Quelles activités mettre en place pour développer une éducation

Transcription

Quelles activités mettre en place pour développer une éducation
IUFM DE BOURGOGNE
CONCOURS DE RECRUTEMENT DE PROFESSEUR DES ECOLES
Quelles activités mettre
en place pour
développer une éducation
tactile à l’Ecole
Maternelle?
FAVROT Virginie
1
DIRECTEUR
DE
MEMOIRE :
Cécile CORNEC
Année: 2005
N° de dossier du stagiaire :
04STA00374
Sommaire
Introduction ………………………………………………………………………
……… 2
I . L’importance de l’éducation du toucher ……………………………………
……… 4
1. l’éducation sensorielle ………………………………………………………
2. les sens : un apport au niveau des apprentissages ………………………
* un apport au niveau des connaissances et compétences
disciplinaires………………………………………………………………………
…
* au niveau de l’épanouissement de l’individu …………………………
3. pourquoi une éducation du toucher à l’Ecole Maternelle ? ……………
* ce que disent les Instructions Officielles ………………………………
…
* la peau, connaissance sur le monde ……………………………………
……… 4
……… 5
……… 5
* la transversalité de cette éducation ………………………………………
II . Séances mises en place : le toucher dans les apprentissages ……………
1. le toucher dans la «Découverte du monde » ……………………………
* obtenir des renseignements sur la texture d’un objet …………………
* obtenir des renseignements sur la matière d’un objet …………………
2. le toucher pour initier aux mathématiques ………………………………
2
……… 7
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3. la découverte sensorielle grâce à la motricité. ……………………………
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III . Analyse sur ma pratique ……………………………………………………
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Conclusion …………………………………………………………………………
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Bibliographie ………………………………………………………………………
Annexes ……………………………………………………………………………
…
Introduction
Accompagner l’enfant dans son développement moteur, affectif et intellectuel pour
lui permettre de construire sa personnalité, structurer sa pensée et acquérir des notions
essentielles à ces futurs apprentissages, telles sont les principales préoccupations qui ont
marquées mon année de formation.
Ayant effectué mes deux premiers stages en responsabilité en maternelle, ces préoccupations
se sont imposées, générant de multiples interrogations, quant aux démarches pédagogiques à
adopter pour œuvrer dans cette perspective.
Lors de mon stage de pratique accompagnée réalisé en Petite Section, je me suis
aperçue qu’un enfant de 3 ans avait un besoin constant de toucher ce qui l’entoure. Ceci m’a
amené à m’interroger sur l’éducation sensorielle du toucher à la maternelle : comment le sens
tactile est –il mobilisé dans la classe ?
Par rapport aux sens de la vue et de l’ouie, le toucher est souvent mis de côté, même si il est
vrai que les enfants de maternelle ont de grandes occasions de toucher et manipuler divers
3
objets ou matériaux ; mais il n’y a pas d’apprentissage et d’analyse de l’acte de toucher : c’est
pourquoi les enfants arrivent difficilement à exprimer leurs ressentis.
Ainsi, je me suis intéressée à la pédagogie sensorielle afin de comprendre comment
celle-ci doit être développée pour favoriser la construction de compétences chez les enfants. A
cet âge précoce, l’enfant privilégie ses yeux au dépend de ses autres organes.
Or, le toucher est sans doute le sens le plus important à la survie de l’être humain.
Mais aussi il est un sens souvent négligé dans notre société. Touche avec tes yeux, pas avec
les mains ! répète- t-on sans cesse aux enfants. La culture occidentale privilégie les sens du
lointain : la vue et l’ouie, et tient en méfiance les sens de proximité auxquels d’autres
civilisations ont fait une place plus importante.
La vue et l’ouie sont considérés à l’école comme des outils d’observation, d’analyse mais
constituent souvent les seuls sens autorisés, les autres étant souvent ignorés. De plus, la
sensation tactile est quelque chose de subjectif par rapport à la vue ou à l’ouie qui sont
mesurables, maîtrisables, en d’autre terme sûres !
Mais pourquoi une éducation au sens du toucher ?
Eveiller ce sens chez l’enfant va l’aider à acquérir des compétences essentielles. De plus il
semblerait que la sensorialité ait de plus en plus de place dans les programmes.
Au cycle 1, les sens sont définis comme un objet d’étude. « L’aider à mieux découvrir le
monde, c’est donc enrichir et développer ces aptitudes sensorielles, lui permettre de s’en
servir pour distinguer des réalités différentes, les classer les décrire grâce au langage. »
Mais quelles activités mettre en place pour aider l’enfant à développer son sens
tactile ?
Afin de répondre à cette problématique, je m’attacherai donc, dans un premier temps, à
développer l’importance et l’intérêt de l’éducation du toucher. Puis dans un second temps, je
présenterai les diverses activités mises en place lors de mes stages en responsabilité. Enfin,
dans un dernier temps, je ferai une analyse de ma réflexion.
4
I. L’importance de l’éducation du
toucher.
1/ L’éducation sensorielle
La mise en place de l’éducation sensorielle en classe dès la première année de
Maternelle correspond à une réelle volonté d’insérer les sens dans un processus
d’apprentissage. La pédagogie sensorielle permet de développer les sens et de les « utiliser »
comme outil pédagogique.
Eduquer à la sensibilité, c’est faire prendre conscience aux enfants de leur sens, leur
apprendre à les cultiver et à apprécier la diversité des sensations. Mettre en place, au sein de la
classe, une pédagogie sensorielle, c’est être convaincu de la nécessité d’utiliser le domaine
sensoriel de l’enfant dans les processus d’apprentissages.
Mais précisons ce que recouvrent les termes de sensorialité et d’apprentissage, en
milieu scolaire.
Aux premiers abords, on ne conçoit pas aisément que par l’intermédiaire du domaine
sensoriel de l’enfant, on puisse parvenir à la construction de connaissances, tant les deux
termes paraissent opposés. Alors que la sensorialité fait plutôt référence au côté subjectif de
l’être humain, l’apprentissage nous place plutôt du côté de l’intellectualité : le Savoir, la
Connaissance.
5
Le terme sensorialité signifie « action de percevoir par les organes des sens » et
recouvre l’ensemble de ces mécanismes qui permettent à tout être humain de ressentir et de
percevoir le monde extérieur par l’intermédiaire de certains organes. En psychologie, il est
synonyme de sensibilité.
On peut définir les sens comme « une fonction par laquelle le système nerveux perçoit
consciemment et analyse les objets ou phénomènes extérieurs »1
Sous l’effet de stimuli, l’individu reçoit des sensations qui entraînent une perception. Il
recevra cette dernière en se référant à ses connaissances, ses expériences et ses représentations
du monde environnant.
Un des rôles de l’Ecole Maternelle, comme le précisent les Instructions Officielles de
2002, est « de guider l’élève vers une toute première analyse de son environnement fondée
sur la mise en ordre des perceptions qu’il reçoit ». La pédagogie de l’Ecole Maternelle
semble traduire la nécessité de passer par le corps pour parfaire le développement de l’enfant.
En ce qui concerne le terme d’apprentissage, il recouvre en pédagogie une notion très
précise : celle d’évolution des savoirs ou des comportements de l’individu par l’interaction de
ce dernier avec son milieu.
L’enfant dispose d’un capital de connaissances et de compétences. Ce capital est
différent pour chaque enfant car chacun a des références qui lui sont propres, qui dépendent de
son environnement dans lequel il évolue. Lorsque dans le cadre scolaire, l’enfant est placé en
situation d’apprentissage, il doit remettre en cause ce qu’il sait déjà. Se produit alors une
phase d’assimilation, au cours de laquelle l’élève intègre les nouvelles connaissances. Puis
suit une phase d’accomodation2 qui lui permet de faire sien le nouveau savoir et entraîne une
nouvelle réorganisation de l’ensemble de ses connaissances.
On comprend donc que l’apprentissage est un processus relativement individuel au
cours duquel chaque enfant s’approprie le savoir nouveau de telle sorte qu’il pourra le
réutiliser dans d’autres contextes. Toutefois, on notera l’importance de l’environnement dans
lequel l’enfant agit. Ce sont les actions et les expérimentations qui vont primer dans le
processus d’apprentissage. On retrouve ici la nécessité d’une utilisation de son corps, d’un
passage obligé par les organes sensoriels pour capter les informations qu’offrent toutes les
expérimentations. C’est par les contacts et les manipulations que l’élève va parvenir à élaborer
de véritables perceptions.
2/ Les sens : un apport au niveau des apprentissages
Ainsi les sens constituent un apport aux apprentissages. Mais quels rôles jouent-ils
dans une situation d’apprentissage ?
Ils peuvent occuper le statut d’objet d’apprentissage, être étudiés pour eux-mêmes afin de
favoriser leur développement. Ils peuvent être considérés comme outil, comme médiateur
entre l’élève et l’accès à une connaissance plus disciplinaire. Ce double rôle va induire une
diversité et une multiplicité d’activités proposées aux élèves par l’enseignant.
