La dépense énergétique

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La dépense énergétique
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La dépense énergétique
Collège des Enseignants de Nutrition
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2010-2011
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Table des matières
I Postes de dépense énergétique ........................................................................................................4
I.1 Le métabolisme de base et la dépense énergétique de repos .................................................4
I.2 L’énergie dépensée pour l’activité physique .......................................................................... 4
I.3 L’effet thermique des aliments ................................................................................................ 4
II Méthodes d’évaluation de la dépense énergétique ......................................................................5
II.1 La calorimétrie directe ........................................................................................................... 5
II.2 La calorimétrie indirecte ........................................................................................................ 5
II.3 La méthode à l’eau doublement marquée .............................................................................5
II.4 Les méthodes indirectes ..........................................................................................................6
II.5 Estimation la dépense énergétique totale ..............................................................................6
III Variabilité de la dépense énergétique .........................................................................................7
III.1 Variabilité avec la masse .......................................................................................................7
III.2 Variabilité avec l’âge ............................................................................................................. 7
III.3 Variabilité avec le sexe .......................................................................................................... 8
III.4 Grossesse................................................................................................................................. 8
III.5 L'allaitement........................................................................................................................... 9
III.6 Variabilité avec la ration alimentaire .................................................................................. 9
III.7 Variabilité d’origine génétique............................................................................................11
IV Contribution des différents substrats à la DET .......................................................................14
V Le concept de quotient respiratoire ............................................................................................15
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À retenir
La dépense énergétique des 24 h se répartit en trois postes d’inégale importance : le
métabolisme de repos qui représente 60-75 % de la dépense énergétique totale, la dépense
énergétique liée à l’activité physique, dont la part varie en fonction de la nature, de la durée
et de l’intensité de l’exercice, et l’effet thermique des aliments (environ 10 % du total).
La dépense énergétique des 24 h et le métabolisme de repos varient de façon
proportionnelle au poids et à la masse maigre.
Les macronutriments (glucides, lipides, protéines) qu’ils aient pour origine l’alimentation
où les réserves endogènes constituent l’unique source énergétique pour l’homme. Pour être
utilisable, cette énergie doit être transformée en ATP, processus qui consomme de l’oxygène
et produit de la chaleur. La mesure de la consommation d’oxygène (calorimétrie indirecte)
et/ou de la production de chaleur (calorimétrie directe) sont les deux méthodes de mesure
de la dépense énergétique.
À comprendre
Les grandes fonctions (croissance, développement, maintien, reproduction...) ont un coût
énergétique dont la somme est appelée dépense énergétique totale.
L’homme est incapable de fabriquer l’énergie. Pour couvrir ses besoins, il la puise dans le
milieu extérieur ou dans ses réserves à partir des liaisons chimiques des nutriments et la
transforme en une autre énergie chimique utilisable, l’ATP. L’homme est incapable de
consommer l’énergie. Il la restitue au milieu extérieur de façon immédiate ou retardée, sous
une forme identique et chimique (urée, créatinine par exemple) ou différente (mécanique et
thermique). En l’absence de variation du poids ou de la composition corporelle, les apports
énergétiques sont égaux aux dépenses.
Les trois nutriments sources d’énergie sont les glucides, les lipides et les protéines. Ils
contribuent à la couverture énergétique de façon hiérarchisée : les glucides, les protéines
puis les lipides. Leur compartiment de réserves énergétiques a une capacité nulle pour les
protéines, limitée pour les glucides (300 à 600 g) et immense pour les lipides.
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I
POSTES DE DÉPENSE ÉNERGÉTIQUE
La dépense énergétique des 24 heures est la somme de trois grands postes.
I.1
LE MÉTABOLISME DE BASE ET LA DÉPENSE ÉNERGÉTIQUE DE REPOS
Le métabolisme de base correspond à la dépense énergétique minimale pour le
fonctionnement et l’entretien de l’organisme, dans des conditions très standardisées (à jeun,
au repos, à température neutre). Le métabolisme de base est souvent confondu avec la
dépense énergétique de repos. La dépense énergétique pendant le sommeil est inférieure
d’environ 5 % par rapport au métabolisme de repos. Le métabolisme de base correspond à
l’énergie nécessaire pour le fonctionnement des pompes ioniques, des turnover de
substrats, des cycles futiles et pour le maintien de la température. Le métabolisme de base
représente environ 60 % de la dépense énergétique des 24 h.
