Analyse diagnostique de l`emploi au Senegal

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Analyse diagnostique de l`emploi au Senegal
République du Sénégal
Un Peuple-Un But-Une Foi
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MINISTERE DE L’ECONOMIE ET DES FINANCES
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CENTRE D’ETUDES DE POLITIQUES POUR LE DEVELOPPEMENT
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Rapport provisoire
ANALYSE DIAGNOSTIQUE DE L’EMPLOI AU SENEGAL
MAI 2012
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TABLE DES MATIERES
Sommaire
Table des matières
INTRODUCTION ........................................................................................................................................ 3
I.
II.
Ressources productives et employabilité ......................................................................................... 3
1.
Données démographiques ............................................................................................................ 4
2.
Aspects qualitatifs du capital humain et de l’employabilité ........................................................... 5
3.
Investissements dans les ressources humaines ........................................................................... 8
Possibilités d’emploi et rémunération de l’emploi ............................................................................. 8
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INTRODUCTION
L’objectif de ce rapport est de procéder à une analyse diagnostique de l’emploi, en générale et de
l’emploi des jeunes en particulier pour assurer la réalisation d’une croissance riche en emplois et
inclusive. La démarche adoptée dans le document s’appuie sur le guide conceptuel élaboré par le
Bureau International du Travail (BIT).
Cette méthode a comme point de départ, le diagnostic de la croissance économique suivant l’approche
retenue par Hausmann, Rodrik et Velasco établie pour diagnostiquer la faiblesse de l’investissement
privé et de l’entreprenariat.
La méthode se décompose en deux phases :
1. la première phase consiste à dégager les dynamiques du développement et de l’emploi.
L’objectif de cette partie est d’orienter l’analyse à travers le contexte de l’emploi et la situation
du développement propres au pays. Elle contient trois thèmes essentiels : i) les facteurs
démographiques et autres facteurs fournis ; (ii) les tendances et dynamiques générales de
l’emploi, des revenus, des inégalités et de la pauvreté ; (iii) les dynamiques de la croissance, de
l’emploi et de la productivité par secteur.
2. Un diagnostic structuré autour de « l’arbre de référence de l’emploi ». Ainsi, il sera examiné tour
à tour, (i) les ressources productives et l’employabilité ; (iii) les possibilités d’emploi et la
rémunération de l’emploi et enfin (iii) la durabilité de l’emploi. Chacune de ces parties sera
approfondie, si elle constitue une préoccupation majeure.
3. L’analyse sera prolongée quelques problématiques qui seront suggérés par les travaux
préliminaires (vulnérabilité, discrimination, environnement des affaires, politiques
macroéconomiques et commerciales, etc.).
I.
Ressources productives et employabilité
L’emploi est resté une préoccupation du Gouvernement depuis les années 80. Cependant, la
politique de l’emploi était considérée comme passive, soit, en d’autres termes, résultant de l’activité
économique. La mise en place d’une politique de l’emploi active a été rendue nécessaire par la
persistance des difficultés économiques et l’émergence d’une offre de travail plus forte, marquée par la
jeunesse de la population, évoluant dans un contexte de développement des médias favorisant les
contestations et faisant peser un risque de contestation sociale à l’image du printemps arabe de 2011.
Ainsi, comme le souligne le Rapport de la Banque mondiale sur la Croissance et le
Développement (2008), la population active et les ressources humaines ne seront plus considérées
comme étant essentiellement des bénéficiaires de la croissance mais plutôt les facteurs créateurs de
cette croissance économique.
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1. Données démographiques
La population du Sénégal estimée par l’ANSD à 12 855 153 habitants en 2011, croît au rythme
annuel de 2,5%, ce qui dénote d’un dynamisme reflétant à la fois une forte natalité (une femme donne
naissance à 5 enfants en moyenne, selon l’enquête EDS MICS 2011) et une mortalité maîtrisée,
notamment celle infanto-juvénile (72‰ contre 132‰ précédemment).
Cette population est composée essentiellement jeune avec plus de 40% de la population ayant
un âge inférieur à 15 ans1. Par ailleurs, les personnes âgées (plus de 65 ans) représentent environ 4%
de la population. Cette situation induit un taux de dépendance des inactifs (moins de 15 ans et plus de
65 ans) de 0,85, ce qui favorise la présence de beaucoup de travailleurs pauvres car le revenu du
travail sera insuffisant pour faire à la charge familiale.
