l`europe souffle le chaud et le froid

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l`europe souffle le chaud et le froid
WEBMAG N° 54 - MAI 2013
DÉBATS & OPINIONS
TRANSITION ÉNERGÉTIQUE
L’EUROPE SOUFFLE LE CHAUD ET LE FROID
Le marché européen des quotas de
CO2 accumule un excédent, ce qui
fait plonger le prix de la tonne de
CO2. Mais l’Europe tient néanmoins
le cap sur sa politique climatique.
C’est une mésaventure que la Belgique
connaît bien en matière de mécanisme
de marché appliqué à l’énergie et au
climat. Le système européen d’échange
de quotas d’émissions (ETS), fer de lance
de la politique climatique européenne,
basé sur le marché, se heurte depuis
quelque temps à un excédent de quotas de « permis
de polluer » : les deux milliards de tonnes d’excédent
– sur les 8,5 milliards disponibles dans l’Union Européenne – ont fait plonger le
prix de la tonne de CO2 sous
les trois euros. C’est le résultat conjoint de la générosité
des Etats en matière d’allocations de permis (dont le
calcul vient d’être revu par la Commission Européenne pour les allocations
futures), de la spéculation de certains
acteurs industriels et des effets pervers
des mesures de compensation prévues
par les mécanismes de flexibilité via
les « réductions d’émissions certifiées »
(CER). Un industriel comme Lakshmi
Mital se serait ainsi enrichi par ce biais
d’un avantage indu estimé à près de
500 millions d’euros. Une situation qui
n’est pas sans rappeler celle des certificats
verts accumulés en Wallonie.
La Commission Européenne avait proposé en novembre dernier de geler
temporairement quelque 900 millions
de quotas, dans l’espoir de juguler
l’effondrement du marché ETS. Le Parlement européen s’y est opposé à une
courte majorité et la question est donc
renvoyée devant la commission parlementaire de l’environnement.
Pour ne rien arranger, les députés européens ont massivement approuvé, quelques
semaines plus tard, de reporter d’un an l’inclusion dans le
système ETS du CO2 émis par
les avions. Les compagnies
aériennes bénéficient donc
d’un nouveau sursis. Or, dans
le même temps, l’Agence
Internationale de l’Energie, s’inquiète
du risque grandissant de voir le réchauffement s’accélérer avec l’augmentation
des émissions. Dans son dernier rapport,
l’Agence constate qu’on émet aujourd’hui
toujours autant de CO2 qu’en 1990 par unité d’énergie produite. Signe très symbolique, en mai de cette année, les relevés ef-
fectués traditionnellement au-dessus du
volcan Mauna Loa, à Hawaï, ont dépassé
le seuil de 400 ppm. « La dernière fois que
la planète a connu une concentration de
plus de 400 ppm, note un expert, c’était il
y a environ trois millions d’années ».
Dans l’immédiat, les émissions de CO2 produites par les quelques 12 000 installations
industrielles soumises à l’ETS affiche un
recul de 2 %. Et les autorités européennes
ne baissent pas les bras. Le parlement
européen vient d’adopter un projet de
règlement visant la contruction, à marche
forcée, d’infrastructures énergétiques
transeuropéennes. D’ici 2020, l’Union Européenne prévoit d’injecter 9,1 milliards
d’euros dans ses réseaux de transport
d’électricité et de gaz. La liste des projets visés sera établie d’ici le mois d’août.
Elle comprendra uniquement des projets
jugés non rentables, situés dans l’un des
quatorze corridors prioritaires définis par
la Direction de l’Energie. A charge pour les
Etats bénéficiaires de désigner une autorité unique qui coordonnera la procédure
de manière à réduire les frais adminitratifs
et les délais de prise de décision. Le parlement européen a également voté le 21
mai dernier en faveur d’un objectif contraignant en matière d’énergies renouvelables
à l’horizon 2030, donnant un signal encourageant pour le secteur. De quoi accélérer
la transition énergétique européenne.
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