Les enjeux de la scolarisation des enfants de moins de 3 ans

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Les enjeux de la scolarisation des enfants de moins de 3 ans
Les enjeux de la scolarisation des
enfants de moins de trois ans
Viviane BOUYSSE
Inspectrice générale de l’Education nationale
ESEN, 9 juillet 2013
Plan de l’exposé
v 
Repenser l’école maternelle selon une logique
progressive
(une conception éducative partagée au niveau
européen)
v 
Penser des conditions suffisamment bonnes
pour scolariser les très jeunes enfants
(qualité structurelle, qualité des processus)
v 
Repenser certains gestes professionnels
(souplesse, adaptation)
2
Repenser l’école maternelle selon une logique
progressive
« Dépasser l’opposition récurrente et stérile » entre
deux modèles pédagogiques ; les coordonner de
manière optimale. (Eurydice)
Deux modèles pédagogiques :
§  Approche dite développementale, centrée sur
l’enfant, favorisant les apprentissages dits indirects
ou incidents.
§  Interventions plus marquées de la part de
l’enseignant animé par des intentions didactiques
précises, favorisant les apprentissages structurés.
Phases successives dans de nombreux pays.
Dosage plus subtil pour l’école maternelle lié au
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processus du « devenir élève ».
Repenser l’école maternelle selon une logique
progressive
v 
Accord sur l’importance de l’activité et de
l’initiative de l’enfant comme moteurs de
son développement
MAIS
reconnaissance que ce développement
n’intervient pas dans un vide culturel.
v 
Orientation de l’action éducatrice vers des
domaines porteurs de valeurs culturelles et
précurseurs des apprentissages scolaires
fondamentaux = chance des enfants issus
des milieux culturellement défavorisés.
4
Repenser l’école maternelle selon une logique
progressive
v 
Objectifs de l’éducation en milieu collectif durant la
petite enfance (Eurydice) : favoriser le
« développement affectif, social, motivationnel
et cognitif des jeunes enfants ».
v 
Echos dans la concertation pour la refondation
de l’Ecole : 2 familles d’objectifs à privilégier :
§  langage ;
§  compétences psycho-sociales / aptitudes socioaffectives :
§ 
§ 
§ 
§ 
confiance en soi ;
auto-régulation (émotions, modes d’action) ;
motivation intrinsèque pour les apprentissages (vouloir
savoir, vouloir savoir-faire et non vouloir faire plaisir) ;
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capacités de coopération avec les autres.
Penser des conditions suffisamment bonnes
pour scolariser les très jeunes enfants
v 
Qualité structurelle
Des choix qui impliquent l’équipe pédagogique
§ 
Forme même de la « classe » ou du dispositif.
§ 
Aménagements du temps : souplesse et régularité.
Objectif = conduire l’enfant à « se synchroniser »,
à s’inscrire dans le temps de tous.
§ 
Aménagements de l’espace de nature à créer un
sentiment de sécurité, à orienter les activités, à
autoriser les initiatives, à favoriser les interactions.
§ 
Une personne au moins en plus du professeur des
écoles et une stabilité des
« encadrants » (importance de « l’attachement 6
Penser des conditions suffisamment bonnes
pour scolariser les très jeunes enfants
v 
§ 
§ 
Qualité des processus : 1/Accueil et
socialisation
Accueil : favoriser une séparation en douceur avec
les parents (présence acceptée un moment ;
substituts tolérés aussi longtemps que nécessaire).
Pour le jeune enfant, processus de socialisation =
processus d’intégration à des cercles sociaux divers
(famille, classe, école, autres selon modes de vie) ET,
en même temps, acquisition d’une première
autonomie personnelle.
(Evolution fréquente : à côté … / comme … / avec ….)
La socialisation n’est pas un préalable mais
s’organise dans et par la mise en activité, en
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situation, avec une régulation attentive de l’adulte
Penser des conditions suffisamment bonnes
pour scolariser les très jeunes enfants
v 
Qualité des processus : 2/ Activités
Activités induites par des mises en situation d’abord ;
langage en accompagnement avant d’être vraiment
inducteur (valeur et fonction de la consigne à
construire progressivement). D’où l’importance de
l’aménagement du milieu et de la « démonstration ».
A favoriser :
§  déplacements ; grandes manipulations ;
§  jeux ;
§  explorations (assemblages, démontages,
modelages…).