I.2
L’ÉNERGIE DÉPENSÉE POUR L’ACTIVITÉ PHYSIQUE
Elle correspond à toute forme de dépense énergétique qui s’ajoute au métabolisme de base,
à cause du mouvement. Ceci concerne tout aussi bien les activités de la vie quotidienne que
les exercices physiques plus intenses, qu’ils soient sportifs ou non. Ce poste de dépense
énergétique est le plus variable d’un individu à l’autre, et représente entre 15 % et 30 % de
la dépense énergétique totale.
I.3
L’EFFET THERMIQUE DES ALIMENTS
Afin que l’énergie chimique contenue dans les aliments puisse être convertie en énergie
utilisable, les aliments doivent être digérés, c’est-à-dire transformés en substances plus
simples, puis être stockés par exemple au niveau du foie et du muscle sous forme de
glycogène, ou au niveau du tissu adipeux sous forme de triglycérides.
L’ensemble de ces processus coûte de l’énergie. Ce coût varie avec les voies biochimiques
empruntées. On estime que ce coût représente environ 5 % à 10 % de la valeur calorique
ingérée sous forme de glucides, 20 % à 30 % pour les protéines, et moins de 5 % pour les
lipides.
Dans certaines conditions (administration importante de glucides), une partie de l’effet
thermique des aliments peut être inhibée par les agents bêtabloqueurs, ce qui indique un
rôle du système nerveux sympathique dans son contrôle. On appelle ceci la thermogenèse
facultative. Quelles que soient les possibilités de modulation de l’effet thermique des
aliments, celui-ci ne représente qu’une faible portion (environ 10 %) de la dépense
énergétique totale. Toute modification de l’effet thermique des aliments a peu de chances de
retentir de façon significative sur la dépense énergétique totale et sur la balance
énergétique.
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À ces trois postes principaux de dépense énergétique, il faut ajouter des dépenses
inhabituelles qui, dans certaines circonstances, peuvent constituer un coût important. Il en
est ainsi de la croissance, dont le coût est très faible. Il en est de même du coût nécessaire
aux phénomènes de réparation et de cicatrisation qui peut s’avérer très important par
exemple dans le cas des brûlures étendues. L’ensemble des réactions de défense contre
l’infection et les réactions inflammatoires créent une dépense énergétique qu’il faudra
savoir prendre en compte pour un patient.
L’ensemble de ces dépenses énergétiques constitue la dépense énergétique totale.
II MÉTHODES D’ÉVALUATION DE LA DÉPENSE ÉNERGÉTIQUE
II.1 LA CALORIMÉTRIE DIRECTE
Dans cette méthode, on considère qu’il y a égalité entre production de chaleur et dépense
d’énergie de l’individu. La réalisation de la mesure nécessite une enceinte de taille réduite
et hermétique ou une combinaison calorimétrique, ce qui limite la durée tolérable des
mesures. Cela permet la quantification des différentes composantes de la perte de chaleur.
Cette méthode est actuellement peu utilisée en raison de ces limitations et du nombre réduit
d’institutions disposant de l’équipement nécessaire.
II.2 LA CALORIMÉTRIE INDIRECTE
Cette méthode repose sur l’équivalence entre l’énergie utilisée dans l’organisme et celle
convertie à partir de l’oxydation des nutriments. Il est donc possible d’utiliser la
consommation globale d’oxygène comme témoin de la dépense d’énergie. La mesure des
échanges gazeux respiratoires (consommation d’oxygène, et production de gaz carbonique)
peut être réalisée en chambres calorimétriques, dans des conditions où le sujet pourra
reproduire ses activités quotidiennes. La mesure peut également être réalisée sous une
cagoule ventilée. Cet appareil est plus léger et ne permet que des mesures limitées dans le
temps, (métabolisme de base et effet thermique des aliments). Les échanges gazeux
respiratoires sont couramment mesurés avec un embout buccal en physiologie du sport ; la
dépense énergétique au cours d’un exercice peut être évaluée ainsi.
