DECENTRALISATION ET ORGANISATION

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DECENTRALISATION ET ORGANISATION
DECENTRALISATION ET ORGANISATION
DES TRANSPORTS PUBLICS EN FRANCE
Thierry GOUIN
CERTU
Une nouvelle loi de décentralisation est actuellement en préparation en
France.
Modifiera-t-elle l’organisation des transports publics après plus de vingt ans
de fonctionnement du système basé sur la Loi d’organisation des transports
intérieurs de 1982 ?
Cette éventualité nous offre l’occasion de regarder un instant en arrière pour
voir comment ce système a fonctionné, quelles sont ses limites, comment et
vers quoi il pourrait évoluer.
1.
AVANT 1982
Nota bene : la description ci-après de la situation antérieure à 1982 ainsi que
celle du dispositif mis en place par les lois de décentralisation reprennent pour
une large part les informations contenues dans l’ouvrage, très complet sur la
question, publié par le CELSE en 2001 et intitulé « Cadre juridique et
institutionnel du transport de voyageurs » (voir bibliographie).
1.1 La naissance du chemin de fer
Jusqu’en 1914, le droit des transports est marqué essentiellement par le
transport ferroviaire et se caractérise par la liberté de l’organisation des
transports et la conclusion de contrats de transport.
Le réseau de chemin de fer français commence à voir le jour vers 1830. Il est
exploité par les communes, les départements et les compagnies
concessionnaires de l’Etat. Les investisseurs privés apparaissent sous la
forme de six compagnies ferroviaires régionales.
Selon les termes de la loi du 11 juin 1842, à travers des concessions pouvant
aller jusqu’à 99 ans, l’Etat prend à sa charge les infrastructures et les
compagnies concessionnaires prennent à leur charge le matériel roulant et les
dépenses d’exploitation.
Le 1er janvier 1848, 4 000 km de voies ferrées sont concédées.
C’est la loi du 31 juillet 1913 sur les voies ferrées d’intérêt locales (VFIL) qui
fixe le cadre juridique des services de transport ferroviaire.
1.2 Le développement des transports collectifs par route
Le transport par route apparaît rapidement comme une réponse souple et
adaptée à la demande de déplacements de la population.
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Le transport par autocar se développe pour le ramassage d’entreprise, les
services réguliers et les services de messagerie, les déplacements en milieu
rural (démarches administratives, de santé, marchés régionaux). Le transport
des élèves reste marginal pendant cette période.
Face au développement des transports collectifs par route, l’Etat décide de
protéger le transport ferroviaire.
Le décret-loi du 19 avril 1934 fait obligation de déclarer les services de
transport à la Préfecture. A partir de 1934, il est interdit de créer de nouveaux
services de transport. Les transports privés pour compte propre sont mis hors
réglementation.
La SNCF est créée le 31 août 1937. C’est une Société d’Economie Mixte avec
49% de capitaux privés. L’Etat couvre le déficit d’exploitation mais décide des
tarifs. À partir de la fin des années 60, la SNCF bénéficie de la liberté tarifaire,
l’Etat compensant les servitudes qu’il impose.
La loi de coordination et d’harmonisation des transports ferroviaires et routiers
du 5 juillet 1949 fait obligation pour les entreprises d’inscrire leurs services à
un plan départemental de transport. L’accès à la profession réglementé. Des
autorisations de transports assorties de règlements d’exploitation (itinéraires,
horaires, fréquences, services) sont délivrées. Rapidement, elles sont
considérées comme des droits acquis. Leur durée est indéterminée.
L’inscription au plan est cessible. L’article 10 de la loi prévoit une
indemnisation en cas de suppression d’un service, ce qui conforte l’idée de
l’existence de droits patrimoniaux.
1.3 La montée de l’automobile et le soutien aux transports publics
Le Versement Transport est institué en 1971 en région parisienne puis dans
les villes de province de plus de 300 000 habitants par la loi du 11 juillet 1973.
Ce dispositif fiscal créant une taxe spécifique vise à faire prendre en charge
une partie des déplacements domicile-travail des salariés, dans un contexte
(années 60 et 70) où le fort développement démographique et économique
ainsi que l’urbanisation importante de la France rendent nécessaire
l’extension des transports, en particulier en milieu urbain.
Cette taxe est prélevée auprès des entreprises de plus de 9 salariés situées à
l’intérieur du périmètre des transports urbains. Son produit, fixé à 1% de la
masse salariale brute, est prélevé par l’URSSAF puis restitué à l’autorité
organisatrice, qui ne peut l’utiliser que pour financer les transports en
commun.
Les autorités organisatrices décident d’instaurer ou non le VT et fixent son
taux.
Depuis 1973, le champ d’application du VT s’est élargi. Depuis la loi SRU
(2000), le VT est applicable dans les PTU de plus de 10 000 habitants.
