Intégration TD2 Intégrale de Lebesgue : outils de calculs

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Intégration TD2 Intégrale de Lebesgue : outils de calculs
Intégration TD2
Intégrale de Lebesgue : outils de calculs
Préparation à l’agrégation de mathématiques, ENS Cachan.
e-mail : [email protected]
On désigne par (X, A , µ) un espace mesuré.
L 1 (µ) désigne l’ensemble des fonctions mesurables complexes f définies sur X vérifiant :
Z
|f |dµ < ∞
X
1
Théorème fondamental du calcul :
Ce théorème regroupe deux résultats, connus depuis l’intégrale de Riemann (on omet volontairement
les hypothèses pour l’instant) :
Z x
« F (x) :=
f (t)dt définit une primitive de f »
a
Z
b
« f (b) − f (a) =
f 0 (t)dt »
a
Dans le cadre de l’intégrale de Riemann, pour f régulière, ces résultats s’obtiennent aisément : la continuité
de f fournit le premier, et l’existence d’une dérivée continue suffit au second.
La question est : l’intégrale de Lebesgue permet-elle d’étendre ces résultats, en relaxant les hypothèses
de régularité effectuées sur f ?
La réponse est affirmative :
Définition : (Absolue continuité) [1], p.178
On dit qu’une fonction f définie sur un segment [a, b], à valeurs dans C, est absolument continue sur [a, b] si, pour tout ε > 0 il existe δ > 0 tel que pour toute famille disjointe d’intervalles
]α1 , β1 [, ]α2 , β2 [, . . . , ]αn , βn [ inclus dans I et vérifiant :
n
X
(βi − αi ) < δ , on ait
i=1
n
X
|f (βi ) − f (αi )| < ε
i=1
Théorème : [1], p.174 et suivantes
1. Si f ∈ L1loc (R) alors F est presque partout dérivable, et, presque partout : F 0 (x) = f (x).
2. Si f : R → R est absolument continue, alors elle est dérivable presque partout, f 0 ∈ L1loc et :
Z
f (b) − f (a) =
b
f 0 (t) dt.
a
Remarque :
La preuve de ce théorème est trop longue pour être abordée en TD ou présentée en développement. Cependant le résultat est important et peut être mentionné dans les leçons portant sur l’intégration, à condition
de préciser qu’il est ADMIS si on ne sait pas le démontrer. Le théorème de Rademacher, non énoncé ici,
traite le cas des fonctions lipschitziennes (c’est donc un cas particulier du théorème précédent) et peut
éventuellement servir de développement (difficile).
1
2
Intégrales à paramètre :
2.1
Énoncés :
Dans les théorèmes de régularité qui suivent, (E, d) est un espace métrique. On considère f : E × X → C,
et on note :
Z
F (t) := f (t, x) dµ(x).
Théorème : (continuité sous le signe intégral) [2], p.138
Soit a ∈ E. Si :
(i) Pour tout t ∈ E, x 7→ f (t, x) est mesurable.
(ii) Presque partout (en x), t 7→ f (t, x) est continue en a.
(iii) Il existe g ∈ L 1 (µ) telle que, pour tout t ∈ E :
|f (t, x)| ≤ g(x)
presque partout en x.
Alors F est définie en tout point de E et continue en a.
Théorème : (dérivation sous le signe intégral) [2], p.139
On suppose ici que E = I est un intervvalle ouvert non vide de R. Si :
(i) Pour tout t ∈ I, f (t, ·) ∈ L 1 (µ).
(ii) Presque partout (en x), t 7→ f (t, x) est dérivable sur tout I.
(iii) Il existe g ∈ L 1 (µ) telle que, pour tout t ∈ E :
∂f
(t, x) ≤ g(x)
∂t
presque partout en x.
Alors F est définie et dérivable en tout point de I, de dérivée :
Z
∂f
(t, x)dµ(x)
F 0 (t) =
X ∂t
Remarque : Le théorème précédent est en fait un corollaire d’un résultat plus général dans lequel la
dérivabilité supposée et obtenue se limite à un seul point. L’hypothèse de domination se fait sur le taux
d’accroissement dans ce cas là ; on la retrouve d’ailleurs ici grâce au théorème des accroissements finis.
Théorème :(Intégration à paramètre complexe) [3], p.94
Soit A un borélien de Rd , Ω un ouvert de C. Soit F : Ω × A → C vérifiant :
(i) Pour tout z ∈ Ω, l’application x 7→ F (z, x) est mesurable.
