comment améliorer l`accueil et la prise en charge

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comment améliorer l`accueil et la prise en charge
DE LA FORMATION AU PROJET : COMMENT AMELIORER L’ACCUEIL ET LA
PRISE EN CHARGE DU JEUNE POLYHANDICAPE OPERE
Cécilia ALDENHOFF
Infirmière DE, Centre Hélio Marin, Saint Trojean les bains
Michèle GANNEAU
CADRE INFIRMIER, ADJOINT DE DIRECTION, CENTRE HELIO MARIN, SAINT TROJEAN LES BAINS
Didier COHEN SALMON
Médecin anesthésiste, hôpital d’enfants A. Trousseau, Paris – Association Sparadrap1
MICHELE GANNEAU : PRESENTATION DE L’ETABLISSEMENT
Le Centre hélio-marin de Saint-Trojan-les-Bains est un établissement accueillant des enfants et des
adolescents lourdement handicapés associant pour la plupart un handicap moteur souvent sévère et
une déficience intellectuelle profonde. Structure privée à but non lucratif gérée par l’ATASH (Association
pour le Traitement et l’Adaptation Sociale des Handicapés) elle participe au service public hospitalier.
L’établissement, plus que centenaire puisque créé en 1896, est pavillonnaire et situé en bord de mer
sur l’Ile d’Oléron.
Les agréments se répartissent en 2 secteurs (sanitaire et médico-social) :
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Le secteur sanitaire composé de 75 lits prend en charge des soins de suite et de réadaptation
et est divisé en 3 services :
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Une pouponnière sanitaire accueillant les enfants de moins de 3 ans présentant pour la plupart
une pathologie sévère justifiant de soins médicaux importants.
1
-
Une maison à caractère sanitaire :
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Pathologie neurologique pédiatrique essentiellement
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Epilepsie
-
Maladie neuromusculaire
-
Un service de réadaptation fonctionnelle
-
Atteintes orthopédiques, traumatologie…
Association SPARADRAP, 49 rue de la Plaine 75020 Paris – Tél. : 01 43 48 11 80 - www.sparadrap.org
Douleur et souffrance dans les situations de handicap - De l’évaluation à l’accompagnement de la personne…
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Le secteur médico-social est composé de :
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30 lits de déficients moteurs avec troubles associés (Annexes 24 bis)
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40 lits de polyhandicapés (annexes 24 ter)
Les origines des handicaps sont diverses :
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Séquelles de souffrance anté, per ou post natales
-
Anomalies chromosomiques
-
Pathologies dégénératives congénitales
L’association vient de créer une maison d’accueil spécialisée de 40 lits située à une trentaine de
kilomètres du Centre hélio-marin et qui doit ouvrir ses portes au cours du deuxième semestre 2004.
Cet établissement accueillera entre autres les jeunes du CHM ayant dépassé 20 ans, l’âge de nos
agréments.
La lourdeur des handicaps des jeunes accueillis nécessite un personnel qualifié et diversifié, en effet
sur les132 enfants actuellement présents au CHM :
- 100 n’ont aucune mobilité ou une mobilité très réduite,
- 95 n’ont aucun langage oral,
- 27 sont exclusivement alimentés par sonde naso-gastrique ou gastrostomisés,
- 60 reçoivent quotidiennement un traitement anticomitial.
Actuellement l’originalité de la présence des 2 agréments (sanitaire et médico-social) sur le même site
permet une complémentarité très enrichissante pour les deux secteurs.
La prise en charge de l’enfant repose sur un projet individuel élaboré par l’ensemble des professionnels
à partir de ses capacités et difficultés spécifiques. Elle est personnalisée, couvre la globalité de ses
besoins (médicamenteux, éducatifs et rééducatifs, scolaires et psycho-sociaux). Des synthèses
régulières avec les différents intervenants permettent de faire le point et de corriger ou d’adapter le
projet en fonction de l’évolution.
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Prise en charge du jeune polyhandicapé opéré
Constat :
Au cours de leur séjour dans notre institution, ces enfants peuvent être transférés dans un autre
établissement en vue d’intervention chirurgicale, la plupart du temps programmée. Ce sont
généralement des interventions orthopédiques destinées à améliorer leur confort futur et à prévenir
l’aggravation de leur malformation.
La « banalisation » de ces actes chirurgicaux risquait de nous faire oublier le choc et l’inquiétude que ce
changement de cadre peuvent représenter pour ces enfants plongés subitement dans un
environnement inconnu, sans possibilité de communiquer oralement ou de se faire comprendre par le
personnel du service de chirurgie qui l’accueille souvent débordé et non formé à cette prise en charge
très spécifique.
Nous constatons d’ailleurs que les retours sont de plus en plus précoces après l’intervention, et les
contacts pris avec ces équipes nous confirment leur grande difficulté à communiquer avec ces enfants.