De même, les taux ont évolué pour s’établir, depuis la loi SRU, à :
- PTU de plus de 100 000 habitants
Taux plafond général : 1 %
Taux plafond si création d’un TCSP : 1,75 %
- PTU de 10 000 à 100 000 habitants
Taux plafond : 0,55 %
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Toutefois, les communautés de communes et communautés
d'agglomération ont la faculté de majorer de 0,05 % les taux maxima
mentionnés ci-dessus.
Cette faculté est également ouverte aux communautés urbaines ainsi
qu’aux AOTU auxquelles ont adhéré une communauté urbaine, une
communauté d'agglomération ou une communauté de communes.
- Syndicat mixte loi SRU
La loi SRU du 13 décembre 2000 autorise, dans certaines conditions,
la perception d’un VT additionnel de 0,5 % maximum dans un espace à
dominante urbaine.
Dans certains cas, les employeurs assujettis à la taxe peuvent demander son
remboursement.
Malgré l’instauration du VT (qui ne touche que le transport public urbain) , le
développement de la voiture individuelle fait baisser la rentabilité des
transports collectifs de personnes, provoque l’intervention financière des
départements et des communes, amène les collectivités et les transporteurs à
rechercher la contractualisation.
De plus, le système reste très centralisé. Les décisions de création ou de
modification de lignes sont prises par les représentants de l’Etat.
Les collectivités souhaitent avoir d’avantage voix au chapitre et s’organisent
pour faire évoluer le contexte juridique et institutionnel (création du GART en
1979). Cette évolution viendra avec la loi TPIL.
La loi-cadre relative aux transports publics d’intérêt local du 19 juin 1979, dite
TPIL, définit la notion d’autorité organisatrice (départements, communes et
groupements de communes) et fait obligation à ces autorités organisatrices
de passer des contrats avec les transporteurs. Quatre types de contrats sont
imposés, en fonction du mode d’intervention de la collectivité (risques et
périls, garantie de recettes, gestion à prix forfaitaire, gérance). Si la collectivité
respecte ces contrats-types, elle peut se dégager d’une certaine tutelle
administrative. Par contre, les droits patrimoniaux continuent à exister et les
collectivités ne peuvent pas choisir leurs transporteurs, sauf en cas de
création de service.
Cette loi, venue remplacer la loi VFIL de 1913, ne vivra que trois ans. Elle
touchera principalement les transports interurbains. En créant de nouveaux
liens juridiques et financiers entre transporteurs et collectivités, elle ne fera
que renforcer les aspirations de ces dernières à plus d’autonomie, dans un
contexte au demeurant toujours marqué par la centralisation et l’absence de
concurrence.
2.
1982 - 2003
2.1 L’évolution du cadre législatif
La loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des
départements et des régions met en place un processus de décentralisation
de l’Etat vers les collectivités territoriales dont une partie s’applique aux
transports.
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Mais ce sont la Loi d’orientation des transports intérieurs (LOTI) du 30
décembre 1982 et son décret d’application du 16 août 1985 qui vont engager
réellement le processus de décentralisation des transports.
La LOTI constitue le socle législatif de l’organisation des transports. Elle a été
modifiée ou complétée par deux lois importantes récentes, en particulier pour
ce qui touche aux plans de déplacements urbains :
- La loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie n° 96-1236 du 30
décembre 1996 (LAURE) ;
- La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain n° 2000-1208
du 13 décembre 2000 (SRU).
D’autres lois récentes ont une influence notable sur l’organisation des
transports, même si leur objet est beaucoup plus large :
- La Loi d’orientation pour l’aménagement et le développement durable
du territoire du 25 juin 1999 (LOADDT) modifiant la loi d’orientation
pour l’aménagement et le développement du territoire (LOADT) du 4
février 1995 ;
- La Loi relative au renforcement et à la simplification de la coopération
intercommunale n° 99-586 du 12 juillet 1999 ;
Ce corpus législatif définit le cadre de l’organisation actuelle des transports
publics en France.
2.2 Les grands principes de l’organisation à la française
Le droit au transport
Le « droit au transport » tel que le définit l’article 2 de la LOTI va bien au-delà
du simple droit d’aller et venir reconnu dans la déclaration des droits de
l’homme :
« La mise en œuvre progressive du droit au transport permet aux
usagers de se déplacer dans des conditions raisonnables d’accès,
de qualité et de prix ainsi que de coût pour la collectivité,
notamment par l’utilisation d’un moyen de transport ouvert au
public »
La notion de service public
En France, le transport de personnes est considéré comme un service public
au même titre que l’école ou la santé, ce qui n’est pas le cas dans tous les
pays de l’Union européenne.
Le service public de transport est défini dans l’article 5 de la LOTI :
« Le service public de transport comporte l’ensemble des missions
qui incombent aux pouvoirs publics en vue d’organiser et de
promouvoir le transport des personnes et des biens.
Ces missions sont les suivantes :
- La réalisation et la gestion d’infrastructures et
d’équipements affectés au transport
- La réglementation des activités de transport et le
contrôle de son application
- Le développement de l’information sur le système de
transport
- Le développement de la recherche, des études et des
statistiques
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- L’organisation du service public »
Sont considérés comme des transports publics tous les transports de
personnes et de marchandises, à l’exception des transports qu’organisent
pour leur compte propre des personnes publiques et privées.
