la negociation d`une delegation de service public
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la negociation d`une delegation de service public
Cahier n° 52 - Février 2012 - No 254 - www.courrierdesmaires.fr QUESTIONS LA NEGOCIATION D’UNE DELEGATION DE SERVICE PUBLIC LOGO_CDM_50Q.indd 1 4/12/06 15:31:02 De 1 à 10 De 11 à 17 De 18 à 36 De 37 à 44 De 45 à 50 P. III P. VI P. VII P. XII P. XIV PRÉSENTATION DES OFFRES Modalités de sélection, documents et justificatifs… GARANTIES DU CANDIDAT Conditions de financement, fonds propres du candidat… CONDUITE DES NÉGOCIATIONS Confidentialité, modification des offres, indicateurs à privilégier… ASPECTS COMPTABLES Provisions et amortissement. Régime des compensations… CLÔTURE DES NÉGOCIATIONS Règles à respecter pour sécuriser et valider la convention. DE 1 À 10 PRÉSENTATION ET ANALYSE DES OFFRES LA NEGOCIATION D’UNE DELEGATION DE SERVICE PUBLIC Par Christophe Michelet, directeur général, Gaëtan Huet, directeur général adjoint de Partenaires Finances Locales, et Sophie Garnier, avocate, Sphère Publique. La collectivité dispose d’une grande liberté de manœuvre dans la phase de négociation d’une délégation de service public (DSP). Cependant, si le juge exerce un contrôle minimum sur le choix du délégataire, il exerce son contrôle normal sur le respect de la procédure et en particulier sur le respect du principe de transparence et d’égalité de traitement des candidats. La collectivité délégante doit donc respecter des règles strictes dans la phase de négociation avec les entreprises qui ont déposé une offre. Elle doit dresser la liste des candidats admis à présenter une offre après examen de leurs garanties professionnelles, financières, de leur aptitude à assurer la continuité du service public et l’égalité des usagers devant le service public. 1 2 La collectivité doit-elle publier les critères de jugement des offres ? La personne publique doit-elle pondérer ou hiérarchiser ses critères ? Oui. Pour assurer le respect des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, la personne publique doit apporter aux candidats à l’attribution d’une délégation de service public, avant le dépôt de leurs offres, une information sur les critères de sélection des offres (CE 23 déc. 2009, Etab. publ. du musée et du domaine national de Versailles, n° 328827). Cette règle s’impose à l’ensemble des délégations de service public, qu’elles entrent ou non dans le champ du droit communautaire. Cette information doit être donnée au plus tard au moment de l’envoi aux candidats du dossier de consultation présentant les caractéristiques des prestations attendues. Le modèle d’avis du Journal officiel de l’Union européenne (JOUE) pour les concessions de travaux publics, soumises aux règles de publicité communautaires, impose toutefois de renseigner la rubrique relative aux critères d’attribution. Non. S’il est impératif d’indiquer les critères de jugement des offres, il n’est pas obligatoire de pondérer ou de hiérarchiser ces critères. Le Conseil d’Etat considère que la personne publique n’est pas tenue d’informer les candidats des modalités de mise en œuvre de ces critères (CE 23 déc. 2009, Etablissement public du musée et du domaine national de Versailles, n° 328827). Le principe reste celui de la liberté de choix de la personne publique. Le Conseil d’Etat rappelle qu’aux termes des dispositions de la loi du 29 janvier 1993, la personne publique négocie librement les offres avant de choisir, au terme de cette négociation, le délégataire. Ce choix est effectué au regard d’une appréciation globale des critères, sans être contrainte par des modalités de mise en œuvre préalablement déterminées. Cet affichage des critères de sélection des offres facilite le contrôle par le juge de l’éventuelle erreur manifeste d’appréciation quant au choix du candidat retenu au terme de la procédure. A NOTER Les critères publiés ne peuvent être modifiés par la collectivité dans la suite de la procédure. Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● III DE 1 À 10 PRÉSENTATION ET ANALYSE DES OFFRES 3 Commission A la suite de l’ouverture des offres remises, la commission procède à un examen des offres destiné à formuler un avis au vu duquel l’exécutif engagera toutes négociations utiles. Précisions utiles Au minimum, les candidats doivent remettre le compte prévisionnel d’exploitation sur la durée du contrat et le plan de financement du candidat. Idéalement, ce socle de base sera complété par le bilan et, pour les concessions, par le plan d’amortissement, le programme d’équipement ainsi que le programme de maintenance, d’entretien et de renouvellement. IV 4 Qui est compétent pour l’ouverture des plis ? La commission peut-elle auditionner des candidats ? Les plis contenant les candidatures et ceux contenant les offres sont ouverts par la commission visée à l’article L.1411-5 du CGCT. Cette commission est composée du président et de cinq membres de l’assemblée délibérante élus à la représentation proportionnelle au plus fort reste (trois s’il s’agit d’une commune de moins de 3 500 habitants). Les suppléants sont élus en nombre égal à celui des membres titulaires. Le comptable de la collectivité et un représentant de la concurrence siègent à la commission avec voix consultative. Des agents de la collectivité peuvent, enfin, être désignés par le président de la commission en raison de leurs compétences, pour y participer, avec voix consultative. La commission dresse la liste des candidats admis à présenter une offre, après examen de leurs garanties professionnelles et financières, de leur respect de l’obligation d’emploi des travailleurs et de leur aptitude à assurer la continuité du service public et l’égalité des usagers devant le service public. L’organisation d’auditions des candidats par la commission de délégation de service public n’est pas expressément prévue dans le cadre de la procédure de délégation de service public, ni exclue non plus. Toutefois, afin de ne pas créer de confusion sur la procédure organisée et se distinguer des négociations qui seront engagées sous l’autorité de l’exécutif, les auditions devront se tenir entre la réunion de la commission de délégation de service public d’ouverture des plis contenant les offres et la réunion de la commission portant examen des offres et au cours de laquelle elle rendra son avis. En tout état de cause, ces auditions n’auront pour objet que de poser aux candidats les questions qui s’avéreraient nécessaires pour la bonne compréhension de leur offre. 