L`ENFANT IMAGINAIRE (Texte paru dans la revue spirale). L
Transcription
L`ENFANT IMAGINAIRE (Texte paru dans la revue spirale). L
O. ROSENBLUM L'ENFANT IMAGINAIRE (Texte paru dans la revue spirale). L'enfant imaginaire a été conceptualisé dans les années 1970 suite au séminaire de Lacan (1901-1981) sur « le réel, le symbolique et l'imaginaire » qui sont trois instances avec lesquelles on perçoit le monde. Les psychanalystes qui travaillaient dans le champ de le périnatalité ont placé cet enfant imaginaire au coeur du processus des théories sexuelles infantiles, processus qui opère également chez l'adulte. En effet, l'enfant fait appel à notre curiosité infantile. La curiosité infantile (le sexuel infantile, l'enfant imaginaire) va pouvoir accompagner l'enfant dans tout son développement libidinal, jusqu'à ce qu'il soit parent lui-même, et même au delà. Lorsqu'on travaille avec les adultes, on travaille toujours avec l'enfant qui est en eux, c.à.d avec l'image aliénante de leur place d'enfant où ils pensent avoir été mis. Cela vient donc questionner tout le développement libinal, jusqu'à la mort. Jusqu'au milieu du XVIIIème siècle, on peut dire que le bébé, le jeune enfant, est plutôt un être imparfait associé de l'idée de fragilité et précarité. A cette époque, la mortalité était très élevée, on n'investissait donc pas beaucoup l'enfant. D'autre part, on pensait que le nourrisson était une créature imparfaite dont il fallait sauver l'âme. L'enfant était vu comme un petit animal. Il y avait une ambivalence de l'enfant : être vivant, pulsionnel, fardeau, qu'il fallait amener à être utile. A partir du XVIIIème siècle, J.J Rousseau : « l'enfant est un être spontané, innocent, dont il faut respecter les besoins ». l'éducation s'est mise en place, mais une éducation au plus près des besoins de l'enfant. Au XIXème siècle, c'est la révolution Pasteurienne. Les enfants meurent beaucoup moins, les mères aussi. La révolution du Xxème siécle, liée à la psychanlyse qui a mit au coeur du développement de l'enfant la libido et la relation parent-enfant (d l'intime avec l'enfant).a permit de faire émerger une dissociation avec la sexualité de l'adulte au service du développement et le projet de l'enfant. La sexualité de l'adulte est donc dissociée de la libido de l'enfant. Au XXIème siècle, la place de l'enfant se trouve dans l'équilibre de l'adulte. Avoir un enfant est un droit. On dissocie la sexualité de l'adulte au service du développement et le projet de l'enfant. La sexualité de l'adulte est donc dissociée de la libido de l'enfant (sexualité et parentalité chez l'adulte ne sont plus si intimement liés). I. L'ENFANT IMAGINAIRE : CONCEPTIONS THEORIQUES Le concept de représentation L'image hallucinée a des rapports étroits avec le désir. Exemple : lorsqu'on a affaire à des amlades mentaux qui délirent, on dit classiquement « qu'on ne délire que dans le domaine de son désir ». Le délire n'est jamais par hasard, il est structuré. Le délire a un rapport avec des processus hallucinatoires : les représentations. Le cerveau a besoin de ces représentations, il ne cesse jamais de fonctionner, même lorsqu'on ferme les yeux, il y a toujours une image, une représentation. On hallucine donc sans arrêt, et nous hallucinons par rapport à notre désir. On dit classiquement que le désir tend par nature vers l'hallucination de son objet pour en tirer une satisfaction : le plaisir des yeux. Pour que le désir puisse trouver une satisfaction, il va créer une image ; l'image n'est donc que la façon satisfaite qu'un désir a de son objet. Exemple le bébé qui tête va ensuite sucer son pouce alors qu'il n'a plus faim, pour poursuivre le bon sein de façon hallucinatoire et pouvoir continuer à penser. Il y a donc un lien entre les processus de pensée et la satisfaction du désir à travers l'auto-érotisme ici. L'image peut donc se placer entre le désir et l'objet du désir. Lacan, dans les années 1974-75 dit (dans son séminaire sur le réel etc.) : « l'imaginaire est à entendre à partir de l'image, mais dans un registre aprticulier : le leurre ». C.