La LOTI donne à l’autorité organisatrice la responsabilité et la définition de la
mise en œuvre du service public de transport. À ce titre, c’est à l’autorité
organisatrice que revient :
- la décision de créer, modifier ou supprimer des services
- le choix du mode d’exploitation (gestion directe ou gestion déléguée –
voir plus loin : le recours possible au secteur privé)
- la conduite de la politique de tarification.
L’opérateur, lui, assure le service défini, soit en tant que régie, soit en tant
qu’entreprise privée, dans le cadre d’une convention passée avec l’autorité
organisatrice pour une durée déterminée.
La répartition des compétences
La LOTI affirme la notion d’autorité organisatrice (AO) et clarifie les
responsabilités de chaque niveau de collectivité pour l’ensemble des
transports intérieurs.
• Les Communes ou groupements de communes organisent les
services de transports publics urbains après création d'un périmètre de
transports urbains (PTU), élaboration les plans de déplacements urbains
(PDU), choisissent le mode d'exploitation des transports publics urbains ;
• Les Départements organisent des services de transports publics non
urbains, dont les transports scolaires, élaborent les schémas
départementaux de transport, choisissent le mode d'exploitation des
transports publics non urbains et des transports scolaires.
• Les Régions organisent des services de transports ferroviaires et
routiers de voyageurs d'intérêt régional, élaborent le schéma régional de
transport, conventionnent les services régionaux routiers et ferroviaires ;
• L’Etat gère les lignes d’intérêt national.
Outre son rôle d’organisateur des services de transport public d’intérêt
national, l’Etat assume d’autres rôles spécifiques :
- Législation et réglementation des activités de transport et contrôle de
leur application
- Tutelle des entreprises nationales de transport (RFF, SNCF et RATP)
- Définition du cadre général des politiques de transport public de
personnes pour le développement d'un service public de qualité
- Incitation au développement des réseaux et de l'intermodalité, par le
biais notamment de soutiens financiers aux autorités organisatrices
- Fixation des normes de sécurité et contrôle technique de leur
application
- Évaluation des politiques de transport et développement d'outils
d'analyse et d'aide à la décision (statistiques, études)
- Promotion de programmes de recherches, d'études, d'expérimentation
et d'innovation en matière de transports
- Encadrement national des évolutions tarifaires des transports publics
urbains
- …
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Le recours possible au secteur privé
La LOTI a donc confié aux autorités organisatrices des transports (AOT) la
responsabilité d’organiser les services publics de transports réguliers de
personnes sur leur territoire.
En France, « service public » ne veut pas dire « gestion publique ». Le service
public est simplement un service ouvert au public, quel que soit son mode
de gestion.
Pour assurer l’exploitation du service de transport public, les autorités
organisatrices de transport compétentes peuvent donc choisir de le faire ellesmêmes directement, c’est-à-dire en régie, ou de confier ce service à une
entreprise de statut privé. Cette seconde solution est de loin la plus
fréquemment retenue par les AOTU (89 % des cas en urbain).
Dans le cas de la gestion privée, il convient de distinguer les sociétés dont le
capital social appartient en totalité au secteur privé, et les sociétés
d’économie mixte (SEM), c’est-à-dire celles qui, bien qu’ayant un statut privé,
sont contrôlées majoritairement par les collectivités locales ou leurs
groupements (valable essentiellement en urbain).
Tous les grands réseaux du groupe KEOLIS (Lyon, Lille, etc.) ou du groupe
CGEA CONNEX (Bordeaux, Rouen, Saint-Étienne...) sont gérés par des
sociétés anonymes totalement privées.
La gestion sous forme de SEM se rencontre dans la plupart des grands
réseaux du groupe TRANSDEV (Nantes, Montpellier...) et, dans une moindre
mesure, au sein de l’association AGIR.
La gestion directe en urbain concerne plutôt des petits réseaux, adhérents de
l’association AGIR ou faisant partie des réseaux « non rattachés ».
Cependant, la troisième agglomération de France, Marseille, a choisi de gérer
ce service public elle-même en s’appuyant sur un EPIC (établissement public
industriel et commercial), la Régie des transports de Marseille. C’est le cas
aussi du réseau de la Rochelle.
En Île-de-France, en revanche, cohabitent de nombreux opérateurs privés et
deux grandes entreprises publiques : la RATP et la SNCF.
Il existe une douzaine de « grosses » régies départementales, en diminution
progressive, mais on trouve également de l’ordre de 2 000 petites régies
communales et intercommunales qui assurent du transport scolaire.
2.3 Les limites du système
L’exception Île-de-France
La loi d’orientation sur les transports intérieurs ne s’applique pas en Île-deFrance dont l’organisation est fondée principalement sur le décret de 1949
relatif à la coordination et l’harmonisation des transports ferroviaires et
routiers, et sur une ordonnance de janvier 1959.