Si l’on considère que l’objectif est de développer les 5 sens dont dispose chaque enfant, on se
situe dans la partie des Instructions Officielles intitulée « Découvrir le monde». Les activités
1
2
Définition du Dictionnaire Encyclopédique Larousse
termes issus de la théorie de PIAGET
6
mises en place viseront à « enrichir et développer ses aptitudes sensorielles »3 et par la
même, favoriseront l’éducation à la connaissance de soi et de son environnement.
* Un apport au
compétences disciplinaires
niveau
des connaissances et des
Par connaissances et compétences disciplinaires, j’entends l’ensemble des savoirs et savoirfaire développés par les activités mises en place dans la classe.
« L’éducation à la sensibilité est souvent vécue comme un luxe mais un luxe
nécessaire, parce qu’elle est sans doute infiniment liée au développement des autres
facultés. »4
Rappelons que Jean Jacques ROUSSEAU écrivait dans l’Emile à la fin du XVIII
ème siècle, « les premières facultés qui se forment et se perfectionnent en nous sont les sens.
Ce sont donc les premières qu’il faut cultiver, ce sont les seules qu’on oublie ou néglige le
plus. » Il rajoutait : « Exercer les sens n’est pas en faire usage, c’est apprendre à bien juger
par eux. C’est apprendre ainsi dire à sentir, car nous ne savons ni toucher, ni voir, ni goûter,
ni entendre que quand nous avons appris. »
Favoriser l’entrée dans un processus d’apprentissage en utilisant les sens est une idée
ancienne.
C’est l’œuvre d’une grande dame, Maria MONTESSORI qui, dès le début du XX ème siècle,
instaura dans la « première Maison des Enfants » à Rome, une pédagogie sensorielle. Elle
s’est appuyée sur la psychologie de l’enfant et sur la mise en place d’un milieu riche, grâce à
un matériel pédagogique adapté. La particularité de ce matériel se trouvant dans les classes
Montessori est qu’il permet à l’enfant d’emmagasiner des expériences ainsi qu’un
vocabulaire ; l’adulte l’invite à associer à chaque stimulant sensoriel les noms appropriés. Ce
matériel est destiné à affiner les sens, dans le but de donner à l’enfant des bases solides sur
lesquelles il pourra développer ses connaissances.
Dans ces ateliers, Maria MONTESSORI cherche à développer les capacités
sensorielles afin de les rendre plus performantes. C’est de la précision des perceptions
sensorielles de l’enfant que dépend sa capacité future à percevoir toutes les subtilités de son
environnement. L’affinement des sens conditionne sa capacité de discrimination du futur
adulte.
Il me semble intéressant de rappeler que la pédagogie que prônait Maria
MONTESSORI lui a été suggérée par les besoins développés chez les enfants déficients. C’est
pour apprendre le code écrit à l’un d’entre eux qu’elle a eu l’idée d’utiliser des lettres
prédécoupées dans de la toile Emeri. De là sont nés les ateliers Montessori qui connaissent un
certain succès dans les écoles maternelles. C’est le cas des « lettres rugueuses » dont l’objectif
est la préparation à l’écriture et plus précisément à la mémorisation de la graphie des lettres et
de leur nom par la mémorisation du geste.
3
4
Instructions Officielles 2002
Alain BOUILLET, professeur en Sciences de l’Education, Cahiers Pédagogiques n°374, mai 1999
7
Il n’est plus à démontrer que les enfants et notamment ceux en âge d’entrer à l’Ecole
Maternelle, ont un besoin très fort de « vivre les apprentissages, de toucher du doigt » ;
autrement dit, ils ont grand besoin de concret pour mieux parvenir à l’abstraction ensuite.
S’adressant aux enseignants, Françoise DOLTO affirme qu’ « à l’Ecole Maternelle, un enfant
doit percevoir le plus possible. Percevoir pour l’enfant, c’est se construire. Il faut le laisser
agir, découvrir, multiplier les occasions d’utiliser ses sens. »
L’enfant a besoin de stimulations sensorielles et corporelles pour passer du stade de
l’action à celui de la perception. C’est Antoine de la GARANDERIE qui disait : « il faut
donner à voir, à entendre, à sentir, à ressentir, à manipuler les choses pour les connaître. »
Cette notion de stade nous amène à évoquer les recherches psychologiques faites sur le
développement de l’enfant. Nous allons tenter de mettre en relation les apports de ces
réflexions avec ce qui nous intéresse pour voir si la connaissance de la psychologie enfantine
peut nous aider à mettre en place des situations d’apprentissage grâce au sens tactile.
PIAGET a mis en évidence l’importance du domaine sensoriel de l’enfant au cours de
son développement cognitif.
A sa naissance, un bébé est pourvu d’un équipement sensoriel relativement bien
développé (il réagit au toucher des adultes). Mais il ne perçoit pas toutes ces sensations ; il
n’est pas encore capable de leur donner une signification, il les subit.
Puis de un à trois ans, grâce à l’accès à une plus grande autonomie –marche, début du
langage usuel, prise de conscience du « moi » - l’enfant va utiliser l’ensemble de ces facultés
sensori-motrices. Les sens vont lui apporter une multitude d’informations.
C’est à partir de trois ans, durant sa scolarité pré- élémentaire, que l’enfant devient
capable de se représenter ses actions, d’anticiper, de rechercher un résultat. Il expérimente
dans un monde sur lequel il peut agir. Son exploration sensorielle s’accroît en même temps
qu’elle s’affine. L’enfant prend conscience de ce que peuvent lui apporter ses sens et il les
utilise à ses fins.
Ainsi l’Ecole Maternelle se doit de proposer un environnement assez riche pour ne pas
anéantir cet élan.
Ce bref rappel permet de comprendre combien le domaine sensoriel est la base même du
développement de l’enfant entre sa naissance et l’âge de six ans. Les sensations qui ne sont au
départ que des tableaux tactiles subis, deviennent ensuite de véritables sources d’informations,
pour enfin être le déclencheur d’actions pensées et abouties.
* Epanouissement de l’individu
La mise en place d’activités sensorielles, plus précisément tactiles, a des objectifs
cognitifs mais également agit sur l’épanouissement de l’individu.
Hélène BRULE a fait des études auprès de tout- petits5. Selon elle, l’enfant qui arrive en
Maternelle, se caractérise généralement par une certaine agitation et un besoin de toucher à
5
Les moins de quatre ans à l’école maternelle
Hélène BRULE –collection Bourrelier-1979
8
tout, de palper, de saisir des objets, de les transporter. L’auteur précise qu’à travers ces
actions répétitives et changeantes, l’enfant se construit.
Rechercher dans des sacs opaques des objets, les reconnaître par le toucher, nommer les
sensations, les trier, permet d’atteindre des objectifs spécifiques mais également favorise la
connaissance de soi : l’enfant prend conscience de ses différentes capacités sensorielles ; il
découvre son corps, apprend à le connaître, à l’utiliser et à le maîtriser.
Cet apprentissage du corps, et par le corps représente une des conditions de
l’épanouissement du sujet. Faire prendre conscience au jeune enfant de son corps lui permet
d’acquérir une certaine confiance en soi. N’oublions pas que ces enfants bien dans leur peau
aujourd’hui représentent les futurs adultes de demain.
« Un plaisir tactile satisfaisant pendant la petite enfance et pendant l’enfance est
fondamentale pour le développement ultérieur vers un comportement équilibré de
l’individu. » 6
L’importance du toucher pour l’homme est infiniment plus grande qu’on ne peut le
croire. La peau est un organe déterminant dans le développement du comportement humain.
Prendre conscience de son corps passe nécessairement par l’expérience tactile.
3/Pourquoi
maternelle ?
une
éducation
du
toucher
à
l’école
« L’éducation sensorielle est une curieuse non- discipline scolaire. En maternelle, on la
proclame comme étant un fondement de l’enseignement ; en primaire, elle est plus rare. » 7
Voyons ce que disent les Nouveaux Programmes.
* Ce que disent les Instructions Officielles (B.O
14/02/2002) pour le cycle 1.
du
* Domaine d’activité : Découverte du monde - Découverte sensorielle
« Pour qu’il puisse établir des connaissances, il importe d’abord de guider l’enfant vers une
toute première analyse de son environnement fondée sur la mise en ordre des perceptions
qu’il reçoit. C’est par l’usage des sens que l’enfant reconnaît les objets et les évènements
qu’il perçoit.
6
7
La peau et le toucher
Aslhey MONTAGU
Elizabeth THURIET, professeur d’éducation physique
9
L’aider à mieux découvrir le monde, c’est donc enrichir et développer ses aptitudes
sensorielles […]. Dans cette perspective, on lui propose des situations mettant en jeu :
l’exploration des qualités tactiles : rugueux, lisse, doux, piquant, chaud, froid […]. »
Compétences devant être acquises en fin de cycle :
« Etre capable de :
-décrire, comparer et classer des perceptions élémentaires (tactiles…)
-associer à des perceptions déterminées les organes des sens qui correspondent. »
* Domaine d’activité : Découverte du monde – Exploration du monde et de la
matière
« En agissant sur la matière, l’enfant élabore des représentations. Il peut ainsi
s’exercer à modeler, tailler, …, morceler, transvaser en agissant sur des matériaux nombreux
et variés. »
En lisant les programmes de l’Ecole Primaire, on constate une véritable progression dans
l’apprentissage du toucher.