II.3 LA MÉTHODE À L’EAU DOUBLEMENT MARQUÉE
La méthode à l’eau doublement marquée est également une mesure de calorimétrie
indirecte qui permet de déterminer la dépense énergétique totale dans les conditions
habituelles de vie. Elle consiste à faire ingérer au sujet un mélange d’eau marquée sur
l’oxygène (18O) et sur l’hydrogène (deutérium). L’oxygène est plus rapidement éliminé que
le deutérium et cette différence de vitesse d’élimination dépend de la production de CO2.
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La mesure de la différence d’élimination du deutérium et de l’oxygène 18 dans les urines
permet le calcul de la production de CO2 et de la dépense énergétique.
La détermination est extrêmement simple et non agressive pour le sujet étudié. Il boit de
l’eau marquée par des traceurs stables (donc non radioactifs) et recueille un échantillon
d’urine tous les jours pendant 14 j, alors qu’il mène sa vie normalement. Cette méthode a
cependant l’inconvénient de nécessiter un traceur et des méthodes d’analyse en
spectrométrie de masse très onéreux. Cela limite donc son emploi à des activités de
recherche sur la dépense énergétique de population ciblées dans des conditions de vie
habituelles (personnes âgées, nourris-sons…) ou extrêmes (sportifs, expéditions
lointaines…).
II.4 LES MÉTHODES INDIRECTES
La méthode d’enregistrement de la fréquence cardiaque est basée sur la relation linéaire
étroite existant entre la fréquence cardiaque et la dépense énergétique, pour des activités
physiques d’intensité croissante. Cette méthode peut être utilisée dans des études
épidémiologiques pour évaluer les dépenses énergétiques moyennes de groupes de
personnes. Il suffit alors de disposer d’un enregistrement de la fréquence cardiaque.
La méthode des accéléromètres permet de quantifier et d’enregistrer l’intensité de
mouvement selon un ou trois axes au cours d’une activité physique, et de le convertir en
dépense d’énergie.
La méthode factorielle permet d’évaluer les dépenses énergétiques journalières et
fragmentaires d’un individu à partir de l’enregistrement du type et de la durée des activités
pratiquées au cours de la journée, et du coût énergétique unitaire de chaque activité. Ce
dernier peut être exprimé en multiples du métabolisme de base pour uniformiser les
données entre les individus.
II.5 ESTIMATION LA DÉPENSE ÉNERGÉTIQUE TOTALE
Comme il est indiqué dans le chapitre suivant, il est possible de réaliser les estimations de la
dépense énergétique de repos à partir de données anthropométriques simples.Étant donné
la variabilité interindividuelle de l’intensité et de la durée de l’activité physique, la dépense
énergétique totale peut être estimée en multipliant la dépense énergétique de repos par un
facteur traduisant l’intensité de l’activité physique d’une personne. Ce facteur (PAL de la
littérature anglaise, et NAP- pour niveau d’activité physique- de la littérature française) a
pu être déterminé pour de nombreuses activités de la vie quotidienne, sédentaire,
professionnelle ou sportive. Les valeurs du NAP sont disponibles dans la seconde édition
des apports nutritionnels conseillés de la population française.
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III VARIABILITÉ DE LA DÉPENSE ÉNERGÉTIQUE
La dépense énergétique est extrêmement variable d’une personne à l’autre. Ceci est un
facteur très important à prendre compte dans la définition des besoins énergétiques
individuels. En effet, à cause cette variabilité, une prescription calorique généralisée n’a pas
de sens. Par exemple, il serait illusoire de prescrire 1 800 kilocalories par jour à tous les
patients hospitalisés ; cette valeur pourrait s’avérer insuffisante pour certains patients ou, à
l’inverse, excessive pour d’autres.
III.1 VARIABILITÉ AVEC LA MASSE
Il est connu depuis longtemps que la dépense énergétique est proportionnelle au poids.
