Regards croisés sur les Emplois d`avenir
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Regards croisés sur les Emplois d`avenir
Etude-action sur les Emplois d’avenir Regards croisés sur les Emplois d’avenir Territoire de la Mission Locale de l’agglomération de Montpellier Rapport final Anne Le Bissonnais, Julie Erceau – Octobre 2014 Tous les documents constituant l’étude sont téléchargeables à partir du site : www.institutbertrandschwartz.org 1 Sommaire Introduction............................................................................................................................................. 3 Rappel des objectifs de l’étude ........................................................................................................... 3 Eléments méthodologiques................................................................................................................. 3 1. Le contexte du territoire ................................................................................................................. 5 1.1 Un territoire dynamique sur le plan démographique, un taux de chômage important ............... 5 1.2 Une Mission Locale bien implantée sur le territoire, plus de 11 000 jeunes accompagnés ......... 6 2. La mise en œuvre du dispositif Emplois d’avenir ............................................................................ 7 2.1 Un dispositif globalement bien accueilli sur le territoire .............................................................. 7 2.2 Un démarrage difficile, une montée en puissance progressive .................................................... 8 2.3 Une organisation qui a évolué pour faire face à la montée en charge du dispositif .................. 12 2.4 « Le socle de collaboration » régional et le rôle de la « cellule opérationnelle » ....................... 18 2.5 Un objectif ambitieux pour 2013, difficile à atteindre ................................................................ 20 3. Un dispositif d’emploi important pour les jeunes peu qualifiés du territoire .............................. 21 3.1 Pour les jeunes, une véritable opportunité d’emploi stable ....................................................... 21 3.2 Pour les employeurs, des motivations différentes de recruter.................................................. 25 3.3 Des modalités d’intégration, d’accompagnement et de tutorat variables selon les employeurs ........................................................................................................................................................... 27 3.4 La mise en œuvre des parcours de formation ............................................................................ 30 4. Eléments de synthèse et questionnements .................................................................................. 32 Annexes ................................................................................................................................................. 36 Annexe 1. Entretiens réalisés ........................................................................................................... 36 Annexe 2. Compte-rendu de la restitution de l’étude ...................................................................... 37 2 Introduction Rappel des objectifs de l’étude L’objectif du Volet 2 de l’étude sur les Emplois d’avenir (EAV), portée par l’Institut Bertrand Schwartz, est de comprendre comment le dispositif est mis en œuvre sur le terrain, comment il fonctionne et comment les différents acteurs concernés le perçoivent. Il ne s’agit pas d’une évaluation mais d’une étude qualitative, permettant de recueillir le point de vue des différents interlocuteurs (conseillers, directeurs, élus, employeurs, services de l’Etat, jeunes) sur : - la conception du dispositif des Emplois d’avenir et sa pertinence (public ciblé, employeurs concernés, aide financière, formation dispensée etc.) ; - les difficultés concrètes rencontrées, en particulier par les jeunes, les conseillers et les employeurs ; - les points de blocage, les éléments facilitateurs et les pistes d’amélioration. L’étude est réalisée sur six territoires, ceux des Missions Locales du Pays Salonais, de Nord Essonne, de l’Agglomération de Montpellier, de l’arrondissement d’Aurillac, du Poitou et des Hautes-Pyrénées (Tarbes) entre novembre 2013 et juin 2014. Eléments méthodologiques Ce rapport concerne l’enquête réalisée sur le territoire de la Mission Locale de l’Agglomération de Montpellier (MLJAM). Des entretiens préparatoires effectués à Montpellier fin 2013 avec Monsieur Abder Abouitman, directeur-adjoint de la Mission Locale et avec Monsieur Florian Burlet, conseiller référent sur les Emplois d’avenir ont permis: - de connaître l’organisation de la Mission Locale pour la mise en œuvre des EAV, les objectifs fixés et les premiers résultats obtenus ; - d’identifier les personnes à interroger dans le cadre des entretiens qualitatifs et d’organiser les prises de rendez-vous ; - de recueillir les documents utiles (rapports, tableaux, comptes rendus de cellules opérationnelles etc.). Au total, une vingtaine d’entretiens semi-directifs (d’une durée d’une heure en moyenne) ont été réalisés entre janvier et avril 2014 auprès de professionnels et conseillers de la Mission Locale, d’employeurs, de représentants de l’Etat et de jeunes (voir liste des entretiens en annexe 1). Ce document a pour objectif de rendre compte des constats et des points de vue recueillis sur le territoire, d’en faire une analyse croisée et d’en tirer les premiers enseignements. Ces éléments ont été mis en débat lors d’une restitution, organisée en septembre 2014, en présence des personnes interrogées. Le compte-rendu de cette rencontre a été intégré au rapport (voir annexe 2). Après avoir présenté le contexte du territoire et de la Mission Locale, nous analyserons comment le dispositif Emplois d’avenir a été mis en œuvre et comment les acteurs se sont organisés. Nous montrerons ensuite l’intérêt des Emplois d’avenir pour les jeunes et pour les employeurs ainsi que la variété des modalités de mise en place du tutorat et des plans de formation. Enfin, nous présenterons une synthèse des enseignements tirés de l’étude. 3 Compte tenu de la durée de l’enquête (4 jours) et du nombre faible d’entretiens réalisés par catégorie d’acteurs, il convient d’être prudent dans les interprétations; le travail d’enquête sur les autres territoires viendra enrichir l’analyse et permettra d’approfondir les premières hypothèses formulées. Le rapport transversal, intégrant les éléments des six rapports de site, sera finalisé en octobre 2014 et fera l’objet d’une restitution plus large. 4 1. Le contexte du territoire 1.1 Un territoire dynamique sur le plan démographique, un taux de chômage important La communauté d’agglomération de Montpellier représente 31 communes et 419 291 habitants1. Le territoire est attractif et dynamique sur le plan démographique; la croissance démographique y est deux fois plus élevée que la moyenne régionale, avec un flux de plus de 5 500 habitants par an en solde migratoire, dont plus d’un tiers sont diplômés de l’enseignement supérieur. A elle seule, la Commune de Montpellier compte 264 538 habitants au recensement de 2011. C’est une ville jeune, avec 32,5% de la population âgée de 15 à 29 ans (17,6% à l’échelle de l’Agglomération). Avec 29 000 entreprises, 60 000 étudiants et des Pôles d'excellence dans les domaines de la santé, de l'eau, de l'agronomie ou des technologies de pointe, l’Agglomération a des atouts mais la conjoncture économique reste mauvaise. Les projets de développement (lignes de tramway, construction de logements sociaux et d’équipements tels que les parcs d’activités et les pépinières d’entreprises) permettent de maintenir l’emploi dans le secteur des travaux publics. Le tissu économique local des Très petites entreprises (TPE) est fortement touché par la crise. Les activités de la sphère présentielle2 et en particulier dans le secteur des services à la personne, sont majoritaires. Les emplois sont fortement concentrés à Montpellier et dans certaines communes limitrophes comme Lattes, Pérols, Saint Jean de Vedas ou Castelnau le Lez. En raison du développement du chômage et des emplois peu qualifiés, les revenus de la population du bassin d’emploi sont en dessous de ceux de la moyenne nationale : 48% des foyers fiscaux ne sont pas imposables contre 45,5% en France métropolitaine. Alors que le taux de chômage a augmenté de 3,6% dans le département de l’Hérault (109 782 demandeurs d’emploi catégories A, B et C inscrits à Pôle emploi fin mars 2014), il a diminué légèrement pour les jeunes. En mars 2014, il y avait pour le département de l’Hérault 16 531 demandeurs d’emploi de moins de 25 ans inscrits à Pôle emploi (catégories A, B et C) contre 16 819 un an avant3; cette légère baisse peut être attribuée à la mise en œuvre des EAV. Pour la zone d’emploi de Montpellier (plus large que l’Agglomération), le chômage était de 13,5% au 4° trimestre (contre 13,9% pour la Région et 9,8% pour la France). Le chômage des jeunes reste élevé ; il est particulièrement important dans les quartiers prioritaires de la Ville de Montpellier, notamment dans les cinq Zones urbaines sensibles (ZUS) : Gély-Figuerolles, La Paillade (plus de 15 000 habitants, dont 34,4% de moins de 20 ans et 73,2% de jeunes adultes sans diplôme de niveau au moins égal au bac), Les Cévennes, Pas du Loup-Val de Croze-Paul Valéry, et Petit Bard-Pergola. Le territoire ne comporte pas de Zone de revitalisation rurale (ZRR). 1 Au 1er janvier 2012 (source INSEE) L’économie présentielle regroupe les activités mises en œuvre localement pour la production de biens et de services visant la satisfaction des besoins de personnes présentes dans la zone, qu’elles soient résidentes ou touristes. 3 http://www.languedoc-roussillon.direccte.gouv.fr/IMG/pdf/STMT1403-note.pdf 2 5 1.2 Une Mission Locale bien implantée sur le territoire, plus de 11 000 jeunes accompagnés Créée en 1983, la Permanence d’accueil, d’information et d’orientation (PAIO) est devenue Mission locale d’insertion de la Ville de Montpellier en 1997 puis Mission Locale des jeunes de l’agglomération de Montpellier (MLJAM) en 2002. Financée en 2013 à 50% par l’Etat et à 24% par l’agglomération, l’association Mission Locale regroupe 82 professionnels (dont une conseillère détachée par Pôle emploi) et dispose de 15 lieux d’accueil : 7 antennes (Montpellier Mosson, Montpellier Centre, Montpellier Croix d’Argent, Castries, Pignan, Lattes, Villeneuve les Maguelone) et 8 permanences décentralisées, dans les quartiers de Montpellier ou les communes rurales. La Mission Locale accompagne les jeunes dans les différents champs de l’insertion sociale et professionnelle (formation, emploi, santé, mobilité, logement); elle collabore avec les partenaires locaux intervenants dans ces domaines. Elle mène des actions spécifiques dans les quartiers, dans le cadre du Contrat urbain de cohésion sociale (CUCS). Un réseau de parrains actifs ou retraités renforce le travail d’accompagnement des jeunes vers l’emploi. Le partenariat avec Pôle emploi est concrétisé par une Convention de co-traitance : en 2013, 1140 Jeunes ont pu bénéficier du Programme Personnalisé d’Accompagnement à l’Emploi (PPAE). La MLJAM co organise ou participe également aux salons emploi/formation (rencontres pour l’emploi de Montpellier Agglo, TAF, Handi Job, rencontres Interprofessionnelles, etc.) mais aussi à des manifestations autour de la santé ou de la mobilité internationale. Depuis 2008, la Mission Locale développe des actions particulières d’accompagnement vers l’emploi et l’alternance (information sur les contrats, mises en relation, sécurisation des recrutements etc.) ; en 2009, elle a renforcé ces actions avec les employeurs en créant un service relations entreprises chargé de la prospection d’offres d’emploi et d’un soutien gratuit aux employeurs qui souhaitent recruter (choix du profil, du contrat, aide au montage des dossiers, présélection des candidats etc.).1935 entreprises sont inscrites dans la base Parcours 3 de la MLJAM. L’existence de ce service a été un atout dans le cadre de la mise en œuvre des Emplois d’avenir. En effet, après une première étape de reconnaissance des compétences du réseau des Missions Locales en 2005 avec leur intégration au sein du Service Public de l’Emploi des Jeunes, l’Etat leur a confié en 2012 pour la première fois, la gestion totale du dispositif Emploi d’Avenir. En 2013, la MLJAM a accompagné 11 662 jeunes4, dont 50% étaient âgés de 22 à 25 ans. 25% étaient non diplômés, 29% avaient un niveau CAP/BEP, 37% avaient un niveau Bac et 9% au moins un niveau bac + 2. 17,2% des jeunes accompagnés sont issus des ZUS. 4471 nouveaux jeunes ont été accueillis pour la première fois en 2013. 4 Voir Rapport d’activité 2013 de la Mission Locale de l’agglomération de Montpellier. 6 2. La mise en œuvre du dispositif Emplois d’avenir 2.1 Un dispositif globalement bien accueilli sur le territoire Pour les acteurs rencontrés, la durée du contrat proposé et la mise en place des parcours de formation constituent les aspects les plus intéressants du dispositif5. L’animatrice territoriale de la Direccte (Unité territoriale 34) met en avant l’opportunité du parcours de qualification : « On a affaire à des jeunes non demandeurs de formation, qui recherchent prioritairement un emploi; l’intérêt, c’est la durée longue du contrat durant laquelle ils vont comprendre les enjeux et trouver progressivement le sens de la professionnalisation. » Elle souligne également l’intérêt de la logique de co construction avec la Mission Locale, l’employeur et le jeune et le rapprochement des Missions Locales avec les Organismes Paritaires Collecteurs Agréés (OPCA). Pour Pôle emploi, les principaux avantages du dispositif sont les suivants : « - La cible des jeunes non qualifiés (public prioritaire très touché par la sélectivité du marché du travail), - le travail sur le parcours formation – qualification en lien avec l’embauche, - la durée du contrat (CDI temps plein ou sur dérogation temps-partiel), - l’accompagnement dans l’emploi qui favorise l’intégration et la mise en œuvre plan d’action formation) ». Le dispositif a été également bien accueilli par les professionnels de la Mission Locale, même si certains aspects, liés aux critères d’éligibilité notamment, ont été parfois difficiles à gérer : « Le dispositif est une réponse adaptée à un public ciblé, qui est d’ailleurs souvent en accompagnement renforcé; donc, on l’a accueilli avec enthousiasme. C’est une occasion pour les jeunes de se former pour rebondir ensuite. Car il s’agit souvent de CDD (…). C’est souvent la première fois qu’ils ont la possibilité d’accéder à un emploi. Au départ, les collègues ont été sceptiques sur l’antenne Centre car nous n’avons pas de ZUS et l’objectif était de toucher ces jeunes de ZUS. Mais les jeunes en centre-ville ont été pris. Il y a beaucoup de jeunes en difficulté dans certains quartiers dans Aiguelongue, la cité Montassinos par exemple, ou la Pompignane. (…) Il a fallu aussi gérer la pression du public, celle des jeunes diplômés qui se plaignaient de ne pas avoir accès aux Emplois d’avenir. Le point négatif est lié à cet aspect : « Si j’avais su, je n’aurais pas eu mon bac » En 2014, on a moins cette pression. » (Responsable territorial) Dans les antennes et quartiers Politique de la Ville, où les attentes des jeunes étaient fortes, la pression a sans doute été accentuée : « J’ai bien accueilli le dispositif mais sa mise en œuvre s’est faite dans la précipitation. (…) Il y a eu une mauvaise communication au niveau national et des effets d’annonce. On a « sur 5 Pour rappel, les contrats Emplois d’avenir sont des CDI ou des CDD de 1 à 3 ans, à temps plein (sauf exception). 