Colette Nicollin : « Un beau rêve » 16

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Colette Nicollin : « Un beau rêve » 16
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Sports
Midi Libre midilibre.fr
MARDI 10 AVRIL 2012
T10P-
■ Contre Vauvert en août 1975 en D3 avec Fleury Di Nallo (au centre).
FOOTBALL
■ Contre Thonon en 1981 en Division 2, l’année de la montée en D1.
■ En 1981 contre le Saint-Étienne de Platini en Coupe de France.
La fabuleuse histoire du Montpellier Hérault Sport Club l Les débuts de La Paillade (1/6)
L’amitié et la passion...
Le club est né de la volonté de trois hommes : Louis Nicollin, Bernard Gasset, son fidèle ami, et Carlo Llorens.
A
u début des années 70, Louis
Nicollin n’est encore que supporter de l’Olympique Lyonnais, son club de cœur. Il est
aussi président de la société éponyme, installée à Castelnau-le-Lez, spécialisée dans la collecte des ordures
ménagères. Dans le souvenir du
grand SOM d’avant-guerre, capable
de rivaliser avec le FC Sète, le foot
dans la capitale régionale n’est plus
qu’affaire de quartier. Du côté de
l’AS Paillade, un modeste club amateur. Pas de quoi soulever les foules. Le dimanche après-midi les
Montpelliérains ont d’autres occupations. Ici, il y a le soleil, les plages
et, dit-on, les plus belles filles de
France...
Dans ses bureaux installés sur les
hauteurs de La Mosson, Carlo Llorens, le journaliste-localier de Midi
Libre enrage. Passionné de foot, il
aimerait que La Paillade sorte de
l’anonymat. C’est lui qui propose de
fusionner l’AS Paillade et l’équipe
corpo du groupe Nicollin. Une solide formation finaliste de la Coupe
de France en 1974. L’idée fait son
chemin. Louis Nicollin et Bernard
Gasset, rencontré autour d’un terrain où jouait le FS Nettoiement
Montpellier, se lancent dans l’aventure avec Roger Prouget. La Paillade SC Littoral est née.
« Les femmes tenaient
la buvette pour gagner
des sous... »
Louis Nicollin
Oui, mais voilà, François Delmas, le
premier magistrat, se moque du
sport en général, du foot en particulier, comme de son premier chapeau. Il a d’autres chats à fouetter. Il
lui faut construire encore et encore
pour accueillir les rapatriés d’Afri-
CHRONOLOGIE
●
1974 : création de
●
1975-1976 : La Paillade,
●
1977-1978 : après deux
La Paillade SC Littoral.
qui évolue depuis deux
saisons en Division Honneur,
accède à la Division 3.
saisons en D3, le Montpellier
Paillade Sport Club termine
2e derrière Nice et monte en
D2.
1980-1981 : la D2 n’est
qu’une étape. En finissant
1er du groupe A, devant
Toulouse, le MPSC accède
à la Division 1.
●
1981-1982 : un véritable
cauchemar après l’euphorie.
Le MPSC, lanterne rouge de
la D1, redescend illico en
Division 2...
●
des joueurs. Des pointures. « Bernard connaissait le ballon et il
avait le coup d’œil. J’étais la tête, il
était les jambes », s’amuse Louis Nicollin.
L’OEIL DE...
LOUIS
NICOLLIN
Président-fondateur
du MHSC
Les premiers exploits
en Coupe de France
■ Bernard Gasset, Georges Frêche et Louis Nicollin fêtent la première montée en D1 en 1981.
que du Nord, les pieds-noirs. Il n’y a
pas de place pour les subventions.
« On organisait des lotos et nos femmes tenaient la buvette pour gagner des sous », se rappelle Louis Nicollin.
Avec le successeur de Delmas à la
mairie, Georges Frêche élu en 1977,
tout change. Le “Grand” a vite compris le bénéfice qu’il peut tirer du
sport pour la communication de sa
ville et pour la renommée de Montpellier. Frêche change de politique.
Il s’investit et délie enfin les cordons de la bourse. « On rêvait tous
de D2, mais il fallait passer pro et
avoir l’aval de la ville. Sans lui,
c’était cuit », constate le patron du
club.
Bernard Gasset, dont le fils,
Jean-Louis, sera l’un des tauliers de
La Paillade en D2, puis l’entraîneur
du MHSC avant d’être, aujourd’hui,
l’adjoint du sélectionneur de l’équipe de France Laurent Blanc, un
autre ancien Pailladin de la grande
époque, s’occupe du recrutement
La Paillade grandit vite. DH, D3,
bientôt D2 et enfin l’apothéose avec
la première montée en D1 sous la
conduite de l’emblématique Kader
Firoud, un Nîmois passé à l’ennemi.
Le premier, pas le dernier. Ouattara, Di Nallo, Edwige, Curioni, « le
plus grand avant-centre que j’ai jamais connu », insiste Louis Nicollin, Valadier, Mézy, Vergnes, Sarramagna, Formici, « le gardien volant », Trossero, posent leurs crampons à La Mosson. Mais la marche
est trop haute. À l’issue de la saison
81-82, le Montpellier Paillade Sport
Club retrouve la D2.