5 6 A NOTER Ces auditions devront se dérouler dans des conditions qui garantiront le respect du principe d’égalité de traitement des candidats ayant remis une offre. Elles ne devront donner lieu à aucun début de négociation. Le délai de convocation sera, en conséquence, identique pour tous les candidats et la convocation mentionnera le déroulement des auditions. Quelle est la nature de l’avis rendu par la commission sur les offres ? Peut-on imposer un format type de comptes prévisionnels au candidat ? La commission exerce ici une compétence consultative en délivrant à l’autorité exécutive un avis sur les offres remises sous la forme d’un rapport. Cet avis doit être motivé au regard des critères de jugement des offres, et ce de façon suffisante pour l’information du représentant de l’autorité exécutive et de l’assemblée délibérante à laquelle il devra être communiqué. Cet avis ne lie toutefois pas l’autorité habilitée à engager les négociations qu’est l’exécutif de la collectivité. Un rapport doit être établi pour retracer les travaux d’examen, par la commission de délégation de service public, des offres, qui ressortent de sa seule compétence. Il s’agit là, pour la commission, de recenser et d’analyser les offres, afin d’informer l’autorité compétente de leurs qualités et points faibles, et d’émettre en conséquence un avis. Le rapport de la commission de délégation de service public est annexé au procès-verbal de cette commission, auquel il se rattache, et dont il fera partie intégrante. Le procès-verbal, signé par l’ensemble des membres de la commission présents lors de la séance considérée, fera état de ce rapport. Oui. Pour que les offres des candidats soient comparables, il est indispensable de fournir un cadre financier type au stade du dossier de consultation. En effet, les candidats vont appréhender le besoin de la collectivité en fonction de leur savoir-faire et de leurs contraintes de financement. Indépendamment de la problématique de l’exhaustivité des informations, les comptes prévisionnels devront permettre de traiter les offres des candidats sous la forme d’une matrice commune. Les comptes prévisionnels seront adaptés au projet et joints au dossier de consultation des entreprises. Ils exigeront un niveau d’informations incompressibles. Les candidats seront invités à dépasser ce cadre de réponse minimum en apportant toutes les précisions utiles à la bonne compréhension de leurs offres. A NOTER A l’issue de la consultation, les comptes prévisionnels ont vocation à intégrer les annexes du contrat et permettront à la collectivité territoriale d’exercer son rôle de contrôle. Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● DE 1 À 10 PRÉSENTATION ET ANALYSE DES OFFRES 7 Quels sont les états financiers et les justificatifs à demander à l’appui des candidatures ? Les justificatifs à demander au stade des candidatures visent à appréhender la capacité financière des candidats au regard de la nature et de l’étendue du projet. Ainsi il convient de demander au minimum, le chiffre d’affaires global et celui portant sur un objet similaire à la consultation. Les comptes annuels et/ou liasses fiscales complètes permettent de mieux saisir la réalité de la situation financière du candidat et de se livrer à une première analyse de ses capacités. A cet égard l’analyse du bilan et plus particulièrement du haut de bilan s’avère nécessaire à la parfaite mesure de la solvabilité du candidat. 9 Peut-on exiger la création d’une société dédiée ? Oui. La création d’une société dédiée est souhaitable dans la mesure où elle apporte plus de transparence au projet. En effet, les comptes d’une société dédiée (bilan, compte de résultat) retracent l’intégralité des flux financiers en dépenses et recettes de la DSP. Le contrôle exercé par la collectivité territoriale est donc facilité avec un montage de ce type, surtout en ce qui concerne les modalités de financement, le niveau des dépenses et la rémunération du délégataire. Une société dédiée permet également de mieux identifier les flux financiers avec la maison mère et notamment les frais de structure qui devront faire l’objet d’une facturation identifiable dans les comptes de la société dédiée. Attention cependant, la création d’une société dédiée a un coût pour le titulaire d’une DSP (frais d’immatriculation, frais comptable…). La mise en place d’une comptabilité par établissement au sein du délégataire sera par conséquent à privilégier dans le cadre de projets financièrement modestes afin de ne pas enchérir son coût. Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● 8 Doit-on raisonner en euros constants ou courants ? Suivant la nature de l’activité concernée, les candidats vont intégrer ou non l’inflation sur les charges et produits et éventuellement d’autres formes d’indexation. Or, pour pouvoir comparer les offres et mesurer les différences réellement liées au contenu de chaque offre il est nécessaire de raisonner à partir d’un référentiel commun. Dans le cas contraire, la collectivité territoriale risque d’exposer son analyse à des biais techniques (un candidat n’inflatant pas ses charges pourra apparaître globalement plus compétitif). C’est la raison pour laquelle il convient de raisonner en euros constants ou d’imposer aux candidats une inflation dans le cas d’offre en euros courants. Pour éviter toute confusion, la collectivité doit préciser dans la consultation le mode d’affichage souhaité et vérifier lors de l’analyse des offres que les candidats s’y sont conformés. Cette exigence ne porte bien sûr que sur les valeurs unitaires, les variations liées au volume d’activité devant elles apparaître dans les comptes (par exemple si les services fournis s’accroissent, il est normal que les produits et les charges varient en conséquence). 10 Peut-on mesurer la performance de l’offre à la lecture des dépenses et des recettes lors de la 1re année d’exploitation ? Non. La performance d’une offre ne peut s’apprécier que sur l’intégralité du contrat. L’offre d’un candidat repose sur un objectif de rentabilité couvrant toute la durée projet. Cette rentabilité n’est pas linéaire. Les premières années d’un contrat de DSP sont en règle générale les années les moins rentables pour son titulaire, notamment lorsqu’il est amené à supporter des investissements. De plus, le cycle d’exploitation se base souvent sur une fréquentation croissante. A l’inverse, sur les dernières années, il est fréquent de constater l’apparition de profits plus importants. Toute la difficulté pour la collectivité réside dans la comparaison des différents flux financiers dans le temps. C’est la raison pour laquelle seule l’actualisation des flux financiers est indispensable pour comparer les offres entre elles. Actualisation La collectivité locale devra donc calculer une valeur actuelle nette (VAN) à partir d’un taux d’actualisation commun à toutes les offres. Ce taux d’actualisation doit refléter le coût de financement pour la collectivité sur la durée du contrat envisagé. V DE 11 À 17 GARANTIES FINANCIÈRES DU CANDIDAT 11 Les candidats doivent-ils tous proposer le même mode de financement ? Collectivitésbanquiers La rencontre avec le banquier ne doit pas conduire la collectivité à se substituer au candidat dans sa négociation avec le banquier : le financement du candidat reste une des composantes essentielles de son offre, sur laquelle il doit s’engager, afin de permettre à la collectivité de faire son choix en parfaite connaissance de cause. Cession de créance La cession de créance va modifier le rapport des forces entre la collectivité locale et le délégataire, en introduisant un lien financier direct entre la collectivité et la banque. En acceptant une cession de créance une collectivité accepte de faire face au versement des remboursements d’emprunt, quel que soit le devenir du contrat de DSP. Autrement dit, la mise en place d’une cession