Oscilloscope plus analyseur logique?

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Oscilloscope plus analyseur logique?
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INSTRUMEN T A T I O N É L E C T RO N I Q U E
Oscilloscope plus
analyseur logique ? Avec
le MSO,c’est du deux en un

L’oscilloscope et l’analyseur logique sont normalement deux appareils bien particuliers, le premier pour l’analyse temporelle des signaux, le second pour l’analyse
numérique. De nombreuses applications font appel aux deux appareils. Avec les
MSO (Mixed Signal Oscilloscope), les deux fonctions sont intégrées. Les possibilités
en analyse logique sont limitées mais elles répondent bien aux besoins de mise au
point des systèmes embarqués, qui comportent des composants numériques relativement simples. Agilent Technologies a été le premier à croire réellement à ce
marché. Lecroy, Yokogawa et désormais Tektronix l’ont rejoint. Les offres sont
assez différenciées.
D
ans les équipements électroniques, l’électronique numérique s’est imposée partout.
Même les “équipements” par
essence analogique, comme par exemple les
capteurs ou les commandes de moteurs, intègrent massivement de l’électronique numérique. Malgré cela, l’oscilloscope reste
l’instrument de base de l’électronicien
chargé de développer un équipement électronique. Du moins tant qu’on reste dans des
fréquences en dessous
de quelques gigahertz,
L’essentiel
parce qu’au-delà de
ces fréquences, l’os Les MSO sont des oscilloscocilloscope
cède le pas
pes dotés de fonctions
aux analyseurs de
d’analyse logique
spectres ou aux analy Leurs possibilités en nombre
seurs vectoriels.
de voies sont relativement
L’oscilloscope analyse
limitées
le signal tel qu’il se
 Mais ils sont bien adaptés au
présente. S’il s’agit
marché visé : le développed’un signal logique, il
ment et la mise au point des
visualisera la forme de
systèmes embarqués
ce signal, avec sa suc Les MSO sont surtout
cession de niveaux
destinés aux cartes comporhaut et de niveaux bas.
tant des composants
Et il le fera beaucoup
numériques simples et des
mieux qu’un analybus série
seur logique. En effet,
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l’oscilloscope échantillonne le signal à une
fréquence très élevée (en règle générale, à
4 fois la fréquence maximale du signal) et le
numérise sur 8 bits (en général, mais c’est
parfois plus), soit 256 niveaux différents.
L’oscilloscope peut mettre en évidence des
parasites sur le signal, voir son temps de
montée et son temps de descente. On n’en
demande pas tant à l’analyseur logique. En
gros, on lui demande de détecter les transitions du signal. Au lieu des 256 niveaux de
Lecroy WaveRuner 104i
l’oscilloscope, l’analyseur logique se contentera de deux niveaux seulement, un niveau
haut et un niveau bas (l’utilisateur fixe un
seuil : l’analyseur attribue le niveau “haut” à
tout ce qui est au-dessus de ce seuil, et le
niveau “bas” à tout ce qui est en dessous).
Quant à la fréquence d’échantillonnage, elle
dépend de ce que l’on cherche. Si on s’intéresse simplement à l’analyse d’états, on
pourra se contenter d’une fréquence
d’échantillonnage relativement faible. Si on
s’intéresse très précisément aux instants de
changements d’états, c’est-à-dire à l’analyse
temporelle, il faudra évidemment une fréquence d’échantillonnage plus élevée.
Deux appareils complémentaires
Cela dit, si l’oscilloscope traditionnel peut
faire de l’analyse logique, il trouve très vite
ses limites. La principale, c’est le nombre de
voies. 2 ou 4 voies, c’est un maximum pour
un oscilloscope, alors qu’on en dénombre
plusieurs dizaines
voire plusieurs centaines sur les analyseurs logiques. Une
autre grosse différence entre les deux
catégories d’appareils
se situe au niveau du
déclenchement : l’oscilloscope déclenche
sur des seuils, des
fronts ou des transitoires relativement
simples, alors que
l’analyseur logique
est capable de déclencher sur des mots ou
des combinaisons de
mots logiques (avec
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Solutions
Le créneau des
MSO
Agilent MSO6034A
des instructions booléennes du genre IFTHEN-ELSE). Une dernière différence, et de
taille : les analyseurs logiques sont capables de
décortiquer une séquence logique parallèle
(un bus de microprocesseur, par exemple), et
de restituer les instructions assembleur et les
données au format hexadécimal par exemple ; les oscilloscopes de base, non.
Bref, les deux catégories d’appareils sont
complémentaires. Et en pratique, les concepteurs d’électronique numérique utilisent les
deux types appareils. Mais cette solution à
deux appareils a un prix, elle est encombrante et peu pratique (beaucoup de fils…),
et il n’est pas toujours facile d’obtenir des
résultats optimaux.