Ce constat nous a amenés à réfléchir à une meilleure collaboration car même si les fiches de liaison
existent elles sont insuffisantes pour garantir efficacement la circulation de toutes les informations. En
effet, les moyens d’expression de ces jeunes polyhandicapés sont essentiellement perceptibles par
l’entourage habitué, constamment vigilant pour repérer les réactions inhabituelles.
La difficulté de communication va gravement perturber l’évaluation de la douleur, les signes directs
étant masqués et les repères communs aux équipes par l’intermédiaire des grilles d’évaluation étant
insuffisants.
L’évidence de ces lacunes nous a confortés dans la nécessité d’améliorer la prise en charge de cette
période difficile et dans un premier temps à rechercher pour notre plan de formation 2002 une aide
pédagogique pour concrétiser ce projet de « mieux préparer le jeune polyhandicapé à une intervention
chirurgicale ».
Nous nous sommes tournés vers l’association « Sparadrap », dont nous connaissions l’engagement
dans l’accompagnement de l’enfant à l’hôpital, afin de nous aider dans notre démarche.
Le Dr COHEN-SALMON, Président de cette association, nous expliquera comment son intervention
dans notre établissement a permis d’aboutir à la concrétisation d’un outil de communication que va
nous présenter Cécilia ALDENHOFF, infirmière au Centre hélio-marin.
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CECILIA ALDENHOFF : PRESENTATION DE L’AFFICHE
Suite à la réflexion menée pendant la formation « Sparadrap », un groupe de travail composé d’aidessoignantes, d’infirmières et d’une kinésithérapeute s’est constitué.
Nous avons cherché à améliorer la qualité du séjour de nos jeunes résidents quand ils partent en
hospitalisation dans d’autres établissements en essayant de fournir un outil aux équipes de soins qui
sont souvent prises au dépourvu dans la prise en charge quotidienne des polyhandicapés.
Pour cela, nous avons choisi un support de taille suffisamment grand pour qu’il n’atterrisse pas dans un
dossier d’accompagnement, d’un aspect ludique car il s’adresse à des jeunes, avec une présentation
claire et simple puisqu’il doit être utile à tous les membres de l’équipe du chef de service à l’agent
d’entretien.
C’est de cette façon qu’est née « l’affiche individuelle ».
Sur ce support, c’est le jeune qui se présente avec ses forces, ses goûts, les petites choses de son
quotidien qui lui sont agréables ou non et qui servent son autonomie. Bien sûr, tout ne peut être mis, on
doit se concentrer sur l’essentiel. Si le soignant pense qu’il faut des détails il rédige alors une fiche de
liaison ou des transmissions particulières.
Cette affiche s’adresse avant tout à des jeunes polyhandicapés pour lesquels la communication s’avère
difficile, ou bien à des bébés. Cela reste un outil important lors d’une hospitalisation d’urgence. Pour ce
faire, cette affiche doit être réalisée par l’ensemble de l’équipe. Sa mise à jour doit être faite
régulièrement, par exemple par le référent du jeune afin d’être toujours prête à servir.
Pour l’instant, cette affiche a été testée sur quelques cas concrets dans des services de pédiatrie de
Bordeaux et La Rochelle. Les équipes ont trouvé l’outil utile dans la prise en charge au quotidien du
jeune, en apportant un réel gain de temps dans la recherche des informations et par la même une
amélioration du vécu du jeune.
Nous espérons que cet outil sera utile à d’autres équipes, pour cela il nous faut trouver un support idéal
pour en transcrire les données.
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DIDIER COHEN-SALMON
En 2002 et 2003 deux groupes de soignants issus de plusieurs services du CHM ont suivi deux
journées de formation non consécutives. Ce dispositif favorise au mieux le travail de réflexion d’une
journée à l’autre, et donne du temps pour l’échange entre les deux groupes qui sont composés de
soignants aux missions très différentes. En tant que formateur, ces journées m’ont aussi beaucoup
apporté en me mettant pour la première fois au contact d’un monde que je ne connaissais pas, celui du
polyhandicap.
Les questions initiales à travailler en formation étaient donc :
-
Comment préparer à une intervention chirurgicale lourde un jeune polyhandicapé sans langage
verbal ?
-
Comment faire pour améliorer le suivi du jeune entre le Centre et le CHU, pour créer un fil
conducteur qui le suivrait dans son parcours ?
-
Comment sensibiliser les équipes soignantes du service chirurgical au problème spécifique que
pose chaque jeune polyhandicapé dans sa singularité ?
La question soulevée est celle de la continuité et de la cohérence entre le travail apporté par une équipe
qui suit l’enfant sur une longue période et celui réalisé par une autre qui ne le connaîtra que quelques
jours, mais des jours critiques puisqu’il s’agit de ceux correspondant à l’opération et à ses suites
immédiates.