Ce ne sera qu’une brève parenthèse...
Si, ces années-là, La Paillade concrétise ses rêves les plus fous en championnat - trois montées en sept saisons (!) -, les Montpelliérains multiplient les exploits et se taillent aussi une fameuse réputation en Coupe
de France. Ils s’imposent 2-1 en 32e
de finale, contre l’Olympique de
Marseille à Alès, lors de la saison
76-77 avec le but de la victoire, signé Jean-Marc Valadier, à la 89e minute. Trois saisons plus tard, Michel Mézy et sa bande éliminent
l’AS Saint-Étienne, en quart de finale, sur deux matches aller-retour
(0-0, 1-1).
Loulou ne sait pas encore que cette
compétition lui apportera son plus
grand bonheur. Mais ça, c’est une
autre histoire...
TEXTES : JEAN-FRANÇOIS BOURMAUD
[email protected]
Photos : archives MIDI LIBRE
« Au départ, les joueurs avaient une
double licence. C’était autorisé.
Ils jouaient le samedi en corpo avec
nous, le dimanche avec leur club
à Alès ou Sète, en D2.
A La Mosson, il n’y avait qu’une
petite tribune en bois et une butte
de terre où les spectateurs
s’installaient. On y avait aménagé
des marches. Colette, mon épouse,
lavait les maillots. Elle tenait aussi la
buvette avec la femme de Frêche,
celle de Nouzaret et celle de Varlot.
À La Paillade, c’était toujours chaud
avec une poignée de gitans, prêts à
tout. On avait des supporters
dévoués corps et âmes, mais on les
arrêtait quand on voulait. Et puis il y
avait Firoud, un sacré meneur
d’hommes qui n’aimait pas les
Stéphanois et Zorzetto le
Monégasque. Il leur ajoutait des
tours de terrains. Il n’y avait que
Mézy et Luizinho qui trouvaient
grâce à ses yeux. Quand je l’ai viré,
je n’ai pas fermé l’œil de la nuit. Les
joueurs n’en voulaient plus, sauf les
Nîmois de l’équipe. À La Paillade,
on l’a plus aimé qu’à Nîmes... »
MARDI PROCHAIN
1982 - 1988 :
cure de jouvence
et carte jeune
LE MATCH
LE TÉMOIN
Colette Nicollin : « Un beau rêve »
Toujours présente, l’épouse du président fut une cheville ouvrière du club.
Quels souvenirs
gardez-vous des premières
heures de La Paillade ?
Je me rappelle la petite
tribune en bois de 600 places
et puis la création du centre
de formation dans un
préfabriqué qui jouxtait celui
des bureaux du club. Avec
Éliane Gasset, on avait posé
les rideaux une heure avant
l’arrivée des parents qui
venaient visiter ces
installations. On faisait tout.
Je m’occupais du linge.
On faisait la vaisselle. De ces
premières années, je me
souviens de la buvette que
nous avons tenue pendant
dix-sept ans, des matches
exceptionnels, contre l’OM
ou Saint-Étienne en Coupe de
France, des spectateurs qui
insultaient Louis le soir d’une
défaite contre Lens et de la
descente en D2. C’était dur.
Mais s’il fallait retenir
quelque chose ce serait la
formation des jeunes qui
avaient l’âge de mes fils, leur
scolarisation dont j’avais fait
une priorité.
Comment vivez-vous cette
saison et cette place
de leader de la Ligue 1 ?
Je suis stressée mais je ne le
montre pas car ce serait la
“cata”. À La Mosson, je ne
regarde pas trop les matches.
Je préfère les ralentis. Et
quand ils marquent, j’explose.
Et Louis ?
Il n’est jamais fatiguant.
C’est un faux extraverti qui
intériorise ses sentiments,
ses émotions. Il garde ses
soucis pour lui.
Croyez-vous au titre ?
Oui, mais je suis
superstitieuse. C’est un beau
rêve. Après la Coupe, pour
Louis, ce serait le top.
■ Colette Nicollin était aussi des
premières heures du club.
RDH
● MONTPELLIER ............... 2
● MARSEILLE ..................... 1
Le 13 février 1977, à Alès. 32e
de finale de la Coupe de France.
Stade de la Prairie. Mi-temps :
1-1. Montpellier qualifié.
Spectateurs : 12 000.
Arbitre : M. Kitabjian.
Buts pour Montpellier :
Doual (22e), Valadier (89e).
But pour l’OM : Osvaldo
Alonso (27e).
MONTPELLIER PAILLADE SC :
Landi, Besson, Betton, Maurin,
Terrasse, Gasset, Moh, Augé,
Doual (Ruelle 71e), Valadier,
Di Nallo. Entraîneur : R. Nouzaret.
OLYMPIQUE DE MARSEILLE :
Migeon, Baulier, Bracci, Gransart,
Zvunka, Fernandez, Bereta, Florès,
Osvaldo Alonso, Zlataric, Emon.
Entraîneur : José Arribas.
Cette qualification, c’est le
premier tournant pour la
Paillade. Le premier coup de
projecteur. Pas le dernier...