loi sur le droit d`auteur

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loi sur le droit d`auteur
Actualités Propriété Intellectuelle
Février 2002
L’emploi d’une œuvre artistique comme dessin
industriel peut modifier le droit d’auteur sur l’œuvre
L
par D. Jeffrey Brown
A LOI SUR LE DROIT D’AUTEUR du Canada
protège le droit d’auteur sur (entre autres) les
œuvres artistiques, notamment les peintures,
les dessins, les sculptures, les œuvres architecturales,
les gravures et les photographies. Aux termes
de la Loi sur le droit d’auteur, un droit d’auteur
a généralement effet jusqu’au cinquantième
anniversaire du décès de l’auteur. Toutefois, si
une œuvre artistique est utilisée comme dessin
industriel (c.-à-d., une configuration, un motif ou
des éléments décoratifs qui s’appliquent à des
objets utilitaires et qui ne sont jugés que selon
des caractéristiques visuelles), la protection que
confère le droit d’auteur peut être efficacement
remplacée par une autre qui, aux termes de la Loi
sur les dessins industriels, ne protège les œuvres
que pour 10 ans.
Les dispositions de la Loi sur le droit d’auteur qui
régissent l’emploi d’une œuvre artistique comme
dessin industriel dépendent de la date à laquelle
celui-ci a été créé. Les dessins créés à compter
du 7 juin 1988 sont assujettis aux dispositions de
l’actuel article 64 de la Loi sur le droit d’auteur,
qui ont été intégrées en 1988. Les dessins créés
avant le 8 juin 1988 sont assujettis à l’article 46
de la Loi sur le droit d’auteur, dans sa version
antérieure aux modifications de 1988.
Il est très important de déterminer quelles
dispositions de la Loi sur le droit d’auteur
s’appliquent à chaque cas, parce que les deux
articles diffèrent considérablement au niveau
de leur incidence pratique. L’ancien article 46
dispense les dessins de l’application de la Loi
sur le droit d’auteur et élimine ainsi en fait tous
les droits d’auteur sur les œuvres visées. Par
contre, l’article 64 de l’actuelle Loi sur le droit
d’auteur empêche le titulaire d’un droit d’auteur
de faire valoir celui-ci sans compromettre son
existence. De plus, la restriction prévue à l’article
64 concernant l’application de la loi ne vise
que les reproductions du dessin en ce qui a
trait à l’objet, de sorte qu’on peut prétendre
que les autres droits d’auteur sur l’œuvre ne
sont pas touchés.
L’article 64 de la Loi sur le droit d’auteur se
distingue en plus de son prédécesseur par
l’inclusion d’exceptions à son application. Alors
que la dispense prévue à l’article 46 prenait effet,
sans exception, dès la production de plus de 50
objets comportant un dessin, l’article 64 de la
Loi sur le droit d’auteur permet, dans certaines
circonstances, cette reproduction sans imposer
de restrictions sur le droit d’auteur. Plus
particulièrement, le paragraphe 64(3) de la Loi
sur le droit d’auteur stipule que les restrictions
visant la portée du droit d’auteur sur une œuvre
artistique ne s’appliquent pas « dans le mesure
où elle [l’œuvre artistique] est utilisée à l’une
ou l’autre des fins suivantes », dont a) des
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représentations graphiques ou photographiques appliquées
sur un objet; b) des marques de commerce ou étiquettes; c) du
matériel dont le motif est tissé ou tricoté; d) des représentations
d’êtres, de lieux ou de scènes réels ou imaginaires appliquées
à un objet et e) des objets vendus par ensembles, pourvu qu’il
n’y ait pas plus de cinquante ensembles.
Il est important de noter que l’article 64 ne s’applique que
lorsqu’un dessin est appliqué à un « objet utilitaire », qui est
défini comme un objet remplissant une fonction utilitaire
plutôt qu’une « fonction d’un objet autre que celle de
support d’un produit artistique ou littéraire ». Par conséquent,
l’article 64 ne s’applique pas aux reproductions d’œuvres
artistiques ne comportant aucune fonction utilitaire (p. ex.,
les sculptures) ou dont on peut dire par ailleurs qu’elles
ne remplissent qu’une « fonction d’un objet autre que celle
de support d’un produit artistique ou littéraire » (p. ex.,
les affiches). Toutefois, l’article 64 s’applique à des usages
comme la fabrication industrielle de tasses à café, de
couches, de papier peint, de carreaux de plancher ou
de vaisselle de table comportant des œuvres artistiques
tels des dessins, sauf si l’une des exceptions mentionnées
ci-dessus s’applique.