Ainsi, de nombreuses équations ont été établies pour calculer la dépense énergétique de
repos à partir du poids. En fait, depuis les travaux de Ravussin, la masse maigre (se
rapporter au chapitre « composition corporelle ») détermine la dépense énergétique de
façon beaucoup plus précise que le poids. Ceci est vrai tant pour la dépense énergétique des
24 h que pour le métabolisme de base. Malgré cela, la plupart des équations qui permettent
de calculer le métabolisme de base ou la dépense énergétique totale sont établies à partir du
poids. Il n’y a pas encore d’équation satisfaisante permettant d’estimer le métabolisme de
base à partir de la masse maigre.
Dans la dernière version les apports nutritionnels recommandés pour la population
française (2001) deux équations sont proposées pour estimer le métabolisme de base à partir
du poids. Ces deux équations ont été validées :
Equations de Harris et Benedict :
Femmes MB = 2,741 + 0,0402 P + 0,711 T – 0,0197 A
Hommes MB = 0,276 + 0,0573 P + 2,073 T – 0,0285 A
Equations de Black :
Femmes MB = 0,963 . P0,48 . T 0,50 . A-0,13
Hommes MB = 1,083 . P0,48 .T 0,50 . A-0,13
avec MB en MJ.j-1, P = poids en kg, T = taille en m et A = âge en années
III.2 VARIABILITÉ AVEC L’ÂGE
La dépense énergétique totale diminue au cours de l’âge, pour deux raisons. D’une part, le
métabolisme de base diminue (environ 2 % tous les 10 ans, a priori à cause de la réduction
de la masse maigre associée à l’âge sans qu’il soit possible de déterminer s’il existe un
défaut métabolique spécifique du vieillissement). D’autre part, la dépense énergétique liée à
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l’activité physique est diminuée à cause de la réduction du temps passé en activités
physiques. Il semble que le coût énergétique de chaque activité diffère très peu au cours de
l’âge, à l’exception de certaines activités comme la marche quand elle s’accompagne de
déficits physiques ou de handicaps. Il y a donc une réduction des besoins énergétiques liés
à l’âge.
III.3 VARIABILITÉ AVEC LE SEXE
Dans un précédent chapitre, il était montré que la composition corporelle varie avec le sexe.
Même après prise en compte de ces différences de composition corporelle, il semble que la
femme dépense moins d’énergie (environ 10 %) que l’homme. Il n’y a pas d’explications
satisfaisantes à cet état de fait.
III.4 GROSSESSE
La grossesse est une période d’adaptation du métabolisme énergétique. La femme va
construire un organisme nouveau et mettre de l’énergie en réserve pour préparer la période
d’allaitement. Ceci entraîne des modifications de la composition corporelle (augmentation
du volume de certains organes, création de nouveaux organes comme leplacenta, et
augmentation de la masse grasse). Étant donné le peu de variations de la consommation
alimentaire induites par la grossesse, il doit exister une adaptation des différents postes de
la dépense d’énergie.
La dépense énergétique de repos est augmentée en proportion de l’augmentation de la
masse corporelle, et de la masse maigre ; c’est la partie la plus coûteuse de la grossesse.
L’effet thermique de l’alimentation n’est pas modifié par la grossesse. Pour ce qui est des
activités physiques pour lesquelles le poids a peu d’importance (par exemple la pratique de
la bicyclette) le coût énergétique n’est pasmodifié jusqu’au troisième trimestre. À la toute
fin de la grossesse des modifications de la gestuelle (l’allure de la marche est différente)
l’efficacité énergétique s’améliore, et permet de réaliser une certaine économie. L’intensité et
la durée de l’activité physique varie énormément en fonction de critères culturels et
environnementaux (dans les pays en voie de développement, il n’est parfois pas envisagé
qu’il y ait une période de repos avant et après l’accouchement).
On estime les besoins énergétiques supplémentaires associés à la grossesse à environ 260
kilocalories par jour, pendant les trois trimestres. Ceux-ci assurent une prise de poids
raisonnable (entre 10 et 12 kg). Le niveau d’activité physique (NAP) évolue au cours de la
grossesse puisqu’il passe de 1,8 fois le métabolisme de base avant la gros¬sesse, à 1,5-1,6 à
la fin de celle-ci (essentiellement par une augmentation de la dépense énergétique de
repos).