Le cycle 1 s’attache surtout à l’acte sensori-moteur et aux informations que celui-ci apporte.
Alors que le cycle 3 met en avant la compréhension des structures et des mécanismes mis en
jeu lors du toucher.
A l’Ecole Maternelle, il faut « aider l’élève à mieux découvrir le monde […] en enrichissant
et en développant ses capacités sensorielles ».
Pour cela, l’enseignant doit maîtriser les connaissances scientifiques expliquant l’acte de
toucher et ses conséquences.
* la peau, une connaissance sur le monde
Le corps ressent et enregistre tout ; il est à la fois acteur principal et témoin muet :
tout ce que nous pouvons expérimenter est vécu par le corps ; et ce, grâce à la peau.
La peau joue avant tout un rôle de barrière de protection mécanique et biologique qui
isole les tissus profonds du monde extérieur. La fonction sensorielle du toucher contribue
largement à cette protection en permettant une approche concrète du monde extérieur grâce
aux différentes perceptions.
La peau possède de nombreuses fonctions telles que la protection mécanique,
thermique, immunologique et chimique, la régulation thermique et la réception des stimuli.
10
La peau couvre, chez l'adulte, une surface comprise entre 1,5 et 2 mètres carrés. C'est
d'abord une enveloppe qui contient l'ensemble du corps, recevant toutes les sensations venues
de l'extérieur. Elle est aussi une frontière entre l'extérieur et l'intérieur: elle est l'intermédiaire
avec l'environnement. Elle est à la fois perméable et imperméable, filtrant ce qui lui est utile.
La peau, dont l'épaisseur varie entre 1,5 et 4 mm, présente trois couches superposées
qui font fonction de « remparts » : l'épiderme, le derme, et l'hypoderme.
La couche la plus externe de la peau, l’épiderme, contient un réseau de terminaisons
nerveuses libres chargées de transformer les informations recueillies par les récepteurs
sensoriels en influx nerveux électriques.
Elle contient de nombreux récepteurs sensoriels (annexe 1) qui transmettent les
sensations cutanées au système nerveux. Des structures spécifiques sont responsables de
stimulations précises :
- le corpuscule du tact de Meissner pour le toucher ;
- le disque du tact de Merkel pour la pression ;
- le corpuscule de Pacini pour la pression et la vibration ;
- les terminaisons nerveuses libres pour la douleur et la température.
Les corpuscules de Pacini sont les plus volumineux de ces organes sensoriels et sont
situés sur la partie interne du derme (l’hypoderme). Ils informent le cerveau des mouvements
du corps.
Les corpuscules de Meissner, en forme d’olives, sont surtout abondants dans la pulpe
des doigts et véhiculent des informations relatives au tact. Ils informent le cerveau que la peau
a été touchée.
Les disques de Merkel sont des organes plats répartis dans les mêmes régions que les
corpuscules de Meissner. Ils informent le cerveau quand la peau est touchée de façon
continue.
Le sens du toucher est le premier à se développer chez l’embryon humain. C’est le
sens le plus important du corps. Un être humain peut vivre aveugle, sourd mais ne pourrait
survivre un instant sans les fonctions assurées par la peau (deux autres organes sont vitaux : le
cœur et le cerveau). Comme le disait Paul VALERY, « la peau est ce qu’il y a de plus
profond en nous ».
La peau assure le premier contact de l’individu avec le monde extérieur, d’où son
rôle de protection et de relation. Une forte envie de rentrer en contact avec les objets qui nous
entourent est présente en nous. Et cela est possible avec les différentes parties de notre corps.
Cette notion de contact montre bien que ce sens est en éveil permanent.
Mais la sensation de contact n’apparaît qu’en certains points du corps. Le nombre de ces
« points de toucher » varie de 5 à 200 par centimètre carré selon les régions du corps. On en
dénombre 135 sur la pulpe des doigts et seulement 5 à 7 sur la partie supérieure des cuisses.
De même, la peau n’est pas uniformément sensible aux variations de température : elle
11
possède des « points de chauds » et des « points de froid ». La sensibilité de la peau est donc
ponctuelle, c’est- à- dire limitée à des points précis laissant entre eux des espaces insensibles.
Dès son plus jeune age, l’enfant ressent la nécessité de toucher : le nouveau né
explore de manière tactile les objets avec la bouche puis avec les mains.
Le toucher fonctionne comme un système d’alarme naturel; sans le toucher il serait impossible
de faire la distinction entre un lieu dangereux et un lieu sûr. Ce sens nous protège chaque jour
des agressions de l’environnement.
La peau apporte également des renseignements sur la matière, sur la forme d’un objet.
Il est bon de noter qu’il existe différentes variations des perceptions tactiles :
*les origines des perceptions : il y a celles que l’on provoque (je touche, je caresse, je
frotte…), il y a celles que l’on subit en le sachant d’avance (je suis touché par quelqu’un ou
par quelque chose que j’ai vu venir à mon contact), il y a celles que l’on subit sans être
prévenu (je suis touché par surprise).
*les perceptions varient aussi en intensité : il est parfois difficile de maîtriser les
réactions engendrées par une perception vive : je veux me baigner et je sais que l’eau est très
froide… et le premier contact avec l’élément reste un moment délicat.
*la durée d’une perception peut être variable : au toucher bref, voire fugitif
(effleurer), s’oppose le toucher prolongé.
Après avoir fait un rappel scientifique sur la peau, nous allons voir que l’éducation au toucher
n’est pas qu’une affaire d’apprentissages en Sciences. Surtout en Maternelle, le sens tactile
est présent dans toutes les disciplines.
* La transversalité de cette éducation
« Eduquer à la sensibilité vise à reconnaître la réalité des savoirs, à prendre conscience de
l’existence d’une véritable culture des sens, culture qui trouve à s’exercer de multiples
façons »8
L’éducation de la perception peut être pratiquée sous trois formes complémentaires :
*l’attention aux choses : il s’agit d’exploiter les mille occasions de la vie quotidienne
pour aider à une prise de conscience de ce que nous découvrons par le toucher : c’est la forme
essentielle de l’éducation sensorielle à l’école maternelle.
Un exemple qui a été significatif lors de mon stage en Petite Section : lorsque je me
mettais en jupe, les enfants étaient curieux de connaître la sensation que procurait le collant
8
Alain BOUILLET, professeur en Sciences de l’Education. « Des sens à la sensibilité : quelle
éducation ? »
Cahiers pédagogiques n°374 mai 99
12
sur la main (dès qu’ils le pouvaient, à l’habillage, au dortoir, les enfants passaient leur main
sur ma jambe pour « sentir »). Un jour, un enfant m’a même dit que « ça fait bizarre sous les
doigts ».
*les exercices perceptifs : ce sont des activités ponctuelles qui entraînent à faire
attention, à affiner la discrimination sensorielle. Ces petits jeux ( Kim du toucher, loto tactile)
doivent être fréquents et souvent renouvelés. Ils sont vécus avec grand plaisir par les enfants.
*le contact avec la matière : il s’agit de provoquer des situations complexes qui amènent
les enfants à manipuler des matériaux divers. Les activités de fabrication s’y prêtent
particulièrement bien.
« Au cours du cycle 1, l’élève doit prendre conscience au niveau de la sensibilité, que l’être
humain […] touche, qu’il prend connaissance du monde qui l’entoure avec les organes des
sens. » 9
Ainsi l’enfant prend connaissance de son environnement en agissant. La perception
que l’enfant prend du réel par l’intermédiaire de ses sens remplit plusieurs fonctions :
*elle le renseigne sur les caractéristiques du milieu et lui permet d’ajuster son action. Le
toucher permet d’ajuster son geste et son effort aux caractéristiques du matériau manipulé : on
ne déchire pas du carton comme on déchire du papier.
*elle lui procure un plaisir sensoriel et suscite l’activité mentale imaginative, très
importante pour l’équilibre psychologique.
L’éducation sensorielle sollicite et développe les sens au cours de nombreuses activités
et à tout moment opportun de la journée.
Elle ne se limite pas à des activités en sciences. D’autres domaines développent ce sens : la
motricité, les arts visuels, les mathématiques.
Un enfant peut apprendre les concepts de base en maths de deux façons : avec des
méthodes abstraites ou en utilisant et manipulant du matériel concret. Selon Piaget, les jeux
sensoriels préparent l’enfant à la pensée mathématique dans la mesure où ils l’amènent
successivement et progressivement à nommer les qualités de l’objet, puis à comparer et enfin
à réfléchir, donc à entrer dans la pensée abstraite.
La découverte sensorielle du toucher est présente dans différents domaines
d’apprentissage.
Comme le montrent les Instructions Officielles de 2002, elle est présente dans « la
sensibilité, l’imagination, la création », dans « la découverte des formes et des grandeurs »,
dans « agir avec son corps ».
Le domaine « la sensibilité, l’imagination, la création » s’appuie sur deux
ensembles de pratiques artistiques mettant en jeu des sollicitations sensorielles
9
A la découverte du monde vivant-cycle1. CRDP Nord. Pas de Calais.2002
13
complémentaires : visuelles et tactiles pour « le regard et le geste », auditives et vocales
pour « l’écoute et la voix ». « La priorité est donnée à l’exploration motrice et sensible […]
La découverte des matières et des matériaux passe par une utilisation sensorielle alliant le
toucher, la perception visuelle […] »
En motricité, le toucher n’est pas qu’une affaire de mains, on peut utiliser les pieds
pour ressentir les choses. Le toucher est un processus d’interaction et de communication.
