Le Concerto pour orchestre de Béla Bartók : commentaire

Transcription

Le Concerto pour orchestre de Béla Bartók : commentaire
Le Concerto pour orchestre de Béla Bartók :
commentaire des 2ème et 3ème mouvements
Analyse Musicale n°55, septembre, 2007, p. 73-80.
Résumé :
Le Concerto pour orchestre, composé en 1943 alors que Béla Bartók était expatrié aux EtatsUnis, s’inscrit la lignée des concertos néoclassiques des années 20 qui prennent pour modèle le concerto
grosso Baroque. Cependant, la pièce s’éloigne du modèle néoclassique par le recours à la virtuosité et par
une architecture en arche typique de Bartók. Les mélodies du Concerto pour orchestre se nourrissent des
connaissances approfondies de Bartók des musiques folkloriques, notamment des musiques hongroises,
roumaines et serbo-croates. Le deuxième mouvement, Giuoco delle coppie, s’inspire de la musique de
Dalmatie en présentant cinq thèmes par des duos d’instruments à vent. Le troisième mouvement, Elegia,
constitue le centre expressif et formel de l’œuvre. Il reprend notamment des éléments thématiques
provenant du premier mouvement, inspirés des folklores hongrois et serbo-croate. Le Concerto pour
orchestre est l’exemple même d’une intégration réussie d’éléments hétérogènes (échelles et de modes
empruntés à différentes cultures, thèmes inspirés du folklore) qui se fondent parfaitement dans le langage
compositeur.
Philippe Lolitte (*)
Le Concerto pour orchestre de Béla Bartôk:
analyse des zme et ,5me mouvements
1. BIOGRAPHIE DU COMPOSITEUR
Béla Batt6k 00Ît le 25 mars 1881 à NagyszentmikJ6s,
en Hongrie (aauellemem Sânnicolou Mare, en
Roumanie). Son enfance est marquée par une santé
délicate et 10 mort de san père, en 1888. 11 manifeste
très tôt des dons musicaux exceptionnels. De 1899 à
1903, il étudie à l'Académie Royale de Budapest
auprès d'lstv6n Thomon (piano) et Jonos Koessler
(composition). En 1903, il écrit le poème symphonique
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Kossuth exaltant le héros hongrois de la révolution de
1848. Nommé en 1907 professeur de piano à
l'Académie Royale de Budapest, il partage sa vie entre
l'enseignement une carrière de pianiste et ses
activités de compositeur et d'ethnologue. Dès 1905, il
commence, avec son ami Zoft6n Kod6Iy, à collecter de
manière systématique les musiques folkloriques en
enregistrant les chants à l'aide d'un phonographe.
L'étude des musiques paysannes aura une importance
décisive dans ses choix esthétiques et techniques. If
découvre
notDmment
l'utilisation
d'échelles
(pentDtonique ou hexatonique) et de rythmes
asymétriques (5/8, 7/8, 11/8) qui lui ouvrent de
nouvelles directions dont on voit les premières traces
dans les piéces pour piano - Trois Chants populaires
hangrois (1907), Quinze Chants paysans hongrois
(1914-18), Six danses populaires roumaines (1915).
Peu avont 10 Première Guerre Mondiale, BartOk
compose ses premières œuvres marquantes
influencées par Debussy et Stravinsky - le Quatuor à
cordes n° 1 (f 909), Allegro barbaro paur piano
(f 911), l'opéra Le Château de Barbe-B/eue (f 914­
1917), le ballet Le Mandarin Merveilleux ( 1918­
1919). Au lendemain de la guerre, le compositeur eut
l'espoir d'être aidé par les nouveaux gouvernants,
mais sa musique fut critiquée car elle débordait le
cadre du nationalisme. Bart:Dk repriS la colleae et la
transcription des musiques papulaires interrompues
pendant la guerre. L'originalité de son style éclot
véritablement à partir des années vingt - avec les
deux Sonates pour violon et piano (1921-22), le
premier Concerto pour piano (1926), les Quatuors à
cordes n° 3 (1927) et 4 (1928). Les années trente
voient se succéder une série de chefs-d'œuvre qui
influenceront plusieurs générations de compositeurs ­
les Quatuor à cordes nOS (f 935) et 6 (1939), la
Musique pour cordes, percussion et cé/estD (/936), la
Sonate pour deux pianos et percussions (1937),
Mikrokosmos, 153 pièces pour piano (1926-39).
E.n 1936, Bart:Dk marque courageusement son
opposition au régime nazi. If interdit à son éditeur de
faire la preuve de son origine « aryenne)} et
revendique, par solidarité, d'être au programme
musical des manifestations contre « f' art dégénéré)}
organisées par Gœbbels. L'Anschluss (1938), puis la
mort de sa mère, en décembre 1939, qui rompt le lien
le plus fort le retenant à la Hongrie, poussent BartOk à
s'expatrier. Après un voyage de reconnoissance aux
E.tats-Unis où il donne une série de concerts avec le
violoniste Jozsef Szigeti, le compositeur débarque, avec
sa seconde femme Ditta Posztory, à New York le 29
oaobre 1940.