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III.5 L'ALLAITEMENT
L’allaitement représente un coût énergétique supplémentaire à cause de la production du
lait, du coût induit par le changement de masse grasse, et de ceux liés à la variation
d’activité physique. Le volume de lait produit par jour est remarquablement constant entre
les femmes, mais évolue au cours de l’allaitement. La valeur énergétique du lait est
d’environ 0,61 kilocalories par g. Il en coûte environ 20 % de kilocalories en plus pour en
assurer la synthèse.
La dépense énergétique de repos et l’effet thermique des aliments ne sont pas modifiés au
cours de l’allaitement. Il existe une réduction importante de l’activité physique dans les
sociétés occidentales, chez les femmes ayant choisi l’allaitement. La prise alimentaire
moyenne des femmes au cours de l’allaitement (entre 70 et 380 kilo-calories par jour) ne
suffit pas à compenser son coût énergétique (environ 600 kilocalories par jour lors de
l’allaitement exclusif). L’allaitement favorise donc la perte de poids après l’accouchement.
III.6 VARIABILITÉ AVEC LA RATION ALIMENTAIRE
La suralimentation prolongée ou, à l’inverse, la restriction calorique durable s’accompagne
de changements de la dépense énergétique qui vont tendre à limiter les variations de poids
(gain de poids en situation de suralimentation ou perte de poids en situation de restriction
calorique).
Dépense énergétique et restriction alimentaire
La diminution des apports énergétiques s’accompagne d’une perte de poids. Cette perte de
poids n’est pas linéaire dans le temps et tend à diminuer à mesure que la restriction
énergétique se prolonge. In fine, une nouvelle phase de stabilité pondérale sera atteinte
dans un délai variable et pour une perte de poids variable selon les sujets (Figure 1). Cet
arrêt de la perte de poids témoigne de l’adaptation à la restriction énergétique par une
diminution des dépenses énergétiques qui aboutit au rééquilibrage de la balance
énergétique. Cette adaptation relève de plusieurs mécanismes. Il existe une relation linéaire
entre la dépense énergétique et le poids et particulièrement le poids de masse maigre. La
perte de poids contribue donc à diminuer la dépense énergétique de repos. En second lieu,
la diminution de la ration alimentaire est associée à une diminution de la thermogenèse
alimentaire au moins dans sa composante obligatoire. Enfin, le coût de l’activité physique
étant lié positivement au poids mobilisé, la perte de poids réduit les dépenses énergétiques
dues à l’activité physique. En revanche le rendement énergétique du travail musculaire
accompli ne diffère pas avant et après perte de poids.
La composition du poids perdu sous l’effet des régimes restrictifs touche à la fois la masse
grasse et la masse maigre et la contribution respective de ces masses au poids perdu varie
considérablement d’un sujet à l’autre. D’une façon schématique, plus la masse grasse
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initiale du sujet soumis à une restriction calorique est importante, plus la contribution de la
masse grasse au kilo de poids perdu sera élevée (Figure 2). Le degré d’adiposité initiale
n’est pas le seul déterminant de la composition du poids perdu. L’importance du déficit
énergétique créé par les régimes hypocaloriques intervient également. Pour une même
masse grasse initiale, plus le déficit calorique est important, plus la proportion de masse
maigre perdue est élevée (Figure 3).
Certaines études montrent que la diminution du métabolisme de repos en situation de perte
pondérale est plus importante que ne le voudrait les pertes tissulaires.
Ceci suggère une augmentation de l’efficacité énergétique dans lequel interviendraient la
diminution du tonus sympathique et la réduction des concentrations de triodothyronine
(T3) due à une inhibition de la déiodination de la thyroxine (T4) en T3 dans le foie. D’autres
mécanismes peuvent intervenir dans ces phénomènes d’adaptation.