à.d l'illusion, l'image est un leurre, une construction. Ce leurre (l'hallucination dans laquelle on se trouve) est ce qui va faire en sorte que l'on va pouvoir s'identifier. L'identification opère dans le leurre, dans le désir. Donc, l'identification se fait toujours à partir d'une construction imaginaire, d'un leurre, d'une illusion. On peut dire que dans la relation intersubjective, il y a quelque chose de factice qui s'introduit toujours : la projection imaginaire de l'un sur le simple écran que devient l'autre (il y a donc une transformation, le processus n'est pas direct). Dans la relation intersubjective, il y quatre éléments : – Une méconnaissance. Lorsque l'on est avec l'autre, il y a quelque chose que l'on ignore de soi-même. – Une aliénation. Lorsque l'on est avec l'autre, on est aliéné par ce qu'on pense que l'autre pense de nous. – L'amour. – L'agressivité (on a envie que l'autre nous appartienne, de le détruire). Lacan a formalisé cela dans le concept du « stade du miroir ». Fait que l'enfant puisse jubiler de se voir dans le miroir dans les bras de l'autre. « L'enfant se construit originairement (d'emblée) dans la méconnaissance quant à la vérité de son être propre et sa profonde aliénation de l'image qu'il va donner de lui-même ». Il va y avoir une sorte de nouage à partir de cette image formatrice (originaire) de l'imaginaire. « Je suis l'enfant de ma mère » est une construction, c.à.d l'imaginaire originaire d'avoir été l'enfant de sa mère. Etre l'enfant de sa mère, c'est être nommé, noué dans quelque chose d'imaginaire avec la nomination, c.à.d dans une chaîne symbolique, en étant désigné, donc inclut dans une chaîne signifiante. Donc aliénation, méconnaissance de l'autre et nouage. A partir de là, on peut déduire que l'homme n'a jamais un accès direct à son propre désir. On peut dire que le désir de l'être humain, c'est toujours le désir de l'autre (notre désir passe toujours par le désir de l'autre). L'imaginaire s'inclue dans la relation au désir de l'autre, dans un nouage avec du symbolique. On peut donc avoir accès au désir uniquement par l'imaginaire (doit passer par la construction de l'imaginaire). On n'appréhende jamais le désir pur, le désir propre. II. ENFANT IMAGINAIRE ET LIENS INTERGENERATIONNELS Serge Lebovici (1915-2000) a développé cette notion d'enfant imaginaire qui se déploie dans le champ du préconscient (rêveries diurnes, fantaisies), champ qui est tissé de souvenirs mis en latence. Ces souvenirs sont réactivés par les rêveries (= l'enfant imaginaire). Exemple pour la mère : elle va rêver de son futur enfant, enfant imaginaire, censé combler le narcissisme de la mère. Généralement, c'est l'enfant qui vaessayer de combler l'attente des parents. Le but du clinicien sera de réduire l'écart entre l'enfant imaginaire des parents et la réalité. L'enfant imaginaire a à voir aussi avec l'inconscient, car il ignore le temps. L'inconscient, c'est l'éternité (on souhaite mourir le plus tard possible, on pense que l'on est éternel). L'enfant est une part du lien entre inconscient et préconscient, l'enfant est le gage de l'éternité. Selon Lebovici, l'enfant fantasmatique est un enfant qu'on ne peut appréhender directement, enfant de notre propre inconscienr, il n'y a pas d'accès direct. On ne peut l'appréhender qu'à l'aide des techniques psychothérapiques et psychanalytiques, c.à.d lorsque l'on met en place la névrose de transfert. On peut alors avoir accès à cet enfant fantasmatique à travers ce processus. L'enfant fantasmatique est l'enfant que la mère fera avec son propre père : l'enfant oedipien (construction, ce n'est pas la réalité...). Cela veut dire que c'est l'enfant qui va réaliser le voeu oedipien de pouvoir avoir un enfant du père. L'enfant fantasmatique rejoue le propre infantile des parents, il va rejouer le drame oedipien, c.