Parmi les activités quotidiennes nombreuses sont celles qui conduisent l’enfant à manipuler
des objets, des formes et des dimensions variées. L’enfant apprend, « par l’usage de ses sens,
à reconnaître et catégoriser, non seulement des objets, mais aussi des qualités (couleurs,
formes, …) » 10
Ainsi l’approche par le toucher (par exemple avec les yeux bandés) complète
l’approche visuelle. Avant de dessiner des formes sur le papier, qu’elles soient imaginées ou
imitées, les enfants auront pratiqué de nombreuses activités où le sens tactile joue un rôle
essentiel :
-deviner la nature d’un objet touché, les yeux bandés
-identifier un objet à partir de l’observation de l’une de ses empreintes dans de la pâte à
modeler
-construire des objets de formes particulières à partir d’une pâte malléable.
Ainsi, les Instructions Officielles montrent que l’éducation au toucher peut se faire dans
divers domaines d’apprentissage. C’est donc à l’enseignant de multiplier les domaines pour
solliciter le sens du toucher chez les jeunes enfants.
Lors des stages que j’ai effectué en Ecole Maternelle, j’ai pu mettre en place diverses activités
permettant de développer le sens tactile.
10
Pour une scolarisation réussie des tout-petits Documents d’accompagnement des programmes 2002
14
II La mise en place des séances : le toucher
dans les apprentissages.
Je me suis attachée, à travers les séances proposées lors de mes stages en responsabilité en
Grande Section puis en Petite Section, à montrer qu’une étude spécifique du toucher, dans
plusieurs domaines d’apprentissage,
était nécessaire pour permettre une meilleure
verbalisation des ressentis chez les jeunes enfants de Maternelle.
1 le toucher dans la « Découverte du monde »
Lors de mon premier stage, effectué en Grande Section, j’ai mis en place une séquence sur le
toucher lors du décloisonnement MS- GS car je me suis aperçu que les élèves n’avaient pas
encore, au mois de décembre, eu d’expériences en éducation sensorielle.
* la peau nous renseigne sur la texture d’un objet :
L’objectif de cette séquence est de prendre conscience que la main donne des
renseignements sur la texture, la consistance d’un objet.
15
Plan de la séquence :
Séance 1 : kim du toucher
Séance 2 : le jeu « les mains dans le dos »
Séance 3 : évaluation finale
Mais quels renseignements la main peut-elle nous donner ? Afin de répondre à cette
question, j’ai mis en place deux séances.
Le point de départ de séance est la lecture d’un album : Ce que Thomas voit de C.
MERVEILLE. C’est l’histoire d’un petit garçon aveugle, Thomas, qui utilise ses autres sens
pour découvrir le monde qui l’entoure. Même si l’histoire ne se centre pas uniquement sur le
toucher, les élèves se sont rendus compte que les mains sont très importantes pour ce petit
garçon qui ne peut se servir de ses yeux.
Voici la séance 1 : (annexe 2)
Objectif : faire émerger le vocabulaire relatif au toucher : dur/mou ; doux/piquant.
Compétences visées : être capable d’exprimer ses sensations
oser toucher sans voir
savoir isoler un sens : le toucher
associer à des perceptions déterminées l’organe des sens qui correspond.
Déroulement :
Avant de commencer, j’ai récité et mimé aux élèves la comptine « Que fait ma main ? »
Que fait ma main ?
Elle caresse, douce, douce,
douce.
Que fait ma main ?
Elle pince, ouille, ouille, ouille.
Que fait ma main ?
Elle chatouille, guili, guili, guili.
Que fait ma main ?
Elle pique, pique, pique, pique.
Que fait ma main ?
Elle s’en va. Au revoir !
16
A partir de cette comptine, je les ai questionné sur les gestes que fait la main, sur sa fonction :
« la main pique », « elle chatouille », « elle caresse », « elle pince » puis un enfant a répondu que
« la main, ça sert à toucher »
Ensuite, j’ai présenté un doudou : « Je vous ai amené un doudou. Avez-vous toujours un
doudou ? »
Certains enfants en ont encore un, qu’ils gardent près d’eux pour s’endormir. Et tous en ont
déjà eu un, ainsi je leur ai demandé : « A votre avis, pourquoi ça s’appelle un doudou ?
Pourquoi l’aimez-vous ? » Rapidement, les enfants ont répondu que « c’est doux, on peut se
caresser la joue, le nez ».
Puis j’ai présenté la suite de l’activité : « nous allons jouer à un nouveau jeu. J’ai
amené des objets que j’ai mis sur la table et dans le sac. Vous allez devoir retrouver dans le
sac l’objet qui est sur la table. Mais attention il ne faut pas regarder dans le sac à secret. »
Je leur montre les divers objets : papier de verre, coton à démaquiller, cylindre en plastique,
coquillage, coquetier en bois, rond en bois, morceau de feutrine, balle molle, petit anneau et
sac de riz. Tous les objets sont présentés pour s’assurer qu’ils sont connus de tous.
Consigne : « Vous allez, chacun votre tour, plonger la main dans le sac, choisir un
objet (sans le lâcher) et dire ce que c’est. Après vous montrerez le même objet sur la table. »
Les enfants jouent chacun leur tour et observent attentivement le camarade qui joue. Ce
dernier fouille dans le sac et pioche un objet.
Une fois l’objet découvert, j’ai demandé à l’élève ce qu’il a ressenti : « comment est l’objet,
que ressens-tu avec ta main ? ».
Le vocabulaire émergé était correct : « c’est doux donc c’est le coton ». Une enfant a fait la
correspondance entre la sensation et la matière : « c’est le coquetier, c’est dur car c’est en
bois ».
Une autre relation a été faite pour le coquillage : « c’est dur mais ça peut aussi couper ! »
Une seule erreur s’est produite dans la correspondance entre l’objet senti et l’objet présent sur
la table : un élève a choisi dans le sac le carré de coton à démaquiller et a montré la feutrine.
Les sensations de ces deux tissus étaient très proches et donc trompeur : « pourquoi as-tu
choisis cet objet ? Parce que c’est doux ! » Après vérification par les autres enfants, eux aussi
ont constaté que les deux morceaux de tissus étaient « doux », « ça ressemble », « c’est presque
pareil quand on touche »
Réactions des élèves :
Les enfants étaient très enthousiastes. Ils présentaient un fort besoin et une grande envie de
toucher, de mettre la main dans le sac.
Ils attendaient leur tour avec impatience et étaient très attentifs aux réactions des camarades :
ils vérifiaient l’exactitude des propositions. Lorsqu’un enfant était en désaccord avec la
proposition faite, tous avaient envie et besoin de toucher l’objet pour valider ou non.
Rôle de l’enseignante :
Je questionnais les enfants avant la mise en jeu pour vérifier que tous connaissent les objets
présentés.
Pendant le jeu, je veillais au bon déroulement et sollicite les élèves à exprimer leurs
sensations, pour faire émerger le maximum de vocabulaire.
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Mes attentes :
Je pensais que certains enfants auraient des difficultés à exprimer certains ressentis. Or le
vocabulaire (mou/dur- doux/piquant) a été bien assimilé. Tous les termes de sensations
tactiles ont été prononcés par les enfants.
De ce fait, j’aurai pu introduire la notion de lisse/rugueux qui est complémentaire aux autres.
Après cette séance de découverte de sensations tactiles, j’ai voulu développer les
propriétés de la main et de la peau.
Voici la séance 2 : (annexe 3)
Objectif : prendre conscience que la paume et les extrémités des doigts donnent des
renseignements sur la consistance d’un objet.
Compétences visées : émettre des hypothèses, les vérifier. Réinvestir le vocabulaire.
Déroulement :
La séance s’est déroulée au coin regroupement. Tous les enfants étaient assis sur le banc face
au tableau. Je leur demande de rappeler ce qui a été fait la séance dernière : « on a touché des
objets et on les a cherché dans un sac. »
Consigne : « Aujourd’hui, vous allez jouer à un nouveau jeu : je vais caresser votre main
avec un objet. La main sera derrière votre dos et vous ne devrez pas regarder derrière vous.
Vous direz ce que ça vous fait, ce que vous ressentez. »
Les objets utilisés étaient une plume, du coton, du papier de verre, un crayon de
papier bien taillé et un rond en bois.
Je passais derrière chaque enfant et faisais découvrir l’objet en effleurant, en piquant
la paume et les doigts. Quand tous les élèves avaient ressenti l’objet, chacun prenait la parole,
exprimait son ressenti et proposait le nom d’un objet : « ça pique, je crois que c’est une
aiguille », « c’est tout doux, c’est comme le coton. ».
Je notais au fur et à mesure ce que les enfants disaient sur une affiche accrochée au tableau.
(Annexe 4).