La problématique de l’emploi est d’autant plus pressante que la population âgée d’au moins 15
ans (en âge de travailler) croît au rythme moyen annuel de 3,2% (projections ANSD pour la période
200-2015), soit 202 000 nouveaux demandeurs potentiels d’emploi par année2. L’absorption de cette
main d’œuvre excédentaire constitue ainsi un défi majeur pour l’économie. Celle-ci est d’ailleurs
essentiellement jeune dans la mesure où la tranche d’âge 15-34 ans représente 55% de cette
population.
La répartition de la population jeune (15-34 ans) par sexe indique également une prédominance
des femmes aussi bien globalement (53,7%) que par tranche d’âge ; ce qui justifie la nécessité d’une
prise en charge de la dimension genre dans l’étude.
Figure 1: Répartition de la population de 15 à 34 ans par sexe
60,0%
50,0%
51,6%
48,4%
54,0%
46,0%
55,2%
44,8%
55,7%
44,3%
53,7%
46,3%
40,0%
30,0%
Hommes
Femmes
20,0%
10,0%
0,0%
15-19 ans
20-24 ans
25-29 ans
30-34ans
Total
Jeunes
Source : Données ESPS (2006) et nos calculs
1
Les données sur la composition de la population proviennent de l’enquête ESPS 2005/2006
Toutes ces personnes ne demandent pas systématiquement d’emploi puisque certains par exemple poursuivent
leur étude.
2
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Face à cette offre importante de main d’œuvre par année, une partie cherche à migrer vers les
pays étrangers, notamment la France, l’Espagne, l’Italie, les USA et dans une moindre mesure en Côte
d’ivoire, au Gabon et au Congo Brazzaville. Les statistiques du Ministère des Sénégalais de l’Extérieur
indiquent l’existence de 800 000 sénégalais résidant dans la sous-région et de près de 2 000 000 de
sénégalais résidant à l’extérieur3. Cependant, la perspective d’émigration sera dans les années à venir
une option beaucoup plus difficile à envisager du fait du niveau élevé de chômage dans les principaux
pays destinataires (pays de l’OCDE) ayant conduit à un durcissement des conditions d’admission.
2. Aspects qualitatifs du capital humain et de l’employabilité
Cette partie traite des attributs qualitatifs qui déterminent la possibilité pour un individu d’accéder
à un emploi productif. Cs aspects comportent des éléments fondamentaux que sont l’éducation et al
santé.
S’agissant de l’éducation, la population active (15-65 ans) est peu instruite avec un niveau
d’alphabétisation de 44,8%. En d’autres termes, la majorité de cette population ne sait ni lire ni écrire ;
ce qui rend difficile l’obtention d’un emploi, notamment un emploi décent dans le secteur formel et
favorise ainsi la non occupation ou la précarité dans l’emploi.
Une forte disparité est à relever entre les hommes et les femmes. Ces dernières ont un taux
d’alphabétisation plus faible (34,9%) tandis que 56,5% des hommes savent lire et écrire. La population
active féminine est ainsi plus touchée par l’analphabétisme.
Lorsque nous nous intéressons à la population jeune (15-35 ans), nous remarquons que près de
la moitié ne savent pas lire et écrire et que cette situation touche également davantage les femmes
(57,4%) même si l’ampleur est moindre par rapport à celles âgées de plus de 35 ans
Figure 2: la classe la plus élevée fréquentée par la population active
3
Ces statistiques ne sont pas fiables dans a mesure où elles ne découlement pas d’un recensement mais plutôt
d’une estimation basée sur les inscriptions dans les différents consulats.
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Au niveau de la population active scolarisée, l’essentiel a arrêté les études entre les classes de
CM1 et de 4ème collège. D’ailleurs, près de 25% de la population souligne avoir arrêté les études au
CM1. La répartition par sexe indique également que la classe de CM1 est celle où les hommes et les
femmes arrêtent leurs études et que le phénomène touche davantage les femmes.
L’’employabilité de la population active est contrainte par le fait que l’essentiel de la population
n’a effectué aucune formation professionnelle ou technique (87,9%). L’enseignement dispensé est
général et ne permet pas aux bénéficiaires de s’insérer dans le marché du travail. D’ailleurs, près de 3%
de la population active détient un diplôme professionnel ou technique ; ce qui signifie que parmi même
ceux ayant suivi une formation, une partie n’a pas obtenu de diplôme. Or, au Sénégal, à l’instar des
pays de culture francophone, l’obtention d’un diplôme professionnel ou technique est quasiment
indispensable pour le recrutement à un poste dans le secteur moderne. Lorsque nous savons que
Une frange importante a tout de même effectué une formation sur le tas (87,5%).