Pendant les premières années américaines, Bartok
poursuivit sa carrière de pianiste en solo ou en duo
avec sa femme, mois avec peu de succès. Sa carrière
de pianiste se termine en janvier 1943 avec 10 création
du Concerto pour deux pianos et percussion conduite
par Fritz Reiner. Atteint d'une leucémie, BartOk a du
mal à composer. Cependant, le succès du Concerto
pour orchestre (1943) lui apporte un regain de force et
de créativité. If s'éteint le 26 septembre 1945 ou West
Side HospitDl de New York.
Illustration n° 1 : Bartok au piano
Il. CONTEXTE DE COMPOSITION DU
CONCERTO POUR ORCHESTRE'
E.n 1941, Bart:Dk obtient une bourse pour travailler au
département de musique de l'Université de Columbia
de New York jusqu'à fin 1942. Il est chargé de
transcrire et d'analyser des enregistrements de folklore
serbo-croate provenant de la collection Milman Parry.
Pendant cette période BartOk ne compose pas du tout,
en partie en raison de l'ampleur du travail et de
problèmes de santé récurrents, mais également à
cause des conditions de vie new..yorkaises beaucoup
plus stressantes et bruyantes que celles de Budapest
Sa santé se détériore en 1943 et l'oblige à interrompre
un cycle de conférences pour être hospitDlisé. Avec
l'aide de l'A S. CA P. (American Society of Composers,
Authors and Publishers), sallidtée par E.rna Balogh, l'un
de ses anciens élèves, BartOk est envoyé en
convalescence à Saranoc Lake, dans les monts de
rAdirondack, au nord de New York. Avant son départ
grâce à l'instigation de son ami de longue date, le chef
d'orchestre Fritz Reiner et de }6zsef Szigeti,
Koussevitzky, le direaeur de l'Orchestre symphonique
de Baston, lui commande une œuvre pour orchestre. La
Analyse Musicale n° 55 - septembre 2007/73
d'instruments entrent les unes après les autres avec
des passages brillants };3. Ce sont effectivement les 1er
et S" mouvements qui tendent le plus vers le concerto
de soliste. Le 2' mouvement, quant à lui, développe
une écriture concertante, mois par le biais de duos. Les
deux outres mouvements se situent plus nettement
dans la tradition symphonique. Bien que l'effectif de
l'orchestre soit important (vents par 3 ou par 4, 2
harpes, percussions et cordes), il est notable que le
compositeur n'emploie que rarement toutes ces
ressources en même temps. L'orchestre est traité par
groupes de timbres qui s'opposent ou se complètent
plutôt que par des effets de masse.
Le Concerto pour orchestre de BartOk se démarque
aussi des autres concertos néoclassiques par sa forme
et son arrière-plan autobiographique. Contrairement au
concerto grosso et au concerto de soliste généralement
en trois mouvements (vif/lent/vif), l'architecture de
l'œuvre de Bartok est conçue en dnq mouvements
III. PRESENTATION DU CONCERTO (viflmodéréllent/modérélvif). La forme en arche
(ABCBA), ainsi que les formes internes à chaque
POUR ORCHESTRE
mouvement contenant elles-mêmes des symétries (voir
Généralement. on désigne par concerto une œuvre Tableau 1), sont caractéristiques du langage de BartOk.
musicale écrite pour un instrument soliste et un Cette tendance à adopter des architectures
orchestre. Cependant, ce genre musical, dont on fait symétriques se rencontre natamment dans le 4"
remonter l'origine aux Concerti di Andrea e di Quatuor à cordes (1928), le S" Quatuor d cordes
Giovanni Gabrieli (Venise, 1587), désigne des œuvres (1934) ou le 2' Concerto pour piano et orchestre
diverses dans leur constitution et dont certaines ne (1931). Dans le Concerto pour orchestre, l'agencement
correspondent même pas à ce critère de base. Le des tempos guide la trajectoire formelle, le mouvement
Concerto pour orchestre de BartOk cherche à initial et le mouvement final étant les plus rapides (et
renauveler le genre concerto tout en synthétisant des aussi plus longs). D'autres éléments, provenant des
éléments de son histoire. À portir du milieu des drconstances de la vie du compositeur, semblent avoir
années 1920, apparurent des pièces orchestrales influencé le plan de l'œuvre.
portont le titre concerto comme le Concerto pour
orchestre op. 38 ( 1925) d'Hindemith, le Concerto
pour petit orchestre op. 24 (1925) de Rousse~ le
Dumbarton Oaks Concerto (1938) de Stravinsky ou le
Concerto pour orchestre (1940) de Kod61y. Leur point
commun réside dans le choix de prendre pour modèle
le concerto grosso Baroque dont le principe est
d'opposer un groupe de solistes (concertino) au tutti
(ripieno). Ces pièces néoclassiques délaissent la
rhétorique et la narrativité du concerto de soliste au
profit d'une neutralité expressive qui renvoie à l'idée,
défendue notamment par Stravinsky, que la musique
n'exprime qu'elle-même2• Renonçant à l'hypertrophie Illustration n° 2 : Partition du Concerto pour orchestre
des orchestres Romantiques et Post-romantiques, ces
L'œuvre reflète d'une certaile manière fétat d'esprit du
compositeurs préfèrent les formations réduites,
compositeur
partagé entre l'inquiétude et fespoir d'une
propices d un échange plus équilibré entre groupes de
vie
meilleure.
