9. L`Amour de Dieu : le Prix de la Croix

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9. L`Amour de Dieu : le Prix de la Croix
9. L’Amour de Dieu : le Prix de la
Croix
« Ayez en vous les sentiments qui étaient en Jésus
Christ, lequel, existant en forme de Dieu, n'a point
regardé comme une proie à arracher d'être égal avec
Dieu, mais s'est dépouillé lui-même, en prenant une
forme de serviteur, en devenant semblable aux
hommes ; et ayant paru comme un simple homme, il
s'est humilié lui-même, se rendant obéissant jusqu'à la
mort, même jusqu'à la mort de la croix. »
Philippiens 2 :5-8
Abandon Total
Comme nous l’avons défini précédemment, l’amour est désintéressé. Le
véritable amour est tourné vers autrui, c’est le don de soi, l’abandon de
sa personne pour l’intérêt de l’autre. La mesure de ce désintéressement
fut démontrée à la croix. A cet endroit, Père et Fils renoncèrent à tout ce
qu’ils avaient de plus précieux pour pouvoir sauver une humanité
perdue.
a) Abandon du ciel
Il est paradoxal que Christ ait quitté la gloire de son ciel pour nous
permettre de la connaître. En réalité, il nous est impossible de
comprendre comment il a pu faire une chose pareille ; mais la bonne
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nouvelle c’est que nous allons avoir toute l’éternité pour sonder la
grandeur de cet amour désintéressé, si nous croyons en lui.
Imaginez le jour de votre mort. Vous êtes emmenés aux portes du ciel, et
si vous vous trouvez en Christ, on vous laisse entrer. Tout d’un coup,
vous êtes dans un monde parfait, sans péchés, sans souffrances, sans
larmes, où toute chose est source de joie et de bénédiction. Votre visage
est rayonnant de beauté et vos vêtements brillent comme le soleil.
Autour de vous, aucune couleur n’est impure. Et puis vous voyez le
Père face à face, dans toute sa majesté et sa gloire, reconnaissant dans
son regard le véritable amour. Pendant quelques instants, vous vous
plongez dans les yeux du Père et en percevez l’infinie richesse. Au même
instant, le chant d’une chorale de mille personnes fait entendre son
écho : pas une seule voix n’est imparfaite. Et puis tout d’un coup, en une
seconde, on vous chasse du paradis et on vous renvoie sur terre.
Comment vous sentiriez-vous ?
On ne peut imaginer ce que ce fut pour Christ de renoncer à cette gloire
pour venir sur une terre déchue et remplie de péchés. Auprès de son
Père il était loué, adoré, couronné de gloire. Et puis il quitte tout pour
venir sur une terre où il sera constamment humilié, rejeté, et entouré de
gens pécheurs et ennemis de son Père. Il accepte de se revêtir
d’ignorance, lui qui était omniscient. Il accepte de prendre le corps d’un
homme limité, lui qui était omnipotent et omniprésent. Il accepte de se
soumettre, lui qui était souverain. Maître du monde, il devient
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dépendant et obéissant. Lui qui était roi de l’univers, accepte de naître
dans une crèche. Lui par qui le monde fut créé, accepte de devenir
charpentier. Tout d’un coup il est l’égal de ceux qui sont sales, petits et
humiliés. Lui, le créateur du monde, voit son opinion débattue et
ignorée. Lui, la source de toute bonne chose, se voit insulté et maltraité.
b) Abandon du Corps
Jésus manifesta tous les aspects d’un abandon total de sa personne sur
cette croix. Non seulement il se donna pour mourir, mais en plus il se
laissa crucifier ; une mort des plus atroces. Par amour pour des
pécheurs, il subit les plus atroces souffrances. Premièrement battu de
verges, il fut ensuite couronné d’épines, ces mêmes épines qui étaient
apparu dans le monde comme conséquencse du péché d’Adam. Il fut
ensuite forcé de porter sa croix jusqu’au Mont Golgotha où il fut crucifié,
alors que les soldats romains prenaient plaisir à lui frapper la tête et la
foule à lui cracher dessus. On lui enleva ces vêtements, et alors qu’il était
vraisemblablement nu, on l’éleva sur une croix entre deux brigands.