de créance transfère une partie du risque financier auquel est exposé le délégataire sur la collectivité territoriale. VI Non. Les candidats vont bâtir leur offre en fonction de leur savoir-faire technique et financier mais également en fonction de leurs ressources financières. C’est l’un des intérêts du recours à des modes de financement externe pour une collectivité territoriale. Ainsi au cours d’une même procédure, une collectivité locale pourra se retrouver confrontée à un candidat proposant de réaliser les investissements sous la forme d’un crédit-bail alors qu’un second envisage le financement par un crédit bancaire classique. L’ingénierie financière des délégataires est en constante évolution. La collectivité devra chercher à profiter de cette ingénierie financière afin de baisser le coût global du projet. A NOTER La collectivité devra veiller à ne pas brider la créativité des candidats, tout en veillant bien sûr à s’assurer de la crédibilité du financement proposé. Le dossier de consultation des entreprises devra laisser des portes ouvertes en matière de mode de financement. 13 La collectivité peut-elle rencontrer les établissements bancaires ? Si la collectivité souhaite s’assurer des conditions de financements bancaires des candidats, elle peut leur demander de rencontrer les établissements bancaires, afin de s’assurer de leur engagement et de vérifier les conditions proposées aux candidats. Mais en DSP, contrairement au contrat de partenariat, le banquier n’est pas systématiquement associé aux négociations et surtout il n’est pas partie au contrat de DSP. Pour autant, la rencontre de la collectivité avec les banquiers peut permettre de rassurer ces derniers en explicitant le projet et les objectifs de la collectivité. Dans la mesure où le financement est d’abord construit entre l’établissement bancaire et le candidat, celui-ci peut être tenté d’enjoliver ses prévisions afin de diminuer l’appréhension du risque par le banquier ou à l’inverse dégrader ses prévisions pour se couvrir. Une rencontre entre la collectivité et le banquier peut permettre à celui-ci de mieux appréhender le risque et donc adapter en conséquence ses conditions de financement. 12 La collectivité peut-elle intervenir sur les conditions de financement bancaires du candidat ? Les candidats font en principe leur affaire de leurs conditions de financement, qui sont un élément de leur offre. Mais dans la mesure où ces conditions ont un impact sur l’équilibre financier de la DSP et notamment sur les tarifs pratiqués et/ou les subventions sollicitées, la collectivité peut avoir intérêt à demander une amélioration des conditions de financement des candidats. Toutes choses égales par ailleurs, un candidat disposant de meilleures conditions de financement présentera une offre financièrement plus compétitive. Une collectivité a donc tout intérêt à indiquer à un candidat en cours de procédure que ses conditions sont au-dessus de celles pratiquées par le marché et qu’il doit revoir son montage financier. Les conditions de financement bancaires ne concernent pas uniquement les marges bancaires en période de financement. Tous les éléments constitutifs de l’offre sont négociables : périodicité des taux, taux de financement, commissions bancaires et autres frais de dossiers. 14 Dans quels cas la mise en place d’une cession de créance est-elle possible ? Une cession de créance n’est possible qu’à partir du moment où le délégataire dispose de recettes en provenance de la collectivité territoriale : compensations, subventions… La mise en place d’une cession de créance a pour objectif de diminuer le coût de financement d’un candidat à une DSP en transférant la nature du risque de contrepartie. En effet, pour les établissements bancaires, le financement d’un candidat à DSP s’apparente au financement d’un projet industriel, avec les risques associés. L’acceptation et la notification d’une cession de créance par une collectivité locale permettent de transformer au moins en partie un risque de financement industriel privé en « risque public ». L’un des enjeux de la négociation devient dès lors d’obtenir une baisse du coût de financement suffisant au regard de l’engagement pris par la collectivité. Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● DE 18 À 36 ENGAGEMENT ET CONDUITE DES NÉGOCIATIONS 15 16 Qu’est-ce qu’un financement « corporate » ? Le recours au compte courant d’associé permet-il d’optimiser les conditions de financement du candidat ? Il s’agit d’un financement apporté par la maison mère ou le groupe auquel appartient le candidat, en substitution ou en complément d’un financement bancaire. Il se traduit en général par des apports en compte courant d’associés, au profit du délégataire, qui sont régis par une convention définissant les conditions de financement : montant, durée, taux, possibilité de retrait/ remboursement. En pratique la notion de financement « corporate » recouvre des réalités diverses : simple apport en compte courant par la société mère de la société dédiée, mais aussi parfois financement via des structures ad hoc au sein des groupes, qui peuvent combiner ressources du groupe et ressources externes, via par exemple des fonds d’investissement. Aujourd’hui, la plupart des dispositifs ont pour objectif d’éviter une consolidation de la dette finançant la DSP. Oui. Le candidat va devoir mobiliser des ressources financières pour réaliser le projet, soit interne, donc provenant de ses actionnaires ou de son activité, soit externe principalement auprès des banques. Le problème est que les fonds apportés par les actionnaires sont coûteux à rémunérer et que le financement bancaire peut être contraignant pour le candidat. C’est la raison pour laquelle certains candidats préfèrent recourir aux avances en comptes courants associés, également appelés financement « corporate ». Cette technique s’apparente à un prêt des actionnaires au projet, prêt rémunéré à des conditions très inférieures à celles des fonds propres et parfois aux taux des banques, avec beaucoup plus de souplesse. A NOTER La collectivité doit s’assurer que ces montages parfois complexes ne fragilisent pas le financement, même s’ils sont en apparence compétitifs. A NOTER Si les avances en compte courant d’associé permettent de faire diminuer le coût moyen pondéré du capital mobilisé par le candidat, il est essentiel pour la collectivité de vérifier les conditions précises de mise à disposition et retrait des fonds, afin d’assurer la pérennité du financement de la DSP. 17 18 A-t-on le droit de demander le maintien des fonds propres pendant toute la durée du contrat ? Oui. Lorsque le titulaire d’un contrat de DSP s’est engagé à mettre en place une société dédiée au projet, il est primordial de veiller à la capitalisation de la structure ainsi créée. Il convient au minimum de s’assurer que le montant des fonds propres de la société sera maintenu pendant les premières années, au moins jusqu’à la réalisation des investissements dans le cadre d’une concession. En effet, pour ne pas fragiliser le projet en phase de construction, il convient d’être particulièrement vigilant au rapport des fonds propres sur les dettes. En phase d’exploitation, le besoin en fonds propres apparaît plus limité. Mais ces derniers doivent rester en adéquation avec la nature de l’activité et les besoins de financement du service public. Il est donc important d’obtenir du titulaire un engagement à maintenir un niveau de fonds propres suffisant sur la durée du contrat. Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● Quels sont les principes qui gouvernent la négociation ? En matière de délégation et de service public, le principe est le libre choix du délégataire de service public. Cette liberté s’exprime particulièrement dans la phase de négociation laissée à la charge de l’exécutif de la collectivité. Cette liberté est toutefois encadrée par les principes généraux du droit de la commande publique. Ces principes sont la liberté d’accès à la commande publique, l’égalité de traitement des candidats dans toutes les phases de la procédure, du recueil des candidatures et des offres jusqu’au terme des négociations, et la transparence des procédures de mise en concurrence et de publicité. En outre, si la collectivité fixe des règles supplémentaires prédéfinies d’organisation de sa procédure, elle doit les respecter tout au long du déroulement de ladite procédure. Engagement Cet engagement s’impose en particulier en cas de financement « corporate » où la totalité ou quasi-totalité du financement est apportée par la maison mère. L’objectif étant d’éviter que celle-ci ne retire trop tôt la quasi-intégralité de ses fonds propres une fois l’équipement achevé, fragilisant financièrement la société dédiée. VII DE 18 À 36 ENGAGEMENT ET CONDUITE DES NÉGOCIATIONS 19 L’autorité délégante doit-elle engager les négociations avec tous les candidats ayant remis une offre ? Aux termes de l’article L.1411-5 du CGCT, « au vu de l’avis de la commission, l’autorité habilitée à signer la convention engage librement toute discussion utile avec une ou des entreprises ayant présenté une offre ». En matière de délégation et de service public, le principe est le libre choix par l’exécutif de la ou des entreprises avec qui entrer en négociation. Il n’est pas tenu de suivre l’avis émis par la commission. L’obligation d’informer les candidats des critères de jugement de leurs offres est toutefois de nature à permettre au juge d’exercer un contrôle de l’erreur manifeste sur le choix de l’exécutif de ne négocier qu’avec un seul ou une partie des candidats ayant déposé une offre dans le délai imparti. Les négociations doivent être réellement engagées avec chacune des entreprises choisies par l’exécutif de sorte qu’elles puissent chercher à améliorer leur offre. 21 VIII 20 Qui peut participer aux négociations ? Les négociations doivent être menées avec les candidats par l’autorité habilitée à signer la convention, soit le représentant de l’exécutif. Le rôle de la commission de délégation de service public se termine lorsqu’elle rend son avis au représentant de la collectivité en vue de l’engagement des négociations. La compétence du représentant de l’exécutif de la collectivité pour négocier n’interdit pas que d’autres personnes puissent assister aux réunions de négociations. L’autorité responsable de la personne publique délégante peut ainsi s’adjoindre, pendant la négociation, les conseils de personnalités qualifiées, sur le plan technique, économique, financier ou juridique. De même, rien ne s’oppose à ce qu’un autre membre de l’assemblée délibérante puisse suivre cette négociation, sans avoir reçu nécessairement délégation du représentant de l’exécutif, à condition, toutefois que cet élu ne prenne ni ne signe de décision relevant du représentant de l’exécutif (CAA Bordeaux, 18 mars 2003, SA Groupe Partouche, n° 99BX02772). 22 Le secret des offres des candidats doit-il être protégé en cours de négociation ? Quelles sont les marges de négociation de la collectivité ? Oui. Le respect du secret des offres ainsi que celui de la confidentialité de la procédure conduisent à la plus grande prudence dans la transmission des informations relatives à la procédure en cours. Ainsi, le secret des offres et la confidentialité de la procédure en cours doivent permettre de garantir le droit de propriété des candidats sur les offres qu’ils ont remises, ainsi que la concurrence effective entre les entreprises tout au long de la procédure (il s’agit notamment d’éviter la constitution d’ententes entre les entreprises). Il a ainsi été jugé que la transmission à un des candidats d’un compte rendu de réunion présentant les principales caractéristiques des offres des deux candidats, notamment les prix proposés par ces derniers, constituait un manquement au principe de confidentialité. La transmission de ce document, eu égard à son contenu, était susceptible d’avoir lésé l’autre candidat en permettant à son concurrent d’améliorer son offre (CE 14 décembre 2009, Société Lyonnaise des Eaux France, n° 328157). L’objet même d’une procédure de négociation est de permettre à la collectivité de faire évoluer la ou les offres dans un sens favorable à ses intérêts. La jurisprudence admet que les offres peuvent être modifiées pour satisfaire aux exigences posées par le règlement de la consultation (CE, 14 mars 2003, Sté Air Lib et autres, n° 251610). Une entreprise peut ainsi faire évoluer substantiellement certains aspects de son offre pendant la négociation (CE 9 août 2006, Compagnie générale des eaux, n° 286107). La personne responsable de la passation du contrat de délégation de service public peut apporter, au cours des négociations, des adaptations à l’objet du contrat qu’elle envisage de conclure lorsque ces adaptations sont d’une portée limitée, justifiées par l’intérêt du service et qu’elles ne présentent pas entre les entreprises concurrentes, un caractère discriminatoire (CE, 21 juin 2000, Syndicat intercommunal de la Côte d’Amour, n° 209319). Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● DE 18 À 36 ENGAGEMENT ET CONDUITE DES NÉGOCIATIONS 23 Les candidats peuvent-ils modifier leur offre en cours de négociation ? L’objet même d’une procédure de négociation est de faire évoluer la ou les offres dans un sens favorable aux intérêts de la collectivité. Cette marge de négociation est encadrée par les principes d’égalité de traitement des candidats et de transparence de la procédure. Le Conseil d’Etat considère que les offres peuvent être modifiées pour satisfaire aux exigences posées par le dossier de consultation. Ainsi, le Conseil d’Etat a jugé que si certaines offres ne correspondaient pas exactement aux exigences de service public énoncées dans le document présentant les caractéristiques des prestations attendues, la collectivité délégante pouvait, sans manquer aux obligations de mise en concurrence qui lui incombaient, dans le cadre des discussions engagées sur le fondement de l’article L.1411-5 du CGCT, demander aux candidats de modifier leur offre afin qu’elle satisfasse à ces exigences (CE 14 mars 2003, société Air Lib, n° 251610). 