Dépenses énergétiques et alimentation hypercalorique
En situation de suralimentation prolongée on observe un gain de poids qui, au fil du temps,
va s’arrêter. C’est exactement l’image en miroir de celle décrite pour la perte pondérale
induite par la restriction énergétique. L’arrêt du gain de poids témoigne également d’une
augmentation des dépenses énergétiques qui viennent rééquilibrer la balance. Cette
augmentation s’explique par le gain de masse tissulaire et en particulier le gain des tissus
maigres qui sont métaboliquement actifs, par l’augmentation de la thermogenèse
postprandiale due à l’excès de la prise alimentaire et par une majoration des dépenses
énergétiques liée à l’activité physique en raison de l’élévation du poids corporel.
Figure 1. Évolution de la perte de poids (Δ P) sous régime restrictif en fonction du temps (ΔT).
Figure 2. Contribution relative (%) des masses maigre et grasse au poids perdu en fonction de la
masse grasse initiale.
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Figure 3. Effet du niveau de restriction énergétique sur les contributions relatives des masses
maigre (ΔMM) et grasse (ΔMG) au poids perdu en fonction de l’adiposité initiale.
III.7 VARIABILITÉ D’ORIGINE GÉNÉTIQUE
Le niveau de dépense énergétique est pour partie dépendant de facteurs génétiques (Figure
4).
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- Support de Cours (Version PDF) Figure 4. Part estimée des facteurs génétiques dans les variations interindividuelles de la dépense
énergétique totale.
Génétique et dépense énergétique de repos
Environ 20 % des différences inter-individuelles du niveau de dépense énergétique de repos
ne sont pas expliquées par les facteurs épigénétiques. Il est possible d’évaluer l’influence
des facteurs génétiques dans cette variance (dite résiduelle et de l’ordre de 20 %) en
comparant la dépense énergétique de repos au sein des familles à celle observée entre des
familles différentes. La dépense énergétique de repos peut varier jusqu’à 500 kcal/jour
d’une famille à l’autre. En revanche au sein d’une même famille, la différence
interindividuelle n’est que de l’ordre de 100 kcal/jour. Il existe donc une agrégation
familiale de la dépense énergétique ou « effet famille » qui compte pour environ 40 % de la
variance résiduelle. Cependant, l’étude des familles ne permet pas de séparer avec certitude
les facteurs environnementaux des facteurs génétiques (similitudes génomiques mais aussi
environnementales au sein d’une même famille). Elle suggère cependant qu’un déterminant
génétique joue un rôle sur le niveau de la dépense énergétique de repos. La mesure des
dépenses énergétiques de repos conduite chez des jumeaux homo-zygotes, des jumeaux
hétérozygotes et des paires parents-enfants montre des résultats d’autant plus proches que
le degré de concordance génétique est important. Dans ce type d’étude, la place des facteurs
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génétiques a également été évaluée à 40 % de la variance résiduelle de la dépense
énergétique de repos. Au total le patrimoine génétique contribuerait pour 8 % à 10 % de la
variation interindividuelle globale de la dépense énergétique de repos chez l’homme.
Génétique et thermogenèse alimentaire
À partir de mesures effectuées chez 23 paires de jumeaux monozygotes, 31 paires de
jumeaux hétérozygotes et 31 paires parents-enfants, il apparaît que le coefficient
d’héritabilité de la réponse thermogénique alimentaire est de l’ordre de 40 % à 50 %.
Compte tenu de la place de la thermogenèse alimentaire dans la dépense énergétique des 24
heures, les différences de réponses thermogéniques liées au patrimoine génétique
représentent environ 35 à 50 kcal/jour.
Génétique et coût énergétique de l’activité physique
Il existe un déterminisme génétique du niveau d’activité physique qui a été évalué à
environ 30 % dans une population québécoise de 1 610 personnes issues de 375 familles
différentes. Pour des activités physiques intenses qui nécessitent une dépense énergétique
de 5 à 6 fois supérieure à la dépense énergétique de repos, la part des facteurs génétiques
apparaît moins nette. Elle est estimée à environ 10 %. Enfin, le génotype contribue pour
partie à expliquer les différences interindividuelles observées dans le coût énergétique de
postures courantes et d’activité physique de faible intensité.
