La veille de juillet-août parue en octobre 2015

Transcription

La veille de juillet-août parue en octobre 2015
Juillet - août 2015
Le bulletin de veille sur les aides d’Etat à l’usage des pôles de compétitivité
Le bureau des politiques européennes d’innovation et de financement de la DGE établit chaque mois
une veille des principales aides d’État, au sein de l’Union européenne. Cette veille permet d’effectuer
une comparaison des mesures mises en place par les États membres ; elle permet également
d’appréhender les activités subventionnées des entreprises implantées en Europe.
Ce document n’a pas de valeur juridique. Sa publication ne saurait se substituer à la lecture des
documents officiellement diffusés par la Commission européenne.
L’actualité de ce bulletin vise les décisions prises par la Commission au cours des mois de juillet et
août 2015.
Actualité
•
•
•
•
La Commission européenne déclare compatible l’aide à la restructuration en faveur de KEM
ONE ;
la Commission européenne approuve les plans d’évaluation des régimes exemptés à la RDI
présentés par la France ;
la Commission européenne saisit la Cour de justice de l’Union européenne d’un recours en
manquement à l’encontre des autorités françaises qui n’ont pas récupéré la totalité des aides
illégales et incompatible allouées à certaines compagnies aériennes ;
la Commission européenne approuve l’aide à l’extension des infrastructures du port de Calais
sur la base de l’article 107.3 c) du TFUE.
Décisions de la Commission européenne
Décisions autorisant des aides compatibles
Aide au redressement d’une entreprise en difficulté
Autorisation d’une aide à la restructuration de 135 millions d’euros au bénéfice de Kem One
(France – SA.38544)
Suite à une enquête approfondie, la Commission européenne a estimé que les mesures d'aides
publiques venant au soutien de Kem One SAS, un producteur des produits chloro-chimiques et de
PVC, sont compatibles avec les règles applicables en matière d'aides à la restructuration et au
sauvetage des entreprises en difficulté. La Commission a considéré que le plan de restructuration de
Kem One permettra à l’entreprise de redevenir viable à long terme sans soutien public supplémentaire
et sans fausser indûment la concurrence au sein du marché unique.
En juillet 2014, la France a notifié un plan de restructuration couvrant trois types de mesures de
soutien à Kem One: (i) un prêt du Fonds de développement économique et social ("FDES") d'un
montant de €30 millions, (ii) une subvention d'un montant de €15 millions et (iii) des avances
remboursables de €80 millions. La France faisait aussi mention d'un éventuel abandon de créances
fiscales et sociales.
La Commission avait ouvert une enquête approfondie en octobre 2014 afin de déterminer si les
mesures constituaient ou pas des aides d'Etat. En outre, la Commission s'interrogeait sur la
compatibilité de toutes les mesures de soutien public avec les exigences des règles relatives aux
aides d'Etat aux entreprises en difficulté, notamment que le plan puisse rétablir la viabilité long terme
de Kem One et que l'entreprise contribue suffisamment au coût de la restructuration.
Lors de son enquête approfondie, la Commission a confirmé que les mesures notifiées constituaient
des aides d'Etat conférant un avantage économique à Kem One puisqu'elles n'ont pas été octroyées
dans les mêmes conditions que l'aurait fait un prêteur privé. Cependant, la Commission a déclaré ces
aides compatibles avec les règles de l'UE. En effet, sur la base des éléments recueillis au cours de
l'enquête approfondie, les doutes concernant le plan de restructuration notifié par la France ont pu
être écartés. La Commission a donc conclu que le plan de restructuration répondait de manière
adéquate aux difficultés de Kem One et prévoit un montant suffisant de contribution propre de la part
de l'entreprise. Les autorités françaises sont tenues de présenter régulièrement un rapport de contrôle
à la Commission pour garantir une mise en œuvre complète et correcte des mesures prévues.
Aide à la recherche au développement et à l’innovation
Autorisation des plans d’évaluations ex post des régimes cadres exemptés de notification à la
recherche au développement et à l’innovation (RDI) adoptés par la France (France – SA.40391
et SA.40266)
La Commission européenne a approuvé, sur la base de l’article 1 du règlement général d’exemption
par catégories (règlement UE n°651/2014 du 17 juin 2014), les plans d’évaluation ex post des régimes
exemptés de notifications dont le budget annuel dépasse 150 millions d’euros. Il s’agit du régime
cadre exempté de notification à la RDI (SA.40391) applicable à l’Etat, aux régions et aux fonds
structurels et du régime à la RDI applicable à l’ADEME (SA. 40266). Ces régimes ont été adopté par
les autorités françaises au mois de janvier 2015, leur légalité était soumise à une approbation dans un
délai de six mois à compter de leur entrée en vigueur d’une plan d’évaluation permettant d’identifier
l’autorité d’évaluation ainsi que les critères, données, méthodes et calendrier qui seront mis en œuvre
pour apprécier l’efficacité des aides couvertes par ces deux régimes d’aide.