(ii) Pour presque tout x ∈ A, l’application z 7→ F (z, x) est holomorphe dans Ω.
(iii) Pour tout compact K ⊂ Ω il existe une fonction uK ∈ L1 (A) telle que
|F (z, x)| ≤ uK (x)
pour tout z ∈ Ω et presque tout x ∈ A.
Alors la fonction :
Z
f (z) =
F (z, x)dx
A
est holomorphe sur Ω et toutes ses dérivées s’obtiennent par dérivation sous le signe intégral.
2
2.2
Exercices :
Exercice 1 : Taupin’s style [7], p.200
Calculer l’intégrale :
Z ∞
0
arctan(πx) − arctan(x)
dx
x
Z
Indication : On utilisera l’expression arctan(z) = z
1
arctan0 (sz)ds et l’égalité, valable pour tout z > 0 :
0
1
π
arctan(z) + arctan( ) = .
z
2
Exercice 2 : Transformée de Fourier de la Gaussienne [4], p.227-228
Prouver que la fonction
Z
2
z 7−→
eitz e−t /2 dt
R
est entière.
2
En déduire la transformée de Fourier de la Gaussienne t 7→ e−t /2 en admettant la valeur de l’intégrale
de Gauss :
Z
√
2
e−t /2 dt = 2π
R
Indication : On pensera au théorème des zéros isolés.
Exercice 3 :Une intégrale semi-convergente
A
Z
sin(x)
dx convergent, lorsque A → +∞,
x
bien que l’intégrande ne soit pas intégrable sur R+ . On parle d’intégrale semi-convergente, ou d’intégrale
impropre.
sin(x)
1. Vérifier que la fonction x 7→
n’est pas intégrable sur R+ .
x
2. On considère :
Z +∞
Z t
sin(x) −tx
sin(x)
F (t) :=
e dx et G(t) :=
dx
x
x
0
0
Le but de cet exercice est de démontrer que les intégrales
0
(a) Vérifier que F est bien définie et même de classe C 1 sur R∗+ et en donner une expression sur
ce domaine.
(b) Montrer que G admet une limite finie en +∞, i.e. qu’il s’agit bien d’une intégrale impropre.
Z A
sin(x) −tx
e dx, établir pour t > 0 :
(c) En considérant les intégrales tronquées
x
0
Z
0
+∞
Z
sin(x) −tx
e dx =
x
G(u/t)e−u du
0
Z
(d) En déduire la valeur de l’intégrale impropre
0
3
+∞
+∞
sin(x)
dx.
x
3
3.1
Fubiniseries :
Énoncés : [2], p.221-222
Théorème :(Fubini-Tonelli)
Soient f : (X × Y, A ⊗ B) → R+ une fonction mesurable, µ et ν deux mesures σ-finies respectivement
sur (X, A ) et (Y, B). Alors :
R
R
(a) Les fonctions partout définies x 7→ Y f (x, y)ν(dy) et y 7→ X f (x, y)µ(dx) sont respectivement A
et B-mesurables.
(b)
Z Z
Z
f dµ ⊗ ν =
X×Y
X
Z Z
f (x, y)ν(dy) µ(dx) =
f (x, y)µ(dx) ν(dy).
Y
Y
X
(Ces égalités ont lieu dans R+ .)
Théorème :(Fubini-Lebesgue)
Sous les mêmes hypothèses que le théorème précédent, en supposant cette fois-ci f ∈ L 1 (µ ⊗ ν), à
valeurs dans C, on a :
(a) µ(dx) presque partout, y 7→ f (x, y) ∈ L 1 (ν),
ν(dy) presque partout, x 7→ f (x, y) ∈ L 1 (µ)
Z
Z
(b) x 7→
f (x, y)ν(dy) ∈ L 1 (µ) et y 7→
f (x, y)µ(dx) ∈ L 1 (ν), ces fonctions étant définies respecY
X
tivement µ-p.p. et ν-p.p.
(c)
Z Z
Z
f dµ ⊗ ν =
X×Y
3.2
X
Z Z
f (x, y)ν(dy) µ(dx) =
f (x, y)µ(dx) ν(dy).
Y
Y
X
Exercices :
Exercice 1 : Exemple
Soit f : (X, A ) → R+ mesurable.
Montrer que :
Z
∞
Z
f dµ =
X
µ(f > t) dt.
0
Exercice 2 : Contre-exemple [2], p.223
Soit f (x, y) := 2e−2xy − e−xy .