Les romains n’utilisaient pas ce moyen de mise à mort pour tous les
condamnés. Elle était réservée aux pires criminels : aux traîtres, à ceux
qui n’étaient même plus considérés comme humains. C’était non
seulement l’une des morts les plus humiliantes, mais aussi l’une des
morts les plus atroces.
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C’est ce que nous décrit Frederick Farrar dans son livre The Life of Christ
(La Vie de Christ) :
« Une mort par crucifixion semble inclure tout ce que la douleur et la
mort peuvent avoir d’horrible – étourdissements, crampes, soif, faim,
insomnie, fièvre traumatique, honte, tourment de longue durée,
anticipation d’horreur, mortification des blessures attendues – tout
intensifié jusqu’à la limite de ce qui peut être enduré, mais s’arrêtant
juste un peu avant le point où l’inconscience pourrait soulager la
victime.
La position contraire au naturel rendait chaque mouvement pénible ; les
veines lacérées et les tendons écrasés vibraient dans une angoisse
incessante ; les blessures, enflées par exposition, formaient peu à peu de
la gangrène [lorsqu’une victime prenait plusieurs jours pour mourir] ;
les artères – surtout au niveau de la tête et de l’estomac – devenaient
gonflées et surchargées de sang, et alors que chaque variété de misère ne
faisait que s’empirer, on y ajoutait la douleur intolérable d’une soif
brûlante et rageante, et toutes ces complications physiques causaient de
l’anxiété interne qui rendait l’idée de la mort même – de la mort,
l’ennemi incertain, à l’approche de laquelle l’homme tremble le plus –
porter un aspect de dégagement doux et exquis.
Une chose est claire. Les exécutions du premier siècle n’étaient pas
comme les exécutions modernes, car elles ne cherchaient pas une mort
courte et sans douleur ni la préservation sous n’importe quel aspect de
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la dignité du criminel. Au contraire, elles cherchaient une torture
agonisante pour l’humilier complètement. Et il est important que nous
comprenions ceci, car cela nous aide à réaliser l’agonie de la mort de
Christ. »
Sur la croix, le condamné devait sans cesse s’appuyer sur ses mains et
pieds percés afin de lever son corps pour pouvoir gonfler son abdomen
et ainsi respirer. C’était une mort par asphyxie lente et terrible. Elle
pouvait prendre des heures ou certaines fois des jours. Jésus resta sur
cette croix pendant six heures.
c) Abandon de l’Ame
En quittant son ciel, le Fils renonçait à tous les intérêts qu’il y avait. En
donnant son corps, il renonçait à tous ses intérêts sur terre. Puis
finalement, en portant les péchés du monde, il renonçait à la chose la
plus belle et la plus intense qu’il ait jamais connue, la dernière chose
qu’il possédait encore : la relation avec son Père. En portant les péchés
du monde, il devint une malédiction pour nous (Galates 3 :13). Il devint
ennemi du Père à notre place. Cette relation qui avait durée depuis toute
éternité s’interrompit pendant un instant. A la vue de son Fils portant la
saleté du monde, le Père détourna son regard. Le Fils cria : « Mon Dieu,
mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? » (Matthieu 27 :46).
Le monde né de la relation d’amour entre un Père et un Fils ne put être
sauvé que par la rupture de cette relation. Sur cette croix, le Fils et le
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Père perdirent tout ce qu’ils avaient de plus précieux pour sauver la
terre. Ce regard qu’ils avaient échangé l’un avec l’autre pendant toute
une éternité dut cesser pendant un moment.