L’autorité organisatrice est un syndicat, le Syndicat des transports d’Île-deFrance (STIF), réunissant l’État, les départements et la région Île-de-France.
Le STIF est un établissement public national à caractère administratif,
associant à parité l’État et l’ensemble formé par la région et les 8
départements d’Île-de-France. Son conseil d’administration est composé de
34 membres (17 représentants de l’État, 5 représentants de la région, 12
représentants des départements). Il est présidé par le préfet de la région Île-
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de-France, dont la voix est prépondérante lors des votes du conseil en cas de
partage des voix.
Contrairement aux AOTU de province, les communes n’interviennent pas
directement dans les missions du STIF, sauf en tant que possibles « autorités
organisatrices de second rang ». Les communes doivent satisfaire les besoins
au niveau local et prendre progressivement une responsabilité d’organisation
de réseaux de bassins.
Le conseil d’administration du STIF est composé de 17 membres
représentant l’Etat et de 17 membres représentant les collectivités territoriales
(5 pour le Conseil régional, 5 pour le Conseil de Paris, 1 pour le Conseil
général de chaque autre département).
Le STIF :
• inscrit les lignes au plan de transport (registre des lignes de transport
autorisées).
• détermine la nature des services et désigne les exploitants : il fixe les
relations à desservir, il détermine le mode d’exécution des services, il
désigne les opérateurs (selon un régime particulier), il définit les conditions
générales d’exploitation et la politique tarifaire, et signe les contrats avec
les opérateurs (la RATP et la SNCF Île-de-France ont signé leur contrat en
juillet 2000).
• coordonne l’activité des différentes entreprises de transport de
personnes effectuant des prestations de services réguliers en Île-deFrance : deux entreprises nationales (RATP et SNCF Île-de-France) et
86 autres opérateurs.
• gère le versement transport.
• coordonne et approuve le contenu des grands projets d’équipements ;
contrairement à la province, l’autorité organisatrice ne finance pas ces
investissements.
• prône des actions d’amélioration en matière de qualité de service.
• réalise des enquêtes sur l’utilisation du système des transports.
• pilote et finance des expérimentations.
Contrairement aux AOTU de province, le STIF n’a pas la maîtrise d’ouvrage
des investissements lourds de transports en commun, mais il veille à la
cohérence des plans d’investissement, assure leur coordination et approuve
le contenu des projets d’infrastructure de transports collectifs de voyageurs en
région Île-de-France (schéma de principe et avant-projet).
Alors que dans les agglomérations de province, l’exploitant du réseau est en
général unique, en Île-de-France, plusieurs exploitants se partagent les
dessertes :
• la RATP, pour le réseau de 16 lignes de métro et de 2 lignes de
tramway, pour 2 lignes de RER (A sauf la branche Nanterre – Cergy
Pontoise, et B au sud de la Gare du Nord), et pour 314 lignes de bus y
compris 26 services communaux de banlieue et 18 services de nuit ;
• la SNCF Île-de-France pour le réseau SNCF banlieue (Transilien) et 5
lignes de RER (la branche Nanterre – Cergy-Pontoise de la ligne B, la
partie nord de la ligne B à partir de Gare du Nord, et la totalité des lignes
C-D-E) ;
• 89 opérateurs regroupés en une association, « OPTILE », qui
exploitent au total 950 lignes de bus.
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La relativité du droit au transport
Une évaluation de la LOTI réalisée par le Conseil national des transports dix
ans après fait apparaître la difficulté à mesurer la notion de droit au transport.
Il apparaît cependant, à la lumière de cette évaluation, que le droit au
transport a régressé en milieu rural et dans les zones urbaines défavorisées
et qu’il a progressé en secteur urbain.
Les statistiques de l’INSEE montrent que, sur la période 1980-1988, la part de
population desservie par un système de transport en commun a diminué de
77,8 à 72,3%, essentiellement en raison de l’évolution en secteur rural et
semi-rural.
Suite à cette évaluation, une circulaire a précisé les critères permettant de
définir le droit au transport :
- Qualité de l’accès au réseau
- Qualité des véhicules
- Tarification
- Coût pour la collectivité
- Information des usagers
- …
L’éparpillement des compétences
L’organisation des transports publics amène à prendre en compte des
territoires qui ne correspondent pas nécessairement à des territoires
institutionnels.
Si l’on prend l’exemple d’une petite agglomération dotée d’un réseau de
transports urbains et desservie par le réseau ferré régional, l’organisation des
transports publics sur ce territoire fera intervenir au minimum trois autorités
organisatrices.
L’autorité organisatrice des transports urbains est compétente à l’intérieur du
périmètre de transports urbains.
Le département n’est pas compétent à l’intérieur du périmètre de transports
urbains mais les lignes régulières et les services spéciaux scolaires dont il a
la responsabilité pénètrent inévitablement à l’intérieur du PTU, les premières
pour se connecter à un point central de correspondance, les seconds pour
desservir les établissements scolaires.