Après avoir complété le tableau, les enfants ont réfléchi sur comment définir les notions
découvertes : je notais leurs réponses au tableau:
Doux : « c’est bien », « c’est agréable »
Piquant : « ça gratte », « ça fait mal »
Dur : « c’est pas mou », « c’est dur à casser »
Mou : « on peut le tordre », « mon doigt rentre dedans »
Un élève, pour décrire le piquant, a dit : « quand c’est piquant, c’est pas doux ». Cette réponse
montre qu’il a compris que les deux termes sont opposés.
Réactions des élèves :
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Les enfants étaient très impatients que ce soit leur tour pour pouvoir découvrir l’objet mystère.
Aucun n’a hésité à glisser la main derrière le dos sans savoir ce que j’allais faire. Au contraire,
ils étaient tous curieux de découvrir la sensation.
Rôle de l’enseignante :
Je faisais ressentir aux enfants l’objet en insistant sur l’endroit de la main à effleurer : je
passais l’objet sur la paume de la main puis sur les extrémités des doigts (parties les plus
sensibles).
Par des petites questions, je sollicitais les enfants à exprimer les sensations en réutilisant le
vocabulaire découvert lors de la séance 1.
Mes attentes :
Par cette séance, j’ai constaté que la séance précédente avait été bien assimilée.
En revanche, je craignais que certains enfants ne veuillent pas se laisser « caresser » la main
par un objet mystère! A ma grande joie, tous ont participé au jeu.
A cet âge, le mimétisme est fréquent : un enfant de MS répétait très souvent les dires de ces
camarades ! sans doute également, parce que son vocabulaire était moins développé.
Séance 3 : évaluation
Pour évaluer les acquis des élèves concernant le vocabulaire relatif au sens tactile et aux
sensations, j’ai fait une évaluation orale individuelle. Pour cela, j’ai mis en place une chasse
aux trésors : je demandais à un enfant de trouver dans la classe un objet qui représente telle
texture : « peux-tu trouver un objet doux ? »
Quand l’objet était ramenait, l’élève précisait à quelle famille appartient la découverte :
famille des « piquant », … J’inscrivais la réponse sur une affiche divisée en quatre colonnes,
accrochée au tableau.
Un problème s’est posé lors de cette évaluation, et qui n’avait pas été mis en avant lors de
deux premières séances. Un élève a ramassé dans la classe un coussin en velours, objet qui est
à la fois doux et mou. Mais alors, dans quelle famille mettre le nouvel objet ?
Un autre enfant a dit l’ait tout embarrassé, « mais ça ne va pas, le coussin, il est doux mais il est
mou aussi ! » Le doute s’est installé au sein du groupe et une exclamation a émergé : « mais il
n’a pas le droit de ramener le coussin ! ». Après réflexion, les GS ont dit que « c’est possible, un
objet peut être doux et mou, comme le coussin. »
Cette interrogation est sans doute liée au fait que dans les deux séances, les objets étaient
imposés alors que dans l’évaluation, les enfants étaient libres de ramener ce qu’ils
souhaitaient.
Sur une grille d’évaluation (annexe 5), je notais :
- si l’élève avait ramené un objet correspondant à la texture demandée,
- s’il avait bien compris la consigne
- s’il savait réutiliser le vocabulaire adapté
Mes attentes :
Je souhaitais que les élèves aient compris la différence entre mou/dur et doux/piquant, qu’ils
sachent restituer le vocabulaire approprié, qu’ils utilisent la peau pour définir un objet.
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* La peau nous renseigne sur la matière d’un objet
La peau a des récepteurs sensoriels ce qui donne au toucher un rôle de transmetteur
d’informations portant sur les caractéristiques physiques d’un objet.
Lors de mon stage en Petite Section, effectué au mois de mars, j’ai mis en place, au
réveil après la sieste, pendant 10 jours, un jeu perceptif appelé « les paires de tissus ». La
durée de l’atelier a permis à certains enfants d’y revenir un peu plus tard et de mieux
appréhender les tissus
Cet atelier était libre d’accès puisque les enfants s’installaient librement aux divers ateliers
préparés au retour de la sieste.
L’objectif était de développer son sens tactile, en utilisant les mains.
Trois paires de tissus étaient proposées aux élèves : du cuir, de la moquette, du velours côtelé.
Pour que le jeu ait tout son sens, les petits avaient les yeux bandés. Il fallait empêcher la vue
d’intervenir et d’interférer le sens tactile.
Le but était de toucher les tissus pour en faire des paires.
Déroulement : (annexes 6 et 7)
Les trois tissus étaient présentés aux enfants qui les touchaient, les manipulaient, les yeux
ouverts.
Je faisais nommer les tissus et verbaliser pour connaître les sensations apportées.
Pour reconnaître le cuir, un enfant a dit : « c’est comme la veste de papa ! » J’ai demandé s’il
connaissait le nom de ce tissus mais ne savait pas. Un autre enfant a su le nommer.
Le morceau de velours, c’est « comme le canapé de la maison. »
Pour la moquette, un petit, qui avait « ça dans |sa] chambre », a dit, « c’est de la moquette ».
Après la découverte visuelle et tactile des tissus, l’enfant, qui jouait, a masqué ses yeux avec
un foulard. Je lui présentais un morceau et lui faisait sentir avec les mains. Je lui demandais
s’il savait ce que c’était ; tout cela sous les yeux de quelques camarades.
Tous les élèves ont réussi à nommer le tissus proposé, même si certains mettaient plus de
temps (ils palpaient, manipulaient plus longtemps.)
Ensuite, je proposais les trois morceaux (cuir, moquette et velours) et demandais à l’enfant de
retrouver parmi les trois celui qu’il venait de toucher. Une fois un morceau montré du doigt, je
demandais l’avis aux autres enfants qui valide ou non la proposition. Si les deux tissus ne
correspondaient pas « visuellement », chacun les touchait pour confirmer l’erreur.
Réaction des enfants :
Ils étaient très motivés: au lever de la sieste, trois enfants me demandaient toujours à quelle
table « on joue aux tissus. »
Certains, timides, se contentaient de regarder un camarade, ne voulaient pas
jouer ; cependant, ils participaient lors de la validation (d’abord visuelle, puis
tactile si nécessaire).
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Mes attentes :
Ce jeu a permis à certains enfants de découvrir les matières, comme le cuir.
2. Le toucher pour initier aux mathématiques :
apprendre à toucher par l’intermédiaire des formes
géométriques
Lors de mon stage en Petite Section, j’ai voulu faire découvrir les formes géométriques
aux enfants grâce au toucher. Comme l’énoncent les Instructions Officielles à propos de la
découverte des formes, « l’approche par le toucher (par exemple, les yeux bandés) complète
l’approche visuelle ».
Pour des enfants de 3 ans, cette approche paraît plus ludique puis qu’elle permet la
manipulation et implique un ressenti chez les enfants.
Plan de la séquence :
*1ère séance : découverte des formes géométriques
Objectif : reconnaître, classer et nommer des formes géométrique suivantes : le rond, le
triangle et le carré.
*2ème séance : le Kim des formes
Objectif : découvrir et reconnaître, par le toucher, les formes géométriques (le rond, le carré et
le triangle).
→ Séance spécifique au toucher
*3ème séance : évaluation orale
Objectif : évaluer les connaissances acquises lors des séances précédentes.
Je ne détaillerai pas la séance 1 qui n’est pas une séance spécifique au toucher.
Déroulement de la séance 2 : (annexe 8)
La situation a été mise en place lors des ateliers tournants de la matinée. Les enfants étaient
par petits groupes de 4-5.
Sur la table étaient installés des ronds, carrés et triangles et des emporte- pièces plats
représentant les trois formes.
Chaque enfant avait à sa disposition les 3 formes et l’emporte -pièces. Je les ai laissé
manipuler les formes à leur guise.
21
Après 5 minutes, nous avons regardé ce qui avait été fait. Chaque enfant a inséré les 3 formes
au bon endroit. Nous avons présenté les formes : « comment s’appelle cette forme ? ». Tous
les enfants ont été capables de les nommer correctement.
Ensuite, j’ai présenté la situation aux enfants : « nous allons mettre les carrés, les ronds et les
triangles dans le sac à secret. Je vais mélanger et vous devrez choisir une forme et dire ce
que c’est. Attention, il ne faut pas regarder .Vous avez seulement le droit de toucher avec la
main. »
Le sac à secret était fermé et ne laissait passer que la main. Il contenait deux carrés, deux
ronds et deux triangles. Chacun leur tour, les enfants introduisaient la main dans le sac et
saisissaient une forme. Ils devaient dire ce qu’ils avaient dans la main.
Après cette phase de découverte, j’ai demandé aux élèves de retrouver une forme en
particulier. Une contrainte supplémentaire était introduite. Pour être certaine qu’il n’y avait
pas de doute ou de confusion sur la forme demandée, l’enfant la montrait sur l’emporte –
pièces. « Maintenant, montre-nous un rond »
Une fois la forme découverte dans le sac et montré aux camarades, les autres enfants
validaient ou non la réponse, ce qui leur permettait de verbaliser. « Non, ce n’est pas un rond,
c’est un carré ! » a affirmé une élève.
Je questionnais l’enfant pour qu’il essaie d’expliquer sa démarche de recherche dans le sac :
mais à cet âge, il leur est très difficile d’expliquer. « Comment as-tu fait avec ta main ? » « Je
l’ai pris dans le sac ».