Par amour pour l’humanité, Dieu le Fils se fit homme pour pouvoir
mourir pour elle. Ce sacrifice fut total. Dieu lui-même donna sa vie, sous
la seule apparence au travers de laquelle il puisse le faire : celle d’un
homme.
Et puis on se souvient du poids du premier péché et de ses
conséquences, condamnant toute l’humanité. Sur cette croix, Jésus
portait ce péché, ainsi, que tout les autres ; ceux de millions de gens
ayant péché des centaines de fois par jour. Un poids infini.
La gloire de Dieu révélée
Dans l’évangile de Jean, Jésus se réfère à sa mort comme à sa
glorification :
« Jésus leur répondit : L'heure est venue où le Fils de l'homme doit être glorifié.
En vérité, en vérité, je vous le dis, si le grain de blé qui est tombé en terre ne
meurt, il reste seul ; mais, s'il meurt, il porte beaucoup de fruit. » (Jean
12:23-24)
De par sa mort, Jésus allait révéler la gloire de Dieu. Par son sacrifice, il
allait mettre en lumière la profondeur de l’amour de Dieu, le reflet de sa
nature. A la croix, le Fils et le Père allaient montrer au monde quelle était
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la profondeur de leur amour pour l’humanité et la consistance de cet
amour. Et alors que le cœur de Dieu se dévoile, c’est sa gloire qui
apparaît.
Et pourtant, une question encore reste à être posée : si Dieu ne change
pas, alors comment se peut-il que la croix – cet endroit où cette relation
entre Père et Fils fut brisée et où tous deux abandonnèrent tout ce qu’ils
avaient de cher – puisse révéler la nature de Dieu ? Comment la croix
peut-elle nous raconter qui Dieu est, si à cette même croix la relation
entre le Père et le Fils semble être effacée ?
Il semblerait que sur cette croix, le Père et le Fils perdirent tout ce qu’ils
possédaient. Cependant, une chose persista encore. Même lorsque leurs
regards se séparèrent, il existait encore une chose pour les unir : cet
amour désintéressé démontré par l’abandon total de leur personne.
Ainsi, la gloire de Dieu, c'est-à-dire sa présence et sa personne, fut
définie sur cette croix : quand le cœur de Dieu fut mis complètement à
nu il ne resta plus qu’une chose : l’amour, le don de soi, la recherche de
l’intérêt des autres.
Trop souvent Dieu est perçu comme un Être égoïste cherchant son
propre intérêt. Il est vrai que lorsque que l’on regarde à Dieu dans son
ensemble, c’est-à-dire dans l’unité de la trinité, on s’aperçoit que Dieu
n’est satisfait que de sa gloire et ne recherche que sa propre gloire.
Cependant, lorsque l’on regarde au sein même de cette trinité et que l’on
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observe la relation entre le Père et le Fils, on s’aperçoit que le cœur de
Dieu est complètement désintéressé, et qu’en aucun cas il ne cherche son
propre intérêt : le Fils agit au travers du Père et pour le Père, et le Père
agit au travers du Fils et pour le Fils.
On imagine souvent le paradis comment étant un endroit où les hommes
et les anges passent leur temps à servir Dieu. Cela est vrai, mais ce n’est
que la moitié de la vérité. En réalité, au paradis, Dieu sera le premier à
servir, à se donner, à partager et à aimer : son cœur est celui d’un
serviteur, le Fils nous l’a prouvé par sa vie sur la terre.
Et cela explique aussi pourquoi Dieu créa l’homme comme ne méritant
rien. En effet, on pourrait se demander comment un Dieu méritant tout a
pu faire un homme ne méritant rien « à son image. » Mais au lieu de
marquer une séparation entre Dieu et l’homme, cet ordre des choses est
le secret de la plus profonde unité : en créant l’homme comme ne
méritant rien, Dieu le conçut pour qu’il puisse rechercher non pas ses
intérêts, mais ceux des autres. En d’autres termes, Dieu conçut l’homme
pour aimer ; pour refléter au maximum son image, sa nature et sa gloire.