La région est compétente pour l’organisation des transports ferroviaires
d’intérêt régional. Elle amène donc à l’intérieur du périmètre de transports
urbains des voyageurs dont on peut penser que leur trajet ne s’arrête pas à la
gare et qui auront probablement besoin d’emprunter ensuite le réseau urbain
ou les lignes départementales.
Le déplacement en transport public sur un tel territoire peut donc facilement
faire intervenir trois systèmes de transport que rien objectivement n’oblige à
être cohérents entre eux. Non seulement ces systèmes de transport peuvent
être de niveaux de service très différents mais ils peuvent en outre être mal
connectés :
- Physiquement – pas de point de correspondance ou de pôle d’échange
- En termes d’horaires – pas de correspondances optimisées
- En termes de tarification – pas de titre tarifaire permettant un usage
combiné des différentes offres…
Bien sûr, dans la réalité, pour répondre à la demande légitime, de la part de
l’usager, d’une certaine cohérence entre les différents systèmes de transport
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public, les autorités organisatrices essaient de coopérer pour offrir un système
global et optimisé.
Ainsi, les lignes régulières départementales pénétrant dans le périmètre de
transports urbains sont fréquemment ouverte à la clientèle munie d’un titre de
transport urbain.
Ainsi, de nombreuses expériences d’intégration tarifaire, s’appuyant sur les
progrès de la billettique, permettent au voyageur d’utiliser les différentes
offres avec un même titre de transport.
Ainsi, des pôles d’échanges sont aménagés et des systèmes d’information
multimodale se mettent en place pour permettre un passage facile d’une offre
à l’autre.
Mais la coopération entre autorités organisatrices dans le système français
reste difficile et complexe, techniquement et juridiquement, et ne porte
réellement ses fruits qu’en présence d’une volonté politique forte.
La compétence « transport public » : une compétence parmi d’autres
La planification des transports est-elle possible ?
Le monde du transport public n’est pas un monde à part. Il est une
composante du système de déplacements sur un territoire donné. Vouloir
développer le transport public sans se préoccuper de l’évolution des autres
modes de transport (voiture individuelle, vélo, marche-à-pied…) est illusoire
(sans parler du transport des marchandises, qui vient lui aussi interférer avec
le transport de voyageurs dès lors que tous deux empruntent des
infrastructures communes). Le problème est qu’il n’existe généralement pas
d’autorité publique ayant en main tous les leviers permettant d’agir sur les
différents modes et leur usage. Parmi ces leviers on peut citer :
- La gestion du stationnement
- La politique de développement et de partage de la voirie
- La police de la circulation
- …
Bien souvent, comme la LOTI le permettait, la compétence d’organisation des
transports publics urbains a été confiée à des structures intercommunales ad
hoc, généralement des Syndicats intercommunaux à vocation unique(SIVU),
qui n’avaient, par définition, aucune autre compétence et ne pouvaient donc
qu’avoir une vue « étroite » (ce qui ne veut pas dire « manquant d’ambition »
mais signifie plutôt : « structurellement limitée ») du rôle des transports
publics dans le fonctionnement de leur territoire.
L’un des enjeux des Plans de déplacements urbains (mais ceux-ci ne sont
obligatoires que pour les agglomérations de plus de 100 000 habitants) est
bien d’arriver à cette vision globale du système de déplacements. Mais une
de leurs ambiguïtés majeures réside dans le fait que leur maîtrise d’ouvrage
est confiée à l’Autorité organisatrice des transports urbains, laquelle, comme
nous venons de le voir, peut être tentée de mener une politique très
sectorielle, pour défendre le mode de transport dont elle a la responsabilité.
À supposer qu’il soit possible, à un niveau institutionnel donné, de mener une
politique de transports globale (intégrant tous les modes) et cohérente (se
donnant un objectif politique de partage modal), il faut ensuite se demander si
cette politique sera elle-même compatible avec les politiques de transports
menées à d’autres niveaux institutionnels. En d’autres termes : comment
assurer la cohérence entre un plan de déplacements urbains, un schéma
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départemental de transports, un schéma régional de transports, un schéma
de services national ? Bien sûr, les différents textes de loi qui encadrent ces
diverses procédures prévoient que les instances de pilotage de chaque
démarche associent des représentants des instances de pilotage des autres
démarches, mais on reste là au niveau de la concertation. La décision revient
in fine à chaque institution compétente et rien ne garantit que les décisions
prises seront cohérentes entre elles.
À un niveau institutionnel donné, la planification des transports doit s’insérer
parmi les autres démarches de planification. En particulier, comment articuler
urbanisme et transport ? C’est l’un des enjeux des Plans de déplacements
urbains auxquels leurs textes fondateurs demandent de ne pas se limiter à la
problématique « Déplacements – Transports » mais d’intégrer des
préoccupations portant sur le développement de la ville, la cohésion sociale
ou le respect de l’environnement (Loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de
l'énergie n° 96-1236 du 30 décembre 1996 en particulier).
