La saga Berliet - Ville de Bourg-en

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La saga Berliet - Ville de Bourg-en
© Archives Fondation Berliet-Lyon
© Archives Fondation Berliet-Lyon
BOURG STORY
La saga Berliet
Le 5 octobre 1963, la première pierre de l’usine Berliet de Bourg est posée. Devenue
Renault Trucks, cette unité de production de poids lourds du groupe Volvo est aujourd’hui
le plus important employeur privé du département de l’Ain. Retour sur cette aventure
industrielle.
1960.
ses atouts : vastes terrains disponibles
au lieu-dit Loëze près de la voie ferrée, axes routiers performants... Les
deux hommes tombent d’accord. Le
21 avril 1961, le conseil municipal
se prononce en faveur de la création
d’une zone industrielle Est et engage
l’étude de viabilisation.
Le 9 novembre 1962, un protocole
d’achat de terrains situés dans la future zone industrielle sur la route de
Nantua est signé. Dans la foulée, la
Ville capte les sources du bief du Dévorah et canalise la Reyssouze pour
assainir la future zone industrielle. La
voie est libre pour lancer les travaux.
Le 5 octobre 1963, lors de la cérémonie officielle d’ouverture du chantier
Paul Berliet déclare : « le premier
véhicule sortira l’an prochain ». Le
défi est relevé. En moins d’un an,
40 000 m2 sortent de terre. Le 24 septembre 1964, la première tranche de la
nouvelle usine Berliet de montage d’engins de chantier et
poids lourds est inaugurée.
© Renault Trucks-Daniel Gillet
Le 23 septembre
2014, le jury de
l’International Truck
Of The Year, composé
de journalistes
spécialisés
représentant vingtcinq magazines
internationaux,
a élu le Renault
Trucks T « Camion
international de
l’année 2015 ».
Auréolé de cette
distinction, ce
fleuron de l’industrie
bugienne a pris
la pose devant le
monastère royal de
Brou, monument
préféré des français.
L’industriel Paul Berliet souhaite décongestionner le site lyonnais de Monplaisir,
spécialisé dans la fabrication d’engins
de chantier, en construisant sur 120
à 150 hectares une nouvelle usine.
Plusieurs villes d’implantation sont
pressenties : Ambérieu, Mâcon, Louhans et Bourg. Le 6 octobre, Amédée
Mercier, maire de Bourg reçoit une
lettre de la société des automobiles
Marius Berliet invitant la municipalité
à des discussions en vue de l’installation d’une usine d’assemblage. Le 27
décembre 1960, Amédée Mercier et
Paul Berliet se rencontrent. L’industriel souhaite rapprocher les unités de
production de camions des bassins de
main-d’œuvre, l’édile burgien désire
installer une activité économique
génératrice d’emplois stables dans sa
ville en plein développement. Pour
séduire Berliet, Bourg met en avant
p a g e 2 0 I C ’e s t à B o u r g I w w w. b o u r g e n b r e s s e . f r
DE BERLIET À RENAULT
TRUCKS
L’assemblage des dumpers, de
la gamme militaire, des véhicules pétroliers et sahariens est
lancé. Un lac pour l’expérimentation des engins amphibies et
une piste d’essais complètent
ces installations qui seront
régulièrement agrandies. En
1975, l’usine de Bourg est le
deuxième complexe industriel de la société Berliet après
Vénissieux-St Priest : elle s’étend sur
54 000 m2, emploie 1 800 personnes
et produit 60 véhicules par jour sur
3 lignes d’assemblage. Passée sous
le contrôle de la Régie Nationale des
usines Renault (RNUR) en 1975, Berliet devient Renault Véhicule industriels en 1978. L’usine de Bourg voit
son activité et ses effectifs se réduire
de moitié dans les années 80 suite au
transfert de lignes de montage à Blainville-sur-Orne.
En 2001, la marque Renault Véhicules
Industriels est rachetée par le groupe
suédois AB Volvo et devient Renault
Trucks, une marque aujourd’hui
présente dans plus de cent pays. En
France, Renault Trucks est leader
avec près de 30 % de parts de marché.
L’usine de Bourg-en-Bresse est l’un
des trois sites d’assemblage du groupe
basé dans l’Hexagone. Ici, 1 500 employés assemblent les camions de la
gamme haute du constructeur, dont le
Renault Trucks T, élu Camion international de l’année 2015. Dans le sillage
de Berliet puis de Renault Trucks,
de nombreuses entreprises se sont
développées faisant du bassin de vie
de Bourg-en-Bresse le 1er pôle poids
lourds de France et le 2e pôle européen
de carrosserie industrielle.
Géraldine Bourgeay-Marin
Sources : Fondation de l’Automobile Marius Berliet
– Berliet par Monique Chapelle aux éditions Le
télégraphe, 2005 – Édition spéciale « 40 ans usine
de Bourg », publiée en septembre 2004 par Renault
Trucks – « La formidable aventure de BerlietBourg » article extrait de Lou secret de la tracsyon
22 d’Olivier Marin, éditions Vingt-Deux 2012 –
Archives municipales de Bourg-en-Bresse.
De gauche à droite :
> 4 septembre 1964 : l’usine Berliet-Bourg est
inaugurée en présence d’Olivier Guichard,
ministre délégué à l’Aménagement du Territoire,
qui a débloqué les crédits indispensables à la
réalisation de ce projet.
• UNE MÉMOIRE VIVANTE
> Ligne d’assemblage, Berliet Bourg. GLM 1965.
> Des ouvriers burgiens assemblent en 1968
un Dumper T 45, camion spécialisé dans
l’enrochement pour les carrières et les mines.
Marius Berliet, le père fondateur
Berliet. Une marque symbole de l’histoire du
poids lourd français et de l’indutrie lyonnaise
qui doit tout à son créateur.