7 communiqué » et il y a eu un effet négatif; on a été assaillis par les jeunes ; ils venaient ici comme si on avait reçu le matin des cartons d’Emplois d’avenir et ils venaient chercher le leur. C’était difficile à gérer : on gérait la violence, l’incompréhension, la déception. Il fallait réajuster le tir. (…) Les associations ont fait le relais de la communication et les jeunes sont venus là ; mais ils n’étaient pas toujours dans les critères ; c’étaient des jeunes en difficulté, peu ou pas qualifiés, avec peu ou pas d’expérience (…) les plus revendicateurs ; certains avaient une expérience dans le bâtiment mais les offres concernaient surtout le non marchand. On demandait des jeunes avec des qualifications spécifiques. » (Conseiller référent emploi Mosson) « Les Emplois d’avenir apportent une plus-value pour les Missions Locales; c’est une mesure intéressante (…) même si les critères d’éligibilité sont compliqués à gérer et même s’il est difficile aussi de gérer les objectifs quantitatifs. » (Responsable territorial) L’existence d’un service relation entreprises au sein de la ML était un atout, selon le conseiller chargé depuis plusieurs années de la gestion des offres, de la présélection des candidats et de la relation avec les employeurs : « Quand les Emplois d’avenir sont arrivés, j’ai trouvé que le signal était positif; cela a révélé le bien fondé de tout ce qui avait été mis en place auparavant, notamment la structuration du service entreprise. Nous avions déjà constitué un fichier entreprises et nous étions déjà mobilisés sur les autres contrats aidés (CIE et CAE). Nous étions donc prêts. Les Emplois d’avenir ont dynamisé le service. » (Chargé de relations entreprises de la ML) 2.2 Un démarrage difficile, une montée en puissance progressive Dès la sortie des textes officiels, la MLJAM s’est engagée dans la mise en œuvre du dispositif EAV, avec un objectif fixé de 636 contrats à signer avant le 31 décembre 2013. En novembre 2012, le ministre de l’économie sociale et solidaire, Benoit Hamon, était à Montpellier pour signer la convention d’engagement pour les Emplois d’avenir avec le Conseil général de l'Hérault. A cette occasion, les quatre premiers recrutements en EAV ont été réalisés avec Hérault Sport 6 à l’Institut régional du travail social (IRTS) de Montpellier en présence du ministre. Mais, selon le référent Emplois d’avenir de la Mission Locale : « La mise en place du dispositif au démarrage a été un peu lente sur l’agglo; on était peu nombreux à y travailler ; on n’a pas impliqué plus que ça les conseillers au démarrage. S. et moi, avons absorbé toutes les demandes de la part des associations etc. parce qu’au départ, seul le secteur non marchand était concerné. Puis on est monté en puissance et au bout de 8 mois, on a dû mettre en place une organisation spécifique pour le déploiement des Emplois d’avenir. (…) Dans les premiers mois, les offres provenaient essentiellement des associations et des collectivités locales (…) Nous avons fait 300 offres à deux pendant ces 8 mois, de novembre et juin 2013. Puis quand le dispositif a été connu et mis en place, c’est arrivé dans tous les sens. On a dû se poser, réfléchir à une organisation. Pendant l’été, on a fait énormément de signatures. On est au taquet depuis juin 2013. Et donc, on a fait une proposition d’organisation en septembre et on est passé à 18 personnes impliquées dans le dispositif. » 6 Association regroupant 80 fédérations sportives, associée au département. 8 Plusieurs raisons expliquent le démarrage lent du dispositif: l’insuffisante préparation en amont, la réticence des collectivités locales, le manque d’offres sur le territoire, l’exigence de la qualité et la difficulté à placer des jeunes en ZUS. En outre, selon le référent EAV de la Mission Locale, « c’est un dispositif qui s’est construit au fil de l’eau et a été en perpétuelle évolution au niveau de ses règles (durée des contrats, éligibilités des jeunes,…) avec des moyens de communication « Etat » à l’attention des employeurs erronés, notamment au niveau du coût d’un EAV. » Un déficit de préparation en amont du dispositif La création d’un nouveau dispositif demande toujours un certain temps de « mise en route », d’autant plus lorsqu’il est de l’envergure de celui des Emplois d’avenir. Son démarrage difficile dans les premiers mois sur un certain nombre de ML de la Région s’explique pour un certain nombre d’acteurs par un déficit de préparation en amont : « En juin, quand je suis arrivée, je pense qu’il y avait des frustrations qui sont remontées d’un d’un seul coup; n’importe quel nouveau dispositif nécessite une énergie supplémentaire. Là, c’est sûr que c’est un dispositif qui est ce qu’il est sur le plan administratif, qui implique une démarche de travail différente des autres: le contrat d’engagement, la démarche d’aller vers l’employeur ; même si les ML le faisaient avant, il a fallu y aller d’autant plus. Et les outils ont suivi après, les explications de telle procédure etc. ; il fallait y aller à fond alors que derrière, tout n’était pas calé. (…) Il y a une masse d’informations, qui en outre ont évolué au fil de l’eau : les taux ont évolué : offices HLM, privés, pas privés etc., la question de l’éligibilité des jeunes, des employeurs, etc. : pour le conseiller, c’était difficile à suivre. Nous avons organisé une réunion en juin 2013 entre référents EAV [de la région]: il fallait ouvrir les frustrations, le manque de partage d’infos, la charge de travail, la relation autour de l’AFPA. Ici, la formation AFPA a eu lieu début avril mai-juin : c’était l’explication du process Emplois d’avenir qui venait 6 mois après le lancement pour des référents EAV qui étaient déjà à plein régime; donc complètement en décalage, même si cette formation pouvait être intéressante pour des personnes plus extérieurs au dispositif, comme les chargés d’accueil. » (Chargée de projet ARML Languedoc Roussillon) Les professionnels de la ML confirment le peu d’intérêt de ces formations AFPA, réalisées tardivement et sur des contenus déjà connus d’eux : « On s’est fait former par l’AFPA une journée ou deux, sur l’aspect administratif des EAV (bilan à trois mois etc.) mais c’est nous qui leur apprenions (…) C’était une commande de la Direccte, mais pourquoi ne nous a-t-on pas impliqués dans la mise en place ? C’est coûteux. » (Conseiller emploi Mosson) Suite à la réunion organisée en juin 2013, la chargée de projet ARML a élaboré différents outils à destination des conseillers et des employeurs: plaquette sur les différents contrats proposés dont les EAV (avec le contact des référents EAV), site intranet (lancé en novembre 2013), mémos sur la contractualisation, la dématérialisation, le suivi, fiches OPCA etc. Ces outils et les échanges entre référents EAV de la Région apparaissent comme utiles mais auraient pu être réalisés plus tôt. L’animatrice territoriale de la Direccte estime elle aussi que la mise en œuvre des Emplois d’avenir n’a peut-être pas été assez préparée: 9 « La complexité de la mesure et la charge de travail ont été sous-évaluées. (…) L’ingénierie de la formation aurait pu être anticipée. L’offre de formation du CNFPT est une offre d’adaptation. Le qualifiant n’a pas été préparé. (…) Pour les Emplois jeunes, nous avions préparé des éléments de contexte. On avait réfléchi sur les enjeux et les évolutions par secteur (la médiation par exemple), les profils de poste : on était dans une logique d’innovation. Il y avait eu un travail méthodologique en amont. » Des collectivités locales au départ réticentes Selon l’animatrice territoriale de la Direccte, la mobilisation des collectivités locales a été longue et compliquée, malgré les nombreuses réunions organisées, territoire par territoire. Au printemps, le préfet de l’Hérault a relancé par courrier l’ensemble des maires du département, pour les inciter à recruter des Emplois d’avenir. Il a convoqué une réunion à laquelle ont participé 30 ou 40 maires. Sans doute les difficultés budgétaires des CL ont-elles freiné les recrutements ; mais elles étaient également interrogatives sur les modalités de recrutements et le public ciblé par le dispositif : « Fin 2012, il y avait pas mal d’interrogations ; nous ne savions pas exactement quel était l’interlocuteur, Pôle emploi ou la MLI ? Nous ne savions pas comment procéder pour le recrutement (…). Nous voulions une marge de manœuvre, pouvoir sélectionner dans nos viviers, des jeunes de notre commune. Au départ, cet aspect n’était pas très clair. C’est pourquoi cela a trainé. Quand cela a été un peu plus cadré, vers mars-avril, on a pu envoyer des jeunes vers la MLI et faire en sorte que la MLI fasse un mixte entre nos jeunes et les jeunes pré-sélectionnés par la Mission Locale7. » (Service RH de Castelnau) Globalement, comme le souligne le directeur-adjoint de la MLJAM, dans les territoires ou les élus portaient le dispositif politiquement, et notamment dans les communes rurales qui ont joué le jeu, les recrutements se sont développés. Une autre difficulté rencontrée par des CL de taille plus importante était liée à l’opposition des syndicats qui ne voulaient pas de recrutements extérieurs alors que de nombreux vacataires étaient en poste. C’était le cas de l’Agglomération de Montpellier, notamment, où il fallait que les recrutements passent par la validation des syndicats qui autorisaient à passer l’offre. Le Conseil général estime quant à lui que ses « recrutements non massifs et progressifs » ont permis d’éviter le blocage des syndicats et le risque de concurrence avec des agents non titulaires. Les collectivités ont développé progressivement leurs recrutements à partir de l’été 2013. Au 1er février 2014, la Commune de Montpellier avait recruté 36 Emplois d’avenir et l’Agglomération 7. Le Conseil régional Languedoc-Roussillon avait recruté 11 Emplois d’avenir. En mars 2014, sur 31 communes de l’Agglomération, 20 avaient recruté au moins un Emploi d’avenir. 7 Selon le référent Emplois d’avenir de la ML, « il avait bien été précisé que les offres devaient être « ouvertes » afin d’être transparentes dans le recrutement et éviter toute forme de discrimination. En conséquence, même si la Mairie avait des candidats à « placer », ceux-ci devaient passer par le circuit de recrutement MLJAM. » 10 Le manque d’offres et l’ouverture tardive au secteur marchand Les collectivités mais aussi les autres employeurs potentiels, notamment les associations, compte tenu de leurs difficultés financières, ont été prudentes dans leurs recrutements. Selon Pôle emploi, mais aussi pour la plupart des acteurs interrogés, l’ouverture tardive au secteur marchand, qui s’est faite en outre en trois temps (certains secteurs puis tous secteurs hors entreprise de travail temporaire - ETT, aide à domicile et saisonnier puis au final tous secteurs hors ETT et saisonnier8) n’a pas facilité la mise en place des Emplois d’avenir. L’ouverture à tous les secteurs d’activité aurait pu être réalisée plus rapidement, selon nos interlocuteurs. De façon générale, le recueil des offres en Emplois d’avenir a été (et reste) difficile. La Direccte a conventionné avec la Chambre régionale d’économie sociale et solidaire (CRESS), pour recruter une personne chargée de recueillir des offres mais les résultats ont été limités. Par ailleurs, une Convention a été établie avec FACE (Fondation Agir contre l’exclusion) pour mobiliser son réseau et collecter des offres; là aussi les résultats ont été faibles, en particulier parce que les entreprises liées à ce réseau ont des politiques de ressources humaines qui ne correspondent pas au public EAV. Pôle emploi et Cap emploi ont également constaté les difficultés de recueil d’offres. Peu d’offres ont été transmises de leur part. L’exigence de la qualité « Au départ, on nous avait dit : c’est trois ans, temps plein obligatoire et on a tenu. Et les dérogations doivent être exceptionnelles. Au début, à Montpellier, sur les dérogations, on a été un peu trop bon élève : on a fait 10 dérogations jusqu’à octobre. Pour une offre, nous pensions que si nous présentions les candidatures bac + 2, l’employeur prendrait ces bac + 2 ; c’était injuste au regard du public ciblé par le dispositif. Donc, on a décidé de ne présenter d’abord que les non bacheliers. Les candidatures dérogatoires étaient adressées dans un second temps quand l’employeur avait écarté les premières candidatures « non dérogatoires ». Et puis ensuite, on a vu que les autres ML de la Région faisaient beaucoup de dérogations. Certains étaient à 100 % de dérogatoires sur les ZUS. Donc, on a ouvert après un an sur Mosson et Croix d’Argent. Depuis octobre 2013, depuis que nous avons eu les données régionales. » (Référent EAV) L’animatrice territoriale de la Direccte confirme cette volonté de la ML de travailler sur la qualité des emplois proposés : « Sur Montpellier, la ML a mis du temps à démarrer car ils recherchaient la qualité des postes et une durée longue des contrats. (…). Sur le département, l’aspect qualitatif a été respecté: sur 270 contrats Emplois d’avenir en juin 2013, 243 étaient d’une durée supérieure à 12 mois. » Même si les dérogations qualification sont plus nombreuses aujourd’hui et que les contrats sont pour la plupart des CDD, la MLJAM maintient son objectif de vérifier sur le terrain que les exigences liées aux EAV sont respectées par l’employeur (engagement sur le tutorat et la formation en particulier). 