MON LIVRE VITROLLES ITW Pierre TRIBALLIER
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MON LIVRE VITROLLES ITW Pierre TRIBALLIER
PT, 09/10/2011 : En rouge mes - tardives - corrections ITW PIERRE TRIBALLIER Bibliothécaire à Vitrolles de 1984 à 2001 Syndicaliste CGT Jusqu’en 1990, c’était super, il y avait tout à faire. Je découvrais tout puisque j’avais été artisan maçon dans les Alpes de Haute Provence durant plusieurs années, avant de passer le C.A.F.B. = Certificat d’Aptitude aux Fonctions de Bibliothécaire) diplôme professionnel permettant de devenir bibliothécaire. J’étais fasciné par cette « ville-champignon » de 24 000 habitants en 1984, et fin des années 1990, presque 40 000. Je travaillais à la bibliothèque Georges Brassens au quartier de la Frescoule, annexe de la bibliothèque centrale George Sand. La mairie recrutait à tour de bras, tout le monde était jeune, il y avait une dynamique extraordinaire et les budgets augmentaient d’année en année. La ville bénéficiait du statut de ville nouvelle. Le recrutement des bibliothécaires était fait sur des bases professionnelles avec un jury, il n’y avait pas de clientélisme politique. Quand je compare à la situation que je connais bien à Hyères, où je suis en fonction maintenant, cela n’a rien à voir. On avait les coudées franches, c’était un contexte très porteur pour ceux qui avaient envie de bien faire leur métier. Il y avait un bibliobus ancien, spacieux mais vieillot. Les locaux de la bibliothèque centrale George Sand manquaient d’espace pour les animations, pour les bureaux, pas d’espace musique ni de moyen d’en créer un. J’avais une spécialité « Musique » et j’ai été recruté précisément pour créer le fonds « Musique » de la bibliothèquediscothèque Georges Brassens. Les élus n’ont pas été très interventionnistes, on faisait tout entre nous. Le secrétaire général de la mairie, Fernand Léguillier, avait des idées novatrices de management à l’américaine : il faisait beaucoup de 1 séminaires des cadres. C’était passionant mais assez fumeux. Il avait un ego surdimensionné et aimait avoir un aréopage autour de lui, comme le maire, d’ailleurs. Les obsessions du maire étaient la croissance de la ville et le sport. Il y avait une politique tarifaire pour les activités organisées par la mairie (sport, culture, loisirs) mais aucune politique cohérente, pensée. Les professionnels compétents se débrouillaient. Or, les directeurs des services municipaux n’étaient pas issus des classes populaires et concevaient les programmes culturels surtout adaptés aux classes moyennes. Quant à l’urbanisme, on aurait pu penser qu’à la fin du 20ème siècle on aurait su tirer les leçons du passé récent, or on a construit des cages à lapins horizontales avec des voies de circulation aberrantes, des feux rouges partout, tout est riquiqui, tout millimétré, les gens ne peuvent pas accéder à leur garage, par exemple. C’est l’EPAREB qui décidait tout : les décideurs n’y ont jamais habité ! La ville nouvelle était une vache à lait pour tout le monde. Pour le maire : une ville qui grandit donne au maire plus d’importance, plus de moyens…C’était la gestion du « toujours plus » et pas le temps de réfléchir. Un gros gâteau à gérer qui rend fou : il y a eu jusqu’à 1 200 employés à la mairie pour une ville de 30 000 habitants ! J’ai appris beaucoup par les collègues syndicalistes, notamment le directeur également syndiqué à la CGT, Henri Naïditch. Il y avait aussi Marie-Hélène Bastianelli, grande professionnelle qui n’a fait qu’un passage (1985) mais qui m’a beaucoup appris dans le domaine de la lecture publique, militante syndicale, militante de tout…C’était aussi l’épouse de Jean-Claude Izzo. Au niveau syndical on s’aperçoit que malgré la hausse des budgets, la ville néglige de payer les fournisseurs (pratique de la « cavalerie budgétaire »). Je m’en rendais compte au niveau de l’achat des disques : D’une année sur l’autre on passait de Virgin à la Fnac qui alternativement ne voulaient plus de nous faute d’avoir été payés. Le fric partait plus vite qu’il n’arrivait. Il n’y avait aucun contrôle sur ce qui était fait. On a compris aussi que le sport d’élite voulu par le maire le conduirait à sa perte car c’était déconnecté des centres d’intérêt de la population. A l’inverse les besoins sociaux des quartiers n’étaient pas suffisamment pris en compte. Arrivaient dans ces appartements neufs des familles difficiles : à la Frescoule s’installaient des familles gitanes difficiles. Des jeunes venaient se battre dans la bibliothèque à coups de chaises, il y avait des blessures, il fallait appeler la police municipale, on ne savait pas trop comment gérer tout ça, on était un peu livrés à nous-mêmes. On n’a pas 2 recruté, par exemple, d’éducateurs comme dans les maisons de quartiers. Peu à peu, la question de la police est devenue une autre obsession du maire. La donne sociale était contraignante. Plus on mettait de vidéo surveillance et de police municipale et plus il y avait de problèmes. Pendant ce temps, il y avait les délires sur l’équipe de hand-ball championne d’Europe : l’OM-Vitrolles. On avait alors conscience que cette déconnection entre les réalités sociales et les délires sportifs conduirait à une catastrophe. De plus, le maire s’isolait du reste de son équipe, le cabinet se renforçait. Cathy Cau revendiquait pour de meilleures conditions de travail dans les crèches, et pour les bibliothèques, après la période de croissance des budgets d’investissement et des subventions venues du