25 24 Quelle est la durée minimale d’une négociation ? L’article L.1411-7 du CGCT impose un délai de deux mois au moins entre la saisine de la commission et de l’assemblée délibérante se prononçant sur le choix du délégataire, et le contrat de délégation. Ce délai commence à courir de la saisine de la commission qui est la date limite de réception des plis contenant les offres des candidats, telle que fixée dans le règlement de la consultation. Le point de départ de ce délai n’est donc pas la date de la séance de la commission d’ouverture des plis contenant les offres si celle-ci est postérieure à la date limite de leur réception, ni celle à laquelle cette commission donne son avis sur le ou les candidats avec lesquels la discussion doit s’engager (CE avis n° 297846 du 15 décembre 2006). A NOTER Le Conseil d’Etat a admis que si la collectivité publique n’est pas en mesure de procéder à la sélection des offres dans le délai requis, elle peut en demander la prorogation (CE, 13 décembre 1996, Synd. intercommunal pour revalorisation déchets secteur Cannes-Grasse : Rec. CE, p. 488 ; RFDA 1997, p. 192). 26 Des règles s’imposent-elles dans la conduite de la négociation ? Faut-il informer les candidats écartés de la négociation ? Le principe est celui de la liberté d’engager toutes discussions utiles avec les candidats. Aucune règle n’encadre les modalités de l’organisation des négociations par la personne publique (CE 18 juin 2010, Communauté Urbaine de Strasbourg, req. n° 336120). L’autorité délégante n’est ainsi pas tenue de fixer un calendrier préalable de négociation. Elle peut mettre en place la méthodologie qui lui paraît appropriée, dès lors que les principes généraux du droit de la commande publique, que sont la liberté d’accès à la commande publique, l’égalité de traitement des candidats et la transparence des procédures de mise en concurrence, sont respectés. Ainsi, le respect du principe d’égalité entre les candidats exige que, lorsque la collectivité délégante impartit un délai aux candidats de remise de nouvelles offres, ce délai soit suffisant, compte tenu de l’état d’avancement des négociations pour permettre aux entreprises de présenter leurs offres. Le Conseil d’Etat a confirmé que l’autorité délégante n’est pas obligée de faire connaître son choix de ne pas poursuivre les négociations avec l’un ou l’autre des candidats et peut tenir des réunions avec un seul candidat en vue de finaliser son offre. La collectivité ne manque pas à ses obligations de mise en concurrence en n’informant pas les autres candidats du rejet de leur proposition dès le choix du délégataire. Aucun texte, ni aucun principe n’oblige en effet la collectivité délégante à informer, préalablement à la délibération approuvant le choix du candidat retenu et la convention de délégation de service public, de la décision de ne pas retenir son offre, ni des motifs de ce rejet (CE 18 juin 2010, Communauté Urbaine de Strasbourg, req. n° 336120). Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● A NOTER Le juge administratif considère que cette absence d’information ne prive pas les candidats, dont l’offre n’a pas été retenue, du droit de pouvoir contester efficacement leur éviction auprès du juge des référés précontractuels. Faire évoluer l’offre Le Conseil d’Etat a également confirmé qu’une entreprise pouvait modifier substantiellement certains aspects de son offre, notamment une forte baisse du prix proposé, pendant la négociation sans que cela soit considéré comme irrégulier (CE 9 août 2006, Compagnie générale des eaux, n° 286107). Prorogation Dans un récent arrêt (CE 24 juin 2011, Cne de Bourgoin-Jallieu, req. n° 012207), le Conseil d’Etat considère que l’accord des entreprises en vue de la prorogation du délai de validité des offres peut être implicite et « résulter notamment, selon les circonstances de l’espèce, de la poursuite par les candidats des négociations avec l’autorité délégante ». L’arrêt précise toutefois que la collectivité est tenue de fixer un nouveau délai de validité des offres. Délai L’objectif de ce délai est de garantir l’efficacité de la négociation engagée avec les candidats ayant déposé une offre et choisis par l’exécutif. Il s’agit d’un minimum, pour lequel le CGCT ne prévoit pas d’exception. Le code ne fixe pas non plus de durée maximale. IX DE 18 À 36 ENGAGEMENT ET CONDUITE DES NÉGOCIATIONS 27 Peut-on allonger la durée prévisionnelle du contrat en cours de négociation ? Rentabilité Dans tous les cas la rentabilité pour le délégataire doit s’appréhender sur la durée globale de la DSP, notamment en concession où la rentabilité ne se dégage qu’à long terme. Non. Les offres des candidats sont bâties en fonction du programme de la consultation. En l’absence de variantes clairement formulées dans le programme de la consultation, la durée prévisionnelle doit demeurer inchangée en cours de procédures. Par ailleurs, l’allongement de la durée permettrait certes de diminuer le coût annuel du contrat mais pas le coût global. 29 Peut-on plafonner le niveau de rentabilité du candidat ? Le délégataire exploite et le cas échéant (concession) réalise les investissements à ses risques et périls. Sa rentabilité peut donc varier au cours de la DSP, à la baisse ou à la hausse. Si la rentabilité est inférieure aux prévisions, cela fait partie du risque du délégataire et, symétriquement, il peut bénéficier d’une hausse. Mais il est possible de définir dans le contrat un plafond, au-delà duquel le délégataire doit « partager » le bonus avec la collectivité. Ce « retour à meilleure fortune » consiste à introduire une clause de « partage » ou d’intéressement de la collectivité à des résultats supplémentaires, notamment, afin de s’assurer d’une absence de surcompensation en cas de subvention ou d’augmenter la redevance versée en contrepartie de la remise d’ouvrages par la collectivité au délégataire. Il s’agit de prévoir un seuil de résultats ou de rentabilité à partir duquel les excédents sont partagés avec la collectivité : par exemple si le taux de rentabilité interne supérieur de 2 points à la prévision, x % des résultats supplémentaires au-delà de ce seuil sont reversés à la collectivité. X 28 Quels sont les indicateurs financiers à privilégier pour mesurer la rentabilité du candidat ? Deux ratios permettent d’appréhender rapidement la rentabilité des délégataires : – dans le cadre d’une concession, la rentabilité du contrat pour les candidats s’appréciera sur la base de son taux de rendement interne (TRI). C’est l’indicateur fixant la décision d’investissement pour une entreprise. Une entreprise décidera d’investir dans un projet si et seulement si le TRI dégagé par le projet est supérieur à son coût moyen pondéré du capital mobilisé, augmenté de la valorisation des risques. Le TRI peut être assimilé à un taux de placement des fonds propres de l’entreprise. Schématiquement, le TRI compare les flux sortant pour le délégataire (investissements initiaux et de renouvellement) et les cash-flows dégagés par l’exploitation ; – dans le cadre d’un affermage, la rentabilité commerciale (résultat net sur les produits d’exploitation) sera à privilégier, faute d’investissement. 