Chers Pilotes d`Air France, Comme l`écrivait très justement

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Chers Pilotes d`Air France, Comme l`écrivait très justement
Chers Pilotes d’Air France,
Comme l’écrivait très justement le Monde le 16 Septembre dernier « C’est une
grève de la peur que mènent les pilotes d’Air France. Peur du low cost, devenu
incontournable au point de dominer de plus en plus le transport aérien, puisqu’il
représente désormais près de 45 % des parts de marché en Europe. Peur des
délocalisations et du dumping social à travers le développement de Transavia, la
filiale à bas coûts d’Air France. Peur de voir rogner leur statut privilégié, qu’ils ont
longtemps protégé en cogérant la compagnie avec la direction. » (bit.ly/1BR4GKt )
Mais votre peur n’est pas pire que celle des ouvriers à qui on a annoncé la
fermeture de leur usine, et qui font eux la grève, rassemblés comme un seul
homme autour d’un feu, jours et nuits, en ne nuisant ainsi qu’aux seuls intérêts
des actionnaires de leur entreprise qui ont pris la décision qui les accable. Votre
peur n’est pas pire que celle des chômeurs qui peinent à retrouver un travail,
giflés par la succession des réponses négatives à leurs nombreux courriers, quand
ils ont la chance d’en recevoir… ballotés au mieux de CDD en CDD. Votre peur
n’est pas pire que celle des millions de Français et d’étrangers que votre grève
empêche de faire normalement leur travail, de rencontrer leurs clients et de peutêtre conclure ce marché si important pour préserver l’emploi dans un pays malade
économiquement, mais plus encore malade de ses corporatismes égoïstes et trop
étroits d’esprit. Votre peur n’est pas pire que celle de ces enfants qui ne verront
pas leur papas ou leur mamans rentrer ce weekend pour leur anniversaires, parce
que bloqués de l’autre côté de l’Atlantique, confiants qu’ils ont été de confier leur
voyage et leur argent à Air France, et souvent heureux d’avoir voyagé Français en
soutenant notre fleuron national !
Bien que les disparités salariales existent chez Air France (comme elles existent
partout ailleurs), l’échelle de vos salaires doit rendre plus d’un français pensifs.
Toujours d’après le Monde du 16 Septembre « Un copilote débutant chez Air
France, sur un Airbus A320, un moyen-courrier, touche environ 3 500 euros. Son
homologue de Transavia débute à 4 000 euros et peut empocher jusqu'à 7 000
euros « les bons mois avec beaucoup d'heures supplémentaires », explique Antoine
Amar, ancien d'Air France, adhérent du SNPL, aujourd'hui copilote sur Transavia.
…/… Les pilotes ayant quelques années de maison sont bien mieux payés. Un
commandant de bord chez Air France, ou encore son homologue chez Transavia, la
filiale à bas coûts, touchent par exemple 110 000 à 120 000 euros bruts par an. En
revanche, le gradé d'Air France aura dû grimper patiemment, pendant 16 à 17 ans,
les échelons de l'échelle de séniorité d'Air France avant de parvenir à ce poste et à
ce niveau de rémunération…./… Quand un commandant de bord en fin de carrière,
sur A380 par exemple, le navire amiral de la compagnie Air France, émarge à
environ 200 000 euros bruts par an, son collègue d'Airlinair, une compagnie locale
regroupée sous la bannière de HOP, le pôle de compagnies régionales d'Air France,
est, lui, payé 1 500 euros par mois » (bit.ly/1mhqMm3)
Messieurs les pilotes, le monde change !
Que vous cherchiez à préserver vos avantages acquis, vos statuts privilégiés, vos
salaires rondelets… est en soi légitime, et somme toute très humain. Mais que
vous preniez en otage le pays, contribuiez à rendre l’image de la France, déjà peu
reluisante à l’étranger, plus exécrable encore… que vous priviez votre propre
compagnie de peut-être renouer avec les bénéfices, de se battre sur un marché où
d’autres feront à votre détriment ce que vous lui refusez de faire, car le monde est
global et le marché cruel… que vous empêchiez nos entreprises et beaucoup
d’entreprises en Europe et dans le monde de travailler normalement en leur
faisant perdre des millions d’heures de travail, et sans doute des millions d’Euros…
est tout simplement inacceptable !
Vous ne pensez qu’à vous, à vos petits intérêts particuliers, alors que la grandeur
de votre métier devrait s’apparenter à celle d’un service public qui, quand il est
privé, devrait avant tout s’attacher à la satisfaction totale et permanente de ceux
qui le font vivre, ses clients.
Nous sommes 3 cadres français, bloqués à Sao Paulo. Nous allons finalement
rentrer chez nous, avec plus de 24 heures de retard, des frais et de la fatigue
supplémentaires car devant faire escale à Lisbonne. Votre grève ridicule profitera
ainsi à la TAP (compagnie aérienne Portugaise) et contribuera à aider le Portugal à
sortir de la crise. C’est peut-être justice pour un pays où la totalité des salariés,
quel que soit leur métier, a accepté de changer, eux, et de réduire leur salaire de
prêt de 7% l’an dernier. Elle profitera sans doute plus tard à d’autres, car nous
considérons très sérieusement revoir nos « préférences de voyage »
communiquées à notre agence de voyage, qui quasi chaque semaine nous
emmène aux quatre coins du monde. Jusqu’alors, nous lui demandions de choisir
Air France en priorité… oui le monde change, et va changer encore, plus vite que
vous pouvez a priori l’imaginer, et définitivement plus vite que vous pouvez le
supporter.
Pour conclure j’aurais aimé vous voir plus imaginatifs et plus respectueux de vos
clients dans votre façon de protester. Une idée ? Faire la grève en portant un
brassard tout en assurant un service exemplaire, meilleur que jamais même,
avions à l’heure, service à bord d’exception, petit mot d’accueil sincère et
chaleureux à vos passagers… Nous n’aurions peut-être pas mieux compris les
raisons de cette grève absurde, mais nous vous aurions sans doute admirés d’être
si responsables dans un moment aussi difficile pour notre pays et notre/votre
compagnie, admirés… et peut-être même aimés.
Gabriel Blanc-Lainé