Ainsi
décrit..;1
le
Concerto:
solistes. Le Concerto pour orchestre de BartOk s'inscrit
({
L'atmosphère
générale
de
l'œuvre
représente
- à
dans cette lignée sans toutefois refuser le recours à
une certaine virtuosité inhérente ou concerto de l'exception du badinage du deuxième mouvement ­
soliste. Selon le compositeur : « Le titre de cette œuvre une transition graduelle depuis la sévérité du premier
orchestrale d'allure symphanique s'explique par sa mouvement et le lugubre chant de deuil du troisième
tendance à traiter les instruments isolés ou les vers l'affirmation de 10 we dans le dernier }}4. Cette
groupes d'instruments de façon concertante ou soliste. intrusion du biographique est confirmée par ces mots
Le traitement "virtuose" apparaît par exemple dans de BartOk. confiés à GtWgy sandor, d propos du 4'
les sections fugato du développement du premier mouvement: « le poète fait une déclaration d'amour à
mouvement (aux cuivres), dans les passages en forme sa patrie, mais la sérénade est brutalement
de perpetuum mobile du thème principal du dernier interrompue par finœrYention de la violence brute; des
mouvement (aux cordes), et, plus particulièrement, hommes bottés se jetont sur lui, et ils vont même
dans le deuxième mouvement, où des paires jusqu'à briser son instrument J/. L'aigreur du
commande d'une valeur de 1000 $ ne mentionne
aucune contrainte
concernant l'écriture, mais stipule que fœuvre doit
être dédicacée d Nathalie Koussevitzky, la femme du
chef d'orchestre, décédée quelques années plus tôt
Le Concerto pour orchestre fut composé à Saranac
Lake où le compositeur séjourna avec sa femme et
son plus jeune fils Péter, du 15 août au 8 octobre
1943. La création triomphale, le 1er décembre 1944
ou Carnegie Hall de New York par l'Orchestre de
Boston dirigé par Serge Koussevitzky, contribua
beaucoup d la célébrité du compositeur. L'opportunité
d'écrire le Concerto pour orchestre fut très bénéfique
sur le plan psychologique et dédencha un regain de
créativité. Après cette première œuvre écrite aux
Et.ats-Unis, suivront le Concerto pour alto, le 3'
Concerto pour piano (les deux terminés por son élève
Tibor Serly), la Sonate pour violon seul (posthume).
741 Analyse Musicale n° 55 - septembre 2007
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'oolIlIII1'I11I1•_ _IUllllllllilllllllllllllllllllllI!i).l.,.
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compositeur face à l'emprise des nazis sur l'Europe, et
particulièrement son aversion du régime Horthy, ont
danc leur part dans l'élaboration de l'œuvre.
Cependant, le Concerto pour orchestre ne peut en
aucun cas être considéré comme une musique à
Mouvements
1
/1
11/
IV
V
Titre
Introduzione
Giuoco delle
coppie
E/egia
Intermezzo
interrotto
Finale
programme. Depuis bien longtemps, BartOk n'en écrit
plus (Kossuth 1903, Le prince de bois 19 J4-16, Le
Mandarin merveilleux 19/9). Les descriptions de
BartOk renvoient moins à un scénario qu'à une
progression formelle et à une courbe expressive.
Tempo
Andante, non
troppo 1
Allegro vivace
Allegro
scherzanda
Andante, non
troppo 1Poco
agitato 1 ri
Allegretto
1
Forme
Sonate: introduction 1exposition (T l,
T2) 1développement (dauble
exposition de fugue) 1réexposition (Tl,
TI)
A(abcde)IChoraI/A'(a'b'c'd'e')
Durée·
9.48'
PréludelAlBIClPostiude
6.47'
ABA[lnt]BA
4.32'
Mouvement perpétuel (forme sonate)
9.34'
6.28'
!