8 Arrêtés préfectoraux du 11/06/2013 qui ouvre au secteur marchand avec trois restrictions et du 14/08/2013 qui lève une des restrictions 11 La difficulté de placer des jeunes résidant en ZUS Un travail de réflexion mené par l’ARML Languedoc Roussillon avec les équipes des ML de la région a permis d’identifier plusieurs freins au développement des Emplois d’avenir dans les ZUS9 ; outre le phénomène de discrimination, d’autres facteurs ont été identifiés comme la rareté des offres d’Emplois d’avenir dans les quartiers et le manque de mobilité des jeunes des quartiers dans certains cas, la mobilisation difficile de ces derniers sur le volet formation qui peut être un obstacle à l’embauche en EAV, la fréquence des offres fermées (employeurs ayant déjà sélectionné leur candidat quand ceux-ci se rapprochent de la Mission Locale pour la contractualisation, il n’est donc plus possible de positionner des jeunes en ZUS), les situations complexes (liées aux titres de séjour, notamment), et la difficulté parfois de faire aboutir des dossiers de dérogations (certaines Unités territoriales Direccte (UT) demandant par exemple une lettre de motivation des employeurs, ce qui est difficile à comprendre pour ces derniers). 2.3 Une organisation qui a évolué pour faire face à la montée en charge du dispositif Une équipe mobilisée Compte tenu de la charge de travail liée aux Emplois d’avenir constatée à partir de juin 2013, les moyens mis en œuvre par la Mission Locale ont été développés. Au moment où nous avons démarré l’enquête début janvier 2014, 18 personnes étaient impliquées sur le dispositif : - le directeur-adjoint, qui assure le pilotage stratégique du dispositif ; il est chargé également de la validation des contrats (le directeur peut aussi intervenir sur la validation si besoin), - un coordinateur référent EAV et son assistante (« Appui Emploi d’avenir »), - un chargé de relation entreprise, responsable du service relations entreprises, et son assistante, - 4 « conseillers-développeurs » (« Appui développement de branches ») qui organisent diverses actions de mise en relation entre les jeunes suivis et des entreprises en tension de main-d’œuvre (bâtiment travaux publics, service à la personne, commerce, tourisme-hôtellerie-restauration), - 3 référents emploi (« Appui équipes et territoires »), qui appuient les équipes sur chacun des territoires, - un « Appui Pôle emploi CAE/CIE» (avec la conseillère Pôle emploi mise à disposition et une assistante) : chargé de la transformation des CAE et CIE en EAV, - 4 responsables territoriaux (antennes de Mosson, Centre, Croix d’Argent et Castries) : « Appui collectivités » : ils sont chargés des recrutements réalisés par les communes rattachées à leur secteur géographique. Enfin, un conseiller a été affecté, début mars 2014, au suivi des bilans à trois mois et à la mise en œuvre des plans de formation ; il vient en complément ou en appui aux professionnels déjà mobilisés sur le suivi des jeunes en EAV. 9 Le constat de l’ARML était le suivant : sur la Région Languedoc-Roussillon, l’objectif régional sur les ZUS était, pour 2013, de 16,3%. L’augmentation du poids des jeunes en ZUS parmi les jeunes recrutés en Emplois d’avenir s’est fait progressivement. Le taux est passé de 10,8% en juillet 2013 à 12,8% au 31 octobre 2013. Actuellement, les résultats en ZUS sont plutôt bons. 12 Le dispositif est coordonné par le chargé de développement - référent Emplois d’avenir, qui dispose à la fois d’une expérience de plusieurs années dans la ML et d’une expérience dans le secteur privé. Il est basé dans les locaux de la plateforme transversale (au siège de la ML) qui est la « porte d’entrée » pour les employeurs qui veulent recruter. Un numéro unique Emplois d’avenir a été créé, permettant d’apporter une réponse à chaque entreprise. Si cette entreprise est déjà connue de la ML, c’est le référent de cette entreprise qui s’en chargera. L’objectif est que chaque employeur ait un interlocuteur unique. La gestion d’une offre Des outils ont été créés par l’équipe, comme le « guide méthodologique pour la gestion d’une offre Emploi d’avenir », qui détaille la procédure à suivre pour les trois situations qui peuvent se présenter : - l’employeur souhaite ouvrir son offre et ne l’a pas déposée à Pôle emploi - l’employeur a repéré son candidat mais souhaite ouvrir son offre - l’employeur a en vue un candidat et souhaite monter le dossier administratif (recrutement « fermé »). La description des tâches à accomplir illustre la lourdeur du travail à mener sur chaque offre : - vérification de la fiche de poste et de l’existence légale de l’employeur - préparation et établissement de la fiche de poste si elle n’existe pas (et le travail peut alors être long) - saisie de l’offre sur Parcours 3 + Mise en relation (MER) - envoi de l’offre aux conseillers - envoi de l’offre à Pôle emploi et Cap emploi pour diffusion - entretiens de présélection (pour les jeunes de la MLJAM) - consultation de la boite « Emploi d’avenir » pour vérifier les candidatures reçues par Pôle emploi - transmission des candidatures à l’employeur (un seul courriel pour l’ensemble des candidatures (MLJAM-Pôle emploi) : 10 candidatures maximum: 4 CV de la ML, 4 de Pôle emploi et 2 de Cap emploi ou 5 CV de la ML et 5 de Pôle emploi - lorsque l’employeur a sélectionné son candidat : lancement de la procédure dématérialisée de saisie de CERFA - si le jeune est directement recruté par l’employeur : vérification de son éligibilité, inscription à la ML s’il ne l’est pas déjà et montage du dossier - mise à jour de l’offre sur Parcours 3 (qui sera « suspendue » en attendant le démarrage du contrat) - créer un entretien sur le dossier du jeune, ouvrir le programme « EA » sur le dossier du jeune et mettre à jour la situation du jeune - validation du contrat par la direction - préparation du rendez-vous avec l’employeur (édition du CERFA en 4 exemplaires, dossier d’engagement) - signature des CERFA et du dossier d’engagement + recueil du contrat de travail et autres éléments administratifs (RIB de l’entreprise, carte d’identité du jeune etc.) : cela suppose des déplacements - dépôt du dossier complet auprès de l’assistante qui enregistre dans le tableau de bord ML - mise à la signature des CERFA auprès de la direction MLJAM qui signe au nom de l’Etat - envoi du CERFA papier à l’Agence de services et de paiement (ASP) + édition de la « notification d’attribution » et de la « note Sylae » et envoi à l’employeur - clôture de l’offre à la date de démarrage du contrat - suivi du jeune en emploi pendant 3 ans selon un échéancier fixé à la signature du contrat avec comme objectif de vérifier la bonne intégration du jeune dans l’entreprise et le respect des engagements pris par l’employeur au niveau des formations proposées. 13 Outre les tâches directement liées à une offre, le dispositif mobilise également l’équipe pour la prospection et le recueil d’offres, l’information aux employeurs et aux jeunes, la préparation des jeunes, le suivi dans l’emploi (bilans à trois mois, suivi selon le besoin), la mise en place des parcours de formation, le « reporting « (tableau de suivi des contrats signés qui renseigne sur les jeunes, les employeurs, les secteurs d’activités, etc.) et la participation aux différentes réunions relatives aux EAV, en particulier les réunions de cellule opérationnelle, dont la Mission Locale assure l’animation et la rédaction des comptes rendus pour l’ensemble des partenaires. La prospection et l’information des employeurs Pour ce travail de prospection et de recueil des offres, une répartition a été faite entre le référent Emplois d’avenir, chargé particulièrement des « Grands comptes » (c'est-à-dire les « entreprises stratégiques » et les entreprises ayant signé une Convention nationale, comme la SNCF par exemple), le chargé de relations entreprises, chargé des associations et des projets de recrutement « ouvert » (l’objectif étant de fidéliser de nouveaux employeurs), les responsables territoriaux, chargés des Communes de leur territoire, et les conseillers développeurs, pour les entreprises des secteurs dont ils sont chargés. Beaucoup de réunions d’information avec les employeurs, notamment du secteur non marchand, ont été organisées sur le territoire : « Nous avons eu chaque mois des réunions de sensibilisation sur le dispositif, avec des entreprises, les branches, les associations, le secteur du sanitaire et sociales, les Maisons de retraite etc. » (Référent EAV) Au total, 628 offres EAV ont été recueillies par l’équipe ML depuis fin 2012 correspondant à 766 postes (à la date de notre enquête). La MLJAM ayant signé au 17 avril 2014, 498 Emplois d’avenir, le référent EAV souligne que de nombreuses offres prises par la MLJAM ont étés pourvues par des jeunes inscrits dans d’autres Missions Locales et par CAP Emploi. Le travail de prospection de la MLJAM a donc servi à intégrer des jeunes de la Région. Cette mutualisation des offres pose la question de la pertinence qu’il y aurait eu à mutualiser également les objectifs d’EAV au niveau régional (ou au niveau départemental au moins). L’information et la préparation des jeunes aux EAV Les jeunes accompagnés par la MLJAM ont été rapidement informés du dispositif Emplois d’avenir, notamment par l’intermédiaire de leurs conseillers. Les offres d’emploi en EAV sont affichées notamment dans l’antenne Mosson et les jeunes peuvent venir les consulter régulièrement. Par ailleurs, des informations ont été faites aux partenaires, en particulier aux Réseaux qui travaillent régulièrement avec la ML dans les quartiers de Montpellier: Réseau Pailladins, Réseau Rimbaud, Réseau des Cévennes, qui regroupent les associations, centres sociaux etc. et se réunissent tous les mois, ou les Ecoles de la Deuxième Chance. La Mission Locale a mis en place un certain nombre d’actions permettant d’informer le public sur les EAV et de les préparer aux postes proposés. L’antenne centre, par exemple, a organisé des ateliers Emplois d’avenir chaque semaine, animés par deux conseillères. « En 2013, 80% des jeunes de ces ateliers ont décroché un Emploi d’avenir », selon la responsable territoriale. Des ateliers de préparation aux entretiens d’embauche en EAV ont également été expérimentés, en partenariat avec une association de retraités. 14 Dans l’antenne de Mosson, des ateliers de préparation aux EAV d’une demi-journée par semaine (2 demi-journées par semaine en 2013) sont animés par les conseillers. « On a mis en place les ateliers de préparation à partir d’octobre: une demi-journée pour que les jeunes mettent en valeur le peu qu’ils savent, pour qu’ils s’approprient leur CV etc. et puis un atelier de simulations d’entretien pour les candidats aux EAV mais ouverts aux autres jeunes s’il y avait suffisamment de place. » (Conseiller emploi Antenne Mosson) Les besoins étant importants sur cette antenne (plus de 3000 jeunes suivis, avec des délais d’attente pour les rendez-vous qui s’allongent), les conseillers se sont organisés et ont fait évoluer leurs actions: « On s’est mis ensemble pour réfléchir dans l’antenne entre midi et deux et on a mis en place des ateliers tous les jours entre 14 h et 15 h pour accueillir les jeunes (…). Je viens en support aux collègues. Tous les jours de 14 h à 15 h, je suis disponible sans rendez-vous pour les jeunes qui veulent des renseignements sur les EAV ou une préparation pour un entretien etc. » (Conseiller emploi Antenne Mosson) Ces actions semblent efficaces et adaptées, ce qui n’est pas le cas des ateliers organisés sur une semaine par l’AFPA (financement Etat) pour les jeunes issus de ZUS et intitulés « Semaine de coaching « Jeunes, soyez proactifs pour accéder à l’emploi ». Très peu de jeunes ont suivi ces formations, selon les professionnels de la ML : « Sur l’atelier AFPA, je n’ai pas de retour. Tous les jeunes qui passaient par l’atelier, je leur proposais. Mais c’est davantage de l’occupationnel; ils n’y vont pas trop : ils ont déjà fait ce type de travail à la ML. Et puis c’est sur plusieurs jours, à l’AFPA : certains y sont allés une demi-journée et n’y sont pas retournés ensuite. » (Conseiller emploi Antenne Mosson) « Pour ces ateliers l’AFPA organisés sur plusieurs jours, il n’y a pas de restauration sur place et cette action n’offre pas aux jeunes d’indemnisation. Et puis nous faisons déjà ce type d’actions en interne (…). Nous manquons de moyens ; ils auraient mieux fait de nous donner plus de moyens. » (Référent EAV) Le suivi en emploi, une fonction chronophage Le suivi et l’accompagnement en emploi sont des fonctions déjà connues des professionnels des Missions Locales. Le travail est cependant d’autant plus lourd dans le cadre des EAV qu’il s’agit d’un dispositif qui concerne en particulier des jeunes avec des problématiques souvent difficiles et que les exigences pour l’employeur (tutorat, formation) sont importantes et qu’il s’agit de les faire respecter: « La commande de l’Etat est notamment de placer des jeunes des ZUS : mais ce sont des jeunes qui prennent du temps et on le sait. L’employeur veut bien prendre le risque mais nous prenons aussi le risque de se « griller » l’employeur ; et puis après, l’employeur a besoin de nous, il a des aides financières mais il n’est pas éducateur, ni pédagogue ou formateur : nous sommes en lien permanent avec le jeune, avec les parents mais aussi avec l’employeur pour éviter les ruptures de contrat : « le jeune ne s’est pas levé le matin, je ne sais pas comment faire etc. ». Le plus long et le plus difficile, ce n’est pas la signature du contrat ou le montage du dossier administratif, c’est le suivi en emploi et les différentes actions de « médiation » qui peuvent être mises en place. » (Référent EAV) Le rôle de la ML est d’abord de monter le dossier d’engagement avec l’employeur à partir duquel le suivi va être réalisé. Il s’agit souvent en amont de travailler sur la fiche de poste. Les compétences des professionnels de la ML dans ce domaine sont donc appréciées : 15 « Le dossier d’engagement et de suivi10 est lourd : identité du jeune de l’employeur, du conseiller référent, code ROME, cœur de métier, type de contrat, mission principale à laquelle sera rattaché le jeune (employé aux espaces vert etc.). Où se situe le jeune dans l’organigramme, activités du jeune, compétences à acquérir, certification à mettre en place etc. (…) Pour le monter, on fait la fiche de poste avec l’employeur : « le jeune va donner un coup de main pendant la fête du village ? Est-ce qu’il utilise des machines: est-ce qu’il fait la taille des arbres ? Si oui, il faut alors l’habiliter pour travailler en hauteur ; va-t-il faire le traitement des arbres etc. ? Et on essaye de chercher les formations qui vont être nécessaires. Pour certains postes polyvalents d’accueil et de secrétariat dans des Mairies ou des associations, on va décortiquer aussi toutes les tâches : l’accueil mais aussi du secrétariat, un peu de compta, la caisse à la fin de la journée etc. A partir du moment où il y a ces fiches de postes, on peut faire le point et évaluer l’évolution