Classe de 1ère S3 SEQUENCE 4 : LA3, Fin de partie, (milieu de la

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Classe de 1ère S3 SEQUENCE 4 : LA3, Fin de partie, (milieu de la
Classe de 1ère S3
SEQUENCE 4 : LA3, Fin de partie, (milieu de la pièce), Beckett, 1957
Introduction :
- auteur + contexte : utilisez ce que vous avez imprimé en salle informatique (contexte
historique, vie de Beckett, présentation du théâtre de l’absurde, présentation de l’œuvre :
dans cette pièce est mis en scène le lien tragique qui voue deux êtres à la haine et à la
dépendance. Condamnés à attendre la mort sans pouvoir agir, ils comblent le néant de leur
condition en se faisant souffrir.
- situation de l’extrait : (voir paratexte sur le polycop.) + éléments complémentaires -> Cet
extrait de Fin de Partie, situé au milieu de la pièce, peut apparaître comme un point culminant
dans la révélation des relations qui unissent les deux personnages principaux. En effet, dans
ce passage est confirmée la volonté de Hamm d’en finir avec l’existence. Ce dernier attend de
Clov qu’il accepte de le tuer, Tu n’as qu’à nous achever (un temps.) Je te donne la combinaison
du buffet si tu jures de m’achever. Par ailleurs, le spectateur apprend pourquoi Clov n’est pas
prêt à le faire.
- annonce de la problématique : comment dans cette scène, Beckett, à travers des
personnages interdépendants, montre-t-il le tragique de la condition humaine ? (autres
problématiques possibles, avec adaptation du plan : comment Beckett montre-t-il dans
cette scène l’absurdité de la condition humaine ? En quoi la dépendance entre Hamm et Clov
illustre-t-elle le tragique de la condition humaine ? Comment ce dialogue met-il en évidence
les relations complexes qui unissent Hamm et Clov ? …)
- annonce du plan : Nous verrons dans un premier temps que Hamm et Clov sont unis par des
relations complexes d’interdépendance pour montrer dans un deuxième temps que ces deux
personnages révèlent le caractère tragique de la condition humaine.
ATTENTION : ce plan détaillé est à compléter absolument avec vos propres notes !
I)
Deux personnages interdépendants
a) Un projet commun ?
- Au début de l’extrait, Hamm semble élaborer un projet de départ avec Clov: « Allons-nous
en tous les deux, vers le sud ! » (l.1-2). Nous pouvons ainsi relever le champ lexical du voyage
maritime : « mer, radeau, courants, embarquerai » (l.2 à 7). Mais le projet est aussitôt nié :
« Seul, je m’embarquerai seul ! » (l.7), ce qui est impossible pour Hamm qui ne peut marcher
et reste sous la dépendance de Clov.
- Malgré ce besoin l’un de l’autre, il paraît donc impossible pour eux de vivre ensemble, ce qui
est souligné par l’antithèse « tous les deux/seul » (l.2-7) et qui rappelle la confrontation des
deux personnages tout au long de la pièce.
- On relève également l’absurdité du projet, « vers le sud » (l.2), puisque le lieu même de
l’action reste indéterminé ; quant à l’évocation du « radeau » (l.3 et 8) et au caractère fragile
de cette embarcation, on peut penser qu’il représente métaphoriquement le naufrage de leur
existence.
- Enfin, notons la symbolique de la « porte » (voir didascalie l.10), frontière entre leur refuge
(côté intérieur) et les dangers du monde extérieur (matérialisés par « les squales » l.13) ; une
porte que Clov semble déterminé à franchir (on le voit aux didascalies : gérondif « se
précipitant », l.10 ; « il va » x2 l.1- et 18) tandis que Hamm tente par trois fois de le retenir,
par l’impératif « Attends ! » : l.12-16-19
Transition : cette possibilité de fuir étant rapidement écartée, l’échange redevient alors plus
« réaliste » pour revenir au thème de la souffrance physique.
b) Une souffrance commune?
- Dans une stichomythie, Hamm interroge Clov pour lui faire comprendre que sa situation est
meilleure que la sienne, « Comment vont tes jambes ?/Mal/Mais tu marches » (l.24-26).