30 Peut-on négocier la rémunération des actionnaires ? Oui, au même titre que les postes de dépenses. Le niveau de la rémunération de l’actionnaire dicte en partie les conditions financières d’une offre de DSP. Celle-ci doit rester cohérente avec le montant des capitaux investis, le niveau des investissements, la durée du contrat et le risque supporté. La principale difficulté est d’identifier la rémunération réelle du candidat : au-delà de la rentabilité affichée, des marges peuvent être masquées dans les charges d’exploitation ou dans les investissements réalisés. Une véritable négociation doit reposer, avec l’appui des techniciens compétents, sur une analyse complète des postes de coûts des candidats, afin de s’assurer qu’ils ne bénéficieront pas d’une rémunération exagérée. Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● DE 18 À 36 ENGAGEMENT ET CONDUITE DES NÉGOCIATIONS 31 Peut-on fixer un niveau maximum de frais de structure ? Oui. En principe les frais de structure recouvrent les frais de sièges et fonctions support assurées par la maison mère du candidat : comptabilité, frais de gestion… La collectivité peut et doit exiger des candidats le détail de ces charges… Très souvent, les candidats sont dans l’incapacité de justifier avec précision les frais de structure et préfèrent les fixer en fonction d’un pourcentage des produits d’exploitation. Un niveau de 5 % doit alors être considéré comme un maximum. Mais il arrive aussi souvent que d’autres flux financiers apparaissent, lorsque in fine c’est la maison mère qui assure aussi une partie de l’exploitation et/ou qui réalise les investissements. Dans ce cas, il convient de bien identifier ce qui est directement assuré par la société dédiée et ce qui relève d’une refacturation de la société mère, souvent plus difficile à contrôler. 33 32 Doit-on vérifier les coûts affichés par les candidats et demander un niveau maximum de charges sur un poste ? Il est impératif pour la collectivité de bien appréhender la structure économique et financière des offres et d’en analyser toutes les composantes, en s’entourant des techniciens du domaine concerné. Schématiquement, tout poste de coût surévalué se traduit par un surcoût pour l’usager et/ou pour la collectivité si elle subventionne la DSP. Dans le cadre d’une véritable discussion sur les coûts, une collectivité peut tout à fait demander aux candidats de limiter tel ou tel poste de charges si elle estime que cela ne reflète pas la réalité, le candidat devant apporter la justification de sa propre estimation. L’enjeu est d’amener chaque candidat à expliciter et justifier ses postes de coûts, pour que la collectivité puisse opérer son choix en connaissance de cause et retenir le candidat qui présente le juste prix par rapport aux prestations fournies. 34 Quel est le bon indicateur pour positionner une redevance variable ? Quelles compensations financières la collectivité peut-elle verser ? Plusieurs indicateurs peuvent être retenus pour fixer une redevance variable. Le chiffre d’affaires sera le niveau le plus favorable à la collectivité. Ainsi, toute hausse des recettes se traduira par une hausse de la redevance. Or, toute recette supplémentaire ne dégage pas nécessairement une rentabilité supérieure pour le délégataire. D’où le recours de plus en plus courant à l’excédent brut d’exploitation comme indicateur, soit la différence entre les produits et les charges réelles d’exploitation (hors dotations aux amortissements). A contrario, le résultat net, qui retrace le profit du délégataire est soumis à trop de décisions de gestion (frais financiers, amortissements) et il est insuffisamment réactif pour constituer un indicateur pertinent. On distingue deux grandes catégories de compensations : – celles destinées à financer les investissements ou équipements : travaux, acquisition de matériels… ; – celles destinées à financer l’exploitation, celleci n’étant pas équilibrée par les recettes perçues auprès des usagers. Le type de compensation et son importance dépendent surtout du modèle économique des activités concernées : beaucoup d’entre elles ne génèrent pas suffisamment de recettes d’exploitation (soit que les usagers ne sont pas solvables, soit que la collectivité souhaite maintenir des tarifs faibles) et nécessitent donc une compensation en exploitation. Les activités nécessitant des investissements très lourds (grands équipements, réseaux…) nécessitent plutôt des subventions d’investissement, qui doivent parfois être complétées par des compensations en exploitation. A NOTER La collectivité doit s’assurer qu’une redevance variable, moins sécurisante qu’une redevance fixe, sera suffisamment corrélée à l’accroissement de l’activité. Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● Compensations Dans le cas d’investissements lourds, il est nécessaire pour la collectivité de bien arbitrer entre les deux options de compensation, afin d’optimiser le coût net pour elle, dans le respect des règles de droit français et de droit communautaire, générales et propres au secteur considéré. XI DE 37 À 44 ASPECTS COMPTABLES ET FISCAUX 35 Comment comparer la performance financière des offres entre elles ? Peut-on négocier un contrat sur la base d’une approche de benchmark ? L’actualisation financière est l’un des outils indispensables pour négocier une délégation de service public. Ainsi, seul un calcul de valeur actuelle nette (VAN) permettra de départager financièrement les offres entre elles. L’actualisation financière permet de prendre en compte la dimension temporelle des flux de dépenses et de recettes. Dans un premier temps, il est nécessaire de positionner dans le temps – année après année – les différents flux de dépenses pour la collectivité (subventions, compensations…) et de recettes (redevances de contrôle, intéressement…). Puis, ces flux seront financièrement actualisés en utilisant le taux de financement de la collectivité sur une durée de vie identique à celle du contrat. La valeur nette comptable des biens à reprendre à la fin de contrat doit également intégrer le calcul. L’offre affichant la VAN la plus élevée sera la plus performante. Non. Si les études comparatives sont nécessaires pour positionner son projet par rapport à des projets similaires, une négociation financière conduite sur la base d’une approche de benchmark (prix à la tonne par exemple) ne peut être considérée comme optimale. Chaque projet doit être appréhendé selon ses propres caractéristiques. Les approches de type benchmark ne font qu’institutionnaliser des éléments de coût (frais de structure, conditions de financement), n’incitent pas les candidats à faire preuve d’innovation et, de ce fait, cristallisent les profits des délégataires. Chaque projet a un juste prix, intégrant la notion de risque, et la négociation d’un contrat de délégation de service public visera à le déterminer. 