MAL PERFORANT PLANTAIRE

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MAL PERFORANT PLANTAIRE
MAL PERFORANT PLANTAIRE
Le mal perforant plantaire est un ulcère trophique siégeant aux points de pression.
On le trouve sous la tête du premier ou du cinquième métatarsien dans le pied creux fixé, sous les têtes
moyennes quand l'arche antérieure est inversée, au bord externe d'un pied varus, sous le talon parfois,
etc.
Il est plus fréquent chez l'homme que chez la femme.
ÉTUDE CLINIQUE
Début. — Sur une hyperkératose ancienne apparaît une phlyctène séro-sanglante ou purulente. Elle
vient à s'ouvrir, laissant une ulcération minime, qui peut se fermer, mais s'ouvrira de nouveau. Après
une ou plusieurs poussées, l'aspect typique est réalisé. C'est, a-t-on dit, « un durillon percé d'un trou ».
Période d'état. — L'ulcère est arrondi, ovalaire. Son diamètre varie de quelques millimètres à 1 cm,
rarement plus. Ses bords saillants sont taillés à pic. Le fond est grisâtre, irrégulier, parfois fongueux (fig.
561).
Dans d'autres cas, l'ulcère apparaît comme une faille profonde, au centre d'un véritable bourrelet
épidermique et dermique.
L'explorant avec une épingle, on note une anesthésie qui s'étend au pourtour et contraste avec la
douleur spontanée. Celle-ci, tantôt légère, tantôt très vive, est à prédominance nocturne, surtout chez
les diabétiques.
L'on note souvent d'autres troubles trophiques : œdème dur de voisinage, altération des ongles,
absence ou, au contraire, exagération de la sécrétion sudorale.
Évolution. — L'ulcère se creuse, détruit les tendons, atteint l'os sous-jacent. Il y a raréfaction, puis
nécrose osseuse. Des séquestres peuvent s'éliminer. Les ligaments étant détruits, le mouvement
détermine de petits craquements. On trouve, au stylet, le contact osseux.
Le repos, les pansements stériles amènent parfois une cicatrisation, qui reste précaire. A la reprise de
la marche, la lésion reparaît.
Une réaction inflammatoire est toujours possible : lymphangite, synovite suppurée, ostéo-arthrite. La
gangrène même peut survenir.
Radiographie. — Elle montre généralement des lésions cliniquement insoupçonnées : arthrite
dégénérative atrophique ou hypertrophique, ostéite avec ou sans séquestre, fracture spontanée.
L'image en fumée est bien typique (Didiée). En fin de compte, l'ombre osseuse disparaît en totalité au
niveau de l'ulcère (fig. 562).
ÉTIOLOGIE
Des causes multiples ont été décrites :
1° Certains maux perforants résultent de lésions vasculaires. C’est un ulcère trophique provoqué chez
un artérioscléreux par une embolie de la poplitée.
Diabète vrai, états hyper glycémiques, endartérites oblitérantes sont des étiologies bien connues. Avec
Vie-Dupont, nous avons observé des maux perforants dans la maladie de Vaquez. Barré a montré
qu'au cours du tabès l'ulcère trophique peut, comme les arthropathies, être lié à des oblitérations
vasculaires.
2° Très souvent, une atteinte nerveuse médullaire ou périphérique est en cause : syringomyélie,
spina-bifida et, avant tout, tabès. André Thomas insiste sur la fréquence du mal perforant tabétique et
sur sa rareté dans les formes de syphilis autres que le tabès. Cependant on l'a noté dans une
observation de paralysie générale. Peut-être avait-il une simple origine mécanique ? Le mal perforant
est observé chez des malades présentant une compression médullaire, une polynévrite, une maladie
de Friedreich, des séquelles de poliomyélite.
En chirurgie de guerre, on l'observe dans les blessures des nerfs périphériques. Suivant Bénassy, il
s'agirait toujours de rameaux issus de la première racine sacrée.
3° Pour Lévy-Franckel, Hohmann et Leowe, la lésion ostéo-articulaire sus-jacente à l'ulcération
conditionne celle-ci. L'atteinte osseuse serait, en effet, radiologiquement décelable bien avant
l'apparition du mal perforant. Mais cette atteinte relève sans doute d'un mécanisme nerveux ou
circulatoire.