Figure 3 : Niveau et type de formation de la population active
En ce qui concerne les aspects sanitaires, le taux de prévalence du VIH/Sida est de 0,7%
(0,5% pour le VIH1 et 0,2% pour le VIH2) pour les personnes âgées de 15 à 49 ans, reflétant une
maîtrise globale de la maladie aussi bien chez les hommes que chez les femmes (0,8%). La maladie
est moins présente chez les plus jeunes, notamment ceux ayant entre 15 et 19 ans (0,2% pour les
femmes et 0% pour les hommes).
En ce qui concerne la mortalité maternelle, elle constitue un indicateur particulièrement
révélateur de la condition féminine, de l’accès des femmes aux soins de santé et de la façon dont le
système de santé répond à leurs besoins. Elle est estimée en 2010-2011 à 392‰. S’agissant de la
mortalité infanto-juvénile, elle est de 72‰.
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Dans les pays endémiques, un taux d’hémoglobine inférieur à 8,0 g/dl est considéré comme un
indicateur indirect de la prévalence de l'anémie liée au paludisme. Au niveau national, 14 % des enfants
de 6 à 59 mois ont un taux d’hémoglobine inférieur à 8,0 g/dl.
Enfin, selon l’indice de bien-être économique, les résultats montrent que la prévalence du
paludisme décroit d’un maximum de 6,2 % parmi les enfants des ménages les plus pauvres à 0,7 %
parmi ceux des ménages les plus riches.
Le paludisme et la pneumonie représentent respectivement en 2008 19% et 17% des cas de
décès des enfants de moins de 5 ans en 2011.
S’agissant de l’hypertension artérielle, elle devient une maladie préoccupante dans la mesure où
en 2011, elle enregistrait une prévalence de 37,9% chez les hommes contre une moyenne mondiale de
29,2%. Pour ce qui est des femmes, la prévence de la maladie est de 34,4% contre 24,8% sur le plan
mondial.
Globalement, les indicateurs de la santé sont satisfaisants à l’exception de la prévalence du
paludisme et de la mortalité maternelle qui demeurent une préoccupation. En effet, l’espérance de vie à
la naissance est estimée à 59 ans (OMS, 2009) pour les hommes et 63 ans pour les femmes, soit une
moyenne nationale de 62 ans.
Sur le plan nutritionnel, plus de trois enfants sur quatre de 6-59 mois (76 %) sont atteints
d’anémie4 au Sénégal en 2011 : 23 % sous une forme légère, 48 % sous une forme modérée et 5 %
sont atteints d’anémie sévère. Cette carence en fer frappe également une bonne partie des femmes de
15 à 49 ans (54%) : 39 % souffrent d’anémie sous sa forme légère, 14 % sous une forme modérée et 2
% sous une forme sévère. Elle est plus élevée chez les femmes de 15-29 ans (en moyenne, 55 %) que
chez les femmes plus âgées.
La prévalence de l’anémie chez les hommes de 15-49 ans est de 31%. La prévalence est
également nettement plus élevée pour les adolescents (15-19 ans) que pour les hommes plus âgés
(54% contre 22%).
En outre, pour appréhender une malnutrition chronique, le retard de croissance est évalué.
L’enquête EDS MICS 2010/2011 révèle que 26% des enfants au Sénégal souffrent de retard de
croissance et plus d’un enfant sur neuf (11 %) enregistre un retard de croissance sévère.
De même, un enfant sur dix (10 %) est atteint de maigreur sous forme modérée ou sévère ; ce
qui montre que la malnutrition aigüe globale (MAG) est caractérisée d’élevée.
Ainsi, le Sénégal est affecté par des problèmes de nutrition qui donnent lieu à des retards de
croissance et des maigreurs au niveau des enfants et, de façon générale à une anémie de la
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L’anémie est considérée comme sévère si la mesure d’hémoglobine par décilitre de sang est inférieure à 7,0
g/dl ; elle est modérée si cette valeur se situe entre 7,0 et 9,9 g/dl et, enfin, elle est qualifiée de légère si la
mesure se situe entre 10,0 et 11,9 g/dl.