Pesante 1Presto
Tableau 1
IV. 2EME MOUVEMENT - GIUOCO
DELLE COPPIE
Giuoco delle coppie Oeu de couples) est le titre original
du 2éme mouvement Bartok 1'0 changé plus tard par
« Presentando le coppie)} (Présentation des couples),
qui transcrit mieux l'esprit et la structure du
mouvement7• En effet, les 5 thèmes de la partie A (que
nous nommerons dans cet article respectivement
alblc/d/e) sont présentés par des duos d'instruments à
Sections
Duos
a
Intervalles
6te mineure
Tessiture~
réila]
fa#ddo#3
pizzicato
Modes de jeu
bassons
b
hautbois
3'" mineure
miisi4
do#isol4
pizzicato,
pointe de
l'archet,
glissanda
vent (Exemple J). Chaque duo est bâti sur un
intervalle harmonique spécifique maintenu sans
déviance tout au long du duo (Tableau 2). Après un
choral de cuivres qui fait office de trio (mes.123­
164), on retrouve le même principe de duos dans la
troisième partie (A' mes. 164-263). Mais cette fOis<i,
les thèmes sont souvent enrichis de daubles ou triples
duos (b': 2 hautbois et 2 clarinettes en la, c': 2
flûtes et 2 clarinettes en la, d': 2 flûtes, 2 clarinettes
et 2 hautbois).
c
d
clarinettes en
la
7me mineure
réimis
miifa#4
pjzzicato,
harmoniques,
glissando
flûtes
ste juste
sol#ido6
do#ifas
pizzicato,
spiccato
e
trompettes en ut
2<1e majeure
doisol#4
sibifa#4
Pizzicato,
glissando, sourdine
Tableau 2
Il est notable que cette façon de présenter une mélodie
par paires d'instruments provient certainement de sa
découverte, en 1940, de la musique de Dalmatie. Les
Dalmates interprètent leurs mélodies en mouvements
parallèles (souvent avec des instruments à anche
dauble ou des voix). BartOk décrit ainsi cette musique:
« Les deux voix suivent généralement un mouvement
parallèle, mais la distance entre elles est à peu près
d'une seconde majeure. [. ..] Les deux voix sont
interverties dans le prélude instrumental, ce qui signifie
qu'il y a entre elles une distance de septième mineure
au lieu de la seconde majeure >l. Le compositeur s'est
donc approprié ce principe en l'élargissant à d'autres
intervalles (la tierce mineure, la sixte mineure et la
quinte juste).
Les duos sont également caractérisés par leur
registre (qui dépend de l'instrumentation) et par leur
tessiture mélodique (Tableau 2). Le choix des
instruments à vent pour présenter les duos a été
dicté, on l'a vu, par la musique dalmate qui emploie
des instruments à anche double. Là aussi, le
compositeur conserve l'esprit (bassons, hautbois),
mais élargit la pratique en incluant d'autres modes
.,..
J.
.
Analyse Musicale nQ 55 - septembre 2007 175
d'émission (clorinettes, flûtes et trompettes avec
sourdine).
L'accompagnement
est
assuré
principalement par les cordes (quintette à cordes
auxquelles s'ajoutent deux harpes dans la troisième
partie). Bart6k a prêté attention à varier la couleur de
l'accompagnement par l'emploi de modes de jeu
spéciflClues. Pizzicati, pointe de l'archet, glissandi,
tremolos sourdine, sont mis à contribution pour créer
un écrin adapté au caractère de chaque duo (Tableau
2). À cet égard, l'écriture d'orchestre des sections e
(mes. 87-/22) et e' (mes. 228-252) est
particulièrement virtuose et donne tout son sens à la
notion de concerto pour orchestre. La virtuosité ne se
situe plus seulement dans la vélocité du saliste, mais
intervient dans l'écriture de l'orchestre: le choix des
timbres, des textures, des registres et des modes de jeu.
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Exemple 1 : début des cinq duos du 2' mouvement
L'observation des tessitures montre également que les
mélodies inventées par le compositeur se démorquent
du standard des mélodies populaires dant la tessiture
se cantonne habituellement à une quinte juste. Celles
des duos dépassent toutes l'octave, voire la dauble
octave (le duo de flûtes avec sa tessiture de 28 demi­
tons).
Les mélodies du Concerta pour orchestre se nourrissent
des connaissances approfondies de BartOk des
musiques folkloriques, notamment des musiques
hongroises, roumaines et serbo-croates. Ce ne sont
cependant pas de véritables mélodies folkloriques, mais
des recréations qui, tout en conservant le style originel
du folk/ore, s'adaptent au langage savant du
compositeur lO• Elles sont composées à partir de
nombreuses échelles qui peuvent être les modes
majeur et mineur mélodique (ascendant et
descendant) du système tona! les échelles des
musiques populaires (échelles pentatoniques, modes
« anciens JJ à degrés mobiles, gamme « tzigane JJ) ",
mais aussi d'échelles artifICielles comme la « gamme
par tons entiers }}12, la « gamme acoustique})
typique du langage bart6kien/ 3, ou d'échelles
alternant symétriquement tons et demi-tons '4. Ces
échelles et ces modes sont intégrés dans la
composition selon le principe du chromatisme
polymodal. BartOk a développé un système original
qui tente de concilier la modalité de la musique
populaire avec le chromatisme de la musique
savante occidentale. Le compositeur se démarque
tout à la fois de ratonalisme, représenté notamment
par la seconde É.cole de Vienne (SchOnberg. Berg,
Webern), où les notions de fondamentale, de
tonique, de dominante sont abolies au profit. d'une
égalité entre tous les sons et du polytonalisme,
représenté par des compositeurs comme Stravinsky,
Prokofiev, Hindemith ou Milhaud, qui conserve les
relations tonales tout en superposant deux, vaire
plusieurs, tonalités. BartOk résume ainsi la différence
entre ces trois systèmes: « nous pourrions dire que
la musique atonale ne présente aucune note
fondamentale; que la polytonalité en présente
plusieurs [. ..] ; et que la polymodalité en présente
une et une seule »15. La polymodalité conduit à
l'utilisation de modes diatoniques dant certains
degrés sont mobiles produisant un chromatisme
mélodique par l'adjonction de degrés intermédiaires.