C’est un peu ce qui a conduit au développement des oscilloscopes à signaux mixtes, les
désormais fameux MSO (Mixed Signal
Oscilloscope).
Tektronix MSO4104
Les MSO ne sont pas
à mi-chemin entre
les oscilloscopes et les
analyseurs logiques ;
ils penchent nettement du côté des oscilloscopes et
d’ailleurs le “O” qui
figure dans MSO signifie “Oscilloscope”.
Les MSO sont avant
tout des oscilloscopes
auxquels on a ajouté
des voies logiques,
mais en nombre relativement limité : 16 à
36 selon les modèles,
ce n’est pas si mal,
mais on est très loin
des centaines voire des milliers de voies des
analyseurs logiques. Autre différence, les
MSO sont loin d’offrir les mécanismes de
déclenchement très complexes que l’on
trouve sur les analyseurs logiques. Autre
grosse différence également, les analyseurs
logiques offrent une fonction “analyse logique” limitée à quelques bus standards série
tels qu’I2C, SPI, CAN ou FlexRay, plus quelques bus parallèles de FPGA ou DSP ; on est
bien loin des interfaces matériel/logiciel
proposées sur les analyseurs logiques et qui
permettent de travailler directement sur une
multitude de bus parallèles de microprocesseurs (avec désassemblage du langage machine).
Même s’ils ne peuvent prétendre concurrencer les analyseurs logiques, les MSO
apportent de précieux services aux ingénieurs qui mettent au point des cartes relativement simples,
telles que celles destinées aux systèmes
embarquées comportant des convertisseurs analogiques/
numériques, des DSP
ou des FPGA.
Typiquement, le MSO
est très pratique lorsque l’on a affaire à
une carte comportant
un convertisseur analogique/numér ique 8 bits et que l’on
veuille à la fois observer l’entrée analogique et les sorties nu-
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mériques. Un oscilloscope classique, avec
ses 4 voies, ne peut évidemment pas le
faire ; le MSO, avec ses 16 voies logiques ou
plus (sans oublier ses 2 ou 4 voies analogiques), oui.
Un marché de plus en plus ouvert
L’offre des MSO sur le marché n’est pas pléthorique. Pour les modèles avec bande passante analogique inférieure à 1 GHz, on
dénombre tout de même 4 constructeurs :
Agilent Technologies, LeCroy, Tektronix et Yokogawa.
Toujours les mêmes ! Il y a une bonne dizaine d’années, Tektronix avait mis un MSO sur
le marché (le TLS216). Cependant, la société
n’avait pas cherché à pousser son avantage,
sans doute parce que le marché n’était pas
suffisant. Du coup, Agilent Technologies, son solide challenger dans les oscilloscopes, s’est
engouffré dans la brèche ouverte et a su
ouvrir un véritable marché pour le MSO, et
plus particulièrement les applications embarquées, où les utilisateurs hésitaient à utiliser un analyseur logique en plus de leur
oscilloscope, jugeant la solution peu pratique et pas facile à mettre en œuvre (d’autant
qu’il faut apprendre le mode d’emploi de
l’analyseur logique, ce qui n’est pas toujours
facile). La concurrence n’est pas restée inactive. LeCroy et Yokogawa ont développé ces deux
dernières années une offre en MSO. Tektronix
restait à l’écart de ce marché, estimant sans
doute que le couple oscilloscope plus analyseur logique faisait l’affaire de tous. Mais la
situation commençait à devenir périlleuse et
le leader en oscilloscopes ne pouvait indéfiniment laisser la concurrence développer le
marché du MSO. La riposte est finalement
arrivée, il y a quelques semaines : c’est le
MSO4000, ou plutôt la famille MSO4000.