Attention au matériel (normes liées à la sécurité)
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Penser des conditions suffisamment bonnes
pour scolariser les très jeunes enfants
Qualité des processus : 2/ Activités - suite
Les enfants doivent
§  AGIR, c’est-à-dire prendre des initiatives (et non
pas systématiquement exécuter des ordres) et
« faire » (essayer, recommencer, etc.). Imiter (un
pair, l’adulte).
§  REUSSIR : aller au bout d’une « intention », puis
d’un « projet » ou de la réponse à une consigne, et
ceci de manière satisfaisante.
§  COMPRENDRE : ce qui suppose une prise de
distance, une prise de conscience (relations
moyens / fin ); condition pour réussir à nouveau.
C’est dans cette première « réflexivité » que se
construit la posture d’élève.
INTERACTIONS, ETAYAGE INDISPENSABLES
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v 
Penser des conditions suffisamment bonnes
pour scolariser les très jeunes enfants
v 
§ 
§ 
§ 
§ 
Qualité des processus : 3/ Langage
Reformulation du langage émis par les enfants :
donner une bonne forme à leurs propos (en restant à
leur portée) et les rendre compréhensibles pour les
autres.
Conversations personnalisées.
Langage en accompagnement des activités :
désignation, récit et commentaires, mise en lumière
des relations entre causes et effets, etc.
mais aussi attribution de sens : à un « dessin », à
ce qu’ils ont « fabriqué »…
Langage sur les activités mais hors temps
d’action (langage d’évocation en germe) :
commentaires de photos, de « traces » ; supports à
fabriquer (exemples : supports utilisés dans Parler10
bambin).
Penser des conditions suffisamment bonnes
pour scolariser les très jeunes enfants
v 
§ 
§ 
Qualité des processus : 3/ Langage - suite
Formulettes, comptines, chansons : dire, redire,
faire dire.
(bon contenu pour des rituels collectifs)
Histoires racontées, « jouées » puis lues :
§  Porter attention au choix des premiers livres.
§  Faire construire les attitudes physiques du
« lecteur » ; éduquer le regard.
§  Rendre attentif aux relations entre signes ou
symboles et référents (avec imagiers par
exemple), aux relations entre images et textes
(fonction symbolique en cours d’installation).
§  Faire redire avec l’appui des images dès que 11
possible.
Repenser certains gestes professionnels
v 
Emploi du temps
§  De la régularité (mais revoir les rituels) ET de la
souplesse quant à la durée des divers moments.
§  Sortir de la seule alternance regroupements /
ateliers. Ménager du temps pour des activités à
choix individuels (initiatives) parmi une offre.
§  Exploiter les milieux extérieurs (s’adapter au
temps).
§  Penser la distribution du temps du PE et du temps
de l’ATSEM (ou…).
§  Optimiser le temps de l’après-midi (sieste aussi
tôt que possible).
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Repenser certains gestes professionnels
v 
Préparation de la classe et régulation de
l’action pédagogique
§  Réflexion sur le milieu (quoi/où/pourquoi/…)
§  Anticipation sur les potentiels des activités
proposées en fonction d’objectifs éducatifs (vers
quoi orienter l’activité des « désoeuvrés » ou
réorienter celle des autres).
§  Préparation des consignes (même si elles ne
suffisent pas) et anticipation du langage autour…
Après-coup : valoriser les prises de notes portant
traces d’observations, la documentation de
l’action, l’adaptation de l’action en fonction des
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observations.
Repenser certains gestes professionnels
v 
Posture professionnelle
§  Une attitude incitatrice et structurante :
fournir des modèles (langage et action),
provoquer des décentrations, fournir des
rétroactions.
§  Une disposition professionnelle permanente :
savoir soutenir/étayer (rappel des fonctions de
l’étayage : enrôlement, réduction des degrés de
liberté, maintien de l’orientation sur la tâche,
signalisation des caractéristiques importantes,
contrôle de la frustration, démonstration).
§  Une aptitude à communiquer avec le/la coencadrant(e).
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§  Une ouverture aux parents, une qualité
d’accueil.
Repenser certains gestes professionnels
v 
Evaluation
§  Sortir de l’approche normative. Penser de
manière positive (progrès++) sans négliger des
signes d’alerte (aides éventuelles à solliciter).
§  Organiser une trace du parcours (trace
individuelle : port folio ou autre forme ; traces
collectives : livre d’or, affichage, journal de bord…).
§  Impliquer les parents dans l’observation des
progrès de leur enfant : en posant des questions
simples, susciter un intérêt pour certains signes ;
avoir des rencontres régulières pour faire le point…
§  Impliquer l’enfant : mettre en mots ses progrès,
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l’inciter à le faire lui-même dès que possible.