En permettant de superposer différents modes, le
poIymodalisme produit un chromatisme harmonique
qui est la conséquence de la conduite des voix. Enfin,
la poIymodalité danne une justifICation à l'emploi du
chromatisme par son fondement dans la musique
populaire qui ne peut être considéré alors comme un
système purement artificiel, mais comme l'extension
des principes contenus dans la musique populaire
que BartOk considérait comme une émanation de la
nature. Nous allons maintenant procéder à une
description sommaire de chaque section.
Une courte introduction donne immédiatement le
caractère dansant du mouvement Une caisse daire
sans timbre/ 6 énonce une phrase rythmique de 8
mesures à 214 qui suggère une danse folklorique.
Cette phrase associée à la caisse daire joue en
quelque sarte le rôle de maître de cérémonie
puisqu'on la retrouve à des moments clés: peu
avant le choral pendant le choral en alternance avec
les cuivres et à la fin du mouvement
La première section est constit.uée d'un thème de 16
mesures divisé en 4 périodes de 4 mesures, la
dernière étant une inversion de la deuxième. La
mélodie est présentée aux bossons en sixtes
mineures parallèles. Elle est constituée d'une
succession de cellules de deux ou trois notes
contenues dans un intervalle de tierce (le plus
souvent de tierces mineures) : ré/mi/fa, lablfa, falré,
dolrélmi, fa/mib/ré, ete. Le rythme anapestique (qui
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(
-
reprend celui de la phrase initiale), t'articulation en
notes piquées et les pizzicati de cordes apportent un
caractère de marche militaire. La succession d'accords
parfaits qui harmonise la mélodie évite toute fonction
tonale. Sa trajectoire harmonique part de ré mineur
pour aboutir d ré majeur.
La deuxième sedion est divisée en trois périodes (mes.
25-32, 33-40 et 41-44). Les deux premières
contiennent la mélodie présentée aux hautbois en
tierces mineures. Le registre aigu et la continuité des
courbes mélodiques contrastent avec le thème
précédent La 1r, période est sous-tendue par une
progression chromatique de la bosse (ré/ré#/mi/fa), la
2' période suit une marche harmonique diato9ique
(fa/sol/la/si/do#/ré#/milfa#/sol). Les première et
deuxième périodes sont séparées par un motif en notes
répétées (mes. 32) qui provient de 10 phrase rythmique
initiale. La troisième période assure la transition avec la
section suivante: deux traits ascendants de hautbois
aboutissent d une tierce mineure tenue (ré#/fa#) sous
laquelle les cordes graves entonnent une mélodie d
l'unisson qui rappelle le let thème.
La troisième section comprend quatre périodes (mes.
45-51, 52-56 et 57-59). Le troisième thème. présenté
par deux clarinettes en la d la septième mineure, est
caractérisé par une plus grande variété rythmique et un
chromatisme plus marqué. La première période est
sous-tendue par une progression diatonique, puis
chromatique
(mildo#mi/fa#/sol#/la/la#/si/do).
La
deuxième période est aussi stotique mélodiquement
(oscillation ré/fa#) qu'harmoniquement (pédale de do.
gamme par tons entiers au violons 1). Une marche par
secondes mineures et quartes augmentées, jouée d
l'unisson par les bossons, altos, violoncelles et
contrebasses, sert de transition vers la section suivante.
La quatrième section comprend trois périodes (mes. 60­
69, 70-82 et 83-89). La mélodie est jouée en quintes
parallèles d deux flûtes. L'écriture volubile à grands
traits virtuoses éloigne encore plus cette section de son
modèle (le premier thème). La mélodie aboutit d un
climax (mes. 83) où l'intervalle de quinte juste est tenu
fortissimo dans le registre aigu (do#s!sol#s). Les
violoncelles et contrebasses d l'unisson amorcent la
transition avec un motif chromatique qui se poursuit
avec une gomme par tons entiers d t'alto soutenu par
les trémolos de premiers violons.
La dnquième section renoue avec le caractère de
marche militaire, mais avec une nuance d'étrangeté
due cl l'orchestration (violons et altos divisés, avec
sourdine, trémolos, glissandos). On peut la diviser en
quatre périodes (mes. 90-101, 102-109, 109-116 et
116-/22). La mélodie en notes piquées est présentée
par deux trompettes avec sourdine. La tessiture
relativement étroite. ainsi que l'intervalle harmonique
de seconde majeure, font de cette mélodie la plus
proche du style dalmate. Portant d'une structure
diatonique, elle évolue dons la deuxième période vers le
chromatisme, puis retourne au diatonisme dans la
troisième. La quatrième période constitue un rappel de
la phrase rythmique initiale d'abord jouée en notes
répétées par les trompettes et les cordes, puis par la
caisse claire sans timbre sur un accord de ré majeur.
