n. 168 June 2014

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n. 168 June 2014
n. 168 June 2014
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Juliet 168
Copertina
Brigitte Waldach "Echo" 2014, graphite, gouache, pigmentpen
on handmade paper, cm 146 X 140, ph Bernd Borchardt,
courtesy Brigitte Waldach and Conrads Gallery, Düsseldorf
Intervista
42 | Pier Paolo Calzolari tra l’Essere e il Divenire / Luciano Marucci
48 | Il Maxxi di Hou Hanru / Luciano Marucci
52 | English Breakfast #12 / Matilde Martinetti
58 | Photofestival 2014. Lisa Bernardini / Linda Silvia
62 | Public and Confidential. Wunderkammern / Giulia Bortoluzzi
68 | Fondazione. Ermanno Casoli / Francesca Agostinelli
70 | Calligrafie. Silvio Ferragina / Adriana Iezzi
72 | Milena Barberis. “Sottili Tradimenti” / Emanuele Magri
73 | Anna Franceschini. Macchina Cuore-Polmoni / Valentina Guttuso
80 | Anna D’Ambrosio. Amy-D / Emanuele Magri
82 | Mariagrazia Pontorno. Linguaggi Digitali / Maria Vinella
85 | Mia Pearlman: Drawings in Space / Leda Cempellin
86 | Andrea Lausi / Serenella Dorigo
Reportage
50 | Biennale Marrakech / Emanuele Magri
Presentazione
54 | Caotica. Arte e Scienza / Ruggero Maggi
69 | Manuel Quintiero / Marcello Francolini
74 | Bruna Daus. I Binomi / Guia Placeo
77 | La Bellezza Matematica. Tobia Ravà / Marina Bakos
79 | Marche Centro d’Arte. Quarta Edizione / Nikla Cingolani
Recensione
56 | Sergio Ragalzi. Il Corpo e il Mondo / Marisa Vescovo
67 | Giovanni Pulze. “Angeli Metropolitani” / Antonio Cattaruzza
76 | Gregori Maiofis. La Favola Umana / Emanuela Zanon
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Focus
60 | Jean De Loisy. Président du Palais De Tokyo / Barbara Polla
64 | Aqua Aura. “Boudoir” / Francesca Caputo
71 | Biennale Italia-Cina. Pechino 2014 / Sandro Orlandi
78 | Giampiero Zanzi. Isola Bella / Liviano Papa
81 | Hale Karaçelik / Ferdan Yusufi
Incontri
66 | Appuntamento in Studio #2. Emanuele Becheri / Gino Pisapia
Fotoritratto
75 | Silvia Basiacco / Fabio Rinaldi
87 | Renata Fabbri / Luca Carrà
Rubrica
84 | Ho del Marketing / Angelo Bianco
83 | P. P.* Luigi Negro / Angelo Bianco
Spray
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88 | Recensione mostre / AAVV
Jean de Loisy
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Président du
Palais de Tokyo
interview by B A R B A R A P O L L A
nata in Svizzera, vent’anni fa apre la galleria Analix Forever.
Da sempre ha incentrato la sua attenzione sul lavoro di artisti emergenti.
Si ricordano i nomi di Sarah Lucas, Tracey Emin, Martin Creed, Maurizio
Cattelan, Vanessa Beecroft, Eva Marisaldi, Stefano Arienti.