À un échelon territorial supérieur, les Schémas de cohérence territoriaux
(SCoT), comme leur nom l’indique, veulent œuvrer à la mise en cohérence
des démarches de planification engagées sur les territoires inclus dans le
périmètre du SCoT. À ce titre, leurs prescriptions s’imposent aux Plans de
déplacements urbains réalisés à l’intérieur du périmètre du ScoT, tandis que
les prescriptions du PDU s’imposent, elles, aux Plans locaux d’urbanisme
(PLU), déclinaisons du SCOT sur de petits territoires situés à l’intérieur du
Périmètre des transports urbains.
De même, sur des espaces encore plus larges, comment articuler
aménagement du territoire et transport ? Au niveau régional, la Loi
d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire du
25 juin 1999 (LOADDT) essaie d’œuvrer dans ce sens en incitant les Régions
à transformer leur schéma régional de transports en volet « Transports » de
leur Schéma régional d’aménagement durable du territoire.
De nouveaux territoires difficiles à desservir
La Loi relative au renforcement et à la simplification de la coopération
intercommunale n° 99-586 du 12 juillet 1999, dite loi Chevènement, a conduit
à l’émergence de nouveaux territoires intercommunaux au sein desquels la
question de l’organisation des transports publics se pose avec une acuité
particulière.
Ainsi, la communauté d’agglomération peut être créée dès lors qu’elle
réunit un ensemble de plus de 50 000 habitants (dont la ville-centre compte
au moins 15 000 habitants) dans un périmètre d’un seul tenant et sans
enclave. Cette structure vise à renforcer la coopération intercommunale dans
les zones agglomérées.
L’organisation des transports urbains, au titre de l’aménagement de l’espace
communautaire, fait partie des quatre compétences obligatoires de la
communauté d’agglomération, avec le développement économique, l’habitat,
la politique de la ville. De surcroît, la communauté d’agglomération doit choisir
au moins trois autres compétences obligatoires parmi : voirie et
stationnement ; assainissement ; protection et mise en valeur de
l’environnement et du cadre de vie ; construction, entretien et fonctionnement
d’équipements culturels et sportifs.
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En janvier 2002, une centaine de communautés d’agglomération ont été
créées en France. Toutefois, seules 80 d’entre elles exercent directement leur
compétence d’organisation des transports urbains. Les autres délèguent cette
mission à un syndicat mixte (Valenciennes, Clermont-Ferrand, Mulhouse,
Avignon, Bayonne, Belfort, Périgueux) ou à un syndicat intercommunal ; ce
qui montre que l’exercice de la compétence d’organisation des transports
urbains ne va pas de soi.
La communauté de communes, elle, a été instituée par la loi du 6 février
1992, laquelle a été complétée par la loi du 12 juillet 1999. La communauté
de communes dispose d’au moins trois compétences obligatoires, dont
l’aménagement de l’espace et le développement économique. Étant donné
que cette forme de structure intercommunale s’adresse plutôt aux espaces
ruraux, la compétence des transports urbains est facultative. Elle est
cependant envisageable. Ainsi, en janvier 2002, 25 communautés de
communes exerçaient la compétence d’organisation des transports urbains.
Parmi ces communautés de communes, certaines sont effectivement
largement rurales et l’on peut s’interroger sur la pertinence de la notion de
périmètre des transports urbains sur de tels territoires.
Le développement du transport public en question
Depuis les années 70, les transports publics ont connu un développement
considérable.
Ce développement a surtout concerné les transports urbains, « dopés » par la
mise en place du versement transport, ressource dont n’ont pas bénéficié les
autorités organisatrices régionales et départementales.
Le transport non-urbain départemental, on l’a vu, est le secteur où le droit au
transport reste le plus difficile à assurer. À ressources financières données,
les Conseils généraux se donnent généralement pour priorité la desserte des
établissements scolaires, au détriment des liaisons régulières qui pourraient
participer à l’aménagement du territoire départemental en assurant une
desserte minimale des zones les plus reculées.
Le transport régional de voyageurs est probablement le secteur appelé à
évoluer le plus fortement dans les années qui viennent. Les régions
commencent seulement à jouer pleinement leur rôle d’autorités
organisatrices, en même temps, d’ailleurs, que la SNCF évolue vers un rôle
de « simple » opérateur de transport régional de voyageurs,
contractuellement lié à son autorité organisatrice et appelé à être mis un jour
en concurrence. On est donc bien là dans un secteur à évolution culturelle
forte et non encore aboutie.
Quoi qu’il en soit, et quelque soit le secteur examiné, il apparaît que, si
développement il y a eu, ce développement marque aujourd’hui le pas.
Pour ne parler que du secteur urbain, a priori le plus dynamique aujourd’hui,
on notera que, malgré la mise en place de systèmes lourds (transports en
commun en site propre) dans un nombre croissant de grandes
agglomérations, celles-ci n’ont pas vu la progression de l’usage de la voiture
individuelle s’infléchir, et encore moins s’inverser.
