Survenue d`une LA indifférenciée chez une patiente drépanocytaire
Transcription
Survenue d`une LA indifférenciée chez une patiente drépanocytaire
Survenue d’une LA indifférenciée chez une patiente drépanocytaire Galoisy A.(1), Mayeur-Rousse C. (1), Monier L. (1), Eischen A. (1), Schneider P. (1), Gervais C. (1), Gaub MP.(2), Fohrer C.(3), Mauvieux L.(1) (1) Laboratoire d’hématologie (2) Laboratoire de biochimie et de biologie moléculaire (3) Service d’Oncohématologie CHU Hautepierre Strasbourg Introduction : Les leucémies aigues sont peu fréquentes chez les patients drépanocytaires et la plupart sont secondaires au traitement par hydroxyurée. Nous rapportons un cas de LA chez une patiente drépanocytaire n’ayant jamais bénéficié de cette thérapeutique. Observation clinique : Cette patiente de 26 ans, enceinte de 5 semaines, est suivie pour une drépanocytose homozygote avec 3 à 5 crises vasoocclusives par trimestre, uniquement traitées par paracétamol codéiné et acide folique. Lors d’une visite de contrôle, l’hémogramme retrouve une anémie peu régénérative dans le cadre d’une drépanocytose (Hb 7g/dL, réticulocytes 146 G/L) sans autre cytopénie. Le frottis sanguin montre 7% de cellules difficiles à classer : de petite taille, à chromatine fine, au cytoplasme peu basophile présentant une expansion cytoplasmique unique. Un immunophénotypage restreint oriente vers des cellules de nature blastique. Un myélogramme est alors réalisé et objective un envahissement par 40% de blastes peroxydase et estérases négatifs, de phénotype CD45faible, CD34+ cMPO- cCD13+ sCD13+ CD71+ sans autre marqueur spécifique de lignée lymphoïde ou myéloïde. Le diagnostic retenu est donc celui d’une LA indifférenciée. Le caryotype médullaire ne retrouve pas d’anomalie chromosomique et l’analyse par FISH du gène MLL met en évidence 3 copies du gène non réarrangées sur environ 10% des noyaux, d’interprétation délicate en l’absence de métaphase pathologique. La biologie moléculaire retrouve seulement une surexpression du gène WT1. Après une interruption thérapeutique de grossesse, la patiente est traitée par chimiothérapie de type LAM avec double induction et cure de rattrapage devant l’absence de réponse cytologique puis a bénéficié d’une allogreffe de sang de cordon 4/6. Elle est actuellement en rémission et par conséquence également en rémission de sa drépanocytose. Discussion Chez les sujets drépanocytaires, une vingtaine de cas seulement de leucémies aigues ont été rapportées dans la littérature. Environ la moitié de ces leucémies sont lymphoblastiques, touchant essentiellement l’enfant, et sans notion claire d’exposition préalable à l’hydroxyurée. En revanche, deux fois sur trois, les cas de LA myéloblastiques, plus probablement secondaires, surviennent entre 2 et 15 ans après cette exposition. Il s’agit alors le plus souvent de sous types rares de LAM (LAM3v, LAM6) ou de pronostic défavorable. Toutefois, au regard du très faible nombre de cas de leucémies aigues chez les patients drépanocytaires, le risque leucémogène de l’hydroxyurée est sujet à débat. Notre patiente présente non seulement une leucémie aigue sans jamais avoir bénéficié de traitement par hydroxyurée mais une forme rare puisqu’il s’agit d’une LA indifférenciée. Ce cas soulève donc la question de l’association d’événements rares : simple coïncidence ou la drépanocytose prédispose-t-elle à des formes rares d’hémopathies ? Bibliographie Hydroxycarbamide treatment in sickle cell disease: estimates of possible leukaemia risk and of hospitalization survival benefit.Castro O, Nouraie M, Oneal P.Br J Haematol. 2014 Dec;167(5):687-91 Therapy-related acute myelogenous leukemia in a hydroxyurea-treated patient with sickle cell anemia.Taylor JG, Darbari DS, Maric I, McIver Z, Arthur DC.Ann Intern Med. 2011 Nov 15;155(10):722-4 Malignancies in sickle cell disease patients treated with hydroxyurea. Ferster A, Sariban E, Meuleman N; Belgian Registry of Sickle Cell Disease patients treated with Hydroxyurea. Br J Haematol. 2003 Oct;123(2):368-9