Génétique et adaptation aux modifications de la prise alimentaire
Les études effectuées chez les jumeaux mono et hétérozygotes incluant une suralimentation
(1 000 kcal/jour) pendant 22 jours ou une sous alimentation (moins 1 000 kcal/jour pendant
22 jours) ont montré une forte ressemblance dans l’adaptation de la dépense énergétique de
repos aux changements alimentaires en fonction de la concordance génétique. Il en va de
même en ce qui concerne la réponse thermogénique post-prandiale induite par un repas
mixte (1 000 kcal/repas). En revanche la ressemblance intra-paire diminue à mesure que
l’étude se prolonge dès lors que l’on prend en considération les variations de masse maigre
induites par les déséquilibres énergétiques ainsi créés par la suralimentation ou la sousalimentation. Ceci suggère que les facteurs génétiques interviennent à court terme au moins
dans l’adaptation individuelle de la dépense énergétique en réponse à des déséquilibres
alimentaires.
N.B. : les déterminants moléculaires responsables du déterminisme génétique ne sont pas totalement
élucidés. Récemment un lien entre le métabolisme énergé¬tique de repos et le polymorphisme d’un
récepteur à la mélanocortine (MC5R) et des marqueurs génétiques situés à proximité du gène de
l’UCP2 ont été mis en évidence.
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IV CONTRIBUTION DES DIFFÉRENTS SUBSTRATS À LA DET
Chez l’homme, les dépenses énergétiques sont d’amplitudes variables mais continues. La
continuité des processus de dépense énergétique suppose une disponibilité ininterrompue
de l’énergie. Cette condition est assurée en période inter-prandiale par un compartiment de
réserve énergétique entretenu par des apports habituellement fractionnés, rythmés par les
repas et incluant 3 voire 4 macronutriments : les glucides, les protéines, les lipides et
l’alcool.
Ces substrats sont susceptibles de fournir l’ATP nécessaire à la vie mais leur oxydation par
l’organisme est hiérarchisée. Schématiquement, la priorité d’oxydation est classée selon un
ordre inverse à la capacité qu’à l’organisme à stocker ces macronutriments.
L’alcool est au sommet de la hiérarchie oxydative dans la mesure où il n’y a aucun
compartiment de stockage. De plus et compte tenu de sa toxicité, il doit être rapidement
éliminé. L’ingestion d’alcool stimule immédiatement son oxydation qui, en retour, diminue
voir supprime l’oxydation des autres macronutriments surtout en situation de repos où la
demande énergétique totale n’est pas majorée. Ainsi toute quantité d’alcool ingérée, pour
peu qu’elle soit modérée, est éliminée par voie oxydative dans les 6 heures qui suivent son
ingestion et l’on peut considérer que la balance de l’alcool (apport moins oxydation) est
proche de la perfection. Les glucides qu’il s’agisse de mono-, di- ou polysaccharides,
occupent la seconde place dans la hiérarchie. En effet le compartiment de réserves
glucidiques (sous forme de glycogène) est limité (300 g à 600 g au total). Dans la
hiérarchisation de l’oxydation des substrats, les protéines sont proches des glucides dans la
mesure où les capacités de stockage à court terme sous forme d’acides aminés ou de
protéines sont également très limitées. Les lipides occupent la dernière place dans la
hiérarchie oxydative et se distinguent des autres macro¬nutriments par un compartiment
de réserve immense et une quasi absence d’autorégulation entre l’ingestion de lipides et
l’oxydation lipidique.
En résumé il existe une bonne adaptation entre les quantités oxydées et les quantités
ingérées d’alcool, de glucides et de protéines. Il n’en va pas de même pour les lipides. Ceci
explique pourquoi la balance lipidique, c’est à dire l’équilibre entre les ingestions et
l’oxydation des lipides, est le déterminant majeur de la balance énergétique. En effet,
lorsque la balance lipidique est positive (i.e. apport lipidique > oxydation lipidique), la
balance énergétique est également positive et ceci s’accompagne d’un stockage net de
lipides et d’une augmentation du poids corporel. Une balance lipidique négative (i.e. apport
lipidique < oxydation lipidique) a des effets inverses sur la balance énergétique totale et
s’accompagne d’une perte de masse grasse et de poids.