Comme mentionné précédemment, la date à laquelle le
dessin en cause (et non l’œuvre artistique) a été créé
détermine quelles dispositions de la Loi sur le droit d’auteur
s’y appliquent. Par conséquent, il devient difficile d’identifier
cette date lorsqu’une œuvre artistique a été créée avant le 8
juin 1988, mais qu’elle n’est appliquée en tant que dessin à
un objet utilitaire qu’après cette date. L’article 46 de la Loi
sur le droit d’auteur, dans sa version antérieure au 8 juin
1988, aide à surmonter cette difficulté. Elle dispense de la
Loi sur le droit d’auteur les dessins « susceptibles » d’être
enregistrés en vertu de la Loi sur les dessins industriels, à
l’exception des dessins qui « ne servent pas ou ne sont pas
destinés à servir de modèles ou d’échantillons, pour être
multipliés par un procédé industriel quelconque ». Il semble
donc que les œuvres artistiques créées avant le 8 juin 1988
pour être utilisées comme dessins industriels sont assujetties
aux dispositions de la Loi sur le droit d’auteur, dans sa
version antérieure à cette date.
La question de savoir si une œuvre artistique créée avant
le 8 juin 1988 mais non destinée à servir de modèle ou
d’échantillon, pour être multipliée par un procédé industriel
2 / ACTUALITÉS PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE
quelconque, devrait ou non être assujettie à l’article 64 de
la Loi sur le droit d’auteur, même si l’œuvre a été utilisée
par la suite dans un dessin industriel, est sujette à débat.
Toutefois, même si ce débat existe, un tribunal pourrait
préférer conclure que le dessin a été créé en même temps
que l’œuvre artistique, de sorte que l’article 46 de la Loi sur
le droit d’auteur s’appliquerait même si on n’avait aucune
intention d’utiliser une œuvre artistique comme dessin
avant le 8 juin 1988.1
En résumé, qu’un dessin soit assujetti à l’application de
l’ancien article 46 ou de l’actuel article 64 de la Loi sur
le droit d’auteur, il est évident que l’emploi d’une œuvre
artistique comme dessin industriel engendre le risque que
les droits d’auteur sur l’œuvre soient réduits, voire même
abolis. À cet égard, il appert crucial de déterminer laquelle
de ces dispositions s’applique à un dessin donné. Même si
les dispositions de l’article 64 de la Loi sur le droit d’auteur
sont clairement plus favorables, il ne faudrait pas oublier que
la jurisprudence interprétant l’article 64 se fait rare et que
la portée précise de l’application de celui-ci, y compris ses
exceptions, reste quelque peu incertaine.
1 La Cour d’appel fédérale a rejeté la prétention selon laquelle une œuvre artistique ne devient un
« dessin » que lorsqu’elle est appliquée à un « objet utilitaire » dans Milliken & Co. c. Interface
Flooring Systems (Canada) Inc. Toutefois, les faits de cette affaire étaient suffisamment
distinctifs pour permettre de prétendre que les dessins peuvent, dans certaines circonstances,
être créés après le 8 juin 1988 même s’ils sont identiques aux œuvres artistiques créées,
aucunement destinées à être utilisées comme dessin industriel, avant cette date, ou s’ils en
sont tirés.
Un tribunal américain se penche sur les
différents types de services de reprise
après sinistre
par D. Jeffrey Brown
Dans une récente affaire antitrust qui pourrait intéresser
bon nombre de lecteurs du bulletin Actualités - Propriété
intellectuelle, la U.S. District Court du district fédéral de
Columbia a analysé les interactions concurrentielles entre
divers types de services de reprise après sinistre. L’affaire
United States of America c. SunGard Data Systems, Inc.
découle de l’acquisition proposée par SunGard Data Systems,
Inc. de l’actif lié aux solutions de reprise après sinistre
de Comdisco, Inc.