des compétences du jeune : « en quoi est-il meilleur en taille des arbres etc. ? »: la fiche de poste est essentielle pour évaluer, objectiver et recadrer sur « ça se passe mal », ou « ça se passe bien ». (…) On fait comprendre aux employeurs qu’il y a des critères objectifs et que sans cette fiche de poste détaillée et sans avoir identifié chaque compétence et les niveaux de performances attendus, on ne peut pas évaluer le jeune. » (Référent EAV) L’investissement de la ML dans le suivi en emploi n’est pas le même selon les jeunes placés mais aussi selon les entreprises, celles qui disposent de services RH et sont outillées et celles qui ne le sont pas : « A l’Agglo ou dans les communes comme Montpellier ou Castelnau, ils ont des fiches de poste, mais dans des petites boites, Pro courrier, le petit restaurant, la petite commune, ils n’ont pas de fiches de poste. C’est pareil sur l’aspect tutorat : on conseille à l’employeur de faire la formation des tuteurs car souvent, le tuteur n’est pas formé et à cette fonction, un bon professionnel n’est pas obligatoirement un bon tuteur ; le suivi et l’évaluation d’un jeune ne s’improvisent pas. » (Référent EAV) En revanche, comme on le verra plus loin, des employeurs plus importants comme la Ville de Castelnau ou le Conseil général, mettent en place des modalités de tutorat et de suivi efficaces : « Certains employeurs, ceux qui font de l’apprentissage, notamment ont des outils. A Castelnau, ils ont fait un document de suivi magnifique; moi je ne viens pas avec le mien.» (Référent EAV) Par ailleurs, le logiciel Parcours 3 ne facilite pas la gestion administrative du suivi des formations des jeunes en EAV: il ne permet pas d’identifier quel est l’intitulé d’une formation préparée par exemple, ce qui ne facilite pas le suivi des engagements en matière de formation : « La retranscription du suivi dans Parcours 3 pose problème: un jeune qui va au CNFT, quand il a 10 formations certifiantes à faire, je ne peux préciser le libellé de la formation; on va mettre que l’on va réaliser une formation certifiante : l’employeur doit laisser une trace pour lui donner les certifications correspondantes. (…) J’enregistre les engagements de l’employeur après la signature car notre mission, c’est de contrôler que les engagements de l’employeur soient respectés.» (Référent EAV) 10 Dossier commun à toutes les ML mais que beaucoup ont retravaillé pour le rendre plus opératoire, notamment la MLJAM. 16 La question des grands comptes Dans la mesure où les grandes entreprises (« Grands comptes », comme la Poste ou la SNCF par exemple) ont leur siège régional à Montpellier, la MLJAM était déjà en relation avec elles. En outre, chaque ML prenant les offres situées sur son secteur géographique, le référent EAV de la MLJAM avait déjà entamé une démarche commerciale sur les Emplois d’avenir : « Il a beaucoup pris la main sur ces grandes entreprises mais n’avait plus le temps de faire le lien avec ses collègues des autres ML. Il a absorbé tous les CERFA de la Poste, de la SNCF. A un moment donné, c’était trop compliqué pour lui. On est arrivé en renfort, moi en tant que chargée de projet. » (ARML LR) « Pour le recrutement régional de la SNCF, j’étais déjà en contact avec le DRH, il a voulu que je sois le seul interlocuteur ; je me suis retrouvé sur le pilotage régional ; si un jeune était de Lunel, je devais contacter Lunel. (…). A la Poste, comme l’employeur est basé à Montpellier, il n’y a que moi qui pouvais prendre l’offre, même si le recrutement était ailleurs. (…) Il y a eu un manque de pilotage régional qui est retombé sur nous, cela nous a fait perdre du temps et cela a créé des frustrations.(…) On a voulu que l’ARML prenne la main et coordonne ces recrutements régionaux mais l’ARML ne peut assurer la gestion d’une offre en interne, elle ne peut que diffuser l’information aux autres ML ce qui, au final, nous oblige à coordonner la gestion des candidatures des ML au niveau Région, ce qui est vite devenu ingérable et nuisait à nos relation inter-ML. » (Référent EAV) Concernant deux grands comptes comme le CHRU ou la CAF, Pôle emploi avait déjà établi un partenariat avec eux, ce qui a facilité leur mobilisation sur le dispositif. La Méthode de recrutement par simulation (MRS) a été proposée par Pôle emploi, notamment pour le recrutement des Emplois d’avenir à la CAF; la méthode est fondée sur l’évaluation des habiletés et de la motivation des candidats à tenir un poste de travail : « Cette méthode permet de présenter à une entreprise des candidats qui, certes ne possèdent pas nécessairement la totalité des savoirs mis en œuvre par les salariés observés (connaissances techniques), mais qui, par les habiletés qu'ils ont mis en évidence, vont s’adapter au poste de travail (directement en entreprise et/ou avec une formation). Cette approche permet à la fois de sortir des critères habituels de recrutement, exprimés essentiellement en termes de diplôme ou d'expérience professionnelle mais également de conserver le niveau d’exigence légitime de l'entreprise, puisque les résultats de l'évaluation peuvent être comparés à ceux des salariés de l'entreprise. A ce titre, la méthode de recrutement par simulation permet de lutter contre les difficultés de recrutement, et contre la sur-sélectivité du marché du travail. Le recrutement s'appuie ainsi sur des critères mesurés, identiques pour tous les candidats, donc équitables, partageables et transparents.» (Pôle emploi) Certains recrutements ont été très sélectifs et lourds à organiser, selon la Mission Locale: « Le projet de la TAM11, qui passe aussi par la méthode MRS, est de prendre pendant trois ans des jeunes sur des postes de contrôleur (contrôle des billets etc.) pour enchainer à l’issue sur des postes de chauffeur. Donc en amont, ils font des tests MRS sur le comportement : gestion du stress mais aussi sur la capacité à être chauffeur à l’issue des 3 ans. Il y a des tests 11 TAM : Transports de l’agglomération de Montpellier. 17 psychotechniques et des entretiens. On a fait une information collective sur la TAM en décembre 2013 : il y avait 300 candidats pour 10 postes. On a donc informé sur les critères et on a filtré un maximum après l’info collective. Pôle emploi a fait déjà les premiers tests maths, etc. Mais on ne peut pas vendre la personnalité d’un jeune, sa motivation etc. (…). A l’issue, les jeunes doivent encore passer par une POE12 .» Selon Pôle emploi, « le recours aux Préparations opérationnelles à l’emploi (POE) n’a pas vocation à ajouter une étape supplémentaire de sélection; il s’inscrit dans une logique de sécurisation des parcours en permettant aux jeunes de bénéficier d’un parcours d’adaptation à la prise de poste. Pôle emploi et les OPCA sont ainsi engagés dans la mobilisation de leurs moyens pour contribuer à la réussite de l’insertion des jeunes en entreprise. » Aujourd’hui, sur les « grands comptes », l’ARML Languedoc Roussillon fait le relais, l’interface et le suivi derrière. Au moment de notre enquête, les recrutements étaient terminés pour la SNCF dans la région; sur les 18 jeunes recrutés dans cette entreprise, 13 étaient issus de la MLJAM. Et ce sont les Apprentis d’Auteuil qui font le suivi. Ils ont le contact de chaque jeune et celui du conseiller; ils doivent assurer le retour de ces suivis à la ML. 2.4 « Le socle de collaboration » régional et le rôle de la « cellule opérationnelle » Au niveau régional, une charte locale de coopération entre la Direccte, Pôle emploi et les Missions Locales (« socle de collaboration ») a été mise en place dès novembre 2012. La mise en œuvre du dispositif est définie de la façon suivante : Etape 1 Prospection des employeurs Etape 2 Qualification des offres d’emplois d’avenir Etape 3 Repérage et l’orientation des jeunes Etape 4 Mise en relation d’un employeur avec des candidats Etape 5 Négociation avec l’employeur de ses engagements Etape 6 Signature de la demande d’emploi d’avenir Etape 7 Suivi du jeune et de l’employeur Etape 8 Préparation de la sortie du jeune « Les Missions Locales et les Cap emplois pour les jeunes reconnus travailleurs handicapés sont chargés de la mise en œuvre du dispositif et les étapes 5 à 8 relèvent de la seule compétence de ces deux structures. Pôle emploi intervient, aux côtés des Missions Locales et de Cap emploi sur les phases en amont (phases 1 à 4). Il s’agit pour notre institution d’informer les employeurs et les jeunes concernés, de collecter les offres d’Emplois d’avenir et de mettre en relation les jeunes sur les offres d’Emploi d’avenir. » (Pôle emploi) Pôle emploi décrit ses interventions plus spécifiques de la façon suivante : Au niveau régional : - Une campagne marketing de promotion des emplois d’avenir auprès des entreprises éligibles, - La mise en place d’une procédure permettant la meilleure circulation de flux entrants et sortants d’offres d’emploi entre le réseau des Missions Locales et Pôle emploi, - La mise à disposition, pour chaque agence, d’une liste de demandeurs d’emploi éligibles aux Emplois d’avenir, - La participation au Comité de Pilotage régional du dispositif, 12 La Préparation opérationnelle à l’emploi (POE) est une formation de préparation à la prise de poste. 18 - Le suivi des indicateurs. Au niveau territorial et local : - La concertation avec la ou les mission(s) locale(s) du territoire ainsi qu’avec le Cap emploi départemental afin de répartir la prospection entre les différents acteurs, - La prospection des entreprises relevant du champ d’intervention de Pôle emploi, - La collecte des offres d’emploi d‘avenir, - La mise en relation des jeunes sur les offres d’emploi d’avenir, - L’organisation des modalités de suivi des offres avec la ou les missions(s) locale(s) du territoire, - La réception des jeunes demandeurs d’emploi éligibles aux emplois d’avenir sur la base des listes transmises par la Direction régionale, - La participation aux instances de pilotage infrarégionales. Localement, sur le territoire de Montpellier, la cellule opérationnelle (CO) a été mise en place en mars 2013 et se réunit tous les mois dans les locaux de la mission locale. Les personnes régulièrement présentes sont le directeur-adjoint de la ML et le référent EAV, la directrice de l’Agence Malbosc de Pôle emploi qui est responsable du partenariat avec la MLJAM, le directeur de Cap Emploi et la représentante de la Direccte. « L’objectif est de faire respecter l’esprit de la circulaire, de travailler sur les modalités de suivi et de faire le point sur les nouveaux contrats signés, les actions entreprises etc. Au début, il fallait aussi répondre aux questions techniques : contrats, dérogations etc. (…). Il y avait aussi la question des grands comptes. (…) La CO ne traite pas systématiquement les demandes de dérogations.» (Animatrice territoriale de la Direccte) Pour Pôle emploi, ce comité de partenaires permet d'évoquer les difficultés liées aux recrutements des EAV, comme la question de la présélection des candidatures, par exemple : « Pôle emploi a mis en place depuis janvier 2014 un réseau de référents jeunes (un par agence) afin de sécuriser les recrutements Emplois d’avenir. Il est le point central et le lien avec le correspondant MLI. » (Pôle emploi) Les rencontres mensuelles de CO se poursuivent en 2014 et permettent de traiter certains nouveaux thèmes comme le financement des parcours de formation, en invitant par exemple des OPCA. Les professionnels de la ML regrettent cependant (au moment de notre enquête), que ces réunions ne parviennent pas à résoudre les difficultés de relations avec Pôle emploi. Ces difficultés concernent par exemple les CV transmis sans travail de présélection, des candidatures qui parfois ne rentrent pas dans les critères (candidats de plus de 30 ans, et même parfois de plus de 50 ans, par exemple). Pôle emploi mentionne de son côté les problèmes de transmission de CV de la ML vers Pôle emploi et « les difficultés de suivi des offres d’emploi enregistrées Pôle emploi au niveau du réseau Mission Locale ». Mais la ML estime que les conseillers Pôle emploi ont les éléments pour assurer ce suivi : « Je transmets notre tableau de bord à Pôle emploi. Il y a le numéro de SIRET, le nom de l’entreprise, le poste, le salarié, l’identifiant etc. tous les éléments sur nos candidats (…). Globalement, la collaboration est compliquée car il y a 600 conseillers Pôle emploi susceptibles de gérer une offre. (…) Avec Cap emploi, les relations sont bonnes. Mais on n’a jamais eu d’offre de leur part. » (Référent EAV) Avec l’évolution de l’organisation et la mise en place d’un référent jeune par agence chargé de cette relation ainsi que la coordination par la conseillère Pôle emploi mise à disposition à la ML, la collaboration devrait s’améliorer. 19 La Direccte et les services de l’Etat se sont fortement investis dans la mise en œuvre du dispositif, dès le départ : « Nous avons beaucoup travaillé en interne, pour recueillir de la documentation, pouvoir répondre aux questions-réponses (septembre 2103), sur les aspects juridiques notamment, les aides Agefiph, la question des structures d’insertion par l’économique éligibles aux EAV marchands ou non marchands en fonction de leur statut et fonctions proposées etc.(…). Nous avons organisé un SPEL dédié à la mise en œuvre des EAV en Hérault en décembre 2012. » (Animatrice territoriale de la Direccte) La Mission Locale souligne l’intérêt de la collaboration avec le Préfet : « On a la chance d’avoir un préfet à fond sur les EAV ; il impulse, il nous appuie ; il a une vraie implication. » (Référent EAV) 2.5 Un objectif ambitieux pour 2013, difficile à atteindre L’objectif fixé pour la MLJAM jusqu’à fin décembre 2013 était de 636 Emplois d’avenir13. Au 31 octobre 2013, 297 prescriptions avaient été faites, dont 275 dans le secteur non marchand et dont : 104 dans des associations 152 dans des collectivités locales 19 dans des établissements publics sanitaires et sociaux Et dont 22 dans le secteur marchand. Parmi le total des contrats prescrits, 234 jeunes étaient de niveau infra IV, dont 63 de niveau V bis et 21 de niveau VI. 59 jeunes résidaient en ZUS. Le taux de rupture des contrats n’était que de 4% (dont 2% à l’initiative de l’employeur). La part des jeunes ayant démarré un parcours formatif sur le total des contrats prescrits était de 65%. Si l’objectif n’a pas été atteint à la fin 2013 (392 contrats signés, 61,6% de l’objectif réalisé), le nombre de signatures d’EAV a fortement progressé pour atteindre le chiffre de 637 début juillet 2014, dont : . 69,54% de CDD dans le secteur non marchand . 9,89% de CDD dans le secteur marchand . 12,87% de CDI dans le secteur marchand . 