37 38 Le candidat doit-il amortir obligatoirement sur la durée du contrat ? Qu’est-ce qu’un amortissement de caducité ? La règle est que la durée du contrat ne peut dépasser la durée normale d’amortissement des installations mises à la charge du délégataire. Si la durée du contrat correspond à la durée normale d’amortissement des biens, ceux-ci peuvent normalement être amortis sur la durée du contrat. Dans certains cas, la durée du contrat est inférieure à la durée normale d’amortissement des biens. Cela conduit soit à ne pas amortir la totalité des biens, et donc à une valeur résiduelle en fin de contrat ; soit à l’application d’amortissements de caducité (lire le point suivant) par le délégataire. Dans le cas où la durée normale d’amortissement des biens excède la durée du contrat, le délégataire peut ou doit pratiquer un amortissement complémentaire, lui permettant d’amortir totalement les biens sur la durée du contrat. C’est ce que l’on appelle un amortissement de caducité. En principe, l’amortissement de caducité doit être identifié en tant que tel dans les comptes du délégataire, mais il arrive, si cela reste conforme aux normes comptables, que les candidats calent directement la durée d’amortissement des biens sur celle du contrat et ne pratiquent donc pas en tant que tel l’amortissement de caducité. Avec in fine un résultat identique soit une valeur nette comptable nulle en fin de contrat. A NOTER La collectivité doit bien appréhender ce paramètre et ses conséquences financières avant de fixer la durée du contrat, en particulier lorsque le délégataire doit réaliser des investissements importants (concession), dont l’amortissement aura une incidence forte sur l’équilibre financier de la DSP. XII 36 Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● DE 37 À 44 ASPECTS COMPTABLES ET FISCAUX 39 40 Les biens de retour sont-ils toujours remis à titre gratuit ? Que deviennent les sommes du GER non consommées en fin de DSP ? Le principe en DSP est une remise gratuite des biens de retour, en fin de contrat. Il est cependant admis que si le délégataire doit réaliser des investissements non prévus initialement et en particulier lorsque la durée résiduelle de la DSP est courte, le contrat peut prévoir que les biens de retour correspondant aux nouveaux investissements agréés par la collectivité puissent être remis contre indemnité. Celle-ci est en général calculée à partir de la valeur nette comptable des biens, soit leur valeur d’origine minorée des amortissements intervenus et déduction faite des éventuelles subventions. La question se pose plutôt en cours de DSP, lorsque le délégataire doit réinvestir (par exemple changement de matériel suite à évolution des normes) : il sollicite souvent un retour contre indemnité, au motif que ces biens n’étaient pas initialement prévus. Une analyse financière doit être réalisée, afin de vérifier l’impact d’un amortissement total sur la durée résiduelle et, le cas échéant, accepter d’y déroger. L’objectif d’un compte de gros entretien et réparation (GER) est de s’assurer du parfait entretien des équipements confiés au délégataire sur la durée du contrat. Lors de l’élaboration de son offre, celui-ci provisionne des sommes qu’il affectera à des opérations d’entretien et de réparation afin que les biens soient remis en bon état à la collectivité. Cette provision pèse sur l’équilibre économique du contrat et donc sur le coût supporté par l’usage. Dès lors se pose la question du devenir du GER à la fin du contrat. Si le compte GER n’est pas entièrement consommé à l’issue du contrat (où à date fixe), il doit être, en principe, versé à la collectivité. Faute de quoi il doit être considéré comme une rémunération complémentaire pour le délégataire. Si le contrat ne prévoit pas une telle clause et dans l’hypothèse d’un contrôle défaillant de la collectivité, le délégataire tentera de réduire ses dépenses au titre du GER pour maximiser son résultat en fin de contrat. 41 42 Les DSP sont-elles soumises à la TVA ? En soit, les DSP ne disposent pas d’un régime de TVA spécifique. Dès lors que le délégataire est une entreprise elle-même assujettie à TVA, elle se comporte comme telle dans le cadre de son activité de délégataire. Un autre critère à prendre en compte est celui de la nature de l’activité exercée : certaines d’entre elles ne sont pas assujetties à TVA ou bénéficient d’exonérations spécifiques. Si l’activité est assujettie : – en concession, le délégataire récupère la TVA sur l’intégralité de ses dépenses et la collecte sur la totalité de ces recettes ; – en affermage, où la collectivité finance les investissements et supporte la TVA, elle pouvait transférer le droit à déduction au délégataire qui la récupérait et la lui reversait. Ce dispositif a été remplacé (instruction du 29 décembre 2010) par un mécanisme de récupération directe par la collectivité, avec une redevance d’affermage également assujettie. Reste le cas spécifique des subventions entre délégant et délégataire, qui, selon les cas, seront assujetties ou pas. Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● A NOTER Il est également possible de prévoir un partage des sommes non dépensées en fin de contrat afin d’inciter le délégataire à ne pas engager des dépenses superflues. Les compensations financières sont-elles assujetties à la TVA ? Cela dépend de la nature de la compensation. Les subventions d’équipement, dès lors qu’elles financent des investissements identifiés, ne sont en principe pas taxées. Elles sont donc versées nettes de TVA par la collectivité qui par définition ne récupère pas de TVA. Pour les subventions d’exploitation la situation est plus complexe et dépend de leur qualification. En principe, les subventions accordées pour compenser des obligations de service public ne sont pas assujetties, tandis que celles qui sont qualifiées de complément de prix (lire point suivant) sont assujetties. Mais il est souvent difficile de faire la distinction et, dans ce cas, c’est à la partie versante, donc le délégant, d’apprécier le régime qui s’applique. En cas de contrôle, il devra se justifier auprès de l’administration fiscale. Le coût net pour la collectivité doit intégrer les risques de « frottement fiscal ». Frottement fiscal L’expression désigne par exemple la situation où la collectivité verse une subvention grevée de TVA mais n’est pas en mesure de récupérer celle-ci. Dans ce cas, on retrouve ici la question de l’arbitrage entre compensation en investissement; en principe non assujettie, et en exploitation, souvent assujettie. XIII DE 45 À 50 CLÔTURE DES NÉGOCIATIONS 43 Qu’appelle-t-on un complément de prix ? C’est une subvention d’exploitation versée au délégataire, visant à compenser un tarif inférieur à son prix de revient, par opposition à une subvention globale d’équilibre. Il s’agit d’abord d’une notion fiscale, visant à déterminer si la subvention est assujettie ou non à la TVA. Sur ce plan, le complément de prix se voit appliquer le même régime que les recettes qu’il complète. En fait, la définition du complément de prix repose sur plusieurs conditions, visant notamment à vérifier l’existence d’une corrélation entre le complément versé et le prix pratiqué et ceci selon des principes fixés à l’avance entre les parties. Les subventions venant équilibrer a posteriori un déficit ne sont donc en principe pas concernées. Le lien entre le prix pratiqué et le complément de prix doit également être établi, même s’il n’est pas suffisant en soi. Exemple de complément de prix : les subventions versées aux entreprises de transports publics de personnes, en relation avec leurs obligations tarifaires. 