Vous trouverez dans le tableau les principales
caractéristiques des produits proposés sur le
marché. Il existe des différences assez sensibles mais, comme toujours dans ce secteur
très compétitif, les caractéristiques techniques doivent être jugées à l’aune des prix (à
moins que ce soit l’inverse). De 5 000 euros
à 15 000 euros, la palette des prix est quand
même assez étendue…
Des différences d’approche
Les politiques commerciales peuvent être
différentes. Par exemple, Agilent donne la possibilité aux acquéreurs d’un DSO6000 de le
faire évoluer en MSO6000. Ce qui veut dire
que les fonctions analyse logique sont intégrées en natif et qu’il suffit de déverrouiller
l’appareil (et de payer pour ça) pour les rendre disponibles. Chez LeCroy, la fonction analyse logique est assurée par un module ex-
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Solutions
Les principaux MSO
Modèle
Agilent
LeCroy
Tektronix
Yokogawa
Nombre de voies
Fréquence
d’échantillonnage
Profondeur
mémoire
Taille écran
Dimensions
(L x H x P)
100 MHz
2 Géch./s (1 ou 2 Géch./s
pour les voies logiques)
8 Mpoints
35,4 x 18,8 x 28,2 cm
300 MHz
2 Géch./s (1 ou 2 Géch./s
pour les voies logiques)
16,1 cm,
résolution XGA
(1 024 x 768),
256 niveaux
d’intensité
500 MHz
4 Géch./s (1 ou 2 Géch./s
pour les voies logiques)
1 GHz
4 Géch./s (1 ou 2 Géch./s
pour les voies logiques)
200 MHz
2,5 Géch./s
2,5 Mpoints/voie
analogique
plus
10 à 50 Mpoints/voie
logique (selon l’option
choisie)
Tactile, 26,4 cm 34 x 26 x 15,2 cm
résolution SVGA
(800 x 600)
10 Mpoints sur 4 voies
analogiques plus
10à 50 Mpoints/voie
logique (selon l’option
choisie)
Analogiques
logiques
MSO6012A
2
16
MSO6014A
4
MSO6032A
2
MSO6034A
4
MSO6052A
2
MSO6054A
4
MSO6102A
2
MSO6104A
4
WaveSurfer 24Xs
4
WaveSurfer 42Xs
2
WaveSurfer 44Xs
4
WaveSurfer 62Xs
2
WaveSurfer 64Xs
4
WaveSurfer 104Xs
4
1 GHz
WaveRunner 44Xi
4
400 MHz
5 Géch./s
WaveRunner 62Xi
2
600 MHz
10 Géch./s
WaveRunner 64Xi
4
WaveRunner 104Xi
4
1 GHz
10 Géch./s
MSO 4032
2
350 MHz
MSO 4034
4
2,5 Géch./s (500 Méch./s
pour les voies logiques)
Trois options
(modules externes) :
- 18 voies à 1 Géch./s
- 18 voies à 2 Géch./s
- 36 voies 1 Géch./s
16
400 MHz
600 MHz
MSO 4054
500 MHz
MSO 4104
1 GHz
5 Géch./s (500 Méch./s
pour les voies logiques)
1 GHz
5 Géch./s
DL9710L
4
32
terne qui se connecte sur ses oscilloscopes
standard WaveSurferXs et WaveRunnerXi.
Avec cette approche, la fonction “analyse
logique” est pratiquement indépendante
(l’échantillonneur et la mémoire sont embarqués dans le module), mais l’encombrement
est
en
conséquence
(10,8 x 21,3 x 3,8 cm, pour 775 g) et le
câble de liaison à l’oscilloscope également
(il s’agit en fait de deux câbles solidaires, un
câble qui se connecte sur le connecteur des
voies logiques (type Sub-D), l’autre que se
raccorde sur la prise USB). Mais sur le plan
fonctionnel, on a la même souplesse d’utilisation que lorsque la fonction “analyse
logique” est intégrée. Le constructeur indique qu’il s’agit d’une sonde plug&play, que
l’appareil reconnaît automatiquement la
sonde qui lui est connectée, même dans le
cas d’une connexion à chaud. Yokogawa a également opté pour une solution “analyse lo-
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Bande
passante
10 Mpoints sur toutes
les voies, aussi bien les
voies analogiques que
les voies logiques
26,4 cm
résolution XGA
(1 024 x 768)
43,9 x 22,9 x 13,7 cm
6,25 Mpoints/voie
21,3 cm
résolution XGA
(1 024 x 768)
35 x 20 x 28,5 cm
gique” embarquée dans un module externe.
Comme LeCroy, le constructeur japonais peut
ainsi proposer un nombre de voies logiques
supérieur à celui des modèles MSO d’Agilent
et Tektronix, où les voies logiques (16 chacun)
sont embarquées sur l’appareil.
Le facteur de forme, ou si vous préférez l’encombrement de l’appareil, est une caractéristique importante, surtout pour ceux qui
n’ont pas trop de place. LeCroy et Tektronix se
distinguent des deux autres avec des appareils de très faible profondeur.
La taille et la résolution de l’écran sont également à considérer, beaucoup plus que dans
le cas d’un oscilloscope classique car les MSO
doivent visualiser un nombre important de
signaux. Là aussi, LeCroy et Tektronix tirent leur
épingle du jeu, avec leur confortable écran
de 26,4 cm.