7,69 % de CDI dans le secteur non marchand Sur les 637 jeunes, les femmes sont majoritaires (55,7%). Les jeunes de 22 ans ou plus sont largement majoritaires puisqu’ils représentent 69% du total contre 31% pour les 16 à 21 ans. 424 jeunes (66,5%) résident dans la commune de Montpellier, dont 138 en ZUS (soit 21,6% du total des jeunes en EAV). 13 L’objectif pour l’ensemble du département était de 1735 EAV. 20 L’objectif pour 2014 est fixé à 495 Emplois d’avenir dont 285 pour le premier semestre, objectif qui a été largement dépassé. 3. Un dispositif d’emploi important pour les jeunes peu qualifiés du territoire Comme nous venons de le voir, près de 80% des jeunes recrutés en EAV sont de niveau infra IV. Les jeunes que nous avons interrogés font partie de ces jeunes peu qualifiés. Agés de 22 à 25 ans, ils avaient tous une expérience de travail avant leur entrée en EAV (ce qui sans doute contribue à leur capacité d’adaptation et d’intégration dans leur poste) mais connaissaient des difficultés d’accès à l’emploi durable. L’emploi d’avenir représente donc pour tous une opportunité importante d’emploi stable même si leurs itinéraires et leurs motivations diffèrent: pour certains, l’Emploi d’avenir est une occasion de découvrir un nouveau métier (Noémie, Damien); pour d’autres, il permet de s’intégrer de façon stable dans un emploi quel qu’il soit (Amel) ou dans le secteur d’activité déjà choisi (Adrien, Marie, Jordan). 3.1 Pour les jeunes, une véritable opportunité d’emploi stable Noémie, 24 ans, en Emploi d’avenir depuis février 2014 à Coeptis (secrétariat) Originaire de Montpellier, Noémie interrompt ses études en 2007, à la fin de la classe de première. Elle est admise en terminale pour préparer un Bac pro secrétariat-comptabilité mais, alors enceinte, elle s’arrête pendant deux ans et demi pour s’occuper de son fils. Lorsque celui-ci est en âge d’aller à l’école, Noémie s’inscrit à la ML et est suivie par l’antenne Croix d’Argent. Intéressée par le milieu médical, elle réalise d’abord un stage de trois semaines à la maison de retraite de Croix d’Argent, à la suite duquel elle est recrutée comme agent de service hospitalier (ASH) à temps partiel dans le cadre d’un CAE ; elle y reste un an. En 2012, elle revient vers la ML, afin de poursuivre le travail engagé sur la construction de son projet professionnel. Parallèlement, pendant un an, Noémie effectue des remplacements en tant qu’ASH (travail de nuit et de jour selon les besoins). Les horaires sont contraignants physiquement mais aussi difficilement compatibles avec le fait de devoir s’occuper seule de son fils. Une conseillère de la ML la rappelle alors pour lui parler des EAV et l’incite à prendre rendez-vous avec un des conseillers chargés de la mise en relation avec les entreprises. Après un entretien, elle signe un contrat (en CDD de trois ans à temps plein) au sein d’une association accueillant des personnes en situation de handicap. Elle est en poste au service RH : elle fait de l’accueil téléphonique, suit les dossiers du personnel, effectue des tâches administratives, etc. Pendant un mois, au tout début de son EAV, elle suit des cours de bureautiques, ce qui lui permet de se remettre à niveau. D’un point de vue professionnel, Noémie fait ses preuves et les relations avec ses collègues sont bonnes. En revanche, elle rencontre des difficultés avec le directeur de l’association (harcèlement moral) et fait appel à sa conseillère. Finalement, elle bénéficiera d’une rupture conventionnelle et quitte cet emploi au bout de 8 mois, mi-décembre 2013. La ML lui recherche un nouvel emploi. Deux mois et demi plus tard, début février 2014, elle signe un emploi d’avenir (CDD de trois ans à temps plein payé au SMIC) avec le groupe COEPTIS pour travailler au sein d’une école (7-8 salariés) qui propose de la formation initiale et de la formation continue. Le processus de recrutement s’est déroulé en deux temps : 21 « J’ai passé des tests oraux, des tests écrits, avec une mise en situation sur logiciel où je devais faire de la création de publipostage, j’étais évaluée sur la rapidité de saisie, l’aptitude à répondre au téléphone, on a vraiment été testé sur ça. Et aussi un entretien de motivation la seconde fois ». Noémie ne se prépare pas particulièrement pour ces épreuves, mais les modules de remise à niveau auxquels elle avait participé dans le cadre de son premier EAV l’aident. La réponse positive pour son recrutement lui parvient rapidement, une semaine après le second test. Aujourd’hui, Noémie occupe le poste de secrétaire administrative et appuie également la secrétaire de la formation initiale pour le suivi des étudiants. C’est un poste où elle « touche à tout » : réservation de salles, suivi des étudiants, accueil téléphonique, etc. Pour Noémie, le fait de ne pas avoir fait d’études n’a pas été un handicap : « L’école n’est pas le seul moyen pour apprendre, estime-t-elle, il y a d’autres choses, on peut lire, sortir, etc. C’est juste une question de volonté parfois ». Elle prépare l’examen du permis de conduire, qu’elle a pu financer grâce à une aide attribuée par Pôle emploi, dans le cadre du dispositif ANI. Elle se dit satisfaite de son emploi et de son salaire : « Y’a pas l’inquiétude de savoir comment je vais finir le mois, ça me permet d’avoir une vision beaucoup plus claire. » Noémie se voit bien à long terme dans l’établissement, même s’il lui semble un peu prématuré de se poser la question : « Je n’ai pas tellement de visibilité par rapport à mon poste. Si on me propose de rester, je serais ravie de rester. Mais je n’en ai aucune idée. » Le secteur médical continue de l’attirer, mais aujourd’hui, elle se sent encore fragile physiquement : « En même temps, à travers ce que je fais aujourd’hui, je retrouve le contact que je recherchais dans le médical : je suis au contact des étudiants, des profs, des intervenants, etc. Je ne me sens pas isolée. » Adrien, 23 ans, en Emploi d’avenir depuis mai 2013 à la Mairie de Castelnau (peintre) L’école n’a jamais intéressé Adrien; dès sa sortie du collège à 16 ans, sans avoir obtenu son Brevet des Collèges, il veut travailler et saisit l’opportunité d’un emploi à temps partiel en plomberie, dans lequel il reste deux ans. Même si la plomberie ne lui plaisait pas, il estime avoir appris beaucoup pendant cette période. Après deux mois de recherche, il effectue un CDD de 6 mois comme manœuvre (maçonnerierénovation). Suite à une nouvelle période de chômage de 6 mois, il trouve un emploi en peinture qui lui plait : « En 2012, j’ai fait une formation adulte ; ca a duré de septembre à juillet (rémunéré par la région, à St Jean de Vedas) pour passer le CAP. Et entre temps, j’ai eu tout ce cursus avec la MLI pour le recrutement en EAV et je suis entré à la Mairie le 21 mai, ça va faire un an.» Résidant chez ses parents à Castelnau, il avait envoyé dès l’été 2013 son CV à la Mairie. Lorsque le recrutement EAV a été ouvert pour 4 postes dont un poste de peintre, il a été contacté : « Moi, vu que j’étais à la MLI, la Mairie m’a appelé pour me dire comme quoi il y avait ces offres d’emploi et qu’il fallait passer par la MLI (…). Le CV, ils l’ont regardé, vu qu’ils cherchaient un peintre; M. Y [le peintre] devait partir à la retraite (…). J’ai eu un rendez-vous avec mon conseiller; il a ouvert un dossier et j’ai eu une présélection; j’ai passé un petit entretien, pour 22 voir un peu mes compétences, ce que j’avais fait; j’ai été sélectionné; ensuite, je suis passé par la Mairie devant la DGS, la DGST, il y avait tout le gratin, c’était impressionnant, surtout que je n’avais jamais fait d’entretien de ma vie. Mais mon conseiller m’a donné des conseils : il m’a dit qu’il fallait connaitre la ville, le minimum, de faire attention aux questions pièges (…). J’ai passé l’entretien et ça s’est très bien passé sincèrement quand je suis sorti je me suis dit c’est bon; j’ai parlé un peu technique (…), j’ai pas menti ; j’ai dit que des choses que je savais faire. Moi, après je leur ai dit : « sincèrement, mon but c’est de travailler pour vous. J’habite depuis 16 ans à Castelnau, je suis bien ». Et puis à ce poste il n’y avait que moi apparemment (…) ils m’ont appelé deux jours après, et m’ont dit de passer, faire la visite ; on a signé nos contrats papier et puis après, le Préfet est venu, il y avait le Midi libre tout ça; le maire a fait un discours, le préfet aussi on a signé devant les photographes, le Livre d’or des EAV. Et puis cela a été vite (…). Recruté pour trois ans, Adrien souhaiterait être intégré définitivement dans son poste à la Mairie : « C’est un contrat de 3 ans, mais chaque année, si je veux partir, je peux, à chaque anniversaire ; eux aussi, ils font ce qu’ils veulent. S’ils sont contents de moi, pourquoi chercher ailleurs ? Là, ils sont contents et moi, je me plais ; Monsieur N. m’avait dit au bilan de 3 mois : « Vous vous voyez 40 ans chez nous » ? Moi oui, sincèrement, j’ai pas menti. Je suis bien intégré, je peux pas mieux ; je suis bien (…) Le salaire me convient, à mon âge, vu le chômage qu’il y a… je suis au SMIC 37 heures et demi ; tous les deux mois, je fais les astreintes (…) Et suivant les jours fériés, ça double. C’est pas la même vie que dans le privé ». Jordan, 22 ans, en Emploi d’avenir depuis juin 2013 au CHU (service brancardage) Après sa 3° DP 6 [découverte professionnelle] qu’il a suivie à Avignon où il résidait, Jordan a entamé un BEP sanitaire et sociale qu’il a interrompu au bout d’un an, à cause, selon lui, de ses « conneries de jeunesse ». Il a ensuite travaillé comme serveur les soirs et le week-end à Avignon puis à Montpellier où il réside depuis 4 ans. Accompagné par la Mission Locale, il a effectué en 2010 un contrat de professionnalisation dans un hôtel-restaurant à Castelnau le Lez. Il a souhaité ensuite rechercher un emploi dans le secteur sanitaire, social ou médical, ayant toujours aimé le milieu hospitalier, le rapport aux patients et le contact humain. Il a pris conscience de cet intérêt plus jeune lorsqu’il s’occupait de sa grand-mère. Un stage en Maison de retraite effectué en 3° l’avait aussi particulièrement motivé. Ayant postulé au CHU de Montpellier, il a été recruté en CUI-CAE, après avoir passé un entretien de motivation au centre administratif et une visite médicale. Il devait être embauché comme ASH (entretiens des chambres) mais il a été en fait affecté au brancardage il accompagne les patients pour les examens, il les descend au bloc. Il est resté un an en CAE (à mi-temps) à partir d’avril 2012 avant de voir son contrat transformé en emploi d’avenir14 le 1° en juin 2013, avec un CDD de deux ans à temps plein. « Les Emplois d’avenir, c’est ma chef qui m’en a parlé, mais j’en avais entendu parler aussi par la radio ». Jordan considère qu’il a maintenant un pied dans l’hôpital et souhaite y rester. 14 Il est possible en effet d’intégrer un Emploi d’avenir à l’issue d’un CUI (CAE ou CIE) dans la limite de 3 ans au total (exemple : si déjà 2 ans en CAE, accès à un emploi d’avenir pour 1 an). 23 « Je suis motivé quand je me lève le matin. Le CAE, il y avait la signature tous les 6 mois; là, l’Emploi d’avenir, c’est deux ans, c’est une sécurité, je peux me loger. Je gagne 1191 euros par mois.» Damien, 25 ans, en Emploi d’avenir depuis avril 2013 au CHU (service logistique) A 16 ans, Damien a intégré un CAP menuisier-alu, qu’il a interrompu au bout d’un an et demi. Il a ensuite effectué des missions d’intérim. Inscrit à la Mission Locale, il a alors réalisé une « mobilisation professionnelle » avant d’entrer en formation de chauffeur de bus; mais il n’a pas été reçu à l’examen, n’ayant pas suffisamment révisé selon lui. Il voulait en réalité devenir ambulancier mais n’avait pas à ce moment là les trois années de permis de conduire exigées. Il a ensuite passé son CACES (permis cariste) et effectué un an d’intérim dans un entrepôt, emploi qui ne lui plaisait pas. Accompagné dans le cadre du CIVIS, il a postulé pour le CHU où il est entré en CUI-CAE le 1er avril 2012. Son patron a vu qu’ « il faisait du bon travail ». Sa conseillère est venue le voir pour proposer de transformer le CAE en Emploi d’avenir. Il était au tri avant de travailler dans le conditionnement des médicaments pendant 8 mois. Actuellement, il prépare les commandes pour les services de soins (masques à respiration etc.). En CDD à temps plein jusqu’en 2015, il pense pouvoir être titularisé. Il pourrait remplacer une personne qui part à la retraite l’an prochain. Ses horaires sont variables mais lui conviennent car il a son planning une semaine à l’avance. Payé au SMIC, il gagne le double de ce qu’il avait en CAE. « C’est moins que l’intérim mais il y a la sécurité de l’emploi. Je ne travaille pas dehors et je ne vais pas me casser le dos (…). Aujourd’hui, je prends à cœur mon travail. Avant, je n’avais pas de motivation, j’attendais la paye. C’est un rythme maintenant dans ma vie. Je ne me vois plus ailleurs qu’à l’hôpital. C’est un équilibre, le travail. Ma mère ne se fait plus de soucis pour moi. Je suis sérieux ». Amel, 24 ans, en Emploi d’avenir depuis janvier 2014 dans un Lycée (Conseil régional) Originaire d’Algérie, Amel est arrivée en France en 2012 pour se marier. Ainée de la famille, elle a travaillé très vite après sa Terminale littéraire pour aider ses parents. En 2010, elle a été vendeuse dans une superette et a effectué du petit secrétariat dans une entreprise de fabrication de téléviseurs. Souhaitant depuis toujours devenir institutrice et appréciant le contact avec les enfants, elle a pu effectuer en 2011 un remplacement comme ATSEM dans une école pendant un an. Installée en France en 2012, elle s’inscrit au CNED pour passer le CAP petite enfance. Suivie par la Mission Locale, elle entre à l’Ecole de la Deuxième Chance (Port Marianne), où elle reste durant un an, et effectue des stages dans des écoles de Montpellier. Ayant échoué aux épreuves du CAP en juin 2013, elle entame à partir de septembre de courtes missions de travail (restauration collective, entretien de locaux) avec une association intermédiaire de Montpellier. Eligible aux Emplois d’avenir, elle se positionne sur différentes offres proposées par la Mission Locale. N’étant pas titulaire du CAP petite enfance, elle ne parvient pas à décrocher un emploi en crèche ; elle postule alors aux Emplois d’avenir d’agent d’entretien dans les Lycées, dont elle a connaissance par la directrice de l’Ecole de la Deuxième Chance avec laquelle elle était restée en contact. Elle démarre son contrat début janvier 2014 (CDD de 3 ans) et s’intègre très rapidement, avec des horaires qui lui conviennent (11h30 - 19h30) et des tâches qu’elle apprécie; elle est à l'accueil quelques heures dans la journée mais préfère l’entretien des locaux : 24 "L’accueil, c’est bien, mais j'aime bien bouger ; le ménage, tu fais ce que tu as à faire. On est toujours en action. C’est pas stressant ! » Elle