Lorsqu’il a rejeté une requête par le département de la Justice
des États-Unis visant à faire interdire l’acquisition en raison
de l’impact présumé de cette dernière sur la concurrence
dans le domaine des services partagés de salle redondante, le
tribunal a présenté un survol intéressant de l’industrie de la
reprise après sinistre. Il a analysé plusieurs types de services
de reprise après sinistre, y compris les services internes de
salle redondante, les services quick-ship et les salles blanches,
ainsi que les services de reprise de zones de travail, de reprise
de salle redondante mobile et de haute disponibilité/reprise
spécialisée. Finalement, le tribunal a rejeté la requête du
département parce qu’il a conclu que les services partagés de
salle redondante font concurrence aux services internes de
salle redondante et aux services quick-ship; cela assure aux
acheteurs de services partagés de salle redondante l’accès
continu à des substituts concurrentiels après l’acquisition.
On peut consulter le texte intégral de la décision du tribunal
au http://www.dcd.uscourts.gov/01-2196a.pdf. Si vous
souhaitez obtenir des renseignements plus détaillés sur les
questions concernant la concurrence et l’antitrust, abonnezvous au bulletin spécialisé de Stikeman Elliott, Actualités Concurrence, en faisant parvenir une demande en ce sens
par courriel à [email protected].
La preuve de deux ventes par correspondance est suffisante
pour faire radier une marque de commerce
par Justine Whitehead
Le 4 décembre 2001, M. le juge Nadon de la Cour fédérale,
Section de première instance, a rendu une décision en faveur
de J.C. Penney dans l’affaire J.C. Penney Company, Inc. c.
Gabardine Clothing Co. Inc. J.C. Penney a tenté de faire
radier l’enregistrement d’une marque de commerce (ARIZONA
BLUES JEANSWEAR CO.), propriété de Gabardine Clothing
Co. Inc. (Gabardine). J.C. Penney a prétendu que, à la date du
dépôt de la demande de Gabardine, la marque de commerce
de Gabardine créait de la confusion avec une marque de
commerce déjà utilisée (ou connue) au Canada par J.C. Penney,
à savoir THE ORIGINAL ARIZONA JEAN COMPANY.
Cette affaire a eu pour catalyseur une objection préliminaire
de l’examinateur de marques visant l’enregistrement de la
marque de commerce de J.C. Penney. L’examinateur avait
remarqué que la marque de commerce de J.C Penney ne
semblait pas être enregistrable, car elle créait de la confusion
avec la marque de commerce déposée de Gabardine. J.C.
Penney a retiré sa demande visant l’enregistrement de sa
marque de commerce et a intenté une procédure en Cour
fédérale pour faire radier l’enregistrement de Gabardine.
La demande a été déposée deux jours avant le cinquième
anniversaire de l’enregistrement de Gabardine pour la marque
de commerce ARIZONA BLUES JEANSWEAR CO.
Le choix du moment de la demande a été crucial. Au Canada,
une marque de commerce enregistrée depuis cinq années
complètes jouit d’un avantage important pour contester une
procédure de radiation. Avant le cinquième anniversaire,
les personnes qui tentent de faire radier une marque de
commerce doivent uniquement démontrer, avant certaines
dates-clés, qu’elles ont utilisé une marque de commerce qui
crée de la confusion. Toutefois, après cinq ans, une marque de
commerce ne peut être radiée, sauf si la personne demandant
la radiation démontre que le propriétaire de la marque de
commerce déposée en cause l’a adoptée en ayant connaissance
des droits antérieurs de l’autre personne en common law.
Dans ce cas-ci, puisque la demande a été déposée avant
cette échéance de cinq ans, le fardeau de présentation de
J.C. Penney a été considérablement allégé. Au procès, J.C.
Penney a déposé des preuves qui étaient censées démontrer
l’utilisation de sa marque de commerce au Canada par
l’entremise de son commerce par correspondance et par
Internet, tant avant qu’après la date du dépôt de la demande
d’enregistrement de la marque de commerce de Gabardine
(le 21 décembre 1993).