....
!
La partie centrale du mouvement (mes. 123-1 ô4I
selon certains auteurs!" un pseudo c:horuI
luthérien. La sonorité des cuivres (2 trompettes, 2
trombones, 1 tuba), bien que préparée par la
cinquième section, ainsi que la succession d'accords
aux harmonies subtiles (accords de septième)
apporten~ en tout cas, un très beau contraste
expressif Les interventions de 10 percussion qui
s'intercalent entre les phrases du pseudo choral
donnent
une signification rétrospective d
l'introduction du mouvement: la marche militoire est
id neutralisée par 10 sérénité de la fanfare.
La troisième partie (A' 164-252) est une reprise
variée et abrégée de 10 partie A La reprise du 1er
thème dans la section a' (mes. 164-180) est
légèrement différente de sa présentation dons la
première section. Un contrepoint de basson vient
notamment enrichir la texture. Deux clarinettes
s'adjoignent aux hautbois dons la section b' (mes.
180-197) pour former un double duo. Les parties de
clarinette traitent le deuxième thème en mouvement
controire. Le thème, qui débute cette fois par une
anocrouse, est légèrement modifié et écourté. Dans
la section c' (mes. 198-211), deux flûtes en
septièmes parallèles forment avec les deux
clarinettes une texture dense et complexe.
L'accompagnement est également complexifié par
l'apport des bassons et les accords de quatre sons
en pizzicati des violons. La transition vers la section
d' (mes. 212-227) est réduite à deux mesures (mes.
210-21/). La section d' e~ elle auss~ resserrée, la
première période du quatrième thème étant éludée
(ce qui correspond d 10 mesures). Le premier
hautbois et les clarinettes se joignent aux flûtes pour
former une succession d'accords parallèles en 1er
renversement La transition vers la section e' (mes.
228-252) est écourtée pour Ioisser place au climax
du deuxième mouvement La première période du
cinquième thème est inchangée dons sa structure.
Nulle addition de voix parallèles ne vient colorer le
timbre et densifier la texture. Par contre
,.accompagnement est beaucoup plus présent en
raison de l'adjonction de deux harpes, de deux
clarinettes, des trémolos de violons joués cette fois
une neuvième plus haut et d'accords de cinq sons
aux altos. La deuxième période du thème, réduite à
deux mesures, conduit directement à la troisième
période transposée d l'octave supérieure. La
quatrième période sert de coda. Le mouvement se
termine par un accord de septième de dominante
non résolu soutenu par les cuivres et un dernier
rappel du rythme de caisse claire sans timbre.
es~
V. 3EME MOUVEMENT - ELEGIA
L'élégie renMJie, depuis la Renaissance, cl des pièces
mélancoliques, souvent des déplorations funèbres,
des tombeaux ou des plaintes amoureuses. L'élégie
du 3" mouvement du Concerta pour orchesfJe de
BartOk porte une expression plus ....
empreinte tour à tDur de téw.* el • L b f L
de crainœ et d'esfJDir- I.e
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AnaIJse
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transformés, des éléments thématiques apparus dans
l'Introduzione (1 er mouvement). Le matériau est
organisé dans une forme tripartite encadrée por un
prélude et un pastlude (Tableau 3).
Sections
Prélude
Mesures
1-33
Indications de mouvement
Andante non troppo
A
34-61
Atempo
B
62-83
Poco agitato, mosso,
molto rubato
r=80
C
84-100
Tempa 1
r=64
Postlude
101-128
Tempo 1
r=64
Indications métronomiques
r= 73-64
r= 64-62
Tableau 3
Le caractère tragique du mouvement est dicté, dès le
début du prélude, par une phrase piono en valeurs
longues aux contrebasses (doublée partiellement par
la harpe et les timbales). La succession de quartes et
secondes (qui rappelle le début du le' mouvement)
aboutit à une pédale de rélrébldo sur laquelle s'élève
une phrase pianissimo énoncée par les violoncelles.
Construite sur le même principe, mais dans une forme
plus chromatique, la phrase est reprise en canon par
les altos, puis les violons 2. Commence alors un
passage souvent qualifié de « musique de nuit» qui
évoque l'une des partes du Château de Barbe-8leue
op. Il (191 7), celle qui s'ouvre sur le lac des larmes.
L'atmosphère noaurne est suggérée par
l'orchestration (glissandi de harpe, arpèges de (lûtes et
darinettes, trémolos et trilles des violons l, roulement
de timbales, accor~da/e aux cordes graves) et par
l'emploi d'une échelle en tierces mineures et demi-tons
(doimibimiisoillablsi). Les si réitérés du hautbois (qui
peuvent évoquer les cris d'un oiseau noaurne) se
transforment en une mélopée chromatique qui
s'enroule autour de quatre notes (silsibllalsol#). La
musique nocturne est interrompue brusquement par
un unisson (réb) des hautbois, darinettes et piccolo.