souhaite être intégrée dans cet emploi définitivement mais estime que l’opportunité de formation aura été bonne à saisir quelle que soit l’issue : « J’ai un travail stable, si ça peut continuer… S’il n’y a pas de problèmes, ils peuvent m’embaucher (…). S’ils ne m’embauchent pas, j’aurais quand-même une formation (…). J’aimerais être recrutée. Je pars le matin sans être stressée ; je suis contente, je m’entends bien avec mes collègues. C’est un soulagement. » Marie, 22 ans, en Emploi d’avenir à la crèche de M. depuis octobre 2013 Originaire de Castelnau, Marie habite depuis un an à Jacou, dans un logement autonome, avec son petit-ami. Après l’obtention de son CAP petite enfance en 2009, dans un établissement près de Béziers, Marie cherche du travail pendant un an. Suivie par la ML et Pôle emploi, elle décroche un CAE en août 2010 dans une crèche d’Assas où elle avait réalisé un stage durant son CAP (contrat à temps partiel). Elle y reste 2 ans avant de se retrouver de nouveau au chômage. Malgré son expérience de deux ans, les entretiens qu’elle décroche ne débouchent pas jusqu’au jour où elle postule sur une offre de CAE à la crèche de M.; lors de l’entretien, elle précise qu’elle ne peut prétendre à un CAE mais qu’elle est éligible aux EAV ; la crèche ayant un besoin urgent, elle démarre par un CDD fin septembre puis signe un EAV à partir du 13 octobre (CDD de 3 ans à temps plein). Elle s’occupe des enfants de 13h15 à 17h 30 puis assure l’entretien des locaux : « J’adore ce que je fais (…) L’ambiance est super dans la crèche (…) C’est génial, j’attends juste un CDI. (…) Mais ils ne me prendront pas en CDI ; ça déprime un peu. On m’a dit de réfléchir à ce que je voulais faire dans trois ans (…) C’est dommage que ce soit encore des petits contrats. Car à la fin, j’aurais 25 ans, j’aurai plus droit à rien ; et il n’y a pas de travail dans le coin. Au final, j’aurai 5 ans d’expérience. J’espère que cela comptera. » 3.2 Pour les employeurs, des motivations différentes de recruter Pour un certain nombre d’employeurs, dont beaucoup de collectivités locales, les emplois d’avenir sont une opportunité pour répondre à leur problématique de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) et d’anticiper sur des futurs départs à la retraite. C’est le cas de la Ville de Castenau le Lez : « Les premiers recrutements sont intervenus entre mars et avril 2013; à Castelnau, on est assez actifs en matière de dispositifs, de contrats aidés, de formation, de contrats d’apprentissage parce qu’on est une collectivité qui accueillons en moyenne une dizaine de jeunes en contrats d’apprentissage ; il s’agit principalement de CAP sur 2 ans, il y a donc un roulement (…). Proportionnellement à la taille de la commune, c’est un excellent ratio. On a également des contrats d’insertion, et on a intégré différents agents. La politique de la ville est de prendre des contrats aidés pour pouvoir intégrer ensuite; on essaye d’avoir cette logique d’intégrer à terme les jeunes (…) S’il a su s’intégrer et répondre aux besoins de la commune, 25 pourquoi pas l’intégrer. Quand le dispositif Emplois d’avenir est sorti, le Maire a souhaité que l’on fasse également un effort en la matière ». L’objectif du Conseil général de l’Hérault15 était aussi de favoriser l’intégration de jeunes dans la collectivité, dans la mesure où ces derniers ne constituent qu’un faible pourcentage des effectifs. La situation budgétaire étant difficile, les recrutements allaient vers ceux qui avaient le plus d’expérience. « Mais s’il n’y a pas de jeunes, on se coupe de façons d’être, de savoirs et de savoir faire ; le dispositif Emplois d’avenir était donc une opportunité pour nous de recruter des jeunes, avec l’objectif de pérenniser les emplois ensuite. » (Mission diversité du CG 34) Une Convention entre l’Etat et le département de l’Hérault a été établie, mentionnant que ce dernier s’engage à « créer 40 Emplois d’avenir au sein des services et à favoriser la création de 60 Emplois d’avenir au sein des associations prestataires dans le domaine social et médico-social ». « Il y a eu sept recrutements en novembre 2012. On a débloqué très vite ; on a recruté mais on n’avait pas les profils de poste; il a fallu faire vite. Ils sont rentrés en réalité en février ou mars 2013; puis nous avons échelonné les recrutements ensuite (…) » (Mission diversité du CG 34) 20 jeunes avaient été recrutés à la date de l’entretien ; deux ou trois emplois en restauration scolaire (cuisines des collèges), dont « l’intégration était réussie et pour lesquels les témoignages des tuteurs étaient positifs ». Des jeunes également dans les services espaces verts et en voirie, ainsi qu’à Hérault sport, dont une personne en situation de handicap. Un Emploi d’avenir a été recruté également au siège, sur un poste plus qualifié d’assistance informatique, sur les services réseaux du CG et pour lequel la direction n’envisageait pas au départ de jeune en EAV; un jeune diplômé, en situation de handicap et résidant en ZUS à Montpellier a finalement été embauché, et pour lequel, « tout se passe bien. » (Mission diversité du CG 34) La Chambre de commerce et d’industrie (CCI) a souhaité quant à elle expérimenter un projet de recrutement de « stewards urbains » qu’elle portait. Selon son responsable ressources humaines, elle n’aurait jamais recruté s’il n’y avait pas eu le dispositif EAV. Il ne considère donc pas les recrutements effectués comme un effet d’aubaine mais comme une opportunité dont la CCI s’est saisie. Quatre « stewards urbains » ont donc été recrutés (CDD d’un an à temps plein, renouvelable deux fois) : deux jeunes en septembre 2013 (avec au départ 7 candidatures provenant pour moitié de ML et pour moitié de Pôle emploi) et deux jeunes en janvier 2014 ; il s’agissait de jeunes de niveau Bac. Leur mission est d’accueillir et d’informer les commerçants du centre-ville, de présenter les services de la CCI, de participer aux événements portés par la CCI ou la ville, de relever les problèmes liés à l’affichage sauvage ou aux dégradations. Trois jeunes ont été recrutés sur des postes d’agents d’accueil (à Ganges, Lunel et Lodève) et deux jeunes en assistante de vie scolaire (AVS) pour les CFA hôtellerie-restauration et commerce. Le GEIQ BTP de l’Hérault16 a été informé du dispositif EAV par leur « tête de réseau » ; partenaire de la MLJAM depuis plusieurs années, il s’est mis rapidement en relation avec le référent EAV, lorsqu’une opportunité s’est présentée : 15 Le CG 34 apporte en outre un financement complémentaire à celui de l’État, pour l’embauche d’Emplois d’avenir au sein des établissements relevant de leur compétence. 26 « Nous n’avons pas mis d’offre à la ML. On reçoit des jeunes en permanence et nous avons un vivier de candidats en attente d’un contrat en alternance. Le premier candidat pour les Emplois d’avenir avait été repéré par l’entreprise. Agé de 20 ans, le jeune avait été à l’école mais était en situation d’illettrisme; la signature d’un contrat de professionnalisation n’était donc pas possible. J’ai fait le choix de l’Emploi d’avenir ; l’entreprise a accepté compte tenu de l’aide financière (47% de prise en charge17). Il n’y a donc pas eu d’effets d’aubaine ; c’est moi qui aie proposé la solution de l’emploi d’avenir. » (Directrice du GEIQ) Deux jeunes ont donc été recrutés à la même période, en juillet-août 2013, par des entreprises « historiques » du GEIQ, sur des postes de manœuvre : « Les deux jeunes, on les avait vus deux ou trois fois avant ; l’un avait travaillé en entreprise (…). Ils avaient des parcours compliqués mais ils avaient un projet dans le BTP et pouvaient s’adapter (…) Cela se passe très bien dans l’entreprise avec ces deux jeunes (…). On ne démarre pas de parcours sans savoir où on va avec les jeunes … cela veut dire que le jeune a validé son projet. En 2013, sur 60 contrats, on a eu trois ruptures. » La directrice ne sait pas si d’autres recrutements pourront se faire : « Si l’occasion se présente, je peux recruter. Je n’ai pas forcément de demande. Et puis l’EAV c’est conjoncturel, on ne sait pas combien de temps cela va durer. Le contrat de professionnalisation, c’est notre cœur de métier (30 par an sont signés); on maitrise cet outil. » Selon elle, les EAV ont eu peu de succès au niveau du réseau national des GEIQ car le montage en formation est lourd administrativement et il y a une réticence des OPCA. Elle estime également qu’il n’y a pas eu beaucoup de communication sur les EAV dans le secteur marchand dont l’ouverture s’est faite tardivement « comme s’ils y allaient à reculons ». 3.3 Des modalités d’intégration, d’accompagnement et de tutorat variables selon les employeurs L’accompagnement des jeunes dans l’emploi est l’un des aspects essentiels du dispositif Emplois d’avenir; la désignation d’un tuteur (salarié de l’entreprise) dès la signature du contrat est une obligation pour l’employeur. Dans la réalité, les pratiques de tutorat sont variées. A Castelnau, un tutorat « renforcé » et des outils de suivi adaptés Le Service DRH de la Ville de Catelnau a mis en place deux outils, deux « leviers » pour l’accompagnement des jeunes, un double tutorat et un livret de suivi spécifique : - Tous les jeunes en Emploi d’avenir ont deux tuteurs : un référent technique (le collègue de travail qui a une expérience ou un contremaitre ou un chef d’équipe qui travaille avec le jeune) et un référent administratif, l’ingénieur voirie par exemple : « On s’est dit que le référent technique était important pour l’apprentissage technique mais sur les aspects administratifs, quelqu’un de la direction concernée pouvait assurer ce rôle (…). Les 16 Créé en 1997 dans l’objectif de proposer des parcours de formation dans le secteur BTP à des jeunes faiblement qualifiés, le GEIQ 34 regroupe 35 adhérents (dont 20 adhérents historiques): des entreprises filières de grands groupes ou de PME, principalement dans le gros œuvre et travaux publics (coffreurs, conduite d’engins). 17 La Convention GEIQ mentionne que la prise en charge est de 47% comme pour les Entreprises d’insertion (EI). La prise en charge est de 75% si le recrutement est destiné à l’association GEIQ. 27 tuteurs ont pris à cœur leur rôle, ils sont pleinement investis; c’est un véritable accompagnement (…). On est proche du maitre d’apprentissage ». - La ville a construit un Livret de suivi qui accompagne le jeune tout au long de son parcours de trois ans : « La DRH peut accéder au Livret pour réaliser les suivis réguliers et pour voir les mises à jour, les appréciations, s’il y a des besoins de formation à déclencher etc. » Adrien, peintre en EAV à la Ville, confirme le suivi rapproché de ses tuteurs et sa bonne intégration dans les services: « J’ai deux tuteurs, le responsable CTM [centre technique municipal] et mon chef bâtiment. Je les vois tous les jours. On est à côté. C’est nickel, si j’ai un problème, j’y vais. Pour l’instant, il n’ya jamais eu de problème. (…) Mon chef a dit « tu es un agent ; c’est juste le statut que tu n’a pas ; tu regardes tes chantiers, t’es un agent comme un autre. Sinon, des gens vont dire c’est un Emploi d’avenir » ; quand je vais travailler, je suis intégré. Avec M.I [parti en retraite], j’ai travaillé avec lui deux mois, mais je savais déjà le métier, j’avais travaillé en peinture. Depuis qu’il est parti, ils me font confiance : je suis seul ; si j’ai besoin de quelqu’un, je demande ». Pour le Conseil général, un moyen d’innover sur les fonctions d’accompagnement Pour le CG 34, les aspects tutorat, formation et suivi liés aux EAV sont intéressants même s’ils apparaissaient au départ contraignants pour certains. Selon le responsable de la Mission Diversité, les méthodes d’intégration et d’accompagnement imposées peuvent servir à d’autres adaptations (par exemple dans le cadre des mutations d’un service à l’autre). Dans une optique de transmission intergénérationnelle, « l’idée est aussi que les dispositifs de tutorat peuvent marcher dans les deux sens ; on peut avoir des jeunes qui apportent des choses (…) L’idée serait aussi de « découpler le technique et le relationnel » et de promouvoir l’idée des « tuteurs d’intégration » qui vont être là notamment pour faciliter la relation avec l’équipe, l’interconnaissance (…) On essaye de promouvoir cette approche en partant de ce qui existe. Et allant vers des formes de compagnonnage ; et les EAV nous aident pour ça. » Les tuteurs d’Emplois d’avenir ont été formés (formation spécifique CNFPT) et il a été décidé de leur accorder une prime, la même que pour le maitre d’apprentissage, c'est-à-dire 80 euros par mois. Le GEIQ assure lui-même l’accompagnement en lien avec le tuteur de l’entreprise Le GEIQ assure lui-même un accompagnement rapproché des jeunes en EAV, dont les modalités sont inscrites dans la Convention nationale. Un tuteur est désigné dans l’entreprise qui a recruté mais le GEIQ assure également un tutorat : la directrice se rend en entreprise ; elle dispose de son outil de suivi qu’elle réalise régulièrement pendant la durée du contrat et fait le point également avec le formateur (les deux jeunes sont en formation tous les mois) ; le conseiller ML fait le point avec elle à l’extérieur de l’entreprise. Au CHU de Montpellier, un tutorat assuré par les services en interne Jordan estime qu’il a été très bien accueilli à l’hôpital et qu’il y a une bonne entente dans le service ; il a été intégré dans le service comme les autres. Sa tutrice, qui est infirmière (cadre de santé), le voit tous 28 les jours (elle est également tutrice d’un autre agent en CAE); il peut l’appeler à tout moment en cas de besoins et inversement. Elle juge de son côté que Jordan s’est bien intégré dans l’équipe, surtout depuis qu’il est à temps plein; il travaille en binôme et s’entend bien avec l’ensemble du personnel. Elle l’évalue régulièrement à partir de sa fiche de poste. Elle le connait depuis deux ans (elle était sa tutrice lorsqu’il était en CAE) et n’a jamais eu de problèmes avec lui. Selon elle, « il cerne bien le métier d’ASH ». Elle regrette qu’il n’y ait pas eu encore de regroupement de tuteurs. Elle attend celui qui devrait avoir lieu en avril (sur 2 ou 3 jours). Damien est également bien intégré au CHU; il s’entend bien avec le personnel (il est le plus jeune du service). Il a le même tuteur depuis 2012. Tous les 6 mois, il a une évaluation avec son tuteur (sur sa tenue, le travail en équipe etc.). Sa conseillère de la Mission Locale a fait le point avec son tuteur et lui lors d’un bilan il y a 6 mois. Si le tutorat interne semble bien assuré, les engagements en matière de formation ne sont pas forcément tenus de la même façon pour tous les jeunes recrutés au CHU ; la question posée est celle de l’interface avec la Mission Locale qui n’est pas toujours