Toutefois, en raison de divers vices au niveau de la preuve,
le juge Nadon a conclu qu’on n’avait fait la preuve que de
deux ventes au Canada avant la date du dépôt de la demande
d’enregistrement de la marque de commerce de Gabardine. Le
tribunal a ensuite analysé la question de savoir si deux ventes
distinctes suffisaient pour établir l’emploi de la marque de
commerce de J.C. Penney dans le cours normal du commerce
au Canada. Suivant la jurisprudence, le juge Nadon a déclaré
que l’on devait déterminer si une vente unique suffisait en
tenant compte de toutes les circonstances en cause, y compris
la preuve concernant l’état du commerce tant avant qu’après
les dates-clés.
ACTUALITÉS PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE / 3
Dans l’affaire en cause, le tribunal a tenu compte des
facteurs suivants : (1) J.C. Penney compte des centaines
de détenteurs de cartes de crédit dont l’adresse est au
Canada; (2) J.C. Penney envoie chaque année par la poste
des milliers de catalogues à des adresses canadiennes
et de la marchandise à des Canadiens; (3) J.C. Penney
a commencé à utiliser la marque de commerce THE
ORIGINAL ARIZONA JEAN COMPANY en 1989 et l’utilise
encore; et (4) les marchandises associées à la marque de
commerce THE ORIGINAL ARIZONA JEAN COMPANY
sont affichées bien en évidence dans les catalogues de J.C.
Penney. À la lumière de l’ensemble de la preuve, le
tribunal a conclu que J.C. Penney avait utilisé sa marque
de commerce dans le cours normal du commerce, et non
uniquement de façon symbolique ou artificielle.
En conséquence, le tribunal s’est ensuite penché sur la
question de savoir si la marque de commerce ARIZONA
BLUES JEANSWEAR CO. créait de la confusion avec
THE ORIGINAL ARIZONA JEAN COMPANY. La preuve
démontrait clairement que les marchandises de J.C. Penney
étaient vendues au Canada uniquement par catalogue et
que celles de Gabardine étaient vendues exclusivement à
des magasins Costco au Canada. Néanmoins, le tribunal
a conclu que le caractère commercial des deux marques
de commerce était similaire, puisque [TRADUCTION] « les
marchandises font partie de la même catégorie générale
de produits et sont toutes deux offertes au détail pour
vente individuelle ». Cette conclusion, ainsi que celle selon
laquelle les marques de commerce avaient un caractère
distinctif inhérent, étaient utilisées avec des marchandises
similaires, se ressemblaient du point de vue phonétique
et suggéraient la même idée, suffisait pour permettre au
juge Nadon de déterminer que les marques de commerce
créaient de la confusion.
L’affaire J.C. Penney démontre que les tribunaux canadiens
respectent et accommodent la réalité du commerce
international. Même si le tribunal dans cette affaire a pu être
influencé par la preuve de la présence importante de J.C.
Penney au Canada au plan des ventes par correspondance,
il n’est pas certain que seules les entités avec une présence
si importante pourront faire valoir des droits antérieurs liés
à une marque de commerce et découlant de la common law
contre les droits conférés par l’enregistrement d’une marque
de commerce au Canada. À mesure que les entreprises
de ventes par correspondance en ligne (qui peuvent être
situées dans n’importe quel territoire au monde) prennent de
l’essor, il peut devenir de plus en plus difficile de savoir avec
certitude si l’enregistrement d’une marque de commerce peut
être radié au cours de ses cinq premières années en raison
des droits antérieurs d’une autre entité en common law.
GROUPE DE PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DE STIKEMAN ELLIOTT
MONTRÉAL
Peter Castiel
[email protected]
TORONTO
(514) 397-3272
Kathryn Chalmers
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(416) 869-5544
Jason Gudofsky
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(416) 869-5559
John Judge
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(416) 869-5503
Alison J. Youngman
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(416) 869-5684
OTTAWA
Stuart C. McCormack
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(613) 566-0526
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(613) 566-0525
D. Jeffrey Brown
[email protected]
(613) 564-3472
Eugene Derenyi
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(613) 566-0544
David Fewer
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(613) 564-3457
Randall J. Hofley
[email protected]
(613) 566-0540
Nicholas McHaffie
[email protected]
(613) 566-0546
Justine Whitehead
[email protected]
(613) 566-0541
CALGARY
Stuart M. Olley
[email protected]
VANCOUVER
Warren Brazier
[email protected]
(403) 266-9057
(604) 631-1408
Ce bulletin ne vise qu’à fournir des renseignements généraux et ne doit pas
être considéré comme un avis juridique

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