Fiche du film

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Fiche du film
Fiche n° 1208
Film réalisé par Léa Fazer
Avec Pio Marmai, Michael Lonsdale, Déborah François
France - Date de sortie : 23 juillet 2014
Durée : 1h25
MAESTRO
Scénario :
Henri, un jeune acteur qui rêve de jouer dans FAST & FURIOUS, se retrouve engagé dans le film de Cédric
Rovère, monstre sacré du cinéma d’auteur. Les conditions du tournage ne sont pas tout à fait celles auxquelles il
s’attendait… Mais le charme de sa partenaire et la bienveillance du maître vont faire naître en lui des sentiments
jusqu’alors inconnus. Et Rovère, conquis par la jeunesse et la fantaisie d’Henri, vivra ce tournage comme un cadeau
inattendu.
Sensible et drôle, léger et grave, mélancolique et lumineux… Les qualificatifs ne manquent pas à la sortie de la salle, pour qui vient d’assister à la
projection de Maestro. Derrière ce petit film programmé au cœur de l’été, à un moment où la concentration des cinéphiles est censée s’être
relâchée, se cache un moment rare de cinéma, tout simplement réjouissant.
Cette pépite évoque la rencontre d’un vieux cinéaste, Cédric Rovère (Michael Lonsdale, fluide et suave) et d’un jeune comédien, Henri (Pio
Marmaï, jolie figure montante). Le premier est une légende du cinéma d’auteur, intellectuel épris de beaux textes qu’il met en scène sans budget,
dans des films très singuliers. Le second court après de misérables cachets en tournant dans des publicités ou en doublant des séries américaines.
Auditionné par Cédric Rovère, Henri, totalement inculte mais touchant de maladresse, retient l’intérêt du maître.
Le voilà qui débarque sur le tournage en décapotable de sport, flanqué de son meilleur copain, persuadé d’avoir décroché la lune et impatient de
découvrir la chambre de son cinq-étoiles… Au lieu des films d’action dans lesquels il se projette, Henri se retrouve en toge à susurrer les mots d’un
auteur du XVIIe siècle, Honoré d’Urfé. Point de cinq-étoiles, mais une jolie partenaire, Gloria (Déborah François), aux antipodes de ses propres
centres d’intérêt…
Une histoire vraie – tragique et belle – se trouve à l’origine du film de Léa Fazer, contactée il y a plusieurs années par un jeune comédien nommé
Jocelyn Quivrin, qui avait tourné pour Éric Rohmer dans Les Amours d’Astrée et de Céladon (2007) – adaptation de L’Astrée d’Honoré d’Urfé – et
voulait témoigner de cette rencontre et de cette expérience qui l’avaient transformé.
Las, après avoir travaillé au scénario avec Léa Fazer, Jocelyn Quivrin n’a pu mener à bien son projet de film : il s’est tué dans un accident de la
route, à 30 ans, le 15 novembre 2009, deux mois avant qu’Éric Rohmer ne décède à son tour, à l’âge de 80 ans.fraîcheur potache et poésie exquise
Avec tout ce que la fiction peut prendre de libertés, préférant l’humour à l’affect, Maestro évoque de manière délicate cette histoire de
transmission, entre deux hommes que tout oppose. Tour à tour nimbé d’une fraîcheur potache – il faut entendre Michael Lonsdale demander :
« Qu’est-ce que ça veut dire : “Ta meuf, je la kiffe gros” ? » – ou d’une poésie exquise, cette œuvre toujours plus délicieuse à mesure qu’elle
avance, dit beaucoup sur l’éveil d’un être à lui-même et à un univers poétique auquel il n’avait pas encore eu accès. Au-delà du récit, de ses
péripéties et ses portraits gentiment moqueurs, le film traite aussi de l’accès à la culture, et propose de dépasser les frontières que chacun s’interdit
de franchir. Dans l’ignorance comme dans la prétention. La Croix
Quand Henri, jeune comédien, apprend qu'il a un rôle important dans un film, il se voit déjà en haut de l'affiche et star imminente de
gros films d'action. Sauf qu'il se retrouve en toge à déclamer un texte du XVIe siècle sous la direction d'un pape du cinéma d'auteur,
Cédric Rovère... La ressemblance sonore du nom avec celui d'Eric Rohmer n'est pas fortuite : Maestro, écrit par l'acteur Jocelyn
Quivrin, raconte son expérience sur le tournage des Amours d'Astrée et de Céladon, dernier long-métrage du célèbre cinéaste. Par
amitié pour Quivrin, Léa Fazer a porté son scénario à l'écran. Sa mise en scène est assez intelligente pour traiter son sujet sans
ironie. Maestro est une amusante et émouvante visite des coulisses d'un cinéma dont les moyens sont plus humains que financiers. Un film
joliment attachant. L’Express
…Et donc, chien fou courant le cachet, Henri (Pio Marmaï, irrésistible comme l'était Jocelyn Quivrin) se retrouve presque par hasard engagé par un maître du cinéma d'auteur, Cédric Rovère (Michael Lonsdale), pour l'adaptation d'un
roman pastoral du XIIe siècle. Rocambolesques, les conditions de travail sont loin de celles que le jeune acteur attend
du cinéma. Restent sa jolie partenaire et la présence lumineuse et mutine du grand Rovère...