à.d en quoi pour un enfant ses parents sont l'objet de sa passion. C'est donc l'enfant qui est passionné par les figures parentales, et non le contraire. Quand les parents aiment leurs enfants, c'est leur propre infantile qui agit, c'est eux-mêmes qui ont voulu être aimés par leurs parents. On parle alors de passion amoureuse de l'enfant pour ses parents. Le temps de l'enfant est le temps de la passion. Pour lui, les parents sont des objets sexuels (et non pas l'inverse), il va pouvoir s'accaparer l'adulte (prend le sein de l'adulte, veut être caressé, insatiable quant à ses demandes d'amour). L'enfant fantasmatique est donc l'enfant de ce drame oedipien mais qui est inconscient. Lorsque les parents rencontrent l'enfant, ils vont réactualiser leur enfant fantasmatique inconscient vis-à-vis de l'enfant qui est en face d'eux. Quand les parents sont avec un enfant, ils vont mettre en place plusieurs personnages. L'enfant ne représente pas l'enfant. Lorsqu'un enfant naît, il ressemble à tout le monde : il a les yeux de sa mère, la bouche de son père etc., ensuite il se transforme, les identifications que l'on met sur l'enfant changent, car il va occuper des images imaginaires différentes chez les parents. Nous sommes dans cette notion de théâtre identificatoire avec les différents personnages. Le propre de ces identifications et des rêveries imaginaires (déploiement de la rêverie) se déploie lorsque qu'il y rencontre et dialogue entre les parents et l'enfant. III. L'ENFANT MERVEILLEUX Freud l'a introduit dans « Pour introduire le narcissisme » qui décrit l'amour des parents envers sa majesté le bébé. « Il est si touchant et si enfantin, que l'amour pour le bébé n'est rien d'autre que leur narcissisme qui vient de renaître ». Serge Leclaire (Livre « On tue un enfant ») parle du travail consatnt d'une force de mort, celle qui consiste à tuer l'enfant merveilleux qui, de génération en génération, témoigne des rêves et désirs des parents. « Il n'est de vie qu'au prix du meurtre de l'image première dans laquelle s'inscrit la naissance de chacun ». Pour lui, il s'agit de mettre à mort ce qui prétend rendre compte de notre filiation de façon univoque. Donc, tuer l'enfant merveilleux, c'est accpeter de se décentrer du mythe aliénant da la connaissance de l'originaire pour s'inscrire dans le champ des identifications. But : quitter le pied d'estal d'enfant merveilleux, la place dans laquelle il est aliéné. Il faut le décentrer du narcissisme primaire (se construit à partir du narcissisme de l'autre). L'enfant merveilleux est censé combler toutes les attentes du narcissisme des parents. Le travail du clinicien sera donc de l'aider à sortir de cet état d'enfant merveilleux, tâchel difficile car il faut faire un travail de désillusion, ne plus penser que l'on a tété l'enfant merveilleux (sinon, il faudra toujours réparer cet enfant). Une façon de sortir de là est de sortir de l'originaire. L'originaire est quelque chose de très attractif (nous sommes attirés par l'origine, par le lieu d'où l'on vient). En tant que clinicien, on doit permettre à l'enfant, à l'adulte ou aux parents de pouvoir avoir des images identificatoires, de pouvoir introduire des identificatoires pour sortir de l'attraction originaire, imaginaire. Nous devons pouvoir offrir nous-même des images identificatoires. En tant que clinicien, on doit s'offrir comme écran auquel le patient va pouvoir s'identifier (on va représenter quelqu'un pour lui), il faut accepter de jouer plusieurs personnages. On va offrir des identifications croisées afin de mettre en place une scène, un théâtre, qui va pouvoir l'extraire de la place où ils pensent avoir été mis. Ce qui compte, c'est de travailler avec les représentations fantasmatiques que le patient a, sa façon de raconter l'histoire en s'identifiant à nous = mise en mouvement par l'identification que le patient va halluciner sur nous. C'est l'effet cathartique. Il faut qu'il y ait de la méconnaissance pour pouvoir halluciner car c'est à partir du moment où l'on ne voit plus rien que l'on voit, c'est dans une méconnaissance que l'on voit les choses, que l'on peut faire naître quelque chose de nouveau. Nous devons remettre du mouvement là où le patient est resté figé ; tuer l'enfant merveilleux, imaginaire, du narcissisme primaire, c.à.d en faire le deuil car souvent les enfants tiennent à garder cette place. L'infantile qui est à l'oeuvre tout au long de la vie est quelque chose que l'on doit utiliser comme carburant pour aller revisiter les illusions, la méconnaissance, le conflit, les drames infantiles, c.à.d le côté passionnel. Cela va créer des situations aliénantes = créer des identifications dans lesquelles l'adulte va pouvoir se mouvoir, qu'il puisse occuper autant de places qu'il le peut, mais pour cela, on doit accepter de jouer ces différents rôles.