Août 2016 - UIMM Côte-d`Or
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Août 2016 - UIMM Côte-d`Or
L E B UL L ETIN DU DROIT SOC IA L Août 2016 Actualité législative et réglementaire Adoption définitive du projet de loi « travail » Le projet de loi « relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels », a été adopté définitivement par l’Assemblée Nationale le 21 juillet 2016 en nouvelle lecture, dans le cadre de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution. Le Conseil constitutionnel a été saisi et doit rendre son avis dans les 15 jours. Une fois l’avis du Conseil Constitutionnel rendu, la loi pourra alors être promulguée par le Président de la République et publiée au journal officiel. Nous attirons votre attention sur le fait que l’entrée en vigueur de nombreuses dispositions est, soit reportée à une date ultérieure Décret « IRP » du 29/06/2016 Un décret, daté du 29 juin 2016, et pris en application des articles 16, 18 et 19 de la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, de l’article 19 de la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, et de l’article 5 de l’ordonnance du 10 décembre 2015 relative aux garanties constituant en une prise de position formelle opposable à l’administration, a été publié au journal officiel du 30/06/2016. Il précise : expressément mentionnée dans le texte, soit conditionnée à la publication de décrets d’application, dont le calendrier n’est pas encore déterminé. Il est probable que certains de ces décrets n’entreront en vigueur que dans plusieurs mois. Via un infoflash envoyé le 18/07/2016, l’UIMM 21 a d’ores et déjà fait parvenir aux employeurs une synthèse des principales dispositions de ce projet de loi. Une fois publiée, la loi fera l’objet d’une publication juridique plus exhaustive. Nous aurons également l’occasion de revenir plus en détail sur ces dispositions à l’occasion d’un atelier juridique. – les délais dans lesquels les instances rendent leurs avis, notamment en cas de double consultation entre le comité central d’entreprise et un ou plusieurs comités d’établissement ; – les modalités de fonctionnement du CHSCT (notamment délais de consultation, prorogation des mandats) ; – le contenu des différentes informations à remettre au comité d’entreprise, d’une part trimestriellement pour les entreprises de 300 salariés et plus, et d’autre part dans le cadre de 2 de ses 3 consultations récurrentes, à savoir la consultation sur la situation économique et financière de l’entreprise et la consultation sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi ; – s’agissant de l’égalité professionnelle : le contenu de l’accord ou du plan d’action, la procédure du contrôle administratif (mise en demeure par l’inspection du travail) et les conditions de mise en œuvre de la procédure de rescrit. Ces dispositions sont entrées en vigueur 1er juillet 2016. Pour des informations plus exhaustives quant au contenu et aux apports de ce décret, vous pouvez consulter le Bulletin Spécial rédigé par l’UIMM. A noter qu’un atelier juridique sera également organisé sur le sujet courant octobre 2016. Décret n° 2016-868 du 29/06/2016 relatif aux modalités de consultation des IRP Taux des cotisations additionnelles pénibilité Un décret du 11/07/2016, publié au JO du 13/07/2016, précise les taux de la cotisation additionnelle due au titre de la pénibilité, applicables à compter de 2015. Ces taux sont les suivants : - pour une exposition à un seul facteur : à 0,1 %, pour les années 2015 et 2016, et 0,2 %, à compter de 2017 ; - pour une exposition à plusieurs facteurs : à 0,2 %, pour les années 2015 et 2016, et à 0,4 %, à compter de 2017. Décret n° 2016-953 du 11/07/2016 fixant les taux de la cotisation additionnelle due au titre du financement du compte personnel de prévention de la pénibilité Actualité conventionnelle (Métallurgie) Evolution du dispositif conventionnel L’UIMM, la CFDT, FO, la CFTC, la CFE-CGC, et la CGT ont signé un accord de méthode relatif à la mise en œuvre opérationnelle de la négociation de l’évolution du dispositif conventionnel de branche de la métallurgie. Cette signature marque une étape importante, après 3 ans de travaux en mode projet, menés par l’UIMM et les organisations syndicales. Pour parvenir à un nouveau dispositif plus adapté aux besoins des entreprises, favorisant l’emploi, le développement, l’attractivité et la performance, les partenaires sociaux ont conclu à la nécessité de réécrire l’ensemble des dispositions conventionnelles de la branche de la métallurgie. Cet accord organise la prochaine négociation de ce futur dispositif conventionnel en