ministère de la Culture, au cours des années 1980, les budgets de fonctionnement de la ville ont stagné (à la Frescoule, après 1987). Pas de vision cohérente des programmes culturels. La priorité n’était ni à la bibliothèque, ni à la culture. On est encore dans un fonctionnement très cloisonné. A la bibliothèque il y a des bibliothécaires et des administratifs mais on n’envisageait pas d’avoir des animateurs, des éducateurs, des agents d’accueil. Nous-mêmes avions une vision assez étriquée : dans une bibliothèque il y a des bibliothécaires et un secrétariat, pas plus. Aujourd’hui on a des équipes mixtes : agents de sécurité, d’accueil, éducateurs hors les murs. Notre fonctionnement même était centré sur le prêt de documents (ils ne rendaient pas les livres, ils cassaient…). On allait voir les familles avec le directeur et on essayait d’aller au contact des gens mais c’était limité et on n’était pas formés à ça. Par exemple, le bibliobus qui circulait dans les quartiers vieillissait, il était lourd et poussif, n’avait plus de freins, son chauffeur (une femme) ne voulait plus le conduite à cause du danger, il passait de plus en plus difficilement le contrôle technique les dernières années, et n’a jamais été remplacé. Il y eu aussi un projet de centre culturel en centre ville, près de la place du marché, un bâtiment qui devait enjamber la double voie : école de musique, bibliothèque, palais des congrès ! … Un projet composite qui posait trop de problèmes techniques d’urbanisme. Du coup, le Stadium va prendre toute la place pour le maire : une grande salle de spectacle et de sport pour l’équipe de hand, et présentée comme une salle polyvalente pour tenter d’être subventionnée par le ministère de la culture. Au moment où le Dôme est en construction à Marseille ! Malgré les avis défavorables du ministère (voir la lettre de Jack Lang) le maire passe outre car il veut sa salle pour le hand. Tout le monde lui a dit « c’est une folie ». C’est aussi le 3 résultat de la politique de communication et du spectacle (l’écharpe blanche…) qui était censé faire parler de Vitrolles. L’ironie, c’est lorsque l’OM/Vitrolles est championne d’Europe, c’est de Marseille que l’on parle, à cause de l’OM et non de Vitrolles ! Il n’y a eu sans doute guère plus de 10 spectacles au Stadium. Il servait à l’arbre de Noël municipal…L’acoustique comme le confort relevait du gymnase. Les vitrollais étaient conscients du gâchis. Le vote FN n’est pas selon moi le fruit d’une volonté unique (première) dans la population : se débarrasser du maire. Les populations déracinées de Vitrolles, une immigration récente…terreau du FN. Plus le cloisonnement urbanistique des petits pavillons (avec leurs nains de jardin) qui est un cloisonnement mental. Il y a eu un choix pour le FN et le maire a tout fait pour leur faciliter le choix. PERIODE FN : En théorie, le FN a une politique culturelle avec leurs grands schémas : préférence nationale, défense du terroir et des artistes locaux, réhabilitation de la Provence (« Vitrolles en Provence » quand il y a 3 Vitrolles en région PACA). Il y a eu des recours devant le TA, notamment de la CGT, et la mairie FN a été obligée de retirer cette appellation sur les documents officiels. Les budgets sont restés constants ce qui signifie qu’on avait moins de moyens : on nous disait de supprimer des abonnements et avec abonnements obligatoires à la revue « Présent », de ne prendre qu’un abonnement à Télérama au lieu de 2. Ils ont été plus prudents qu’à Orange, 2 ans auparavant. A Vitrolles pour la bibliothèque, ça a été une censure économique. On a eu aussi le contrôle des listes d’acquisitions, ce qui ne s’était jamais vu jusqu’alors (VOIR DOCUMENTS DE CAP, NOTES, ET AUTRES de Pierre Triballier). On a eu une valse des directeurs de la bibliothèque qui étaient tous totalement incompétents. On avait des stocks importants de livres dans les réserves et on était très inquiets sur une épuration possible et sournoise. Mais il n’y a pas eu de destruction massive de livres à Vitrolles. La médiatisation de ce qui s’était passé à Orange et Marignane a été utile : Vitrolles devenant mairie FN 2 ans plus tard, les 4 dégâts dans les bibliothèques ont été limités. Le FN a joué l’étouffement en laissant partir tous les cadres de la mairie qui n’ont pas été remplacés par des cadres de compétence équivalente. Etouffement par les budgets de plus en plus limités. Ils ont organisé de petites animations sur des thèmes médiévaux, ça ne mangeait pas de pain ! Ils faisaient aussi acheter des livres que personne ne lit (par exemple la collection « Signes de piste » d’inspiration catholique traditionaliste ! et tous les livres de Mégret et de ses copains). Il y a eu aussi l’affaire de la fresque sur le gymnase Ray Grassi qui représentait un masque nègre. Ils ont voulu la supprimer malgré le fait qu’elle était une œuvre d’art subventionnée par le ministère. Ils ont fini par la supprimer. Notre profession était très mobilisée pour la défense des personnels dans les mairies FN. A la médiathèque de Marignane, ils y sont allés fort : pour organiser un apéro sur la banque de prêt ils ont dissimulé les rayonnages de livres ! La banque de prêt devenait table à apéro ! Mégret s’est servi de Vitrolles comme on se sert d’un gâteau : paiement des personnels recrutés, voitures, imprimerie, téléphone…etc. La volonté n’était pas de construire un parti à Vitrolles mais de s’en servir comme d’une base pour la prise de la direction du FN par Mégret. Fin de l’entretien. 5