Sur les MSO, le but de la fonction “analyse
logique” est avant tout de faire une analyse
de timing entre les différentes voies, de voir
les décalages éventuels. Pour ce faire, l’échantillonnage est fixé par l’horloge du MSO et
il est asynchrone par rapport aux voies logiques (alors que sur les analyseurs logiques
orientés “analyse d’états”, l’échantillonnage
est synchrone). La fréquence d’échantillonnage, qui permet de définir la finesse de
l’analyse du timing, est donc un paramètre
à considérer. Plus elle est élevée, plus la résolution temporelle est fine. Sur le modèle
MSO4000 de Tektronix, on notera la présence
de la fonction MagniVu, déjà proposée sur
les analyseurs logiques de la société. Celle-ci
permet d’acquérir 10 000 échantillons
(5 000 avant le déclenchement, 5 000 après)
à la fréquence record de 16,5 Géch./s, soit
un échantillon sur chaque voie toutes les
60,6 ps. Mais, évidemment, la capacité mémoire et les durées d’enregistrement sont
limitées. En mode d’acquisition normal, sur
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Solutions
Yokogawa DL9710L
des longues durées, l’acquisition des voies logiques sur le MSO4000 se fait à 500 Méch./s.
La taille mémoire est, avec la fréquence
d’échantillonnage, la caractéristique majeure
d’un MSO. Agilent Technologies, en portant tout
récemment cette capacité à 8 Mpoints en
standard (alors que jusqu’ici, c’était sur option), a voulu réagir face aux dernières annonces faites sur le marché. Le mode de
gestion de cette mémoire est important.
Agilent Technologies offre une capacité mémoire
globale plus limitée mais il laisse une certaine latitude à l’utilisateur pour l’exploiter
de manière optimale. Si l’utilisateur n’a pas
besoin des voies logiques, il peut disposer
des 8 Mpoints sur les voies analogiques. S’il
s’intéresse uniquement aux voies logiques,
les 8 Mpoints seront affectés à ces voies. S’il
utilise à la fois les voies analogiques et les
voies logiques, la mémoire sera partagée.
Sur les autres appareils, les mémoires affectées aux voies logiques et aux voies analogiques sont indépendantes. Les capacités varient d’un appareil à l’autre. Le record est
détenu par LeCroy, qui prolonge sur ses MSO
sa longue tradition des oscilloscopes à “mémoire longue” (il est possible de disposer de
jusqu’à 50 Mpoints/voie).
Pour le reste, on notera certaines facilités dédiées
à l’affichage. Sur le MSO4000 de Tektronix (qui est
le modèle du marché le plus récent), le niveau
“haut” des voies logiques est en vert et le niveau
“bas” est en bleu. Si les traces des différentes
voies sont très proches les unes des autres, cette
astuce élimine le risque de confondre le haut de
l’une avec le bas de celle qui est au-dessus.Autre
subtilité, si sur une trace, il y a des transitions
rapprochées (transitions multiples) invisibles de
prime abord, le front du signal est surligné en
blanc. L’utilisateur sait ainsi qu’il “se passe quelque chose” à cet endroit et il peut aller zoomer
dessus pour accéder aux détails.
Tous les MSO du marché disposent d’une
fonction de déclenchement et d’analyse sur
les bus série (I2C, SPI et CAN, notamment). Il
faut dire que de plus en plus, les cartes électroniques comportent des bus interne série,
beaucoup moins encombrants que les traditionnels bus parallèles. Tektronix indique que si
ces bus série sont source de grands défis, plus
importants que ceux posés par les bus parallèles. Ils accentuent la difficulté du débogage
des problèmes de bus et du système, ils rendent plus complexes l’isolation des événements dignes d’intérêt et l’interprétation de
l’affichage à l’écran de l’oscilloscope. Les MSO
facilitent l’identification du début et de la fin
des paquets, comme l’adresse, les données,
l’identificateur, le contrôle de redondance
cyclique, etc. Ils assurent également un décodage de chaque paquet du bus.
Touts ces remarques se rapportent à la
fonction “analyse logique”. Mais au moment de choisir un MSO, il est clair que
l’on choisit avant tout un oscilloscope
(“O”, comme Oscilloscope, ne l’oublions
pas) et que les spécifications de la partie
“oscilloscope” sont tout aussi importantes que celles de la partie “analyse logique”. C’est ce que souligne Agilent, attirant notamment l’attention sur
l’incertitude sur l’instant du déclenchement, le bruit vertical et surtout la capacité de l’appareil à mettre en évidence les
parasites et transitoires sur le signal
(autant de points forts de ses MSO6000,
on l’aura compris). Avec sa fonction
Megazoom et la vitesse de 100 000 captures par seconde proposée sur le
MSO6000, le temps mort entre les acquisitions est très réduit et il y a donc une
probabilité très élevée de détecter les anomalies présentes sur le signal.
Jean-François Peyrucat
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