Les journées de formation nous ont conduit à aborder l’ensemble des différents thèmes soulevés par
ces questions : le poly-handicap, la pathologie mentale, la déficience intellectuelle ; la place de la
famille, de l’entourage social, et le thème du handicap social ; les interventions chirurgicales, les soins
post opératoires, la rééducation et le vécu des soins par le jeune patient (peur, angoisse, douleur,
incompréhensions, séparations et ruptures, fatigue, vécu dépressif…) ; ainsi que les problématiques
internes à l’équipe soignante.
Les situations de douleur présentes au Centre même ont été largement évoquées.
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Nous avons d’abord établi un inventaire de ces situations de douleurs :
-
les douleurs liées aux moulages, à la rééducation, aux allongements d’appareil d’Ilizarov ;
-
les problèmes des traitements de relais quand le jeune opéré revient du CHU ;
-
l’expression de la douleur chez certains polyhandicapés qui parfois convulsent pour exprimer
leur mal être ;
-
le rapport particulier à la douleur de certains autistes qui semblent ne rien ressentir et s'auto
mutilent...
A partir de cet inventaire des situations nous avons orienté notre réflexion sur les problèmes
d’organisation de la prise en charge de la douleur, en particulier sur la nécessité d’anticiper la situation
douloureuse pour donner l’analgésique en temps utile. Nous avons beaucoup évoqué cette question
liée à la prescription d’analgésique, en évoquant la difficulté d’obtenir une prescription d’antalgique et
surtout en échangeant longuement sur la définition de ce qu’est un protocole analgésique.
Le vécu quotidien
Mais la douleur est multifactorielle et la plainte douloureuse peut traduire beaucoup d'autres choses.
L’ennui et le désœuvrement multiplient la douleur, ce dont il est bien rendu compte dans des ouvrages
comme « Le paradis des tortues ».
Les enfants et les adolescents peuvent « en rajouter » pour qu'on s'occupe d’eux. « J’ai mal » devient
alors la demande de substitution. Obtenir l’attention de l’infirmière ou une prescription s’apparente à un
véritable sport. Avoir un médicament, ça valorise en renvoyant l’idée qu’on souffre davantage que son
voisin … c’est à celui qui aura le plus « mal ».
Il y a parfois un débordement par la demande. Une infirmière se plaint : « Je ne suis pas une bouteille
de Codenfan® ». Un patient fait état de son ressenti : « Les post-opérés ont tout, alors que nous les
chroniques on n’a rien ! ».
A travers la rapide évocation de ce vécu quotidien on voit combien il peut être difficile et pourtant bien
nécessaire de faire la part de la plainte douloureuse authentique, sinon c’est le subjectif et l’émotionnel
du soignant qui prennent le dessus. C’est alors qu’on réalise tout l’intérêt d’outils adaptés à ces patients
particuliers, tels que la grille d’évaluation de la douleur « DESS » (Douleur Enfant San Salvadour).
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La promiscuité
Si le cadre est idyllique les locaux ne sont pas toujours adaptés, et surtout la promiscuité est un
problème. La consultation d’adolescents scoliotiques se passe dans un hall, devant 7 à 8 blouses
blanches anonymes, sans aucun souci de pudeur ou de confidentialité.
La coexistence des différentes catégories de patients n’est pas évidente. « Le moins de cinq ans qui n’a
jamais vu de polyhandicapé devient angoissé, presque psychotique (caractérisation que conteste le
médecin-directeur) en 15 jours, il se raccroche aux personnes normales », me dit-on.
Mais ce n’est pas toujours négatif : a-t-on eu raison de montrer un enfant porteur d’Ilizarov à un autre
enfant de 5 ans qui allait l’avoir, demande-t-on ? En fait oui, parce que l’enfant déjà opéré a préparé
l’autre !
Le maintien (ou la réparation) des liens
Beaucoup de parents ont progressivement perdu le contact avec leur enfant hospitalisé depuis des
années. Il y a un travail à faire, qui n’est pas facile, autour de la déparentalisation des parents à
laquelle pousse toute la situation.
L’intervention pourrait-elle être l’occasion de réinvestir les parents ?
Les parents sont certes plus présents qu’avant, mais les attitudes sont ambivalentes : demander qu’ils
soient là après les avoir qualifié d’envahissants. Certains parents sont perçus comme envahissant
l’espace des autres enfants que le leur. D’autres sont progressivement abandonniques, « ne veulent
plus en entendre parler ». Cela se solde au final par le recours à l’ASE et par le petit chèque mensuel
comme ultime lien.
Les parents présents sont appelés les « parents-parents ». Ils sont rares, et le groupe reconnaît que
leur moindre geste est observé et analysé. Il y a la conscience du fait que, implicitement, « l’enfant
appartient au centre ». Quelqu’un cite la déception de la mère à qui on dit au téléphone « que tout va
bien »… La mère entend « il va bien sans moi », la soignante entend que la mère entend cela et n’est
pas à l’aise.