Autorisation d’une aide de 50 millions de livres sterling à la recherche et au développement
d’un moteur de lanceur spatial innovant (SA.39457 – Royaume-Uni)
La Commission européenne a approuvé l’aide des autorités britanniques destinée à favoriser la
conception d’un moteur de lanceur spatial dans le cadre d’un projet de recherche et développement
porté par l’entreprise Reaction Engines Limited (REL). Ce projet vise à développer un moteur capable
de propulser une cellule réutilisable pour le lancement de satellites en orbite terrestre basse, ce qui
réduirait sensiblement le coût de telles missions spatiales. La Commission a constaté que la mesure
favorise la R&D dans le domaine aérospatial en Europe, tout en limitant les distorsions de
concurrence dans le marché unique.
La Commission a apprécié le projet au regard de l’encadrement de 2014 sur les aides d’État à la
recherche, au développement et à l’innovation (RDI), qui exige que l’aide d’État soit proportionnée à
l’objectif poursuivi et limitée au minimum nécessaire afin d’éviter l’évincement des investisseurs
privés. Elle a conclu que les fonds levés à ce stade sur les marchés de capitaux privés sont
insuffisants pour pouvoir mener le projet à son terme. Cela s'explique principalement par le fait que les
investisseurs privés ne sont pas en mesure d'appréhender pleinement les risques et les opportunités
de ce projet, en raison d’un manque d’informations sur ceux-ci. La combinaison de la subvention de
50 millions de livres sterling et de l’argent récolté par REL auprès d’investisseurs privés permettra de
poursuivre le projet.
Les autorités britanniques se sont également engagées à veiller à ce que les investisseurs privés
participent à chacune des étapes du projet, de manière à limiter l'utilisation de fonds publics
conformément aux règles de l'UE en matière d’aides d’État. En outre, le risque de distorsion de la
concurrence est actuellement faible, car le projet bénéficiant de l’aide est relativement éloigné du
marché et REL n’exerce actuellement aucune activité sur le marché des moteurs de lanceur spatial.
Aide en faveur de la construction d’infrastructures
Autorisation d’une aide à l’investissement de 270 M€ pour l’extension du port de Calais (France
– SA.39688)
La Commission européenne a estimé qu'un financement public de 270 millions d'euros pour la
construction du nouveau terminal transmanche dans le port de Calais était conforme aux règles de
l'Union en matière d'aides d'État. La nouvelle infrastructure contribuera à la réalisation des objectifs de
la politique des transports de l'Union sans fausser indûment la concurrence au sein du marché
intérieur. Ce projet de financement entre dans le champ des aides d’Etat dans la mesure où
l’exploitation des infrastructures construites dans le cadre du projet sont destinées à l'exploitation
commerciale (voir l'arrêt du Tribunal de l'UE de mars 2011 dans les affaires jointes T-443/08 et T455/08). Dès lors, les autorités françaises ont notifié leur intention de financer un projet d'extension du
port de Calais incluant la construction d’un nouveau terminal au moyen de ressources provenant à la
fois de l'Etat français et de collectivités locales du Pas-de-Calais, ainsi que, sous réserve
d'acceptation, de l'Union européenne via le Mécanisme pour l'Interconnexion en Europe.
La France a réalisé une analyse financière approfondie, montrant que les revenus que l'opérateur du
terminal tirerait de l'exploitation de l'infrastructure ne permettraient pas de couvrir les coûts
d'investissement sur une période de 50 ans. Par conséquent, le projet ne pouvait être réalisé sans
financement public. La Commission a constaté que le financement public était limité au minimum
nécessaire pour rendre l'investissement possible. En outre, les distorsions de concurrence seront
limitées compte tenu des prévisions de croissance du trafic ainsi que de la présence d'autres ports et
d'Eurotunnel qui continueront à exercer une réelle pression concurrentielle sur le Port de Calais. La
Commission a donc conclu que les effets positifs du projet sont clairement supérieurs aux éventuelles
distorsions de concurrence qui pourraient découler du financement public. Le projet est dès lors
conforme à l’article 107, paragraphe 3, point c), du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne
(TFUE), qui autorise les aides d'État destinées à faciliter le développement de certaines activités
économiques, à condition qu’elles n'altèrent pas indûment les échanges et la concurrence au sein du
marché unique.
