Le légume au régime vert

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Le légume au régime vert
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COURRIER PICARD MERCREDI 17 JUIN 2015
LE DESSIN D’ALEX
L’ÉDITORIAL DE JEAN-MARC CHEVAUCHÉ
Tragique
Ce qui s’est passé hier à l’Assemblée est
tragique. Que le 49-3 ait été à nouveau
utilisé par Manuel Valls est l’un des marqueurs de ce qu’est devenue notre démocratie. Une fille violée par une bande de
mauvais garçons. On se méprendrait à
disséquer l’infiniment divers de ce qui se
trouve dans la loi Macron. Et chacun aurait son mot à ajouter. Globalement, elle
libéralise l’économie, elle réduit les délais, elle simplifie les procédures.
Son problème n’est pas là. Son problème
est qu’elle n’est pas une loi que ceux qui
ont voté Hollande attendent. Sur la ligne
politique qu’Emmanuel Macron réfute :
elle est de droite, pas de gauche. Le cinéma de Christian Jacob et de ses amis n’y
change rien. En privé, les députés de
droite le disent : Macron est des leurs.
Eux-mêmes sont perdus, sonnés par un
ministre d’Hollande qui ré-invente leur
propre politique et, -sacrebleu !-, qui
gouverne à leur place !
Pierre Gattaz, le peu marxiste patron du
Medef, a soutenu le 49-3 et, concernant la
loi Macron, a parlé d’aurore libérale. Il est
absolument faux de croire qu’il y aurait
des mesures, comme on l’entend souvent,
qui seraient à prendre absolument et ne
seraient ni de droite ni de gauche. La
vaillante tête d’œuf qui a inventé ce
concept ne devait pas bien aimer la démocratie. On va le rappeler puisque ça devient incroyablement nécessaire : la démocratie, c’est ne pas être d’accord. La démocratie n’est pas une entreprise, où les
solutions sont imposées par des réalités
sur lesquelles le chef d’entreprise n’a pas
de prise. La démocratie est un système
qui propose des solutions concrètes, radicalement différentes, et demande au
peuple de choisir. Parfois le peuple choisit
à droite, et c’est tant mieux. Parfois, il
choisit à gauche, et c’est tant mieux aussi.
Mais c’est quand les postures remplacent
les programmes et quand un coucou parasite les nids que la démocratie s’effondre. Pour la respecter, il faut le courage
de l’aimer et celui de ne pas être d’accord. Ces gens-là en sont incapables.
Le légume au régime vert
En Santerre, Bonduelle et ses organisations de producteurs ont tiré le bilan
des huit fermes-pilotes tournées vers une culture durable. Les bonnes pratiques poussent.
AGRICULTURE
éduire l’usage des produits
phytosanitaires
dans
les
cultures de légumes, par essence fragiles, en préservant la
productivité, la qualité des produits et la compétitivité de l’ensemble de la filière.
C’est l’enjeu du programme de
production intégrée des légumes
de plein champ en Picardie (35 expérimentations et 200 enquêtes),
porté par le groupe Bonduelle et
ses organisations de producteurs
(OPLVert et Expandis), sans oublier
différents partenaires institutionnels (Inra, chambres d’agriculture
et fonds européens notamment).
R
À SAVOIR
Démonstrations
Un pari réussi pour les huit
fermes-pilotes engagées. Les matériels développés pour une agriculture intégrée, herse étrille, bineuse à moulinets et robot de
désherbage, pour chasser les mauvaises herbes sans nuire aux rendements, ont assuré des démonstrations sur les parcelles de l’agriculteur de Méharicourt, Alexandre
Deroo, exploitant l’une des fermes
partenaires. « J’ai la sensation de
mieux travailler avec la production
intégrée, de réduire l’impact sur l’environnement et de participer à une
stratégie durable dans le temps », a
témoigné le cultivateur.
Le bilan s’avère « encourageant »
et « révèle qu’il est possible de produire les mêmes quantités » de
jeunes carottes, haricots et pois de
conserve, avec la même qualité et
au même prix, tout en réduisant
TDER1.
Le robot bineur en démonstration dans une parcelle de haricots verts s’est taillé un vrai succès. (Photo Dominique TOUCHART)
les produits de traitement des
plantes. Les exploitants ont prouvé
que combiner désherbage chimique et mécanique n’est pas insensé, « à condition de s’adapter au
contexte climatique », pondère Bonduelle.
Un bémol de taille souligné par
l’agro-industriel : « s’agissant de la
lutte contre les maladies et les ravageurs, les résultats sont moins probants ». Une avancée de la recherche est attendue dans ce domaine.
Un guide du désherbage alternatif a été édité et est diffusé à
grande échelle dans toute la filière.
Aux alentours de Péronne, une
ferme 3.0 est lancée, pour développer le biocontrôle et les applications des nouvelles technologie.
Les bienfaits
du désherbage mécanique
À l’image de ce robot désherbeur
conçu par une start-up de Toulouse et qui vire de lui-même en
bout de parcelle. La stratégie d’essaimage, se poursuit en Picardie.
« Nos légumes sont aujourd’hui
d’une qualité exceptionnelle. On ne
cultive plus comme il y a trente ans
et c’est tant mieux. Mais l’histoire est
pleine d’empoisonnement 100 % naturel, alors laissons nos contemporains anxiogènes qui sautent sur leur
chaise comme des cabris, a déclaré
Pierre Klein, président d’ Expandis.
Simplement l’état de notre art a progressé et donc continuons à creuser
notre sillon ». Saluant les bienfaits
du désherbage mécanique, Eric Legras, le président de l’organisation
de producteurs de légumes OPLVert, a avoué qu’il restait « plus difficile de s’affranchir des produits
chimiques face aux maladies et aux
insectes ».
▶ Après 6 ans de projet, le programme-pilote de culture durable
de légumes de plein champ en
Picardie, sous l’égide de Bonduelle
et des organisations de producteurs
Op-l-Vert et Expandis, a livré son
bilan hier, mardi 16 juin à Méharicourt (Somme).
▶ Huit fermes pilotes, quatre dans
la Somme, trois dans l’Aisne et une
dans l’Oise, ont participé à ce
programme tendu vers l’éco-agronomie. Elles ont réduit de 17 % leur
indice de fréquence de traitement,
par rapport à 2007, pour leur
culture de carottes, haricots et pois
de conserve.
▶ Un groupement d’intérêt économique et environnemental (GIEE)
poursuit la démarche et se concentrera sur la préservation de la
qualité des eaux de captage du
bassin de Caix (Somme).
Citant l’exemple de l’ergot de
seigle, « tout n’est pas sain dans la
nature et il y a des choses très dangereuses. On ne pourra pas se passer
du chimique », a insisté Éric Legras.
Dans la culture des petits pois,
« nous sommes dans une impasse
technique face à la prolifération de
la mouche et on attend depuis trois
ans en France l’homologation d’un
fongicide pour traiter le haricot alors
qu’il est en vigueur en Belgique ».
N. T.