Hydroquinone, arbutine et acide kojique dans les produits
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Hydroquinone, arbutine et acide kojique dans les produits
REPUBLIQUE ET CANTON DE GENEVE Département de l'économie et de la santé Objets usuels et métaux Service de protection de la consommation Hydroquinone, arbutine et acide kojique dans les produits éclaircissants pour la peau En 2003, la campagne d'analyses sur ces produits cosmétiques avait révélé que près de 50 % des produits analysés renfermaient des substances non autorisées en Suisse, avec notamment des concentrations en hydroquinone représentant un grave danger pour le consommateur. Avertissement, sensibilisation sur les risques encourus, information auprès des consommateurs ont été depuis largement relayés et diffusés par les différents médias. Cette année, nous avons à nouveau recherché ces substances dans les produits destinés à éclaircir la peau pour faire un nouvel état de la situation, se rendre compte si le message était bien passé et constater la présence éventuelle de substances de remplacement. Le soleil, le vieillissement, la grossesse, l'acné, les diverses cicatrices sont les principaux responsables des défauts pigmentaires apparaissant sur notre peau. Pour gommer ces imperfections, l'hydroquinone, l'arbutine, l'acide kojique ou encore l'acide azélaïque sont les produits habituellement utilisés et prescrits par les dermatologues. Depuis quelques années ces substances ont fait leur apparition dans la composition d'un grand nombre de produits cosmétiques destinés principalement à blanchir la peau de façon générale. Une peau blanche, légèrement hâlée, reste un modèle occidental que beaucoup cherchent à obtenir, au détriment parfois de leur santé. L'énorme engouement suscité par les produits destinés à éclaircir la peau auprès des femmes d'origine africaine en particulier a engendré un véritable problème de santé publique. Irritations, dermatites, dépigmentation inégale et irréversible, sensations de piqûres, brûlures, apparition de tâches plus sombres sont les fréquents effets indésirables rencontrés à la suite de l'utilisation de ces produits. La Suisse interdit la présence d'hydroquinone, d'acide kojique, d'acide azéalïque dans la composition des produits de blanchiment de la peau et limite la teneur en arbutine à 0,04 %. -1- Prélèvements et analyse Ces produits ne se trouvant pas dans les grandes surfaces habituelles, nos inspecteurs ont prélevé 60 échantillons dans les magasins et salons de coiffure africains. Ces produits éclaircissants se présentent principalement sous la forme de laits, crèmes, gels, lotions ou sérums. En majeure partie ils sont produits en France (27), en Suisse (16) et en Italie (6) et sont destinés à des distributeurs en France, en Italie et aux États-Unis. L'analyse se fait par mise en solution des échantillons et dilution dans un tampon phosphate pH 3,0. Le dosage est effectué par HPLC avec détecteur DAD. Résultats 56 échantillons (93 %) ont été contestés au total après analyse des composants et examen d'étiquetage dont, 45 (75 %) en raison de la présence de substances interdites ou de dépassement de la teneur maximale fixée par l'Ordonnance du DFI sur les cosmétiques du 23 novembre 2005, OCos, RS 817.023.31. 5 produits ont été contestés pour présence simultanée d'acide kojique et d'arbutine, alors que dans 3 cas l'hydroquinone était associée à l'acide kojique. Hydroquinone, arbutine et acide kojique dans les produits de blanchiment de la peau 8 Concentration [%] 7 6 5 4 3 2 1 58 Hydroquinone Acide kojique Arbutine 55 52 49 46 43 Nombre d'échantillons 40 37 34 31 28 25 19 22 16 13 10 7 1 4 0 Hydroquinone 17 produits, soit 28 % contenaient de l'hydroquinone, substance interdite dans les produits cosmétiques (OCos, annexe 3). Répartition des teneurs en hydroquinone 8 Nombre d'échantillons 7 6 5 4 3 2 1 0 0,03 à 2,0 2,1 à 5,0 5,1 à 7,4 Concentration [%] Arbutine 5 échantillons contenaient de l'arbutine avec des teneurs dépassant la valeur limite de 0,04 % fixée par l'OCos. Teneurs retrouvées : 0,09, 1,8, 2,0, 