Jouant ainsi sur l’implicite Hamm fait comprendre à Clov qu’il souffre vraiment et qu’il devrait
avoir pitié de lui. Il lui prédit alors qu’il sera un jour comme lui : « tu seras aveugle/ tu seras
assis/ tu ne te lèveras pas … » (l.29-30-36), « sauf que toi tu n’auras personne, parce que tu
n’auras eu pitié de personne … » (l.52-55). Cette tirade de Hamm, au futur simple à valeur
prédictive, sonne ainsi comme une condamnation où apparaît le plaisir pris par Hamm à faire
souffrir Clov, comme le montre le CC de manière dans la didascalie l.29 : « avec volupté. »
- A la suite de cette tirade « Prophétique », suit un échange de répliques où Hamm rappelle
son souhait d’en finir avec l’existence et essuie un nouveau refus de la part de Clov, « Je ne
pourrais pas t’achever. » l.76
c) Un passé commun ?
L’échange se termine alors sur un faux dialogue dans lequel le spectateur apprend que Hamm
a recueilli Clov quand il était petit et qu’il lui a servi de père, « C’est moi qui t’ai servi de
père/Oui » l.89-90. Clov étant ainsi redevable à Hamm de sa situation, on comprend que ce
dernier exerce un chantage sur son compagnon pour qu’il accède à sa requête. Cependant, Clov
ne peut s’y résoudre car alors il perdrait tout.
Transition : Les relations qui unissent les deux personnages de Beckett sont complexes parce
qu’ils se détestent mais ont besoin l’un de l’autre. Pour preuve la répétition du « Je te
quitte » jamais suivi des actes. Hamm et Clov sont ainsi voués à une situation tragique qui les
conduit à se haïr tout en continuant à jouer le jeu de l’existence.
II)
Le caractère tragique de la condition humaine
a) Une relation servile et tragique
A l’image de Clov et Hamm, l’Homme apparaît ici comme condamné à errer avec ses semblables
et à les supporter, conférant ainsi à la scène une dimension tragique.
- Le drame mis en scène dans cet extrait consiste à confronter deux personnages qui ne
pourront jamais s’accorder mais qui demeurent inséparables, à l’image des Hommes.
- Enfermé dans un lieu (monde) étrange, Clov dernier exprime une forme de servilité et une
lassitude qui montrent qu’il a renoncé à sa propre liberté : « Tu ne peux pas nous quitter /
Alors je ne vous quitterai pas » l.70-71 ; l’espace dans lequel il évolue, le « home » semble
sphérique et donc clos, comme l’indique la didascalie « Long regard circulaire. » l.94-95 ->
aucune issue ne semble possible (// mort, seule issue de toute vie ?)
- Il est enfin écrasé par la tyrannie de Hamm ; ce dernier va même jusqu’à lui refuser tout
avenir autre que ce qu’il lui prédit, c’est-à-dire les pires malheurs jusqu’à la mort : « Tu seras
assis quelque part, petit plein perdu dans le vide, pour toujours, dans le noir. » l.30-32 ;
sachant qu’il ne se souvient pas de son passé (« Trop petit. », l. 81)
b) Une remise en cause du langage
- Notons tout d’abord que le dialogue est mené par Hamm : il parle davantage (voir sa tirade
l.28 à 55), il pose des questions, et le seul rôle de Clov semble être d’y répondre de manière
laconique, notamment par l’emploi d’adverbes seuls : à la question sur l’état de ses yeux, il
répond « Mal. » (l.21), « Suffisamment » (l.23) … ses réponses trahissent sa mauvaise
maîtrise du langage ; et l’on voit que cet échange n’est guère équilibré.
- Hamm va même jusqu’à employer un « je » qui ne le désigne pas ; ce faisant, il subtilise la
possibilité de s’exprimer de Clov dans une mise en abîme du discours direct : « Un jour tu te
diras, Je suis fatigué … » l.33-34.
- Ensuite, le langage et la communication (apanage de l’Humanité, possibilité de comprendre
une situation …) sur lesquels repose le genre théâtral, sont ici remis en cause et participent à
l’expression du tragique des personnages. En effet, comme dans toute l’œuvre, le caractère
mécanique et répétitif des répliques, ici la stichomythie, et le rejet de l’illusion théâtrale,
(mise en abîme « Même réplique » l.83-84), ainsi qu’un certain nombre d’expressions
tautologiques, « S’il y en a il y en aura », l.15, « Tu ne peux pas nous quitter/Alors je ne vous
quitterai pas », l.70-71, « Je ne pourrais pas t’achever/Alors tu ne m’achèveras pas », l.7677, donnent l’impression d’un langage qui suit l’agonie des personnages en perdant sa fonction
de communication. De même, le comique vient briser l’effet tragique de la tirade de Hamm :
« Je ne peux pas m’asseoir. » l.59, et traduit l’absurdité du langage.