Du coup, la question du financement des transports publics se pose
aujourd’hui avec une acuité particulière. Dans le meilleur des cas, la question
se pose de savoir s’il faut financer (et comment ?) de nouveaux
investissements pour développer l’offre existante. Dans le pire des cas,
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compte tenu de l’usage encore limité des transports publics en France et de la
faiblesse relative des recettes qui en découle, la question qui se pose est
celle de la pérennité des offres en place : pendant combien de temps et avec
quelles ressources sera-t-il possible de financer leur fonctionnement ?
Cette question du financement se pose avec d’autant plus d’acuité que l’Etat,
dans la logique de la décentralisation, continue à se désinvestir y compris
financièrement.
L’État, jusqu’à tout récemment, a en effet fortement contribué financièrement
au développement des transports publics de province en subventionnant les
projets d’investissement portés par les AOTU, notamment dans le cadre des
plans de déplacements urbains (PDU), selon des critères définis par une
circulaire du ministre de l’Équipement, des Transports et du Logement, en
date du 10 juillet 2001.
Ainsi, de 1994 à 2000, l’État a consacré 735 millions d’euros au
développement des réseaux de transports collectifs urbains de province. Sur
ce total, 665 millions d’euros, soit un peu plus de 90 %, ont été consacrés aux
TCSP. Bien que d’un montant plus limité, les aides à la modernisation des
réseaux existants ont plus que doublé sur la période considérée.
Aujourd’hui, ces aides de l’Etat ont considérablement diminué. Si cette forte
diminution ne suffit à mettre en péril, à elle seule, les transports publics
français, elle contribue à renforcer les inquiétudes des collectivités et des
professionnels du transport quant à l’après 2003.
3.
APRES 2003
3.1 Peu d’évolutions en cours ou à prévoir pour le transport
public
Le projet de loi de décentralisation, en son état actuel, fait apparaître très peu
de mesures susceptibles de modifier de manière significative l’organisation
des transports publics en France.
On notera cependant l’affirmation de la compétence des départements en
matière de transport ferroviaire de voyageurs :
« Article 23
Après l’article 18 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982
d’orientation des transports intérieurs, il est inséré un article 18-1
ainsi rédigé :
" Art. 18-1. – Sans préjudice des dispositions de la loi n0 97-135 du
13 février 1997 portant création de l’établissement public « Réseau
ferré de France » en vue du renouveau du transport ferroviaire, les
départements sont compétents pour la création et l’exploitation
d’infrastructures de transports ferrés ou guidés non urbains de
personnes d’intérêt local. " »
En fait, les évolutions récentes les plus importantes et n’ayant pas encore
produit tous leurs effets proviennent de la loi SRU :
« Mettre en œuvre le droit au transport » ?
La Loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain du 13 décembre
2000 (SRU) reprend, mais brièvement, la notion de « droit au transport »
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introduite par la LOTI. Le droit au transport n’est réaffirmé dans la section 3bis
de la loi que par rapport à l’exclusion sociale, celle-ci n’étant d’ailleurs
considérée ici que dans son expression urbaine.
« Section 3 bis
Mettre en œuvre le droit au transport
Article 123
Dans l'aire de compétence des autorités organisatrices de transport
urbain de voyageurs, les personnes dont les ressources sont
égales ou inférieures au plafond fixé en application de l'article L.
861-1 du code de la sécurité sociale, bénéficient de titres
permettant l'accès au transport avec une réduction tarifaire d'au
moins 50% ou sous toute autre forme d'une aide équivalente. Cette
réduction s'applique quel que soit le lieu de résidence de l'usager. »
Des régions pleinement autorités organisatrices
La Loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain du 13 décembre
2000 (SRU) consacre sa section 5 à la réforme de l’organisation des
transports collectifs d’intérêt régional : les Régions sont depuis le 1er janvier
2002 pleinement reconnues comme les autorités organisatrices des
transports régionaux et perçoivent une compensation de l’Etat leur permettant
d’assumer cette nouvelle compétence. Les 16 articles de cette section 5
ratifient la régionalisation des transports ferroviaires de voyageurs.
Cette réforme est la généralisation d’une expérimentation lancée en 1997
dans six régions volontaires (rejointes par une septième en 1999) sur une
idée du sénateur Haenel, alors que le transport ferroviaire dans son
ensemble, et particulièrement au niveau régional, était moribond, après des
décennies de déclin.
Le lancement de l’expérimentation a coïncidé avec la séparation de
l’exploitation et de la gestion de l’infrastructure ferroviaire, avec la création de
Réseau Ferré de France (RFF), en réponse à une directive européenne et à
la suite d’exigences d’ordre comptable et financier.
RFF est un EPIC en charge de la gestion des infrastructures ferroviaires, la
SNCF conservant l’exploitation sur de nouvelles bases financières.
La régionalisation et la création de RFF sont les deux piliers d’une des plus
importantes réformes du système ferroviaire depuis la création de la SNCF en
1937, l’un provenant d’une initiative nationale, l’autre d’une directive
européenne.
À la recherche d’une autorité régulatrice ?