C'est un épatant récit d'apprentissage. La réalisatrice franco-suisse y croque avec brio un certain milieu ciné-
matographique cloisonné : d'un côté, des auteurs qui méprisent ouvertement tout ce qui est divertissant ; de l'autre, de
possibles stars qui, devant certains dialogues ultra littéraires, pouffent de rire dans leur assiette de pâtes... Mais ce
qu'elle réussit le mieux, c'est la peinture tendre et légèrement acide d'un tournage fauché aux silhouettes
croquignolettes : la fidèle assistante (Dominique Reymond et son sourire de Joconde), le comédien toujours en
questionnement (hilarant Scali Delpeyrat)... Au fur et à mesure du film, une lumière de fin d'été nimbe les paysages,
tandis que la petite troupe, en état de grâce, partage un certain art de vivre. Tel un bon vampire, le vieux maestro
amoureux des mots se nourrit de la vitalité de cette jeunesse à qui, à son tour, il transmet sereinement sa passion de la
poésie que son comédien dit ne pas comprendre : « Il n'y a rien à comprendre, il faut seulement la sentir et la vivre. Et
avoir été malheureux en amour, peut-être... » Aussi massif qu'Eric Rohmer était sec, Michael incarne à merveille ce
génie fantasque et partageur qui sait apprendre à « payer sans marchander le prix exorbitant de la beauté ».Télérama
Ce film est né d'une histoire vraie : celle de la rencontre de l'acteur Jocelyn Quivrin et d'Eric Rohmer sur
le tournage des "Amours d'Astrée et de Céladon". Profondément marqué par cette expérience, Quivrin
aurait voulu en faire un film, le réaliser, en tenir le rôle principal… Il est mort trop tôt. Léa Fazer, qui
l'avait fait travailler dans "Notre Univers impitoyable" a repris le flambeau, pour raconter comment un
monstre sacré du 7e art a ouvert à un jeune homme un passage vers la culture.
Le résultat aurait pu être pesant et grave, c'est tout le contraire qui se produit. Léa Fazer signe un film
aérien et pétillant. Et très souvent drôle. "Maestro", c'est la confrontation entre deux univers. Le jeune
insouciant, fan de bagnoles et de jeux vidéos, plongé dans un bain d'intellos. Avec moins d'intelligence,
le film aurait pu tourner au ridicule, à la caricature… mais il y règne une forme de grâce, tout s'emboite
de façon assez jubilatoire.
Michael Lonsdale est épatant, plein d'autodérision, lui qui a tant donné dans le cinéma d'auteur. "Zut, la
barbe" crie-t-il à ses acteurs, lui qui prône le non-jeu, puisque "le texte suffit".
Son tournage est bancal, avec des bouts de ficelles, mais l'équipe est si flattée de côtoyer le génie
qu'elle fait toutes les concessions. Cédric Rovère (Michael Lonsdale) change la distribution des rôles en
cours de route ? Il demande brutalement à son acteur d'apprendre le biniou ? Tout le monde suit,
perplexe, mais avec fidélité. Le vieux maître doit bien savoir ce qu'il fait.
Sur ce tournage fauché, les nerfs sont soumis à rude épreuve. La coiffeuse craque, n'arrivant pas à
trouver un déguisement de plus pour l'unique figurant présent dans tellement de scènes ; accroché à sa
perche, l'ingénieur du son sort de ses gonds afin de pouvoir enfin enregistrer un "son seul" au milieu des
bavardages.
Le film est rythmé, émouvant et drôle, servi par une image chaude, impeccable. On pourra même
trouver ici et là des effluves allenniennes, dans le rythme, l'esquisse des personnages, la bienveillance
et l'humour. Le film, ce qui ne gâte rien, ne rate pas sa fin, alors que les portes de mauvaises sorties se
présentaient comme une évidence.
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Du 5 au 11 novembre
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