Jean de Loisy, Prèsident du Palais de Tokyo (Paris), 2012, © Bertrand Guay / AFP,
courtesy Palais de Tokyo
«Il n’y a pas d’art contemporain, seulement des artistes du présent. À
travers le regard des artistes du présent,
je comprends mieux l’art du passé». JDL
Maître du désordre
Au Palais de Tokyo, la plus grande institution d’art contemporain en
France, Jean de Loisy, qui préside à sa destinée depuis 2011, assume des
responsabilités énormes : le Palais est constamment en transformation,
il est à réinventer au quotidien, il faut l’adapter aux expositions les plus
complexes, aux demandes des artistes comme à celles, souvent très
différentes, des politiciens de la culture, répondre à mille sollicitations
de tout bord et tenir la barre de cet immense navire qu’il veut dédier aux
artistes du présent. Le commissaire éclairé des « Maîtres du Désordre » se
pose lui aussi en Maître d’un désordre créatif et d’un art dionysiaque. Et
l’on peut dire que Jean de Loisy vit désormais au Palais de Tokyo. Mais il a
eu une vie avant le Palais : il a, entre autres, été inspecteur à la Création au
Ministère de la Culture, conservateur de la Fondation Cartier et au Centre
Georges Pompidou et a notamment organisé, en qualité de commissaire
indépendant, « La Beauté » en Avignon, les «Traces du sacré» à Beaubourg,
Monumenta 2011 avec Anish Kapoor, le Pavillon israélien à la Biennale de
Venise 2011 avec Sigalit Landau et tant d’autres.
focus
La Madonna del Parto
Pour cet homme fasciné par le sacré, l’art religieux s’est construit à partir de
nos craintes et de nos espoirs face au mystère de notre destin. Jean de Loisy
témoigne de sa grande admiration pour les religions, pour l’extraordinaire
effort de philosophie et de compréhension de l’humain dont elles on
fait preuve, du corpus qu’elles en ont fait, admirable d’un point de vue
philosophique et métaphysique. Il se dit, encore une fois, fasciné par les
beautés que les religions ont produites. En Italie, ces beautés sont infiniment
riches – mais s’il ne devait en retenir qu’une seule, ce serait sa rencontre,
dans la chapelle du cimetière de Monterchi, dans la province, avec la
Madone enceinte de Piero della Francesca, à une époque où elle n’était pas
encore protégée comme aujourd’hui (n’est-elle pas devenue l’unique pièce
d’un musée créé exprès pour elle ?). « À l’époque, elle était là comme un
objet de dévotion collective et non comme une œuvre d’art et c’est peut-être
l’image la plus énigmatique,, la forme la plus paradoxale des représentations
chrétiennes italiennes, et le fait que cette Madone enceinte soit là, dans un
cimetière, m’a beaucoup ému : elle évoquait de manière très émotionnelle le
grand cycle de la vie et de la mort».
L’irremplaçable parole des artistes
Quand l’art contemporain entre dans sa vie, très tôt en réalité, Jean de Loisy
se met alors à apprendre des artistes eux-mêmes. Témoin passionné, il fera
d’innombrables visites d’atelier, toujours à l’écoute des paroles d’artistes.
«J’ai surtout suivi les paroles des artistes et je suis toujours fasciné par
le saut qu’ils me font faire entre les questions que posent les œuvres du
passé et celles que pose leur propre travail. … C’est de là, de ces passions
croisées pour les arts de toutes les époques et le contemporain, que sont
nées les expositions thématiques que j’ai présentées, dans lesquelles j’ai
associé les arts venus de mondes souvent ignorés avec les œuvres d’artistes
contemporains».
Penone, Anselmo, de Dominicis… puis Cuoghi, Gioni, Lampi!
«Je me suis beaucoup intéressé à l’arte povera, j’ai créé des liens personnels
avec Giuseppe Penone, Giovanni Anselmo, j’avais vingt ans, et j’ai montré
leur travail à la fin des années 70 déjà… et j’ai fait beaucoup de rencontres
avec des artistes italiens, qui m’ont fait voir autrement les œuvres du
passé aussi, qui m’ont offert des occasions extraordinaires de rencontrer
le patrimoine italien : je n’arrive à voir les œuvres du passé qu’à travers les
yeux des artistes, alors tout d’un coup m’apparaissent des choses invisibles
autrement. Mais il y a aussi des artistes que je n’ai pas rencontrés, par
exemple, je n’ai pas rencontré Gino de Dominicis, un artiste admirable dont
j’ai en revanche pu montrer Calamita Cosmica grâce à Laurent Le Bon».
