «En- viron 80% de mon personnel est féminin, y compris aux postes les plus élevés. Je pense qu’elles sont plus à même que beaucoup d’hommes de gérer un grand nombre de priorités simultanément. Et cet élément est très important dans une entité en très forte croissance.» La forte augmentation du personnel et des affaires l’a également obligé à déléguer et à créer une direction générale, il y a environ une année. «Quand on passe de 20 à 105 personnes, on se rend compte que l’on ne va plus pouvoir s’occuper de tout et l’on est obligé de sortir de l’opérationnel pour penser stratégie.» PME PME Magazine / avril 2006