facile, selon le conseiller chargé du suivi et le référent EAV : « Avec un effectif de plus de 8200 personnes, une organisation très sectorisée (1 référent Cerfa, 1 chargé du montage des contrats, 1 chargé des recrutements, 1 responsable formation qui, pour la plupart ne collaborent que rarement ensemble (service recrutement et service formation par exemple), avec des jeunes positionnés sur différents types de postes au sein de différentes structures rattachées au CHU, on ne sait pas qui monte le plan de formation. Il est donc monté a postériori lors notamment du 1er bilan d’intégration à 3 mois avec le tuteur du jeune, qui, au final, est le seul à vraiment connaitre le jeune et l’activité qu’il exerce chaque jour. » (Référent EAV) Pour des structures moins importantes comme certaines associations, les jeunes ont sûrement davantage d’autonomie. Noémie a été bien intégrée au sein de l’équipe mais : «En même temps, il a fallu s’adapter très vite, comprendre très vite comment ça fonctionnait car la charge de travail est importante (…) Pour l’instant j’ai plus l’impression de subir l’organisation, car je suis arrivée en cours d’année scolaire, mais l’an prochain je pourrai m’organiser plus comme je veux ». « Il n’y avait personne sur ce poste au départ donc, à la fois ça me permet d’être assez libre, mais en même temps ça demande beaucoup d’autonomie ». « Si on compare avec le poste que j’avais précédemment, ici on m’encourage beaucoup à prendre des initiatives (..) après le précédent poste que j’ai eu, cela me rassure d’avoir cet EAV et que ça se passe bien avec mes collègues (…) J’ai eu peur que ça me porte préjudice, que ça me suive ». Au sein de l’établissement, Noémie a une tutrice, qui est la personne chargée des RH ; le bilan à trois mois prévu dans le cadre des EAV devrait être bientôt programmé selon elle. Globalement, le tutorat semble avoir été mis en place partout, même si les modalités diffèrent selon les employeurs : A la CCI, un tuteur (agent de maitrise) a été désigné pour les quatre jeunes stewards urbains; il a été formé et semble valorisé par cette fonction de tutorat, selon le responsable RH. Des entretiens de suivi sont également planifiés une fois tous les trois mois avec les RH. Dans beaucoup de structures, les tuteurs sont les salariés qui travaillent au quotidien avec les jeunes recrutés; c’est le cas d’Amel, recrutée comme agent d’entretien au sein d’un Lycée et qui explique 29 qu’elle s'entend très bien avec sa tutrice, elle-même agent d’entretien et avec qui elle travaille tous les jours ; c’est le cas aussi de Marie, en poste à la crèche de M. Sa tutrice est sa directrice-adjointe, avec laquelle elle a un suivi régulier. Selon le conseiller chargé du suivi des EAV, les cas les plus complexes concernent certaines petites entreprises du secteur marchand (notamment dans le secteur de la restauration) qui ne mettent pas en place de tutorat ou de formation parce qu’ils connaissent personnellement le jeune recruté (offre fermée) et qui sont en outre peu ouvert à des suivis extérieurs. Cela représente selon lui entre 5 et 10 employeurs. 3.4 La mise en œuvre des parcours de formation La mise en place d’actions de formation pour accéder à de nouvelles compétences est l’un des autres aspects essentiels du dispositif, même si son objectif est avant tout l’emploi. En théorie, « l’employeur élabore le plus en amont possible, avec son OPCA, un parcours de formation permettant au jeune d’accéder à une qualification ». Dans la pratique, les contraintes sont importantes: réticences des employeurs, en particulier les plus petits, à laisser partir les jeunes en formation, problèmes d’organisation de la formation, difficultés de financements des formations qualifiantes. Le CNFPT par exemple, qui intervient pour former les jeunes en EAV dans les CL, ne finance pas de formations qualifiantes. C’est le cas également de l’Association Nationale de la Formation Hospitalière (ANFH) dans le secteur médico-social public, secteur qui recrute également beaucoup de jeunes en Emplois d’avenir. « Il faut également souligner le manque de réponse « formation » sur le terrain car les organismes de formation ne sont pas adaptés à mettre en œuvre une formation spécifique pour X salariés de l’entreprise Y. Il faudrait en effet, mettre en place des parcours de formation individualisés et adaptés à la réalité de l’entreprise et au niveau du jeune. Cette problématique se pose moins pour les formations « diplômantes » car le jeune est alors intégré dans les groupes de formation déjà en place, contrat de professionnalisation par exemple. » (Référent EAV) La mobilisation du CNFPT par les collectivités locales « On oriente les jeunes vers le CNFPT (…) On profite de cette formation CNFPT qui nous satisfait (…). Sauf pour le jeune recruté en sérigraphie, on a définit avec le responsable une formation que l’on a payée ; sur ce cas précis, on a fait en sorte que l’agent sur le poste bénéficie aussi de cette formation. Ils participent ensemble à une même formation. » (Service RH de Castelnau) Adrien est satisfait des formations réalisées : « En septembre dernier, j’ai fait l’initiation à la fonction publique, territoriale, régionale, départementale (…). C’est le DRH de Marseillan qui faisait la formation, au CNFPT, et du coup, le dernier jour, il y a eu une intervention de F. [référent EAV de la ML] pour avoir un petit bilan de cette formation. Elle a duré trois jours ; moi, j’ai appris des choses ; je ne savais pas qu’il y avait des choses qui appartenaient à la Région. C’est des choses toutes bêtes mais quand on n’a pas le nez dessus, on ne sait pas. Et puis j’ai fait une formation CNFPT à Montpellier, de trois jours sur la maintenance des bâtiments publics : en amont, la sécurité hygiène, permis feu, arrêts préfectorale, habilitations, des choses qu’on ne sait pas : si je veux peindre tel mur, il faut telle habilitation. En général, les communes arrivent à se mettre au niveau. Dans le privé, 30 seulement 3 sur 100 peintres ont cette habilitation ; mais s’il arrive quelque chose, un incendie, c’est à leur charge (…). » Il est plus nuancé sur l’intérêt de la formation en électricité qu’il a suivie à Nîmes : « Elle n’était pas trop adaptée pour moi, il fallait être électricien au minimum. Mais au CNFPT, il y a pas trop de formations dans le bâtiment : on a 14 jours à faire par an, mais dans le bâtiment, ce n’est pas évident : la peinture, je n’ai pas besoin, ni la plomberie et après, il y a pas grand chose d’intéressant ». C’est aussi au CNFPT qu’Amel a suivi une formation de deux jours (adaptation au poste de travail) avec 17 autres jeunes en Emploi d’avenir ; elle a apprécié l’ambiance dans laquelle s’est déroulée cette formation et pense pouvoir réaliser une formation d'agent d'accueil probablement à partir de septembre : "c'est toujours bien de se former". Avant cela, elle se prépare pour repasser son CAP petit enfance qu’elle avait tenté l’année précédente et pour lequel elle n'a que deux épreuves à passer. Au CHU, Jordan doit démarrer une formation de remise à niveau en mai (maths, français, biologie). Selon sa tutrice, « au début, il n’était pas chaud pour faire de la remise à niveau ». Il est convaincu maintenant car il est certain de son projet et de sa volonté d’intégrer l’hôpital : « ça va me permettre de me remettre dans le bain : 80 heures, financées par l’hôpital ». Cette remise à niveau doit lui permettre d’entrer en formation, de septembre à février, pour préparer le concours d’aide-soignant. Il réalisera cette formation dans son temps de travail, une journée par semaine, jusqu’à la fin de son contrat en février. L’objectif est de passer le concours pour être recruté à la rentrée de septembre 2015. La formation tarde à se mettre en place dans le cas de Damien qui voudrait suivre une formation sécurité-incendie ; il pense que cette obligation de formation, « cela n’arrange pas ses responsables ». Et il ne veut pas « réclamer », de peur d’avoir ensuite des problèmes. Noémie, quant à elle, n’a pas encore évoqué la question de la formation avec sa tutrice : « Je voudrais qu’on me laisse le temps de me poser sur mon poste avant de me projeter sur une formation (…) mais mon idée est de valider un diplôme quand-même, comme un D.A.E.U par exemple, l’équivalent d’un bac. Ce serait assez général. » Marie devait faire une première formation « Gestes et postures » mais celle-ci a été annulée car elle était la seule inscrite. Elle devait suivre en mai une journée en formation sur l’Autorité, avec le CFA Partner à Montpellier. Sa responsable lui a demandé de réfléchir à son projet de formation par la suite : « En fait, j’avais pensé en dernier recours au concours d’ATSEM. La VAE, pour l’instant, je n’ai pas assez d’heures. Il faut trois ans à temps complet ; donc, le seul truc, c’est le concours d’ATSEM. Le concours d’auxiliaire de puériculture, cela me fait peur (…). Ma conseillère m’a conseillé de le faire en alternance mais ma référente trouve que c’est difficile. A la crèche, c’est pas possible ». Pour le GEIQ dont la mise en œuvre de parcours de parcours est le cœur de métier, la formation est une priorité : « On nous avait présenté les Emplois d’avenir comme un sas qui pouvait aboutir sur un contrat en alternance (notre cœur de métier) mais cette perspective n’est pas possible car le salaire deviendrait plus faible à l’issue: c’est trop compliqué ; donc, pour ces jeunes au parcours scolaire chaotique (l’un n’a jamais été à l’école), on a mis en place un parcours de remise à niveau, sur les savoirs de base (300 heures, une semaine par mois) la première année, puis de 31 formation technique (420 heures avec l’AFPA). La semaine de remise à niveau est difficile car ce sont des jeunes qui ont été peu scolarisés mais ils s’accrochent (…) ils s’en sortiront. » (Directrice GEIQ) 4. Eléments de synthèse et questionnements L’étude sur le territoire de l’Agglomération de Montpellier a mis en lumière l’intérêt du dispositif des EAV pour les jeunes peu qualifiés, en difficulté d’insertion professionnelle. Issus de Montpellier ou des communes avoisinantes, les jeunes interrogés ont de 22 à 25 ans ; ils disposaient d’une expérience professionnelle avant leur entrée en emploi d’avenir mais ne parvenaient pas à trouver un emploi stable. Au total, 637 jeunes sont entrés en EAV entre novembre 2012 et juin 2014, ce qui représente un chiffre important même si l’objectif pour 2013 n’a pas été atteint. La légère diminution du chômage des jeunes dans l’Hérault (- 1,3% en mars 2014 pour les jeunes de moins de 25 ans en catégorie A) est sans doute liée au développement des EAV. Un dispositif efficace et pertinent pour un public particulier Les jeunes, comme les professionnels de la ML, voient dans ces EAV, l’avantage de pouvoir intégrer un emploi stable tout en étant suivis et formés. Noémie résume les atouts du dispositif : « Parce que pour des jeunes comme nous, qui n’avons pas le niveau, on n’aurait jamais été recruté. Donc ça permet de nous ouvrir des portes, sur des choses que l’on n’aurait jamais pu imaginer, même en rêves (…) mais il faut que ce soit bien encadré, et que l’on soit considéré. Et pour ça je pense que s’il y a un suivi régulier et des bilans, on peut éviter certaines dérives ». Si l’accès à la formation est l’un des aspects essentiels de l’EAV, le public concerné n’est pas le même que celui qui entre en apprentissage. Les jeunes apprentis sont en général moins âgés et ne poursuivent pas le même objectif : « Un jeune qui va en apprentissage, son objectif, c’est le diplôme. Le jeune qui entre en Emploi d’avenir, son objectif, c’est d’abord l’emploi. Le pari, il est là : les jeunes ne veulent plus remettre les pieds à l’école, ils veulent aller au travail ; ils y vont et au bout d’un an, avec le tuteur à côté, les collègues, les perspectives d’évolution, les jeunes viennent petit à petit à la qualification. Certains disent « je veux bien passer un diplôme. » (Référent EAV) Pour la Mairie de Castelnau, qui recrute une dizaine d’apprentis par an, il n’y a pas de concurrence entre EAV et apprentissage : « On n’est pas dans la concurrence. Le contrat d’apprentissage, c’est permettre d’acquérir un métier, d’obtenir un diplôme, et point, sans avoir l’objectif d’être gardé. C’est arrivé une fois ou deux car cela représentait un intérêt pour la commune. Un ou deux jeunes en plomberie. (…). Pour les Emplois d’avenir, on est dans l’aspect contrat de travail, dans le professionnel avec une perspective, pourquoi pas, de pérennisation dans l’emploi. » Même si la baisse de l’apprentissage est constatée globalement sur le territoire, liée aux difficultés économiques des entreprises, le nombre de jeunes suivis à la MLJAM entrant en apprentissage n’a pas diminué. La Direccte estime également qu’il n’y a pas concurrence entre ces deux dispositifs. 