Issue d’une lignée de laboureurs du Nord-Dauphiné, la famille Berliet s’installe à Lyon. Le 21
janvier 1866 naît Marius Berliet. Aîné d’une fratrie
de sept enfants, il décroche son certificat d’études
et devient apprenti tisseur dans l’atelier paternel.
Passionné de mécanique, il suit des cours du soir à
la société d’enseignement professionnel du Rhône.
En 1894, il construit son premier moteur et, en
1895, sa première voiture, au volant de laquelle il
termine dans une vitrine. Une mésaventure qui lui
attire les railleries de son père : « Tu vas me faire le
plaisir de te faire soigner et d’envoyer carrément
ton automobile au Rhône ».
Marius persévère. En 1899, pour développer son
activité de constructeur, il loue un atelier de 90 m2
aux Brotteaux. Le décès de son père accélère ses
projets. Marius confie l’entreprise familiale à son
frère Benoît et devient l’un des 619 constructeurs
français. En 1900, il déménage dans un local plus
vaste près du parc de la tête d’Or. En 1902, il rachète la société Audibert et Lavirotte, embryon de
la futur usine Berliet de Lyon Monplaisir. Le voilà
à la tête de 250 salariés.
© Archives Fondation Berliet-Lyon
LA MARQUE AU CHASSE-BUFFLE
En 1905, la vente de la licence de trois voitures à
l’Alco (American Locomotive Company) qui souhaite se diversifier dans la construction automobile
donne à Marius Berliet les moyens financiers de
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se développer. En souvenir de ce contrat, la locomotive chasse-buffle fabriquée par l’Alco devient
l’emblème de la marque Berliet qui se lance dans la
construction de camions (1907) et autobus (1906).
En 1913, la production monte à 3 500 voitures, et
en 1914, les deux tiers des camions produits en
France sont des Berliet.
La première guerre mondiale accroît la demande :
Berliet fabrique des camions pour l’armée française, dont l’emblématique CBA*, mais aussi des
obus et des chars d’assaut. Ces commandes font
bondir le chiffre d’affaires. Marius Berliet achète
400 hectares de terrains à Vénissieux et St-Priest
pour construire une usine intégrée « de la production de l’acier à la livraison des véhicules ».
Opérationnelle en 1918, elle tourne à plein régime
jusqu’en 1920. Avec l’arrivée des surplus de matériels militaires, les commandes se tarissent et l’entreprise est mise sous tutelle des banques. En 1929,
l’entrepreneur rembourse ses dettes et redevient
seul capitaine. Il mise sur le moteur diesel, lance
les premières missions sahariennes et s’oriente
vers la fabrication exclusive de poids lourds. Pendant la seconde guerre mondiale, Berliet fabrique
jusqu’en 1942 des camions « gazobois ». Par la
suite, le Gouvernement de Vichy exige la fourniture de véhicules aux Allemands. À la libération,
la société Berliet est mise sous séquestre et une
gestion ouvrière des usines est instaurée. En 1946,
Marius Berliet et ses fils, Paul et Jean, sont frappés
d’indignité nationale, condamnés à des amendes et
à de la prison. En 1949, année du décès de Marius
Berliet, l’entreprise est rendue à ses propriétaires
par arrêt du Conseil d’État. Paul Berliet, prend la
tête de l’entreprise, mise sur l’innovation et la recherche... De nouvelles usines sont construites en
Rhône-Alpes dont celle de Bourg en 1964 (voir cicontre) et à l’étranger (Algérie, Maroc). Durant les
Trentre Glorieuses, la production est multipliée par
huit et les effectifs par cinq, atteignant 24 000 personnes en 1974, date de son entrée dans le groupe
Renault. En avril 1980, le nom Berliet disparait
définitivement des calandres.
* camion emblématique de la Voie sacrée, il assura les liaisons jusqu’au
front lors de la bataille de Verdun.
En janvier 1982, les descendants
du constructeur lyonnais Marius
Berliet et Renault Véhicules
Industriel créent la Fondation
de l’Automobile Marius Berliet.
Installée à Lyon dans la demeure
historique de l’industriel, elle sauvegarde camions, cars, bus... des
diverses marques françaises et
valorise le passé de l’automobile
rhônalpin. Riche de 210 véhicules
restaurés et d’un fonds documentaire de plus de 300 000 références
sur 200 marques, la fondation est
une mine pour les historiens.
> Fondation de l’Automobile
Marius Berliet 39, avenue
d’Esquirol Lyon 3e.
Tél. : 04 78 54 15 34
www.fondationberliet.org
• UN LIEU D’HISTOIRE
© Archives municipales,
Jean Serrière
© Archives Fondation Berliet-Lyon
BOURG STORY
En 1378, le site de l’actuelle usine
Renault Trucks de Bourg est connu
sous le nom de fief de Pennessuy.
À l’époque, cette seigneurie avec
maison forte est la propriété de
Jean de Sancia. Au fil du temps,
se succédent d’éminents propriétaires : Claude Lyobard ; Boisse
de Pardaillan, gouverneur de
Bourg en 1601 ; Pierre de Granet,
président du baillage de Bresse ;
Samuel Guichenon, historien.
Vers 1600, Boisse de Pardaillan
fait construire l’actuel château en
lieu et place de la maison forte. À
la Révolution, Joseph Ignace Favier
de Loëze devient propriétaire des
lieux et donne son nom au château.
Fin 1961, une grande partie des
terrains agricoles de Loëze, qui
avaient été divisés à la Révolution,
est achetée à quarante-cinq propriétaires pour implanter l’usine
Berliet. Aujourd’hui, seul le château, propriété privée, témoigne de
ce passé.
Marius Berliet au volant de sa voiture Victoria en 1898.
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