Autorisation d’une aide de 758 millions d’euros en faveur de la construction de gazoducs
(Pologne – SA.39050)
La Commission européenne a constaté que l'aide d'un montant de 3 131,5 millions de PLN (758
millions d'euros) que la Pologne prévoit d'accorder à neuf projets gaziers sur son territoire est
compatible avec les règles de l'UE en matière d'aides d'État. Ces projets contribueront à mettre en
place une véritable Union de l'énergie en augmentant la capacité d’interconnexion gazière entre la
Pologne et les pays voisins, en éliminant les goulets d’étranglement et en étoffant le réseau de
transport de gaz existant en Pologne. La Commission européenne estime que le financement public
des neuf projets poursuit un objectif d’intérêt commun, conformément aux règles de l'UE en matière
d'aides d'État et plus particulièrement des lignes directrices de 2014 concernant les aides d’État à la
protection de l’environnement et à l’énergie.
La Commission est parvenue à la conclusion que les mesures d'aide sont conformes aux règles de
l'UE en matière d'aides d'État. Il est notamment ressorti de son évaluation que les projets n'auraient
pas pu être réalisés sans fonds publics. Une analyse financière approfondie a démontré que les
recettes que GAZ-System compte tirer de l'utilisation de ces nouvelles infrastructures gazières seront
insuffisantes pour couvrir les coûts d'investissement des neufs projets, et ce pendant 25 ans. Si la
totalité des coûts d'investissement devait être financée sur les propres ressources financières de
GAZ-System, il en résulterait une hausse de 22,34 % des tarifs moyens de transport, ce qui n'aurait
pas été viable.
Autorisation d’un financement public en faveur de la mise en place de la liaison fixe rail-route
du détroit de Fehmarn entre le Danemark et l’Allemagne (projet d’important d’intérêt européen)
(Danemark – SA.39078)
La Commission européenne a autorisé le modèle de financement public de la liaison fixe rail-route du
détroit de Fehmarn entre le Danemark et l’Allemagne, estimant qu’il était conforme aux règles de l'UE
en matière d’aides d’État.
Le modèle de financement notifié par le Danemark consiste en des aides publiques à la planification,
à la construction et à l’exploitation de la liaison fixe rail-route et des connexions ferroviaires et
routières danoises. Le budget total du projet est estimé à 64,4 milliards de DKK (8,7 milliards d’euros),
dont une partie est financée par l'Union européenne dans le cadre du mécanisme pour
l'interconnexion en Europe (voir la page 106 de la proposition relative au MIE pour 2014).
La Commission a estimé qu’il n’était pas nécessaire de déterminer si les aides publiques accordées à
Femern A/S aux seules fins de la planification, de la construction et de l’exploitation de la liaison fixe
rail-route du détroit de Fehmarn constituaient des aides d’État au sens des règles de l’UE. En effet,
ces mesures sont, en tout état de cause, compatibles avec les règles de l'UE en matière d’aides
d’État, puisqu'elles favorisent la réalisation d’un projet important d’intérêt européen commun.
En ce qui concerne le financement des connexions ferroviaires et routières terrestres au Danemark, à
savoir les connexions ferroviaires et routières permettant d'accéder à la liaison fixe rail-route du détroit
de Fehmarn côté danois, la Commission a constaté qu’il ne comportait aucune aide d’État au sens
des règles de l’UE. Ces connexions font partie intégrante du réseau de transport public danois et le
financement public de ces infrastructures générales n’est pas susceptible de fausser la concurrence,
ni d’affecter les échanges entre États membres.
Autorisation d’une aide de 33 millions d’euros en faveur des infrastructures de recharge
utilisées par les véhicules électriques (Pays-Bas SA.38769)
La Commission européenne a autorisé sur la base de l’article 107.3 c) du TFUE, le projet des PaysBas de fournir un financement public de près de 33 millions d’euros en faveur de l’installation et de
l’exploitation de bornes de recharge pour véhicules électriques. Ce régime permettra d’assurer le
déploiement des infrastructures nécessaires pour faire des voitures électriques une option viable aux
Pays-Bas. Il contribuera à promouvoir le transport durable et à améliorer la qualité de l’air sans
fausser indûment le jeu de la concurrence au sein du marché unique. En vertu du régime «Green
Deal» instauré par les Pays-Bas en faveur des infrastructures de recharge accessibles à tous, les
autorités locales peuvent décider de participer au régime de soutien et choisir, parmi plusieurs types
de bornes de recharge, celui qui convient le mieux à leur population locale. Le financement public de
l’installation et de l’exploitation des bornes de recharge électrique est assuré, dans chaque région, par
les autorités locales concernées et complété par le gouvernement central. Par ailleurs, le régime exige
des autorités locales qu’elles attirent des investissements privés si elles veulent pouvoir bénéficier du
soutien de l’État. Les exploitants des bornes seront sélectionnés au moyen d’appels d’offres. La
procédure d’appel d’offres devrait permettre de limiter le montant de l’aide au minimum nécessaire. Ce
régime aura une durée de trois ans et expirera le 1er juillet 2018, il sera réexaminé chaque année afin
de veiller à ce que l’aide octroyée soit fonction des coûts réels d’installation et d’exploitation des
bornes de recharge.