781 Analyse Musicale n° 55 - septembre 2007
Les arpèges reprennent (aux bois, puis aux cordes
mes. 26), mais cette fois avec des valeurs en
augmentation et assemblés en tuilages canoniques.
Une courte transition (mes. 29-33) réintroduit un
« chant d'oiseau » au piccolo et des motifs en quartes
(hautbois, cor anglais et cors).
La seaion A (mes. 34-61) change brusquement
d'atmosphère. Une mélodie hongroise (Exemple 2),
précédemment entendue aux trompettes dans le 1e,
mouvement (mes. 39), est ie} présentée forte aux
violons (en oaove, doublés par les clarinettes) dans
un contexte beaucoup plus dramatique et solennel. Le
thème est entrecoupé de gammes descendantes
(flûtes, hautbois, altos et violoncelles) reprises chaque
fois une note plus haut et d'un motif en valeurs
pointées (trompette) typique du verbunkos hongrois/ 8 .
La mélodie hongroise est ensuite reprise variée (mes.
45), accompagnée d'une texture dense de motifs
descendants. Un passage de transition (mes. 54-61)
réintroduit l'atmosphère nocturne de J'introduction:
cordes sul ponticello en trémolos sur un intervalle de
quarte augmentée, oscillations chromatiques des
hautbois, clarinettes et violoncelles divisés, « chant
d'oiseau» du piccolo.
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Exemple 2: début de la section A (réduetÎon d'orchestre en sons réels)
La sedkJn B (mes. 62-83) est le cœur du mouvement
et de la pièce entière. Elle est entièrement dédiée à une
fois une octave plus bas) entrecoupée d'accords
forte en tutti.
Le postJude (mes. 101-128) reprend les éléments du
prélude, mais d'une manière abrégée: la phrase
d'introduction aux cordes graves, puis la musique
nocturne avec ses arpèges et le si aigu répété par le
piccolo. Le mouvement se termine par deux
itérations « apaisées)} de la phrase d'introduetÎon
(dans une forme diatonique, aux premiers violons,
mes. 112), entrecoupée d'un bref rappel du motif
en valeur pointée (verbunkos), puis du « chant
d'oiseau » nocturne au piccolo.
mélodie pseudo-folklorique, dans le style des chants
funéraires transylvains, présentée d'abord par les altos
(Exemple 3), puis par les bois à l'unisson (mes. 73). 1.0
mélodie est constituée d'une phrase chromatique variée
quatre fois. Chaque itération de la phrase est
entrecoupée de trémolos de harpes et violons munis de
sourdine dans un mouvement ascendant par paliers de
tierces mineures (do#/milsollla#). 1.0 seconde
présentation de la mélodie est ponauée cette fois<i
d'accords parfaits en tutti (mib majeur. ré mineur, do
majeur, lab majeur).
VI. CONCLUSION
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Exemple 3 : les 5 premières mesures de la mélodie
transylvaine
1.0 section C (mes. 84-100) reprend des éléments
précédemment entendus. Quelques traits ascendants
en canon (échelle tierce mineure / seconde mineure)
conduisent au retour de la mélodie hongroise présentée
dans un contexte qui évoque le style des rhapsodies
hongroises. Les violons, hautbois et flûtes entonnent la
mélodie accompagnée d'un contrepoint des cordes
graves, clarinettes et bossons. Un effet dramatique
intervient mesure 93: la mélodie hongroise,
chromatisée à l'extrême, revient deux fois (la dewrième
1.0 pièce contribua fortement et rapidement à la
célébrité du compositeur. Cependant, celui-ci fut
accusé de conservatisme et de succomber à la
« manière)} américaine. Ainsi, Boulez pense que le
Concerto pour violon (1938) « marque le déclin de
la pensée de Bartôk }}/9, les œuvres suivantes étant
de moindre valeur. Certes, comparé aux pièces des
années trente, le Concerto pour orchestre marque le
pas. Le langage est moins dense que celui de la
Musique paur cordes, percussion et célesta,
l'exigence d'unité est moindre que ceUe du 6'
Quatuor à cordes où tout jaillit d'une idée direc1riœ.
la pensée formelle est moins achevée que cele de la
Sonate pour deux pianos et petoIIliSÏIJIL L'~
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Anayse Musil::à n& 55
sepIeITùe 2M1 . 7'9
les faveurs du public et béné~der de nouveHes
commandes ?