2,2 et 2,2 %. -2- Acide kojique 30 échantillons, soit 50 %, contenaient de l'acide kojique, substance interdite dans les produits cosmétiques (annexe 3 de l'OCos). Répartition des teneurs en acide kojique 14 Nb échantillons 12 10 8 6 4 2 0 0,02 à 0,2 0,2 à 1,0 1,1 à 2,3 Concentration [%] Acide azélaïque et son sel K.A.D. (potassium azeaoyl diglycinate) Conclusion Tout comme en 2003 le constat est édifiant. Ces produits sont toujours largement distribués dans les commerces spécialisés. Nos inspecteurs ont répertorié dans certains magasins plus de 20 produits différents de blanchiment de la peau. 11 échantillons annonçaient la présence de l'acide azélaïque ou du sel, ingrédients interdits dans la composition de produits cosmétiques. Examen d'étiquetage En ce qui concerne les teneurs retrouvées en hydroquinone, il apparaît qu'elles sont moins élevées par rapport aux résultats 2003. Des vendeurs ont confirmé cette tendance et souligné que les produits à base d'hydroquinone avaient moins de succès auprès des clientes désireuses d'éclaircir leur peau, conscientes des risques encourus. 56 échantillons, soit 93 %, des emballages étaient non conformes pour les motifs suivants : 56 absences d'indication de l'adresse en Suisse 14 absences d'indication de la date de durabilité minimale 15 absences d'indication du numéro de lot 3 absences d'indication de la composition 3 dont la composition n'est pas mentionnée dans la nomenclature INCI et dont l'ordre pondéral décroissant n'est pas respecté 1 dont les indications sur l'emballage ne figurent pas dans une langue nationale 21 dont les précautions particulières d'emploi ne sont pas décrites dans les 3 langues officielles 2 dont la date de durabilité est dépassée 2 dont les indications sont en caractères non lisibles 4 dont les allégations ne sont pas autorisées Ingrédients non autorisés dans la composition : hydroquinone (17), acide kojique (30), l'acide azélaïque et ses sels K.A.D. (11). En revanche on observe une nette progression de la présence d'acide kojique dans ces produits, passant de 5 % en 2003 à pas moins de 50 % cette année ! Le domaine de concentrations a également pris l'ascenseur, atteignant des valeurs proches de 1 %. A cette teneur, l'effet dépigmentant de la peau devient efficace, mais les risques d'effets secondaires sont fortement augmentés. 14 échantillons montraient des concentrations se situant de 0,5 à 2,3 %, alors qu'en 2003 elles n'excédaient pas 0,2 %. Il semble donc évident que l'acide kojique s'est substitué en bonne partie à l'hydroquinone. Plusieurs motifs de contestation ont été fréquemment observés pour un même échantillon. A noter également que l'absence d'adresse en Suisse n'est plus un motif de non-conformité depuis la modification de la législation sur les denrées alimentaires du 1er janvier 2006. -3- Inhibiteur de la mélanine, l'acide kojique, fonctionnant sur le même principe que l'hydroquinone, posera sans doute des problèmes de cytotoxicité similaires à ceux causés par l'hydroquinone, donc un problème analogue du point de vue santé publique. Cette année le taux de contestation au niveau de la composition atteint 75 %. En conclusion, nous constatons que les produits éclaircissants de la peau sont toujours bien représentés dans ces commerces et que les importateurs sont nombreux. L'information sur les dangers d'une utilisation prolongée de ces produits auprès des commerçants et des consommateurs doit se poursuivre. Une campagne de sensibilisation par distribution de dépliants dans les magasins africains serait une mesure simple et efficace. Le problème dépassant très largement les frontières du canton, un relais de ces informations par l'OFSP serait souhaitable. D'autres produits dont les dangers pourraient être encore plus importants, car contenant notamment des dermocorticoïdes, seraient selon certaines informations également sur le marché. Nos enquêteurs ne les ont toutefois jamais trouvés sur le marché, la commercialisation de tels produits se faisant vraisemblablement de manière discrète pour qu'ils ne soient pas exposés à la vente. -4-