32 « Il y a d’autres contrats plus avantageux si on vise la formation pure et notre rôle est de l’expliquer aux employeurs ; cela permet à ces différents contrats d’être complémentaires et pas en concurrence, parce qu’il y a un public pour chacun. » (Directeur-adjoint de la ML) Le cas d’Adrien illustre l’évolution des jeunes qui avaient un blocage vis-à-vis des études et qui voient progressivement l’intérêt de la formation à partir d’une expérience professionnelle : « Je leur avais dit à l’entretien que j’allais passer mon CAP ; ils m’ont laissé passer les épreuves, il y a pas eu de soucis. Et je l’ai eu tranquillement. Même si le CAP n’est pas un niveau scolaire vraiment… A l’école, sincèrement, je n’ai jamais voulu m’intéresser quand j’étais petit ; maintenant que j’ai réfléchi, je me dis que je serais plus motivé pour un bac pro. On m’aurait dit : « fais un CAP, j’aurais dit non: j’ai pas envie d’aller à l’école »; là, le CAP il suffit de travailler un minimum et au final, j’ai eu des bonnes notes [entre 15 et 17 environ]… pourtant, je n’ai pas révisé des masses; pour quelqu’un qui à l’école…n’a pas eu son brevet... Ce qui me motivait, c’est d’avancer, d’avoir au moins un diplôme : quand j’ai eu la période de 6 mois sans rien faire, au chômage, à chaque fois que je cherchais, ils demandaient un diplôme, un CAP minimum, ou 6 ans d’expérience, mais il y a 3 ans, je les avais pas. Et puis, faut les prouver les 6 ans, y suffit qu’on ait un peu travaillé au black… (…) Le CAP, c’est pour moi-même, pour avoir un diplôme, et vu que j’ai aimé ce métier et que je compte y rester, voilà ; après je peux toujours passer mon bac pro ou un BP. Tout dépend (…) » Cet enjeu de la formation pour des jeunes qui ont souvent été en difficultés avec l’école est important : le référent EAV suggère toujours aux employeurs d’ajouter un article « Tutorat et formation » dans leur contrat de travail afin de rappeler aux jeunes que cet axe formation est obligatoire : Article 2 – Formation et tutorat Monsieur X bénéficiera d’actions d’accompagnement professionnel et de formation lui permettant d’obtenir une certification professionnelle dans les métiers de l’animation sportive suivant le document d’engagement et de suivi tripartite annexé au présent contrat. Des représentations des employeurs vis-à-vis des jeunes qui évoluent Selon les professionnels de la ML, le dispositif a permis de faire évoluer l’image que les employeurs avaient des jeunes « jeunes en difficultés », c’est le cas de petites communes rurales qui ont recruté des jeunes issus de ZUS, comme Cournonsec par exemple (même si beaucoup ne recrutent que les jeunes de leur commune) mais aussi de l’agglomération de Montpellier. Un jeune du quartier Petit Bard qui avait connu des problèmes d’incarcération a été recruté à l’Agglomération ; il a été régulièrement suivi par la ML et a passé le cap d’un an. Selon l’animatrice territoriale de la Direccte, le regard a changé sur le public ZUS, même s’il y a plusieurs territoires et plusieurs publics ZUS différents : la Paillade et Petit Bard ont des tissus associatifs différents, par exemple. Avant, il y avait plutôt un regard positif sur les apprentis et un regard négatif sur les jeunes sans qualification suivis à la ML ; ces regards sont en train de changer dans la mesure où ces jeunes placés en EAV font preuve de maturité et de capacités d’adaptation et de travail, souvent acquises lors de leurs expériences précédentes. Les ruptures de contrats sont globalement peu nombreuses, comparées notamment aux ruptures constatées dans l’apprentissage. Une connaissance et une reconnaissance plus grandes des compétences de la Mission Locale Pour certains de nos interlocuteurs, les EAV ont permis la montée en compétences des professionnels de la ML, en particulier en ce qui concerne la mise en place de plans de formation, grâce notamment au 33 travail avec les OPCA, et en ce qui concerne le suivi dans la durée des parcours de jeunes en entreprises ; pour d’autres, il s’agit davantage d’une mise en lumière de leurs compétences. Selon l’animatrice territoriale de la Direccte, « les EAV ont légitimé les ML qui ont désormais une place en tant que prescripteurs ». Les EAV ont révélé également l’importance de l’approche globale de la Mission Locale, du suivi sur tous les aspects périphériques de l’insertion du jeune. Les entreprises connaissent davantage la MLI et ses services. Pour le DRH de la Commune de Castelnau, qui n’avait jamais eu de relations avec MLI avant : « Les relations sont très bonnes avec la Mission Locale. Avec les contrats d’apprentissage, il n’y avait pas de relations avec les MLI, pas de contacts ; on recevait des candidatures spontanées et on organisait l’inscription des jeunes en CFA s’ils n’avaient pas fait les démarches avant. » La MLI représente également un contact nouveau pour la CCI qui était en relation essentiellement avec Pôle emploi. Les EAV ont été une opportunité pour la MLI d’accroitre son fichier d’entreprises et de développer son savoir faire en matière de relations entreprises. L’enjeu est maintenant pour la ML de maintenir ce capital de confiance et de fidéliser son réseau d’employeurs, notamment en ayant l’occasion de transférer ce savoir faire sur d’autres dispositifs emploi. Limites du dispositif et points de vigilance Une des limites principales concerne la mise en place de la formation, en particulier qualifiante : « La première difficulté est liée aux formations qualifiantes ou diplômantes : pour les Collectivités locales, le CNFPT n’a construit que des formations professionnalisantes, donc courtes et successives. Pour les formations diplômantes, certains employeurs étaient prêts à passer par l’externe, en payant des formations en CFA notamment et cela aurait pu constituer une réponse rapide, il y avait des montages possibles, sauf que le monde de l’apprentissage a vécu le dispositif EAV comme un concurrent et non complémentaire à l’apprentissage. (…) Les plus belles formations sont réalisées pour des éducateurs spécialisés ou des moniteurs éducateurs ; ce sont des exemples minimes mais éclairants : les employeurs ont adapté le début et la fin du contrat à la formation car celle-ci était trop longue par rapport au contrat ; c’est l’exemple de GESTARE, une association de réinsertion sociale qui a recruté une éducatrice pour faire du lien social. » (Directeur adjoint de la ML) Beaucoup d’employeurs cherchent avant tout un jeune salarié et si les montages en formation sont compliqués et chers, les parcours de qualification vont être difficiles à mettre en place. Selon Uniformation, la question du financement n’est pas la seule limite : « pour les auxiliaires de puériculture ou les aides soignants, il est impossible d’arriver à ces formations dans le cadre des EAV car il y a une sélection à la formation par concours (agréée par ARS 18 et Région) et un Numérus Clausus : on prend les meilleurs, des jeunes qui ont Bac + 3 (…). Dans toutes les crèches, les jeunes ont un CAP Petite enfance, à 80%. Elles vont aller en préparation d’auxiliaire de puériculture mais n’obtiendront pas le concours ». 18 ARS : Agence régionale de santé 34 Une autre difficulté concerne le tutorat que les employeurs mettent en place de façon inégale avec une interrogation pour les petites entreprises, du secteur marchand notamment, qui ne prennent pas en compte cette nécessité de l’accompagnement rapproché des jeunes, nécessaire à leur bonne intégration et à leur professionnalisation. L’un des points de vigilance essentiel, pour la ML, comme pour la Direccte, est de maintenir des emplois de « qualité », respectant les exigences du dispositif, notamment en matière de tutorat et de formation. Cette exigence implique que le temps passé par les professionnels de la ML pour vérifier et suivre les engagements des employeurs va s’accroitre avec l’augmentation du nombre de jeunes en EAV en 2014. 35 Annexes Annexe 1. Entretiens réalisés (territoire MLJAM) Mission Locale : Directeur-adjoint Référent EAV Chargé de relations entreprises Responsable antenne Centre Responsable antenne Mosson Conseiller référent emploi Conseiller suivi EAV Chargée de mission ARML Services de l’Etat et partenaires : DIRECCTE : animatrice territoriale UT 34 Pôle emploi (apport écrit) Employeurs : CCI GEIQ Mairie de Castelnau Conseil général 34 CHU Tutrice Jeunes : Noémie (EAV Coeptis) Marie (EAV crèche de M.) Amel (EAV Lycée) Adrien (EAV Ville de Castelnau) Jordan (EAV CHU) Damien (EAV CHU) Participation à la Cellule opérationnelle du 27 mars 2014, en présence de deux OPCA : Uniformation et Agefos PME 36 Annexe 2. Compte-rendu de la restitution de l’étude Lundi 22 septembre 2014, à Montpellier La restitution de l’étude sur le territoire de l’agglomération de Montpellier s’est tenue le 22 septembre, soit près de 5 mois après la fin de la conduite des entretiens réalisés (les entretiens ont été menés pour l’essentiel entre les mois de janvier et d’avril 2014). Près d’une trentaine de personnes étaient présentes à cette rencontre, représentant les différentes familles d’acteurs interrogées lors de l’étude: jeunes, équipes de la ML impliquées dans la mise en œuvre des EAV (référent EAV, RT, CRE, conseiller référent emploi, conseiller EAV, direction), Direccte (dont le directeur de l’UT 34, Monsieur Aygalent), Pôle emploi, employeurs (CG 34, GEIQ BTP, Coeptis, tutrice CHU), OPCA, ARML. Le Maire de Pérols, Monsieur Rico, représentait le bureau de la Mission Locale. Le nombre important de participants témoigne de la mobilisation des différents acteurs autour du dispositif et de l’intérêt porté à l’étude et à ses résultats. Il a été souligné que peu d’occasions existaient de faire se rencontrer ces différentes catégories d’acteurs; beaucoup ne se connaissaient pas. Après la présentation synthétique du rapport (illustrée sur plusieurs points par les témoignages de jeunes et d’employeurs), plusieurs éléments, repris ci-dessous, ont été mis en débat. Certains sujets, comme la question de la mise en place des parcours de formation, ont pris davantage de place que d’autres. Lorsque les questions abordées sont assez techniques (telle que le financement de la formation), il n’est pas facile pour tous et plus particulièrement pour les jeunes, de s’exprimer. Le rôle de l’animateur est important, il connaît l’ensemble des participants et est en mesure de donner la parole à chacun. Tous les sujets n’ont donc pas pu être abordés. Il n’a pas été question des évolutions des représentations sur les jeunes peu qualifiés par exemple, ni des changements que le dispositif a pu engendrer sur les pratiques des conseillers au sein de la Mission Locale. Les pistes d’amélioration évoquées, comme le regroupement de tuteurs ou la mutualisation de formations, ont suscité de l’intérêt mais n’ont pas été approfondies. La concurrence EAV/apprentissage L’OPCA OPCALIA s’est interrogé sur la concurrence possible, notamment en 2015, entre les EAV et l’apprentissage en raison, notamment, de la prise en charge du financement de la formation à hauteur de 92% par l’Etat dans le cadre de l’IEJ (voir ci-après). La direction de la ML a rappelé qu’à ce jour, cette concurrence n’était pas avérée sur le territoire de de l’agglomération de Montpellier. Le nombre de jeunes orientés par la Mission Locale pour signer un contrat d’apprentissage est en hausse de 20% sur le début de l’année 2014 par rapport à l’année 2013. La directrice du GEIQ BTP de l’Hérault a rappelé que les deux jeunes recrutés en EAV au sein de sa structure avaient un profil différent des jeunes habituellement recrutés en contrats de professionnalisation ou en apprentissage. Pour les jeunes en EAV, il a été nécessaire de construire un parcours de formation personnalisé (Cf. rapport). L’animateur de l’ARML Languedoc Roussillon a fait remarquer que si concurrence il existe, c’est entre les Emplois d’avenir et les CAE, dont le nombre est en forte baisse sur la région. La représentante du CG de l’Hérault a rappelé que pour les jeunes recrutés en EAV, l’objectif est bien de pérenniser les contrats (contrairement aux jeunes recrutés en contrat d’apprentissage). 37 Le tutorat Deux jeunes, Alan/Adrien et Noëlla/Noémie, ont témoigné de l’importance du tutorat dans le cadre de leur EAV. Adrien, employé depuis mai 2013 en tant que peintre à la commune de Castelnau a rappelé l’intérêt du double tutorat dont il bénéficie dans le cadre de son emploi : un tuteur pour les aspects techniques sur le terrain et un tuteur pour les aspects administratifs. « J’obtiens ainsi rapidement les réponses dont j’ai besoin ». (Adrien) La tutrice de Geoffrey/Jordan, en EAV au CHU, a expliqué que tous les six mois, les tuteurs de jeunes en EAV au CHU devaient remettre un rapport écrit à leur direction. En tant que tutrice, elle s’est sentie parfois isolée, elle aurait souhaité pouvoir échanger davantage avec d’autres tuteurs. Cela rappelle des remarques formulées dans d’autres territoires sur la possibilité et l’intérêt d’organiser des échanges de pratiques entre tuteurs sur le territoire (Cf. Expérience du Centre de ressources Politique de la Ville dans l’Essonne). La formation Noëlla/Noémie, embauchée comme assistante initiale en EAV au sein de l’école COEPTIS, a témoigné de l’importance de laisser le temps aux jeunes pour définir et construire leur projet de formation. Son employeur est allé dans le même sens : « Noëlla est entrée dans la structure sur un poste d’assistante initiale. Aujourd’hui, on peut envisager avec elle un parcours de formation, qui consiste à la former sur un poste de secrétaire comptable et pourquoi pas, à terme, sur un poste de comptable. Cela n’aurait pas été envisageable si l’on ne s’était pas laissé le temps de mieux se connaître ». L’une des tutrices du CHU confirme cette importance du facteur temps pour permettre aux jeunes de mûrir leur projet et de définir avec eux leur projet de formation : « Geoffrey a pu mieux définir son projet à l’issue de sa première année à l’hôpital. Il a pu prendre le temps de passer un test pour mieux mesurer quelles étaient ses possibilités. Aujourd’hui, il fait une remise à niveau pour lui permettre d’entrer en préparation pour passer le concours d’aide-soignant. Le temps passé au sein de l’hôpital a joué un rôle dans la définition de son projet ». Les professionnels de la ML sont revenus sur la difficulté de construire des parcours de formation, avec une offre de formation parfois très limitée. Dans certains cas, encore rares, les formations sont mutualisées entre plusieurs structures. C’est le cas d’une formation « animateur-éducateur sportif » par exemple ou d’une formation CQP « animateur en milieu scolaire ». Cette difficulté à trouver des formations pour les jeunes en EAV demeure importante dans les collectivités territoriales (où ces difficultés ne concernent pas que les EAV). Le CNFPT fait des efforts pour que des formations soient organisées de manière spécifique en direction des jeunes en EAV, mais les manques sont importants. L’OPCA AGEFOS PME est revenu sur les difficultés à assurer le financement de parcours de formation longs et certifiants, parfois peu adaptés aux EAV, et a insisté sur les baisses de financement auxquelles sont confrontés les OPCA. En effet, les OPCA se font refinancer les fonds engagés pour ces parcours au niveau national, par le Fonds de sécurisation des parcours professionnels (FSPP). Or, il y a eu une baisse de 72% des fonds accordés aux OPCA en 2014. AGEFOS PME a par exemple pu financer les parcours jusqu’au 1er avril 2014, puis a assuré ce financement sur fonds propres. Pour certains OPCA, les financements des parcours de formation des jeunes en EAV sont aujourd’hui assurés via l’IEJ (depuis le 1er juillet pour l’OPCA OPCALIA). C’est la piste de financement aujourd’hui envisagée par d’autres OPCA (réponse d’OPCA AGEFOS PME en cours pour bénéficier de fonds européens - IEJ). Alan/Adrien, jeune en EAV au sein de la mairie de Castelnau a témoigné de l’intérêt de certaines formations qu’il a effectuées (Cnfpt) mais aussi de ses interrogations sur les possibilités d’accéder à des formations permettant d’évoluer dans son domaine, la peinture, lui étant déjà titulaire du CAP. 38 Le directeur départemental de la Direccte a conclu la rencontre sur l’importance du partenariat dans un dispositif aussi complexe, dans lequel tous se sont engagés. Il a souligné la nécessité d’améliorer encore sa qualité, dans un objectif de réduction du chômage des jeunes (celui-ci reste en effet encore important sur le territoire malgré sa légère baisse en un an, liée au développement des EAV). L’information auprès des différents acteurs doit donc être poursuivie. Ce d’autant plus que le dispositif est maintenu pour l’année 2015. 39