45 Qui choisit le délégataire ? L’autorité exécutive saisit l’assemblée délibérante du choix de l’entreprise auquel elle a procédé. Outre le rapport de la commission présentant la liste des entreprises admises à présenter une offre et celui portant analyse des offres remises par les candidates, elle lui transmet le rapport qu’elle a établi et qui présente les motifs du choix de la candidate et l’économie générale du contrat de délégation de service public. L’examen des offres est effectué au regard des critères de jugement qui ont été précisés au plus tard dans le règlement de la consultation. L’article L.1411-7 du CGCT impose l’envoi à l’ensemble des élus de l’assemblée délibérante, quinze jours au moins avant la délibération se prononçant sur le choix du délégataire et le contrat de délégation de service public. Il s’agit d’un délai franc, c’est-à-dire que ne compte ni le jour du départ ni celui du terme du délai. Ce délai spécifique a pour objectif d’assurer la complète information des élus. XIV 44 Les comptes prévisionnels doivent-ils être annexés au contrat ? Oui. Les comptes prévisionnels concrétisent l’économie générale du contrat et permettent d’identifier les principaux paramètres la définissant. Il est donc essentiel qu’ils soient annexés au contrat, à la fois pour des raisons de lisibilité et pour ensuite permettre de rapprocher les comptes réels des prévisions. Pour autant, l’exploitation étant aux risques et périls du délégataire, les données figurant dans les comptes prévisionnels ne constituent pas un engagement de résultat de sa part. En revanche, toute évolution significative par rapport aux prévisions doit être analysée par la collectivité et le cas échéant les comptes prévisionnels doivent être actualisés dans le cadre d’avenants. 46 Que se passe-t-il lorsqu’aucune offre n’a été acceptée ? L’article L.1411-8 du CGCT prévoit que la collectivité peut recourir à une procédure de négociation directe avec une entreprise déterminée, dans le cas où, après mise en concurrence, aucune offre n’a été proposée ou n’est acceptée par la collectivité. Ce constat peut être effectué soit, lorsqu’aucune offre n’a été remise, après la date limite de réception des offres, soit, après ouverture de la ou des offres reçues et leur analyse par la commission de délégation de service public, soit après engagement des négociations par l’exécutif avec un ou plusieurs candidats. Il revient à l’assemblée délibérante de décider du caractère infructueux de la procédure initiale et d’autoriser la négociation directe. A NOTER La collectivité peut décider que la négociation directe sera engagée avec une ou les entreprises ayant retiré le dossier de candidature ou encore autoriser l’exécutif à engager la procédure de négociation directe avec une entreprise tierce à la procédure de mise en concurrence. Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● DE 45 À 50 CLÔTURE DES NÉGOCIATIONS 47 48 Le candidat peut-il changer de forme juridique avant de signer la convention ? Quelles sont les pièces transmises au contrôle de légalité ? Non. Le signataire de la convention doit être le candidat retenu, se présentant dans la forme juridique dans laquelle il a déposé sa candidature et sur la base de laquelle il a été sélectionné. En revanche, si le dossier de consultation le prévoit, le candidat pressenti peut s’engager à constituer une société ad hoc, qui peut, après la signature du contrat de délégation de service public, se voir céder le contrat. Les sociétés en cours de constitution pouvant être admises à présenter une offre dans les mêmes conditions que les sociétés existantes, elles devront être constituées pour la signature de la convention. Le fait que, à la date limite de réception des candidatures, seuls avaient été réunis un projet de statuts et les engagements de participation, pour la plupart non chiffrés ou chiffrés de manière incertaine, de la part d’associés potentiels, ne caractérisait pas une société en cours de formation (CAA Bordeaux, 13 oct. 2011, SARL Labhya, n° 10BX02465). La convention signée doit être communiquée à la préfecture, ainsi que l’ensemble des pièces de la procédure, dans un délai de quinze jours à compter de sa signature. La liste de ces pièces devait être fixée par un décret en Conseil d’Etat qui n’est jamais paru. Dans la pratique, il est habituel de se reporter à la liste des pièces transmises dans une procédure de marché public (art. R.2131-5 du CGCT), à savoir : la convention signée et ses annexes, les avis de la commission consultative des services publics locaux et du comité paritaire, le rapport présentant les caractéristiques de la délégation, la délibération initiale, les avis publiés, le dossier de candidature du candidat retenu, le PV de la commission de délégation de service public d’ouverture des candidatures et celui arrêtant la liste des candidats, le dossier de consultation, les PV de la commission d’ouverture des offres et donnant son avis sur celles-ci, le rapport de la commission portant analyse des offres, le rapport de l’exécutif présentant les motifs du choix du candidat et l’économie générale de la convention, la délibération approuvant le choix du délégataire et la convention. 49 50 De nouvelles règles de publicité sont-elles à respecter ? La convention et ses annexes peuvent-elles être communiquées aux tiers ? Oui. La convention doit être signée à l’issue d’un délai de 11 jours à compter de la date de publication d’un avis d’intention de conclure au BOAMP, selon le modèle établi par l’arrêté du 15 septembre 2010. Il sera procédé, à l’issue du choix du délégataire, à la publication d’un avis d’attribution au BOAMP selon le formulaire propre aux délégations de service public. Ces avis comprennent, notamment, la mention de l’objet de la délégation, une information sur le montant prévisionnel total de la convention, à savoir l’ensemble des sommes à percevoir par le délégataire, qu’elles soient liées ou non au résultat de l’exploitation du service, et quelle que soit leur origine, le rappel des critères d’attribution, la date de la décision d’attribution de la convention par l’autorité délégante, qui est en fait la date de signature de la convention par les parties, et les nom et adresse de l’opérateur économique en faveur duquel la décision d’attribution de la délégation de service public a été prise. Oui, mais après avoir occulté, le cas échéant, les éléments couverts par le secret industriel et commercial. La CADA a rappelé à plusieurs reprises que, si les délégations de service public passées par les collectivités publiques et leurs annexes, sont considérées comme des documents administratifs soumis au droit d’accès prévu par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, ce droit d’accès doit s’exercer dans le respect du secret en matière industriel et commercial, protégé par le II de l’article 6 de la même loi. En principe, la convention, elle-même, dès lors qu’elle est signée, est communicable à toute personne en faisant la demande. En revanche, certaines des annexes de la convention ne le sont pas, telles que les informations relatives au chiffre d’affaires, à l’organisation et aux implantations du délégataire, ainsi que celles concernant ses moyens en personnel, la composition de son capital. A l’inverse, les tarifs du service délégué sont communicables. Le Courrier des maires N° 254 Février 2012 ● ● XV