Montrer que :
Z
1
Z
Z
Z
f (x, y)dxdy 6=
0
R+
1
f (x, y)dydx
R+
0
Exercice 3 : [2], p.230, Attention à la faute !
On rappelle que pour tout f ∈ L 1 (R), la transformée de Fourier de f est définie sur R par fˆ(t) :=
Z
R
(a) Calculer, pour a > 0, la transformée de Fourier de x 7→ e
−a|x|
Z
(b) Soient a > 0 et fa la fonction définie sur R par : fa (t) :=
Z
a
Montrer que fa (t) =
e−|y| dy
2 + (y + t)2
a
R
R
.
e−itx −a|x|
e
dx.
1 + x2
1
(c) En déduire la transformée de Fourier de x 7→ 1+x
2.
Indication : On pourra utiliser le changement de variable : s =
4
y+t
a .
f (x)e−itx dx.
4
4.1
Changements de variables :
Le cas élémentaire :
Théorème : [2], p.25
Soit ϕ ∈ C 1 ([α, β], R) et f ∈ C 0 (ϕ([α, β])), alors :
β
Z
Z
0
ϕ(β)
f (ϕ(u))ϕ (u)du =
α
4.2
f (x)dx
ϕ(α)
Le cas général :
Théorème :(Changement de variables) [2], p.239-240
Soit ϕ un C 1 -difféomorphisme entre deux ouverts ∆ et D de Rd . Alors pour tout f ∈ L 1 (D), on a
l’égalité :
Z
Z
f (x)dx =
f (ϕ(u))|Jϕ |(u)du
D
∆
Rappel : Le Jacobien Jϕ est le déterminant la différentielle de ϕ. On peut se souvenir de la formule de
changement de variable en pensant au cas de la dimension 1 :
4.3
x
=
ϕ(u) =⇒ dx = ϕ0 (u)du en dimension 1
x
=
ϕ(u) =⇒ dx = |Jϕ |(u)du en dimension n
Coordonnées polaires sur R2 : [2], p.245
On considère le difféomorphisme :
ϕ : R∗+ ×] − π, π[
→
(r, θ) 7→
R2 − (R− × {0})
ϕ(r, θ) := (r cos(θ), r sin(θ))
Comme R+ × {0} est de mesure de Lebesgue nulle, on a, pour f ∈ L 1 (R2 ) :
Z
Z
Z +∞ Z π
f (x)dx =
f (x)dx =
f (r cos(θ), r sin(θ))rdθdr
R2
4.4
R2 −(R− ×{0})
r=0
θ=−π
Exercices :
Exercice 1 : Un calcul original de ζ(2) [5] et aussi [6], chpt. 6
Z
X 1
dxdy
=
.
(a) Montrer que
n2
[0,1]2 1 − xy
n≥1
(b)
(i) Appliquer le changement de variable u = (x + y)/2, v = (y − x)/2 à l’intégrale précédente pour
obtenir :
Z 1/2 Z u
Z 1
Z 1−u
ζ(2)
dudv
dudv
=
+
2 + v2
4
1
−
u
1
−
u2 + v 2
u=0 v=0
u=1/2 v=0
(ii) Retrouver la valeur de ζ(2).
Exercice 2 : Volume de la boule euclidienne unité de Rd : [2], p.246
Soit f ≥ 2. Notons vd := λd ({x ∈ Rd ; x21 + · · · + x2d ≤ 1}.
1. Avec la convention v0 = 1, obtenir la relation :
Z
d
vd = vd−2
(1 − (x2 + y 2 ) 2 −1 )dxdy
{x2 +y 2 ≤1}
5
2. En déduire, après être passé en polaire, la formule générale du volume de la boule unité en dimension
d:
d
π2
– Si d est pair : vd = d ,
( 2 )!
d−1
2d π 2 ( d−1
2 )!
.
– si d est impair : vd =
d!
Références
[1] W. Rudin. Analyse réelle et complexe (3ième édition).
[2] Marc Briane, Gilles Pagès. Théorie de l’intégration (4ième édition).
[3] É. Amar, É. Matheron. Analyse complexe.
[4] I. Stewart. Complex Analysis.
[5] T.M. Apostol. “A proof that Euler missed. Evaluating ζ(2) the easy way”, Maht. Intelligencer 5
(1983), 59-60.
[6] Aigner, Ziegler. Raisonnements divins (Proofs from the Book), Springer.
[7] É. Leitchnam. Exercices Corrigés de Mathématiques des concours X/ENS, Tome Analyse.
6