Attitudes des élèves :
Ils étaient très enthousiastes et sont entrés avec plaisir dans l’activité. De plus la notion de
secret les a motivé même si quelques enfants étaient tentés de regarder dans le sac malgré la
consigne. Certains fermaient les yeux naturellement, acceptant de rentrer dans le jeu.
Ils étaient très attentifs à la recherche d’un camarade et attendaient leur tour avec impatience !
Toutefois, ces enfants de Petite Section avaient des difficultés à exprimer la façon de
procéder.
Voici quelques explications : « je l’ai touché », « je l’ai pris dans le sac », « j’ai cherché », « j’ai
repéré que c’était carré ».
Un seul élève en sortant un triangle du sac a répondu : « j’ai trouvé que c’était un triangle car il
est pointu et le triangle a trois angles. ». Cette réponse est très exceptionnelle pour un enfant de
quatre ans !
Rôle de la maîtresse :
J’incitais les enfants à exprimer leur ressenti et les questionnais sur la manière de découvrir la
forme. Je contrôlais le respect des règles du jeu (ne pas tricher, ne pas regarder dans le sac).
Bilan de la séance :
En mettant les enfants en situation d’apprentissage, je me suis rendue compte que la
reconnaissance des formes par le toucher n’est pas chose facile pour des enfants de 3 ans.
Certains ont rencontré des difficultés car toucher apparaît pour eux un obstacle
supplémentaire. Toutefois, presque tous savaient reconnaître visuellement le rond, le carré et
le triangle. Ces notions avaient été abordées à plusieurs reprises par la collègue que je
remplaçais.
22
Cependant, cette séance n’était pas bien adaptée à l’âge des enfants de Petite Section en ce qui
concerne le langage. Même si ces élèves parlaient déjà très bien, pour la plupart, au mois de
mars, exprimer une sensation et une procédure est très difficile pour eux.
Cette activité a posé des problèmes à certains enfants qui ne réussissaient pas à palper.
L’objectif était de faire prendre conscience qu’il ne suffit pas d’effleurer l’objet pour le
nommer.
Malgré tout, ils ont pris beaucoup de plaisir ; certains voulaient même recommencer le
lendemain.
Ainsi l’éducation du toucher nécessite un réel apprentissage. Ce n’est pas une opération innée
chez les jeunes enfants. C’est pourquoi il faut mettre en place des situations dès la Petite
Section de maternelle.
Les enfants n’avaient pas encore travaillé et développé leur sens du toucher à travers diverses
activités. C’est pourquoi je pense qu’ils ont rencontré des difficultés pour verbaliser, pour
faire émerger des explications. Un travail réparti sur les diverses périodes de l’année
permettrait aux enfants de mieux appréhender le vocabulaire du ressenti.
Ainsi j’ai décidé d’approfondir le thème en faisant travaillé d’autres domaines d’activités.
3. la découverte sensorielle grâce à la motricité.
Comment montrer que l’organe du toucher ne se réduit pas seulement à la main ? Après les
activités mises en place dans la classe, j’ai décidé d’explorer les sensations tactiles grâce à la
motricité.
J’ai voulu faire prendre conscience que le pied est également important. Ainsi, j’ai mis en
place un parcours tactile. Ce type d’atelier est une véritable expérience sensorielle qui
mobilise le corps et qui encourage la découverte du monde.
Le parcours tactile
L’objectif était d’adapter ses déplacements et d’exprimer ses sensations ressenties.
Déroulement de la séance 1:
Les enfants sont assis au centre de la salle de motricité et observent les quatre ateliers
tournants installés.
Présentation des ateliers (annexe 9)
Les tapis mous avec deux paillassons
La poutre en zigzag
Le chemin de moquette
Les ronds de bois
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Les enfants émettent des hypothèses sur les divers ateliers. « Que peut-on faire sur cet atelier
? ». Deux élèves proposent des actions possibles que je retiens. Puis je reprends les
consignes :
« Vous allez traverser la poutre en zigzag sans tomber.
Vous marchez sur les tapis, comme un petit chien, à quatre pattes.
Vous allez traverser la rivière aux crocodiles, en mettant le pied gauche sur le rond
en bois bleu et le pied droit sur le rond en bois rouge.
Vous continuez à traverser la rivière en sautant à pieds joints sur les carrés de
moquette. Vous ne devez pas vous faire manger par les crocodiles donc il ne faut pas mettre
un pied dans la rivière. »
Phase 1 :
Dans un premier temps, les enfants sont en chaussons. Ils évoluent sur les divers ateliers qui
tournent toutes les 5 minutes. Je me déplace vers les groupes et questionne les élèves sur leurs
ressentis ; leur réponse est unanime : « on ne sent rien ».
Après un retour collectif, je leur demande pourquoi ils ne ressentent rien: « c’est parce qu’on ne
touche pas avec la main ! »,
« C’est normal, on marche et on touche avec les pieds, mais on est en chaussons.»
suggère « qu’il faut enlever les chaussons. »
Une enfant
Phase 2 :
Ainsi, les enfants se déchaussent et recommencent le parcours, cette fois-ci en chaussettes.
Après être passés aux quatre ateliers, ils constatent qu’ « on sent un peu ».
Quelques-uns expliquent ce qu’ils ont ressentis : « quand je saute sur la moquette, ça fait
doux ; mais quand je marche sur le paillasson, ça pique un peu ! ».
« La rivière en bois est un peu dure ! »
Déroulement de la séance 2 :
Cette séance reprend les ateliers installés lors de la séance précédente. L’objectif est de
découvrir que le pied et la peau permettent de ressentir des sensations tactiles. Ce parcours a
été réalisé par mes soins mais si j’avais eu plus de temps, les enfants auraient fabriqué euxmêmes les dalles. En plus de la texture, ils auraient travaillé la matière, ce qui est important en
PS.
Phase 1 :
Après avoir fait un rappel de la séance 1, je propose aux enfants de retirer les chaussettes et de
refaire le parcours pieds nus.
Leurs réactions sont immédiates et plus vives : « je sens beaucoup », « la moquette, c’est
doux », « Ouille, ça pique sur le tapis [brosse]» « ça fait mal »
Phase 2 :
Pendant que trois groupes travaillent, le quatrième découvre un nouvel atelier : les enfants ont
les yeux bandés et marchent sur des choses inconnues. Chacun leur tour découvre des
matériaux sous leurs pieds, donnant la main à deux camarades situés de part et d’autre (pour
les aider à avancer).
Le but est d’isoler le sens tactile pour exprimer les sensations.
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Attitudes des enfants :
Lors de la séance1, ils ont aimé se déplacer sur les divers matériaux sauf sur le paillasson. Ils
passaient rapidement; certains même tentaient de l’éviter en allongeant les pas !
Ils sont impatients d’attendre leur tour. Toutefois, deux fillettes, très timides, ont hésité à ôter
les chaussettes. Elles ont attendu que quelques enfants débutent les ateliers pour se rendre
compte que c’était amusant et qu’elles pouvaient le faire également.
Lors de la phase 2 de la séance 2, pied nu et en aveugle, certains enfants ont eu une petite
réticence pour avancer sur le chemin, ne sachant pas ce qu’ils allaient découvrir sous leurs
pieds.
Rôle de la maîtresse :
J’ai, si besoin, aidé les enfants à effectuer les déplacements demandés (sur la poutre), les
encourageais lorsqu’il y avait une appréhension. Durant les ateliers, je les questionnais sur ce
qu’ils ressentent.
Bilan de la séquence :
Le chemin tactile encourage l’envie de découverte et d’exploration du corps. En marchant sur
divers matériaux, les enfants ressentent des sensations différentes car la plante des pieds est
très réceptive.
III
Analyse de ma réflexion
Au cours de mon année de formation et de mes stages en responsabilité, j’ai voulu
mettre en évidence le sens du toucher qui me semble trop souvent négligé par rapport aux
autres sens, notamment la vue.
A travers les séances menées en Petite Section et en Grande Section, j’ai pu constaté que
l’apprentissage du toucher pouvait s’isoler de la vue, même si cette dernière apporte des
informations complémentaires à celles transmises par l’acte du toucher.
En effet, lors des séances de reconnaissance (des formes géométriques, des tissus et des
objets), les enfants avaient recours à la vue pour valider ou non leurs réponses. Le toucher ne
suffisait pas à être certain des résultats et ne permettait pas de s’évaluer.
Exemple : Lors du Kim tactile en MS- GS, les élèves devaient sortir l’objet du sac pour
vérifier qu’il s’agissait bien du même objet que celui présent sur la table. A ce moment, tous
pouvaient valider la découverte de l’ « enfant- chercheur », grâce à la vue.
Les enfants de PS étaient tentés de regarder dans le sac pour découvrir une forme
géométrique : cela prouve que la vue est indispensable pour ces enfants qui n’ont pas
développés leur sens tactile.
Pendant les stages, il est impossible de mettre en place toutes les séances relatives au
toucher. Toutefois, si j’avais eu la classe toute l’année, j’aurai créé un « univers du toucher
» présent en permanence dans la classe : j’aurai installé un mur tactile sur lequel des arbres
tactiles auraient été accrochés. A chaque nouvelle période de l’année, les enfants auraient
construit un arbre avec de nouveaux matériaux afin de découvrir de nouvelles sensations.