Parce que l’homme ne mérite rien, il est pleinement disponible pour
pouvoir se concentrer sur les intérêts des autres, et ainsi imiter le cœur
divin.
L’idée de sacrifice n’a jamais été populaire. Il est difficile de renoncer à
ses propres intérêts. Et pourtant, c’est là le centre de la vie chrétienne, le
seul moyen pour prendre part à la gloire de Dieu. Sans un abandon de
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sa personne, sans la poursuite d’une vie d’humilité et de dépendance,
l’homme ne peut communier avec Dieu et se réjouir dans sa gloire. C’est
pour cela que Jésus a dit :
« Si quelqu'un veut venir après moi, qu'il renonce à lui-même, qu'il se charge
chaque jour de sa croix, et qu'il me suive. Car celui qui voudra sauver sa vie la
perdra, mais celui qui la perdra à cause de moi la sauvera. Et que servirait-il à
un homme de gagner tout le monde, s'il se détruisait ou se perdait lui-même ?
Car quiconque aura honte de moi et de mes paroles, le Fils de l'homme aura
honte de lui, quand il viendra dans sa gloire, et dans celle du Père et des saints
anges. » (Luc 9 :23-26)
Pour pouvoir vivre de la gloire de Dieu il faut se charger de sa croix
chaque jour et suivre le chemin que Jésus parcourut : celui de l’abandon
total de sa personne. Dieu n’a pas sauvé l’humanité pour avoir des
serviteurs en plus dans son royaume. Il nous a sauvés parce qu’il était
amour et qu’il voulait partager cet amour. Sans le renoncement à soimême, il est impossible à l’homme de se conformer à l’image par
rapport à laquelle il fut créé. Sans l’abandon de soi, il est impossible de
partager une relation avec Dieu et de vivre par sa gloire et pour sa
gloire :
« Pour ce qui me concerne, loin de moi la pensée de me glorifier d'autre chose
que de la croix de notre Seigneur Jésus Christ, par qui le monde est crucifié pour
moi, comme je le suis pour le monde ! » (Galates 6 :14)
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On meurt tous un jour. La question demeure : allons-nous mourir pour
nous-mêmes, ou à nous-mêmes ?
Bonté et Fidelité
Non seulement Dieu est amour, mais en plus il ne change pas. Cela veut
dire que l’amour que Dieu partage reste toujours le même, peu importe
les circonstances. Ainsi, cet amour révélé à la croix est le même amour
avec lequel Dieu nous aime à chaque instant de chaque jour. Cette
passion, cette intensité, cette gloire qui furent montrées lors de la mort
de Jésus sont les mêmes que celles avec lesquelles ce Dieu souverain
ordonne « que toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de
ceux qui sont appelés selon son dessein » (Romains 8 :28).
Ainsi, chaque instant de chaque jour devient une nouvelle porte vers
l’infinité de Dieu et vers la grandeur de sa gloire, où les choses simples
et faibles de la vie sont de nouvelles occasions pour voir Dieu à l’œuvre.
À chaque instant, l’homme fait face à des circonstances planifiées par la
main de Dieu où celle-ci peut être visible, chacune de ces circonstances
ayant été ordonnée avec le même amour que celui montré à la croix,
avec la même intensité et la même profondeur.
La gloire de Dieu, c’est infini. Chaque moment passé avec elle est
comme une goutte d’eau cachant un océan. Et cette gloire est accessible à
chaque instant, lorsque l’homme s’abandonne à lui-même pour laisser
Dieu agir. La gloire de Dieu est connue de l’homme lorsque celui-ci met
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de côté le roman de sa vie pour laisser Dieu l’écrire. La gloire de Dieu
appartient à Dieu seul. Mais en acceptant d’être dépendant, l’homme
permet à Dieu de faire de lui son ouvrage, et devient ainsi porteur de
cette même gloire.
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