Aide à finalité régionale
Autorisation une aide à l’investissement de 117 millions d'euros en faveur d'une usine de
pneumatiques de NEXEN en République tchèque (République Tchèque – SA.39720)
La Commission européenne a autorisé une aide à l’investissement à finalité régionale d’un montant
total de près de 117 millions d’euros (3 207 millions CZK) en faveur de Nexen Tire Corporation Czech
s.r.o. (Nexen) pour la construction d’une usine de production de pneumatiques à Žatec, en
République tchèque.
La République tchèque a notifié des mesures d'aide à la construction d’une nouvelle usine de
pneumatiques représentant un montant total de 116,8 millions d'euros (3 207 millions CZK) et
comprenant une subvention directe de 39,7 millions d’euros, une subvention à l’emploi de 10,1
millions d’euros, ainsi qu'un allègement fiscal et la vente à prix réduit du site de l'usine par les
autorités, qui correspondent à une aide d'environ 67 millions d'euros. Le total des coûts
d’investissement du projet s’élève à 769 millions d’euros et au moins 1 000 emplois devraient ainsi
être créés à Žatec. Cette localité est située dans une zone au niveau de vie inférieur à la moyenne de
l'UE et au taux de chômage élevé qui peut bénéficier d'une aide à finalité régionale en vertu des
règles de l'UE en matière d'aides d'État [article 107, paragraphe 3, point a), du traité sur le
fonctionnement de l'Union européenne (TFUE)].
La Commission a approuvé le projet au regard des lignes directrices concernant les aides d'État à
finalité régionale pour la période 2007-2013, et plus particulièrement des règles relatives aux projets
d'investissement de grande ampleur. Même après la réalisation de l’investissement, les parts de
Nexen (incluant les ventes de sa société mère) sur les marchés de pneumatiques concernés
resteraient inférieures à 25 % et la capacité de production générée resterait en dessous de 5 %.
Recours en manquement
Aide à une entreprise en difficulté
La Commission traduit la France devant la Cour de justice pour non-récupération d'aides
incompatibles avec le marché intérieur auprès de compagnies aériennes
La Commission européenne a traduit la France devant la Cour de justice de l'Union européenne pour
ne pas avoir récupéré les aides incompatibles avec le marché intérieur dont ont bénéficié Ryanair et
sa filiale, Airport Marketing Services (AMS), aux aéroports de Pau, de Nîmes et d’Angoulême, ainsi
que Transavia, à l'aéroport de Pau.
Les décisions de la Commission du 23 juillet 2014 imposaient à la France de récupérer auprès de ces
compagnies aériennes un montant d'aide incompatible avec le marché intérieur de près de 10 millions
d’euros au total. En effet, grâce à divers arrangements contractuels et commerciaux, ces compagnies
aériennes payaient des montants inférieurs aux surcoûts liés à leur présence dans l’aéroport et
bénéficiaient de ce fait d’un avantage économique injustifié, qui doit être récupéré pour remédier à la
distorsion de concurrence qui en découle.
Sur la base des informations dont la Commission dispose actuellement, la France n’a pas totalement
récupéré les aides incompatibles avec le marché intérieur dans le délai imparti de quatre mois. Les
autorités françaises ont envoyé les ordres de récupération, mais n'ont pas été en mesure de les
exécuter en droit interne, car ils ont été attaqués en justice par les bénéficiaires. En vertu d'une
disposition de droit français, les ordres de récupération sont automatiquement suspendus en cas de
recours. Toutefois, cela va à l'encontre de la jurisprudence existante sur l’exécution des décisions de
récupération par les États membres, qui empêche les juridictions nationales d'appliquer ce type de
dispositions lorsqu’elles doivent statuer sur des recours formés contre des ordres de récupération.
La Commission a donc décidé de traduire la France devant la Cour européenne de justice pour
garantir la pleine mise en œuvre de ses décisions en matière d'aides d'État.
Ryanair a également fait appel de deux des trois décisions de la Commission (concernant Angoulême
et Pau) devant le Tribunal de l’Union européenne. En vertu du droit de l'UE, ces recours n'ont pas non
plus d'effet suspensif, si bien que la France reste tenue de récupérer les aides incompatibles avec le
marché intérieur.
Les décisions de la Commission imposaient en particulier à la France de récupérer 0,87 million
d’euros pour Angoulême (auprès de Ryanair et d'AMS conjointement), 2,8 millions d’euros pour Pau
(0,42 million d’euros auprès de Ryanair, 1,97 million d’euros auprès de Ryanair et d'AMS
conjointement et 0,43 million d’euros auprès de Transavia) et 6,3 millions d’euros pour Nîmes (auprès
de Ryanair et d'AMS conjointement).