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L’objectif de cette activité serait d’adapter son geste aux matériaux, d’exprimer de nouveaux
ressentis. Ce mur tactile peut développer la curiosité tactile des enfants des autres classes qui
pourraient venir le regarder, toucher.
De plus, je regrette de ne pas avoir pu faire réaliser des traces écrites par les enfants de
MS-GS. Si j’avais eu plus de temps (car les séances se déroulaient seulement lors du
décloisonnement), chaque élève aurait réalisé son « livre des mains » : sur chaque main en
carton, les enfants auraient pu coller une matière représentant les sensations tactiles
découvertes lors des séances.
En prolongement de la séance « les mains dans le dos » avec les MS-GS, j’aurai pu faire
une comparaison des zones du corps : les enfants auraient ressentis les objets sur diverses
parties du corps (visage, bras, dessus de la main,…). Les parties les plus réceptives auraient
été mises en valeur.
Un autre problème est survenu lors des séances : les difficultés liées au vocabulaire.
Certaines activités auraient mieux fonctionné avec des enfants plus âgés, dans la mesure où
ces derniers ont un langage plus élaboré et plus riche. Par exemple, les MS ont rencontré des
difficultés à expliquer les notions liées à la texture (doux/mou/dur/piquant). Lorsque j’ai
demandé à un élève de MS de dire ce que « ça lui fait quand il touche un objet doux », il a
répondu tout naturellement, « c’est doux » !
Au quotidien, l’éducation au toucher se met en place par beaucoup de moments de
langage et de petites manipulations. L’élève de maternelle a besoin de toucher,
d’expérimenter. Dans la pédagogie sensorielle, la phase d’expérimentation est d’autant plus
importante qu’elle constitue la condition sine qua non pour qu’il y ait activité. En effet, le
fondement même de toute activité sensorielle est l’exploration.
Toute situation nouvelle peut être source d’apprentissage sensoriel.
Les enfants de Petite Section étaient très attentifs au moindre changement vestimentaire de
ma part, de leur camarade ; ce qui entraînait l’action de toucher des tissus de vêtements
inconnus.
A l’automne, il est possible, après une sortie dans la nature, de créer un herbier du toucher en
ramassant des noix, des plumes d’oiseaux, de la mousse, des bogues de chataignes,…
On peut également offrir aux élèves de quoi toucher, palper avec divers jeux mis à leur
disposition : coin de transvasement, dominos tactiles, sacs en tissus remplis.
En prolongement de toutes les activités mises en place, il est souhaitable de prévoir
d’autres ateliers mettant en évidence les autres renseignements sur le monde
extérieur qu’apporte la peau : celle-ci détecte des informations thermiques (le froid, le chaud),
des stimulations excessives provoquant la douleur. Par ce contact avec l’environnement, la
peau fonctionne comme un véritable système d’alarme très utile : ce sens nous protège des
agressions extérieures. Pour éviter la mise en marche de cette alarme, il faut apprendre à faire
la distinction entre ce que l’on peut toucher et ce que l’on ne peut pas. Cet apprentissage, qui
doit se prolonger en cycle 2 et cycle 3, entre dans le cadre de la sécurité.
Lors de ce mémoire, j’ai mis en évidence le caractère transdisciplinaire de l’éducation
du toucher : sciences, motricité et mathématiques. Cependant, je n’ai pu faire découvrir et
développer les sensations tactiles au travers des arts visuels, de la lecture. En effet, présenter
un album tactile permet de développer le toucher mais aussi d’enrichir le vocabulaire en
26
employant le mot juste pour définir telle ou telle qualité. Les enfants apprécient d’écouter une
histoire et de toucher en même temps les matières. J’aurai aimé avec les GS travailler le
braille, suite à l’album Ce que Thomas voit. Mais ce genre d’album écrit à la fois en braille et
en alphabet classique est difficile à se procurer. Un élargissement sur le thème des aveugles
est possible.
Un travail a été fait, dès le début, avec les MS et les GS sur les termes sentir et ressentir.
En effet, le premier, fréquemment utilisé pour exprimer ce que nous dit la peau, est trompeur
puisqu’il concerne le sens de l’ouie et non du toucher.
Conclusion
L’éveil des sens est un objectif non négligeable dès la petite Section de Maternelle.
Plus l’enfant est jeune, plus il a recours à ses sens pour découvrir ce qu’il l’entoure. Ses
performances encore réduites en matières de langage oral, l’amènent à utiliser un autre vecteur
d’apprentissage et c’est vers le corps qu’il se tourne.
Notre vie quotidienne est rythmée par l’utilisation du toucher, alors autant bien la
développer dès le plus jeune âge ! A nous, adultes, de créer des environnements familiers et
scolaires où l’enfant pourra s’enrichir de qualités multiples, variées et équilibrées.
L’important, c’est de pouvoir offrir à l’enfant un environnement lui permettant
d’expérimenter des
variétés sensibles du réel. Chez un jeune enfant, la phase
d’expérimentation est primordiale. En effet, le fondement même de toute activité sensorielle
est l’exploration. Le rôle de l’enseignant est donc d’aider les enfants à toucher, à développer
leur sens tactile et à décrypter les informations qu’engendre cet acte mais aussi à les mettre en
mots.
En faisant appel à la pédagogie du toucher, l’école se donne pour objectif de
développer chez chacun le maximum de ses compétences. Le sens du toucher doit être
considéré comme un atout pour parvenir aux savoirs, savoir- faire et savoir- être ; mais cette
pédagogie fondée sur le sens tactile ne doit pas se faire omniprésente dans la classe. Il ne faut
pas oublier que chacun développera son sens du toucher, et ses sens en général, à travers ses
besoins et ses désirs. Certains enfants restent fermés, complètement ou partiellement à
27
l’éducation par les sens ! L’école se doit également de développer les autres sens afin que tous
puissent optimiser leurs capacités sensorielles.
L’objectif de l’éducation du toucher est de multiplier, avec les enfants de Cycle I, les
situations afin de les aider à verbaliser leurs ressentis car trop peu réussissent à exprimer leurs
sensations tactiles. Le travail autour du langage est important et nécessaire, d’autant plus que
ces élèves sont en plein apprentissage de la langue orale.
Les diverses activités, dans les classes, ont prouvé que le sens du toucher fait l’objet
de réels apprentissages, et que ces derniers procurent un plaisir chez les enfants. Ils
s’investissent activement dans chaque jeu et les séances sont vécues avec joie et
enthousiasme.
Bibliographie
Ouvrages :
Ministère de la Jeunesse, de l’Education nationale et de la Recherche - Bulletin officiel du
Ministère de l’Education Nationale et du Ministère de la Recherche
Hors- série n° 1 du 14/02/2002
Ministère de la Jeunesse, de l’Education nationale et de la Recherche - Pour une scolarisation
réussi des tout-petits
Documents d’accompagnement des programmes- CNDP - 2002
L’école avant 6 ans, guide du maître
Collection Tavernier 1990
CRDP Nord- Pas de Calais- A la découverte du monde vivant- cycle1
2002
H. BRULE - Les moins de quatre ans à l’école maternelle
Collection Bourrelier - 1979
B. MISSANT - Des ateliers Montessori à l’école. Une expérience en maternelle.
28
Collection Pratiques et enjeux pédagogiques - 2003
G. JULLEMIER- Jeux mathématiques et sensoriels à l’école maternelle. Jouer, c’est très
sérieux.
Hachette -1989
J. GUICHARD - Observer pour comprendre les sciences de la vie et de la terre.
Collection « Pédagogie pour demain Hachette » - 2002
D. JASMIN- J M .BOUCHARD Graines de sciences 3
Edition Le Pommier - 2001
Revues :
JDI, revue n°10- juin 2004 « les sciences par les sens »
Cahiers Pédagogiques, « des sens à la sensibilité : quelle éducation?» revue n°374 - mai 1999
Annexe 1
La coupe de la peau
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Cycle : I
Niveau: MS-GS
Objectifs : faire émerger le vocabulaire relatif au toucher (dur/mou,
doux/piquant)
Compétences visées :
Etre capable d’exprimer ses sensations.
Oser toucher sans voir
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Savoir isoler un sens : le toucher
Matériel : affiche de la comptine Que fait ma main?
Sacs opaques– papiers de verre- coton- cylindres évidés en PVC–
coquillages- coquetiers en bois- ronds en bois- feutrine- balles mollesacs de riz– anneaux
Découverte du
monde
Durée : 25 mn
Type de
fonctionnement :
10 E
décloisonnement
Observations :
Déroulement .
10’
*phase 1: approche du toucher
Lecture de la comptine Que fait ma main?. De quoi parle la poèsie? Quels
gestes fait ma main? C’est doux, ma main caresse, elle pince, elle chatouille. Que
peut-elle faire d’autre? Gratter, griffer, taper…
A quoi servent les mains? à toucher.
Puis présentation d’un doudou: j’ai amené un doudou, vous, vous êtes grands
avez-vous toujours un doudou? Pourquoi ça s’appelle un doudou ? Pourquoi
l’aimez-vous? C’est doux, on se caresse la joue, le nez avec le doudou.