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V LE CONCEPT DE QUOTIENT RESPIRATOIRE
La transformation de l’énergie chimique contenue dans les macronutriments en une autre
énergie chimique utilisable par l’organisme, l’ATP, passe par des réactions de
phosphorylation oxydative qui vont, in fine, consommer de l’oxygène et produire du gaz
carbonique. On appelle quotient respiratoire le rapport entre la quantité de gaz carbonique
produit par l’oxydation totale d’un substrat (VCO2) sur la quantité d’oxygène nécessaire à
cette oxydation complète (VO2). Le quotient respiratoire varie en fonction du substrat
considéré. Schématiquement, il est égal à 1 pour les glucides, à 0,7 pour les lipides et à 0,8
pour les protides.
Chez l’homme, le calcul du quotient respiratoire à partir de la mesure de la VCO2 et de la
VO2 informe sur la nature des substrats oxydés. Plus le quotient respiratoire mesuré se
rapproche de l’unité, plus l’organisme utilise les glucides pour assurer son besoin d’ATP.
Lorsque le quotient respiratoire se rapproche de 0,7, les lipides sont alors un substrat
privilégié pour la fourniture d’ATP. La mesure du quotient respiratoire sur 24 heures
réalisée chez un grand nombre de sujets appartenant à des familles différentes montre une
agrégation familiale du quotient respiratoire. Il existe des familles dont le quo¬tient
respiratoire est élevé et des familles dont le quotient respiratoire est plus bas. Les familles
qui ont un quotient respiratoire plus bas oxydent une plus grande quantité de lipides par 24
heures et, face à une alimentation hyperlipidique, constitueront moins de réserve et
prendront moins de poids que les familles disposant d’un quotient respiratoire élevé. Il
existe une relation entre la typologie des fibres musculaires et le quotient respiratoire. Plus
la proportion de fibres de type I dans le muscle est importante (fibres à contraction lente,
résistantes, sollicitées pendant les efforts d’endurance et équipées pour oxyder facilement
les acides gras), plus le quotient respiratoire est bas et plus l’adiposité corporelle totale est
réduite. Les sujets noirs américains ont une plus faible proportion de fibres de type I et une
plus forte proportion de fibres de type IIA (fibres rapides puissantes et glycolytiques) que
les caucasiens. Cette différence peut contribuer à expliquer le risque accru d’obésité dans la
population noire américaine.
La mesure du quotient respiratoire (QR) est parfois utile à la prescription diététique. En
effet, pour maintenir un poids stable il faut que les apports énergétiques et les dépenses
énergétiques soient équivalents mais aussi que les substrats sources d’énergie soient oxydés
en quantités égales à leurs apports. Il est possible de calculer aisément le quotient
respiratoire théorique d’une alimentation mixte (ou quotient alimentaire QA) dès lors que
l’on connaît les contributions relatives des glucides, lipides et protides (voire de l’alcool) qui
la composent. Ainsi une alimentation apportant 55 % de glucides (QR = 1), 35 % de lipides
(QR = 0,7), 10 % de protides (QR = 0,8) aura un quotient alimentaire égal à : 0,55 × 1 + 0,35 ×
0,7 + 0,10 × 0,8 = 0,875.
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Toute personne qui ingère des quantités de glucides, de lipides et de protides juste
suffisantes pour couvrir ses dépenses énergétiques et dans des proportions ci-dessus
indiquées, devra avoir un quotient respiratoire des 24 heures égal au quotient alimentaire
calculé, c’est à dire égal à 0,875, pour maintenir un poids stable. Un quotient alimentaire
inférieur au quotient respiratoire signifie que la contribution des lipides à la ration
alimentaire dépasse les capacités d’oxydation lipidique de l’organisme et place le sujet à
risque de prise de poids. Inversement un quotient alimentaire supérieur au quotient
respiratoire place le sujet en situation favorable à la perte de poids.
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