«En Italie aujourd’hui, après les temps obscurs de la Transavanguardia, et
pour des raisons à la fois économiques, politiques et culturelles, la scène
artistique italienne paraît comme très difficile à appréhender dans son
ensemble, un ensemble confus, duquel se dégagent cependant certaines
figures qui me fascinent tel l’artiste Roberto Cuoghi ou les commissaires
Massimiliano Gioni – dont l’éloge n’est plus à faire – ou Antonia Lampi,
qui a créé au Palais une exposition de toute beauté. Ce sont ce type de
rencontres qui construisent ma pensée».
Maurizio Cattelan au Palais de Tokyo, vernissage de l’Etat du Ciel, ph. Jean Picon/SayWho
focus
Le papier de toilettes de Maurizio Cattelan
Et puis, bien sûr, entre l’Italie et Jean de Loisy, il y a Maurizio Cattelan,
dont il a amené en France l’une des premières pièces célèbres de l’artiste,
les (Auto-) Portraits Robots, et qu’il reconnaît comme «un observateur actif
de la scène de l’art qui, plutôt que de produire des œuvres d’art, invente un
dispositif collectif qui lui permet d’exercer l’acidité de son regard sur les
réalités de notre temps et de nous proposer, à travers ses extraordinaires
collections d’images, des portraits très étranges de ce que l’Occident est
aujourd’hui».
Et c’est ainsi qu’à partir de juin 2013, les sept fenêtres du Palais de Tokyo
donnant sur l’avenue du Président Wilson sont confiées au magazine
Toiletpaper, magazine fondé en 2010 par Maurizio Cattelan et Pierpaolo
Ferrari et constitué exclusivement de photographies résultant du processus
« digestif » d’une surconsommation visuelle. Toiletpaper explore notre
obsession contemporaine pour les images et adopte l’esthétique de la
photographie commerciale et de son iconographie pop pseudo-attrayante.
Toiletpaper se considère comme un projet démocratique qui fonctionne
par diffusion virale. Dans ce contexte et dans cette logique, le Palais de
Tokyo offre ses sept fenêtres de la façade monumentale du bâtiment à un
arrangement intriguant qui parasite l’espace public de l’avenue du Président
Wilson autant qu’il infiltre l’expérience du visiteur au restaurant du Palais.
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And last but not least, France Culture
Le goût extraordinaire que Jean de Loisy a pour les rencontres, les
rencontres d’art et celles avec les artistes, les rencontres aussi entre l’art
«classique» et le plus contemporain qui soit, se concrétisent aujourd’hui non
seulement au Palais de Tokyo, mais aussi sur les ondes de France Culture,
ces ondes qui portent la culture au plus haut. Jean de Loisy anime désormais
«Les Regardeurs», le samedi de 14h à 15h, une émission créée à sa mesure.
Chaque émission sera consacrée à une œuvre – ou plutôt, osons le mot, à
un chef-d’œuvre de l’histoire de l’art, devenu célèbre grâce à l’enthousiasme
de ses commentateurs (d’Apollinaire à Breton, les Regardeurs ce sont eux).
En invités, pour nous parler de ces « objets-insignes », des spécialistes et un
artiste contemporain qui fera le lien entre le passé et la création actuelle, ce
lien si cher à Jean de Loisy: un lien qui selon lui ne peut se faire que par le
regard – et la parole – des artistes d’aujourd’hui.
Family Business au Palais de Tokyo, Ph. Jean Picon/SayWho
Family Business
Et en février 2014, le Palais accueillera une nouvelle extension de «Family
Business», le projet de Maurizio Cattelan et Massimiliano Gioni, avec
Nadja Argyropoulou comme commissaire (Nadja Argyropoulou connaît
bien le Palais de Tokyo, où elle fut la commissaire de Hell As…). En
effet, la galerie new-yorkaise «Family Business», fondée par Maurizio
Cattelan et Massimiliano Gioni, qui a acquis sa renommée, entre autres,
grâce à d’excentriques invitations aux vernissages, qui promettaient aux
destinataires des sapins de Noël à boire ou des interventions de paillettes
en fusion, a fermé en mai dernier, lorsqu’Anna Kustera, la négociante d’art
qui louait l’endroit à «Family Business», a décidé de trouver un nouvel
emplacement. De Chelsea au Palais de Tokyo!
Toilet Paper, Palais de Tokyo