25’ * phase 2: jeu du Kim
Je cache dans des sacs opaques les divers objets et place leur
« double » sur la table devant les E.
Nous allons jouer: vous allez chacun votre tour mettre la main dans le sac,
choisir un objet sans le lâcher et dire ce que vous ressentez. Après, vous
montrerez l’objet ( sur la table) que vous pensez avoir reconnu.
Les E jouent chacun leur tour. Valider les propositions en sortant
l’objet du sac.
Les E doivent faire des phrases. Le PE sollicite les E pour leur faire
exprimer ce qu’ils ressentent.
5’
* bilan:
Comment étaient ces objets? Ils étaient doux, piquants, durs, mous
Prolongement : Introduire notion de lisse/rugueux si les 4 termes sont
bien assimilés
Observations, remarques :
Si confusion dans les objets, proposer objets dont la texture est bien
différente
Annexe 2
Le kim du toucher
Fiche de préparation
Annexe 3
Fiche de préparation
Les mains dans le dos
Cycle : I
Niveau: MS-GS
Découverte du
monde
Objectifs : prendre conscience que la paume et les doigts donnent des
renseignements sur la consistance d’un objet
Compétences visées :
Etre capable d’exprimer ses sensations.
Emettre des hypothèses,les vérifier
Réinvestir le vocabulaire
Matériel :
papier de verre- coton- rond en bois- plume- crayon de papier bien
taillé- rond en bois
affiche (divisée en 5 lignes et 2 colonnes) accrochée au TN
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Durée : 25 mn
Type de
fonctionnement :
10 E
décloisonnement
Déroulement : au coin regroupement.
Tous les enfants assis sur le banc face au tableau. Rappel de la séance
dernière : « on a touché des objets et on les a cherché dans un sac. »
Consigne : « Aujourd’hui, vous allez jouer à un nouveau jeu : je vais
caresser votre main avec un objet. La main sera derrière votre dos et
vous ne devrez pas regarder derrière vous. Vous direz ce que ça vous
fait, ce que vous ressentez. »
Passer derrière chaque enfant et effleurer la paume avec l’objet
mystère. Observer leur réaction.
Faire verbaliser : dire le ressenti, de quel objet il s’agit.
Sur l’affiche, écrire ce que disent les E à chaque objet : sensations,
nom de l’objet
Prolongement :
Introduire d’autres objets.
Un E choisit un objet dans la classe et le fait découvrir aux autres
(même démarche)
Annexe 4
Le jeu « les mains dans le dos » en MS - GS
Voici les réponses qu’ont données les enfants en découvrant l’objet mystère.
La plume
Ça chatouille – c’est comme de la laine – c’est rigolo
C’est tout doux – on sent les petits poils
C’est une plume
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Le papier de verre
Ça gratte – ça pique - ça fait mal – c’est un peu grattant
Un tapis comme devant la porte
Le crayon de papier
Ça pique – ça fait une pointeUn petit ciseau – un coquillage – un stylo – un crabe
Le coton
C’est tout doux
Un doudou – du coton
Le rond en bois
C’est dur –
Un jouet – un caillou
Annexe 5
Grille d’évaluation MS/GS
Le toucher
A ramené un objet
correspondant à la
texture demandée
A compris la
consigne orale
Océane
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Réutilise le
vocabulaire
Florian
Mélina
Cycle :1
Niveau :PS
Domaine disciplinaire : mathématiques
Objectifs : exercer et affiner le sens tactile
Susciter le sens tactile
Compétences visées :
* décrire, comparer et classer des perceptions tactiles
* différencier et classer des objets en fonction de leurs
caractéristiques
Matériel :
1 bandeau
3 pairs de morceaux de tissus ayant la même forme, prélevés dans
le même morceau de tissus (feutrine, peau retournée, velours
côtelé)
Durée : 10 mn
Type de fonctionnement :
en ateliers libre d’accès
Déroulement de la séance :
Observations :
2 ou 3 paires de tissus pour commencer.
Présentation de l’activité par la PE.
Nous allons faire un jeu avec ceci. Qui peut nous dire ce que c’est ? des
morceaux de tissus. Qui connaît ces tissus ?
Je vais vous bander les yeux.
Le but du jeu est de retrouver les 2 morceaux identiques (qui sont pareils).
Comment allez-vous faire pour découvrir ? toucher avec les doigts, avec le
visage.
Bander les yeux d’un enfant. Les autres sont spectateurs.
Je présente un morceau de tissus à l’enfant qui le touche et tente
de dire ce que c’est.
Après découverte du 1er tissus, doit retrouver son pair sur la table.
Validation ou non par les camarades puis par l’E concerné qui a
ôté le foulard.
Verbalisation : ce que je ressens ce que c’est, à quoi ça me fait
penser.
Evaluation :
L’enfant réussit à retrouver les deux morceaux identiques
Prolongement :
Rajouter une paire quand le jeu devient trop facile.
Proposer des tissus peu différents au toucher.
Remarques,
Laisser les E jouer en autonomie (les camarades valident avec la
vue)
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Eliott
Lucille I
Corentin
Lucile
Clémence
Marine
Dylan
Annexe 6
Les paires de tissus
Annexe 7
Jeu des paires de tissus PS
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fiche de préparation
Cycle :1
Niveau :PS
Domaine disciplinaire : mathématiques
Objectifs : reconnaître des formes géométriques simples en
n’utilisant que le sens tactile
Compétences visées :
* décrire, comparer et classer des perceptions tactiles
* reconnaître, nommer des formes simples : carré, rond, triangle
Matériel :
1 sac opaque
3 formes/E : rond, carré, triangle
1 emporte- pièces /E
Durée : 20 mn
Type de fonctionnement :
en petits groupes de 4-5
E
Déroulement de la séance :
Phase 1 : 5’
*installation des E aux tables, devant eux, les 3 formes et
l’emporte- pièces
les laisser manipuler
Observations :
*phase 2 :
observer et vérifier ce qu’ont fait les E : placer les formes au bon
endroit ds l’emporte- pièces.
Présenter les 3 formes : « comment s’appelle cette forme ? »
*Phase 3 : présenter la situation : découverte avec la main
« Ns allons mettre les formes ds le sac à secret, les mélanger. Vous allez
choisir une forme sans regarder et dire ce que c’est. Slmt le droit de toucher
avec la main. »
*Phase 4 :
demander aux E de trouver telle forme ds le sac. Avant vérifier
que la forme est bien connue en la montrant sur l’emporte- pièces.
Evaluation :
Retrouver les formes en n’utilisant que le toucher. Nommer les
formes.
Prolongement :
.
Remarques,
Questionner les E sur la matière de trouver la forme demandée.
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Annexe 8
Les formes géométriques par le toucher
fiche de préparation
Annexe 9
Le parcours tactile
Cycle : I
Niveau : PS
Objectif :
Réaliser un parcours tactile et exprimer les sensations tactiles.
Compétences visées :
Réaliser une action que l’on peut mesurer
Adapter ses déplacements aux différents types d’environnement
Matériel :
3 tapis –brosse(paillasson)+ 3 tapis mous
8 sacs de graines
6 carrés de moquette
3 tunnels
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fiche de préparation
Domaine : motricité
Durée : 25 mn
Type de fonctionnement:
¾ de la classe
Déroulement : 4 ateliers tournants
Les E ôtent leurs chaussons et les chaussettes. Ils les placent
sous le banc.
Les E s’assient au centre de la salle et observent le parcours
installé. Le PE les fait verbaliser : que voit-on ? qu’y-a-t-il
d’installé ?
Sur chaque atelier, 2 E proposent et montrent une action
possible.
Retenir les propositions des E. Expliquer les actions à chaque
atelier.
Le PE fait 4 équipes et les E s’installent devant chaque atelier.
Rappeler les consignes de sécurité : ne pas courir, ne pas faire
mal aux autres.
 Les paillassons+ tapis mous: marcher– traverser le tapis.
 Les plaques de bois : marcher pied nu en alternant pied
G/ pied D
 Les carrés de moquette+ sacs de graines : sauter à cloche
pied puis marcher pour traverser la rivière sans se faire
manger par le crocodile (ne pas mettre le pied en dehors
de la moquette et du sac.)
 Marcher sur les tunnels posés sur le flanc : ne pas
tomber, garder l’équilibre.
A chaque atelier, Le PE observe les E et les questionne sur leurs
ressentis tactiles.
Prolongements :
Remédiations, observations :
Annexe 10
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Observations :
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Quelles activités mettre
en place pour
développer une éducation
tactile à l’Ecole
Maternelle?
Résumé
Je me suis intéressée à l’éducation du toucher à l’Ecole Maternelle car les jeunes
enfants privilégient spontanément leurs yeux au dépend des autres sens, notamment celui du
toucher qui est très important pour une meilleure connaissance de soi et du monde qui nous
entoure.
Je vais tenter de comprendre comment l’éducation du toucher doit être développée
pour favoriser la construction des compétences chez les jeunes enfants. La transdisciplinarité
de cette éducation permet une meilleure approche du monde environnant.
Mots-clés
Sensorialité- toucher- Ecole Maternelle- transdisciplinarité - manipulations
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