Pour les femmes enceintes et les enfants de moins de cinq ans, l’anémie sera considérée comme légère si le
niveau d’hémoglobine se situe entre 10,0 et 10,9 g/dl.
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population. Cette situation représente un risque de retard du développement cérébral et affecte la
productivité de la population active actuellement et dans les années à venir.
3. Investissements dans les ressources humaines
L’effort financier consacré à l’Education en tenant compte des ressources totales du pays est
évalué par les dépenses publiques d’éducation en pourcentage du PIB. Ce ratio tourne est d’environ
8,2% depuis 2008. Le financement d’un élève (tous niveaux confondus) représente plus du quart du
revenu par tête et ce, depuis 2005. Le niveau supérieur est celui qui nécessite le plus de financement
(191% du PIB par tête) et le primaire le secteur où i=un élève reçoit une part plus faible du financement
(17% en moyenne).
Au primaire, nous avons en moyenne 35 élèves par enseignants et au secondaire 26 éleves par
enseignants. Toutefois, les effectifs du supérieur sont pléthoriques en raison de l’insuffisance
d’établissements et d’enseignants.
S’agissant des dépenses publiques dans le domaine sanitaire, elles sont évaluées à 5,7% du PIB
en 2009 (selon OMS). Par habitant, les dépenses totales de santé sont estimées à 60 $ US, soit environ
30 000 FCFA.
La couverture en personnel médical est faible dans la mesure où il est recensé au niveau
national d’une part, 741 médecins, soit 6 médecins pour 10 000 habitants et d’autre part, 5254
infirmiers et sages femmes, soit 4,2 pour 1000 habitants.
II.
Possibilités d’emploi et rémunération de l’emploi
Les possibilités d’emploi productif et la rémunération du travail dépendent largement d’une part,
de la capacité de l’économie à créer des emplois qui, en termes de compétences et de qualifications,
font coïncider l’offre et la demande sur le marché du travail et d’autre part, de la facilité et de l’égalité
d’accès de la main d’œuvre à l’emploi productif. Ces aspects sont évalués de façon générale à l’aide
trois facteurs : (i) le taux de croissance économique ; (ii) la qualité de la croissance ; (iii) les questions
d’inégalités en matière de dotations en ressources, d’accès à l’emploi et de possibilités d’emploi.
Toutefois, pour mieux appréhender le marché du travail, il convient d’examiner au préalable les
principaux indicateurs.
A cet égard, il convient d’élaborer l’arbre de l’emploi suivant :
On appelle population en âge de travailler : celle âgée de 15 à 64 ans
Population occupée est la population en âge de travailler ayant travaillé ou absente du travail
Population au chômage est la population ne travaillant pas mais cherchant du travail
Population active est la somme de la population occupée et des chômeurs
Le secteur formel est défini avec la disponibilité du NINEA et d’une comptabilité.
8
L’arbre de l’emploi
Population totale :
10 881 919
Population
inactive : 3 038 990
Population active :
Chômeurs : 241 051
2 820 220 (48,1%)
(53,8%)
Population
occupée: 2 632 276
(44,9%)
Travailleurs salariés:
Employeurs et
672 600
travailleurs
familiaux non
(25,6%)
indépendants:
Travailleurs
rémunérés: 388 746
1 570 928 (59,7%)
(14,8%)
formel :
Informel :
formel :
Informel :
44 124
1 526 805
390 420
282 181
(2,8%)
(97,2%)
(58%)
(42%)
(53,8%)
(53,8%)
(53,8%)
(53,8%)
Informel :
388 746
(100%)
(53,8%)
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L’arbre de l’emploi ci-dessus indique une proportion faible de la population active (48,1%), ce qui
met en évidence le problème de l’emploi dans le pays. D’ailleurs, la population occupée représente 45%
de la population totale, soit un taux d’occupation faible
En outre, nous remarquons la prépondérance de travailleurs non salariés (74,4%) constitués en
grande partie de travailleurs et d’employeurs indépendants (environ 60%) ; ce qui pose le problème de
la qualité du travail dans la mesure où l’essentiel des travailleurs non salariés ne bénéficient pas de
protection sociale (assurance maladie, assurance accident, pensions de retraites, congés payés, etc.).
l’absence de protection sociale est relevée dans le secteur informel qui existe dans tous les secteurs de
l’économie, y compris par les travailleurs salariés avec plus de 40%.
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