Fig. 562 –Lésion osseuse sus-jacente à un ma perforant plantaire
4° Nous avons observé des ulcères trophiques après électrocoagulation brutale et après irradiation de
verrues plantaires ou de durillons. La lésion est très douloureuse au pourtour comme au centre. Elle est
de traitement difficile (voir : Radiodermites du pied).
5° Nous avons décrit les maux perforants d'étiologie mécanique. Ils sont assez fréquents. On les
observe essentiellement sous la cinquième tête métatarsienne, lorsqu’existe une griffe considérable de
l'orteil. Il s'agit de griffes irréductibles, à la fois dans l'articulation métatarso-phalangienne et dans l'inter
phalangienne proximale. La première phalange est verticalement fixée à la face dorsale de la tête
métatarsienne. La peau plantaire sous-jacente se trouve fortement comprimée. Un durillon apparaît,
qui s'excave. Cet ulcère par compression offre deux particularités :
 1° il ne présente pas l'anesthésie superficielle des autres variétés
 2° si par arthroplastie on rétablit l'axe de l'orteil, ulcération et durillon disparaîtront
d'eux-mêmes.
6° L'enquête la plus minutieuse reste souvent négative. La majorité des auteurs invoquent alors une
lésion sympathique, siégeant sur le tractus intermedio-lateralis.
Quoi qu'il en soit, le fait certain est qu'à la plante les microtraumatismes répétés peuvent, au lieu d'une
simple hyperkératose, produire un mal perforant. Cet ulcère survient avec la plus grande facilité,
lorsque le trophisme des tissus se trouve altéré par une lésion circulatoire, nerveuse, infectieuse,
osseuse, radiothérapique, ou par une hyperpression constante et considérable.
TRAITEMENT
Traitement local. — On traitera l'affection causale : diabète, artérite, syphilis, etc. Mais l'ulcère trophique
répond mal au traitement.
Il faut supprimer l'appui par une lame mousse, suffisamment épaisse qu'on évidera sous le mal
perforant. Au niveau des têtes métatarsiennes, ce sera un appui rétrocapital. On peut abraser la couche
cornée avec une prudence et une asepsie rigoureuses. Toute faute peut être le point de départ d'un
accident grave.
Localement, on peut utiliser l'oxyde de zinc, la poudre d'insuline, la tro-formose de Gley et Kisthinios.
En fait tout ceci est vain. Le traitement est uniquement chirurgical.
Traitement chirurgical. — Les interventions sympathiques ou nerveuses n'ont pas fait leurs preuves.
L'amputation doit être exceptionnelle. La greffe de peau est vouée à l'échec.
Le mal perforant indique une intervention osseuse. Tout se passe comme s'il s'agissait d'un hygroma
chroniquement ulcéré par une pression osseuse (Hoh-mann). Doucement, sans délabrement, on
résèque le segment d'os sus-jacent à l'ulcération. Il est toujours altéré. On draine par une petite lame de
caoutchouc.
Sous l'arche antérieure, le jeu normal des pressions exige que la lre tête métatarsienne soit sur le plan
de la seconde ou très légèrement en avant d'elle. La seconde doit être en avant de la 3e et ainsi de
suite. Si le mal perforant siège sous la 5e tête, il suffit de réséquer celle-ci. Par contre, la résection d'une
autre tête perturbe l'appui antérieur. 11 faut donc, logiquement, pratiquer notre alignement articulaire
métatarso-phalangien. Mais cela est rarement possible en raison de la mauvaise trophicité. Dans ce
cas, on fera une résection limitée quitte à compléter plus tard l'alignement. Dans l'immédiat, on se
bornera à améliorer l'appui par une semelle orthopédique (barre rétro-capitale).
Lorsqu'il s'agit d'une griffe fixée à la fois dans l'inter-phalangienne proximale et la
métatarso-phalangienne, il faut libérer ces 2 articulations et replacer l'orteil dans l'axe normal. On
réséquera donc la tête de la première phalange, on allongera le tendon extenseur et l'on ouvrira la
capsule métatarso-phalangienne. Parfois même, il faut réséquer tout ou partie de la tête.
Le traitement des radiodermites est décrit précédemment.