La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain n° 2000-1208 du 13
décembre 2000 (SRU) offre aux autorités organisatrices, dans son article 111,
la possibilité de se regrouper au sein de syndicats mixtes pour mieux se
coordonner :
« Après l’article 30 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982
précitée, il est inséré un chapitre III bis ainsi rédigé :
" Chapitre III bis
" De la coopération entre les autorités organisatrices de transport
Art. 30-1. - Sur un périmètre qu'elles définissent d'un commun
accord, deux ou plusieurs autorités organisatrices de transport
peuvent s'associer au sein d'un syndicat mixte de transport afin de
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coordonner les services qu'elles organisent, mettre en place un
système d'information à l'intention des usagers et rechercher la
création d'une tarification coordonnée et de titres de transport
uniques ou unifiés.
"Ce syndicat mixte peut organiser, en lieu et place de ses membres
ou de ses parties, des services publics réguliers ainsi que des
services à la demande. Il peut à ce titre assurer, en lieu et place de
ses membres, la réalisation et la gestion d'équipements et
d'infrastructures de transport. »
Dans certaines conditions, ces syndicats mixtes pourraient même bénéficier
d’une nouvelle ressource financière de type versement transport.
Trois ans après la promulgation de la loi, les « syndicats mixtes SRU » ne
semblent cependant pas avoir convaincu les autorités organisatrices
existantes de leur utilité et de leur efficacité. Ils restent en effet très peu
nombreux.
La question qui se pose ici est de savoir si la régulation et la coordination des
offres de transport public existantes doit obligatoirement passer par la
création d’une nouvelle structure.
Île-de-France : en retard ou en avance ?
L’Etat devrait se désengager du Syndicat des Transports d’Île-de-France
(STIF) et laisser progressivement la Région jouer son rôle d’autorité
organisatrice. Ainsi, la présidence du STIF devrait passer du Préfet de Région
au président du Conseil régional d’Île-de-France.
Le désengagement de l’Etat ne ferait cependant pas pour autant de l’Île-deFrance une région comme les autres en matière d’organisation des transports
publics. La question de l’application de la LOTI dans cette région resterait en
effet entière.
Par contre, le rôle fort que tiendrait la région Île-de-France dans l’organisation
des transports publics de l’agglomération parisienne irait au-delà du rôle que
jouent ou pourraient jouer les régions françaises dans l’organisation des
transports publics : plus que l’autorité organisatrice des transports d’intérêt
régional (rôle actuel des régions françaises) ; plus que l’autorité régulatrice ou
coordinatrice des différents systèmes de transport présents sur son territoire
(dans l’esprit du syndicat mixte SRU) ; la région Île-de-France deviendrait en
effet la quasi-autorité organisatrice de tous les transports publics mis en
œuvre sur son territoire. Cette situation inédite méritera en tout cas d’être
suivie avec attention.
3.2 Proximité et / ou hauteur de vue : une contradiction
difficilement dépassable
Le système décentralisé français apparaît assez performant pour ce qui
concerne la dimension sociale du transport public. La répartition des
compétences au plus près du terrain permet de répondre le plus précisément
et le plus pertinemment possible à la demande émanant de la population.
C’est bien le moins qu’on pouvait attendre d’un dispositif fondé sur la LOTI, loi
« sociale », arborant comme un blason la notion de « droit au transport ».
Mais le transport (le transport public comme le transport individuel d’ailleurs)
joue aussi un rôle essentiel dans l’aménagement du territoire. Il interagit
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fortement, par exemple, avec l’urbanisme et conditionne la forme des villes et
de leurs périphéries, en France comme ailleurs. À ce titre, le système
décentralisé français a du mal à trouver (prouver ?) son efficacité.
L’aménagement du territoire (du territoire urbain en particulier) exige la
maîtrise d’un certain nombre de leviers qui se trouvent avoir été distribués
entre des mains très diverses.
Des lois récentes ont bien essayé faire en sorte que ces leviers puissent être
actionnés de manière cohérente, soit en les rassemblant dans une même
main (lois touchant à l’intercommunalité et à la répartition des compétences –
Chevènement), soit en mettant en place des processus de planification
obligeant en principe les mains (et les cerveaux / organes de décision) aux
commandes des différents leviers à s’entendre sur des objectifs communs et
sur des moyens pour les atteindre (LAURE, loi Voynet).
L’exercice reste difficile. Quel est le bilan réel des Plans de Déplacements
Urbains ? Des Schémas de Cohérence Territoriale ? Il est trop tôt pour le dire,
certainement. Il est peut-être temps, par contre, de réfléchir à la définition du
niveau institutionnel pertinent pour garantir la cohérence et l’efficacité des
démarches de planification territoriale (portant sur les transports mais pas
seulement) ; la difficulté étant, au moment où l’Etat – dans le cadre de la
nouvelle décentralisation - prend un peu plus de recul, de ne pas
compromettre l’équilibre fragile entre les trois niveaux de collectivités
territoriales que sont les entités urbaines, les départements et les régions –
collectivités voulues dès l’origine sans hiérarchie ou tutelle entre elles.
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