Nous comprenons enfin que, dans ces conditions, parler revient simplement à meubler le
silence pour mieux combler « L’infini du vide » (l.46-47). Les deux personnages sont
« condamnés » à échanger des paroles en attendant la mort.
c) Une vision pessimiste la vie
Le tragique évoque le destin implacable qui conduit l’homme à la souffrance et à la mort, ainsi
que son l’incapacité à apporter de véritables réponses aux questions qu’il se pose.
- La scène étudiée évoque ainsi la déchéance physique de l’homme, la vieillesse qui ruine peu à
peu son corps et son esprit et la mort à laquelle il ne peut en fin de compte échapper. En cela,
Hamm et Clov relèvent du registre tragique.
- Cette situation tragique est alors accentuée par la souffrance et la solitude qui viennent
s’ajouter à l’impossibilité d’échapper à ce destin. Hamm veut fuir vers le sud mais il sait que
cela est impossible. Il tâche de faire souffrir Clov, mais ce dernier ne semble pas réagir
suffisamment. Il exprime enfin son désir de mourir, mais Clov lui refuse cette possibilité.
- Ainsi, dans tous les cas, Hamm ne peut échapper à sa condition d’homme. On peut
remarquer, sur ce point, la comparaison initiale avec les « mammifères » l.4-5, qui assimile les
hommes à des animaux. Il donne de ce fait une vision dégradée de la condition humaine, que
l’on peut résumer dans l’allégorie qui clôt la tirade de Hamm, « L’infini du vide sera autour de
toi, tous les morts de tous les temps ressuscités ne le combleraient pas, tu y seras comme un
petit gravier au milieu de la steppe. » l. 46à 50, allégorie traduisant l’immense solitude et
l’immense faiblesse de l’homme face à sa condition.
Conclusion :
- réponse à la problématique : Dans cet extrait de Fin de partie, le spectateur découvre quels
sont les liens complexes de dépendance et de domination qui unissent Hamm et Clov.
Condamnés à se haïr, ils meublent ainsi leur existence de paroles qui constituent l’action ou
plutôt l’absence d’action. Cette négation du langage s’ajoute à la négation des personnages qui,
par un effet de miroir, viennent à se ressembler, « Un jour tu seras aveugle, comme moi. »,
l.29-30. Fin de Partie symbolise également le tragique de la condition humaine : les Hommes,
dont l’existence est essentiellement faite de souffrances, sont condamnés à vivre ensembles,
à s’agiter et à bavarder, dans un monde énigmatique, en attendant leur inéluctable mort.
(-> théâtre et philosophie se rejoignent)
- ouverture : Pour conclure, l’on peut observer que le rapport maître/serviteur est souvent
mis en scène au théâtre, et particulièrement le désir d’émancipation du subalterne; on peut
citer par exemple Ruy Blas (1838), pièce de Victor Hugo qui voit la mort de Don Salluste
assassiné par son valet.
ENTRETIEN :
QUESTIONS POSSIBLES :
Envisagez des questions et leurs réponses sur votre fiche !
Par exemple :
- sur l’ensemble de l’œuvre, que vous avez lue en cursive : …
- sur la représentation de cette pièce (DVD vu en classe) : rappelez-vous du décor, des
accessoires, des costumes des acteurs …
Ex. comment la mise en scène de Charles Berling rend-elle compte de la relation particulière
qui unit les personnages ? …
- sur le théâtre de l’Absurde (voir synthèse collée en cours) et pour en savoir plus :
http://letheatredeabsurde.blogspot.fr/
- sur les représentants du Théâtre de l’Absurde : savoir citer Eugène Ionesco (+ titres),
Arthur Adamov, Jean Genet (en plus de Beckett + titres)
- savoir définir le mouvement de l’Absurde (et savoir citer Camus …), connaître son contexte
historique (voir cours) ; savoir que certains auteurs ont posé les jalons d’une écriture absurde
avant même que le mouvement soit nommé et défini (comme Alfred Jarry et sa série des Ubu,
fin XIXème siècle !)