It n'en reste pas moins que le Concerto pour orchestre
synthétise à merveille le langage bartokien dans une
forme accessible. On y retrouve notamment la marque
de fabrique du compositeur: l'équilibre entre les
apposés - la tradition et la modernité, le populaire et le
savant 10 transcription et finvention, le tonal et le
modal, le diatonique et le chromatique, l'homophonique
et le contrapuntique, la métrique fixe et les rythmes
irréguliers, etc. Le Concerto pour orchestre est aussi
l'exemple même de l'intégration de l'hétérogène. La
multitude d'échelles et de modes empruntés à
différentes cultures (des pays de l'Est aux pays
Arabes) ou inventés de toutes pièces fusionnent dans
le creuset bartokien. Le nationalisme de Bart6l<, qui
transparaît dans san étude et son utilisation des
musiques populaires, est avant tout une recherche
d'universalisme
universalisme qui dépasse
d'ailteurs le cadre strictement musical.
(*) Manre de conférences à l'Université de Bourgogne
Notes
pièce est éditée en partition de poche chez Boosey & Hawkes (HPS 79).
Stravinsky affirmait: « je considère la musique dans son essence comme impuissante ci exprimer quoi que ce soit un
sentiment, une attitude, un état psychologique, un phénomène de la nature, etc L'expression n'a jamais été la propriété
immanente de la rpusique », dans Igor Stravinsky, Chroniques de ma vie, Paris, Denoël/Gonthier, 1930, Vol. 1/, p. 119.
3 BARTOK. Béla, Ecrits, Édités par Philippe Albèra et Peter Szendy, Traduits et annotés par Peter Szendy, Genève, Editions
Contrechamps, 2006, p. 323.
4 BARTOK. Béla, Écrits, op. dt., p. 324.
5 Oté par Andrris Botta dans le livret de l'enregistrement du Concerto pour Orchestre par l'Orchestre national de Hongrie
dirigé parJànos Ferencsik (CD Hungaroton HCD 12759-2).
6 Durées des mouvements d'après l'enregistrement du Concerto pour Orchestre par l'orchestre du Concerrgebouw
d'Amsterdam dirigé par Antal Dorati (CD Philips 41 1 131-2).
7 La partition éditée conserve néanmoins l'indication originale. En effet, le changement de titre a été indiqué par Bartôk en
bas de page du manuscrit, ce qui a conduit une inadvertance du copiste.
8 Le la3 correspond, par convention, au la 440 Hz, écrit au milieu de la portée en dé de sol.
9 BARTOK. Béla, Écrits, op. cit., p. 306.
/0 Ure ci ce sujet BOUKOBZA, jean-François, Barték et le folklore imaginaire, Paris, Les Éditions de la Ctœ de la musique,
2005.
/1 Les échelles pentatoniques sont formées de 5 notes. Elles sont nommées « anhémitonique » si elles ne contiennent pas de
demi-ton (par ex. sol, la si. ré, mi), « hémitonique » si elles contiennent un demi-ton (sol, la sib, ré, mi). Les modes andens,
nommés parfois « ecdésiastiques» ou « grecs », sont constitués ci partir de chaque degré de la gomme diatonique. Par
exemple, le mode « dorien» (ré, mi, fa. sol, la, si, do, ré), transposé sur mi devîent: mi, fa#, sol, la, si, do#, ré, mi. La
gomme tzigane comporte deux secondes augmentées (do, ré, mib, fa#, sol. lab, si, do).
12 La « gamme par tons entiers» est une échelle constituée d'une succession d'intervalles de seconde majeure (do, ré, mi,
fa#, sol#, la#).
13 La gomme acoustique (do, ré, mi, fa#, sol, la, sib, do) est ainsi désignée car elle comparte les sons de la série
harmonique.
14 A titre d'exemple, on trouve dans le Concerto pour orchestre des échelles bâties sur l'alternance quarte juste/seconde
mineure (tétratonique do. fa. solb, dob), sur l'alternance tierce mineure/demi-ton (hexatonique do, mib, mi, sol, lab, si), sur
l'alternance seconde majeure/seconde mineure (oetotonique do, ré, mib, fa, fa#, sol#, la, si). L'emploi de ces échelles, qu'il
nomme mades ci tJ;ansposition limtœe, sera systématisé par Olivier Messiaen.
15 BARTOK. Bélo, Ecrits, op. cit., p. 302.
16 Le timbre de la caisse claire est constitué d'une bande amovible de fils métalliques tendus qui vibrent au contaa de la
peau de timbre. Lorsque le timbre est enlevé, la coisse claire perd la sonorité daire et métallique.
17 COOPER, David, Bartok: Concerto for Orchestra, Cambridge, Combridge University Press, 1996, rééd.2004.
18 Le verbunkos désigne ci l'origine une danse de soldats, exécutée par les orchestres tziganes, lors des séances de
recrutement organisées par l'armée austro-hongroise des Habsbourg au début du XVIIIe siècle.
19 BOULEZ, Pierre, Relevés d'apprenti, textes réunis et présentés par Paule Thévenin, Paris, Editions du Seuil, 1966, p. 300.
1 La
2
L'œuvre a eu une grande influence. notamment en Hongrie où elle
l'académisme musical socialiste.
20
1
80/ Analyse Musicale n° 55 - septembre 2007
fut
adoptée comme un modèle par

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