Le problème de la restauration des compétences est posé. Mais il est plus facile à aborder pour le bébé
–la mère que l’on encourage à le prendre dans ses bras est « transformée »- que pour l’adolescent de
1,80 m lourdement handicapé.
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Mais « le parent n’est jamais idéal », quel que soit son comportement, et la tentation de porter des
jugements rapides est toujours forte.
L’équipe soignante, sa souffrance et sa motivation
En 2004, avec le deuxième groupe, la dimension de la souffrance des soignants est devenue très
présente. Mais elle s’est exprimée de façon rétrospective, ou dans des moments de pause, hors
réunion, ou encore dans des évocations du passé personnel et du passé de l’institution quand sa
vocation était différente.
Une soignante se souvient des amygdalectomies à vif qu’un ORL venait jadis pratiquer au Centre il y a
quelques décennies. Une autre, de la même génération, évoque le « lazaret » où étaient isolés les
« infectieux ». On disait alors aux parents : « Vous le déposez ici, vous ne le reverrez plus… ». C’est
aussi la lecture par une jeune soignante du règlement intérieur affiché dans la salle, règlement très
sévère du lieu au temps où c’était un sanatorium.
Tout cela est encore présent dans la mémoire collective du groupe. C’est par ces détours que se dit
l’inavouable.
Mais l’autre face de la souffrance, sa face positive, c’est la motivation à progresser, à acquérir de
nouvelles compétences pour répondre aux besoins identifiés. C’est le sens même de la demande de
formation.
Les cas concrets soulevés par les deux groupes montrent la difficulté de l’entreprise et la souffrance
induite par certaines situations. Ainsi le cas de cet enfant de 10 ans qui a subi des interventions
itératives du cœur puis de la hanche, et actuellement des interventions d’Ilizarov. Comme cause ou
comme conséquence, ou peut-être les deux à la fois, un contexte socio-familial qualifié de difficile a
compliqué le problème. L’enfant a une phobie des scialytiques, qui s’étend aux spots lumineux. Il a des
préoccupations obsessionnelles autour des opérations, ne parle que de cela, il opère des poupées et se
livre à des jeux d’opération typiquement post-traumatiques, répétitifs sur des journées entières, qui le
font entrer dans des états tels que l’équipe ne les supporte plus et y met fin. Il est très destructeur,
hyperactif, ne parle que de « tuer, couper, écraser ». Mais il adore les fleurs et peut faire de très belles
compositions florales. Nous sommes ici dans le domaine des séquelles psychologiques de la maladie
grave, des soins, hospitalisations et opérations.
Le problème est : comment empêcher la répétition de ces situations dramatiques ?
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La préparation à une opération
Ainsi, très naturellement, la formation débouche sur des propositions d’actions concrètes. On peut alors
parler de formation-action . après ce tour d’horizon des problèmes, la réflexion commune s’est
recentrée sur la préparation à l’opération et sur l’élaboration d’outils pour aider et accompagner le jeune
polyhandicapé
Des stratégies sont à élaborer pour prévenir les dégâts psychiques constatés et aussi pour aider les
équipes chirurgicales qui prennent les jeunes en charge.
Le groupe constate que les jeunes polyhandicapés qui subissent des interventions aux suites très
douloureuses dans un lieu inconnu supportent très mal la perte des repères. Ils reviennent beaucoup
plus angoissés qu’ils n’étaient partis, avec des signes de régression qu’il faut ensuite reprendre en
charge au niveau du Centre. Par exemple, comment préparer à son arthrodèse vertébrale un grand
polyhandicapé de 17 ans ? Ce n’est pas sa première intervention, et s’il est sans langage il n’est pas
sans mémoire : maintenant dès qu’il entend une voix inconnue il pleure. Chez ces patients les repères
de voix et d’odeurs sont des supports de sécurité, analogie inattendue avec ce que Françoise Dolto et
d’autres nous ont appris sur les réactions des bébés séparés de leur mère. Certains polyhandicapés ont
des aptitudes inédites, comme de prendre à volonté plusieurs voix de personnes de l’entourage.
Peut-on vraiment envisager une préparation dans ces conditions et comment ?
La démarche qui a été retenue en priorité me paraît innovante car elle contourne la difficulté de
communication en visant non pas le jeune polyhandicapé lui-même mais l’équipe soignante appelée à
le recevoir. Il s’agit au fond d’un outil de transfert des compétences relationnelles entre les deux
équipes.
A partir de cette initiative, quelle dynamique peut être développée ? L’avenir le dira.
L’important n’est-il pas de se fixer une initiative concrète, le proverbe disant « Un voyage de mille lieues
a commencé par un pas » ?
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