précisant : - son architecture: un socle commun et des accords autonomes, - les thèmes de négociation et leur ordonnancement, - le calendrier, l’organisation, les moyens et le rythme des négociations. Avec cet accord se dessinent les contours du futur dispositif conventionnel de la branche, au service d’une vision stratégique pour l’industrie, de son attractivité et de sa compétitivité. Actualité jurisprudentielle CE 29/06/2016 – Faute commise dans le cadre du mandat syndical Dans un arrêt rendu le 29/06/2016, le Conseil d’Etat a estimé qu’un représentant du personnel qui se rend coupable de harcèlement moral dans l'exercice de son mandat méconnaît son obligation de ne pas porter atteinte à la santé et la sécurité de ses collègues et peut, de ce fait, être licencié pour faute. Rappelons qu’en principe, les faits commis en dehors de l'exécution du contrat de travail échappent au pouvoir disciplinaire de l'employeur (notamment Cass. soc. 30-6-2010 n° 09-66.792 : RJS 10/10 n° 792 ; Cass. soc. 12-1-2016 n° 13-26.318 : RJS 3/16 n° 192). Par sa décision du 29/06/2016, le Conseil d'Etat tempère donc ce principe, en refusant d'accorder une immunité disciplinaire au salarié protégé dans l'exercice de son mandat. Pour le Conseil d’Etat, en se rendant coupable de harcèlement moral, le salarié protégé a manqué à son obligation de ne pas porter atteinte, dans l'enceinte de l'entreprise, à la santé et à la sécurité des autres membres du personnel. De tels faits justifiaient donc un licenciement pour motif disciplinaire. A noter que le Conseil d’Etat s’était déjà prononcé dans un sens similaire en estimant que peut ainsi justifier un licenciement pour faute le fait, pour un salarié protégé : - de commettre délibérément un acte de violence sur la personne d'un collègue sur le lieu du travail, même à l'occasion des fonctions représentatives, en méconnaissance de son obligation, découlant de son contrat de travail, de ne pas porter atteinte, dans l'enceinte de l'entreprise, à la sécurité d'autres membres du personnel (CE 27/03/2015 n° 368855) ; - d'utiliser ses heures de délégation pour exercer une autre activité professionnelle, en violation de son obligation de loyauté à l'égard de l'employeur (CE 27/03/2015 n° 371174). CE 29/06/2016 n° 387412 Temps d'habillage et de déshabillage Rappelons que l’employeur est tenu d’accorder une contrepartie pour le temps passé par les salariés à revêtir et retirer leur tenue de travail dès lors que deux conditions cumulatives sont remplies (C. trav., art. L. 3121-3) : – le port de la tenue de travail doit être imposé par des dispositions légales, des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail ; – l’habillage et le déshabillage doivent obligatoirement être réalisés dans l’entreprise ou sur le lieu de travail. Dans un arrêt rendu le 25/05/2016, la Cour de cassation précisé que lorsque les deux conditions cumulatives susmentionnées sont remplies, seul le temps réellement consacré à l'habillage et au déshabillage doit être pris en compte afin d'évaluer le temps devant faire l'objet d'une contrepartie, ce qui exclut l'ensemble des autres temps passés dans les vestiaires et consacrés à d'autres tâches. Cass. soc., 25/05/2016, n° 14-22238, 14-22242, 1425770. Inaptitude – Obligation de respecter l’avis médical Au titre de son obligation de reclassement d'un salarié inapte, l'employeur doit lui faire effectuer l'essai préconisé par le médecin du travail sur un poste au reclassement (Cass. soc., 14 juin 2016, n° 1417032). En l’espèce, un salarié victime d’un accident du travail est déclaré inapte par le médecin du travail et licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Le salarié conteste le caractère réel et sérieux de son licenciement pour manquement de l’employeur à son obligation de reclassement. La cour d’appel déboute le salarié de sa demande en considérant que l’employeur a procédé à des recherches d’un poste de reclassement suffisamment loyales, sérieuses et exhaustives. La Cour de Cassation casse l’arrêt de la cour d’appel qui, pour juger le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, n‘a pas vérifié si l’essai préconisé par le médecin du travail sur un poste au reclassement avait été effectué. Cass. soc., 14/06/2016, n° 14-17032 Cadre Dirigeant - conditions Un salarié qui bénéficie d'un des salaires les plus élevés de l'entreprise et dispose d'une certaine indépendance dans l'organisation de son emploi du temps, mais qui ne participe ni à la stratégie de l'entreprise, ni à ses instances dirigeantes, ne peut pas être qualifié de cadre dirigeant (Cass. soc., 15 juin 2016, n° 15-12894). bénéficiait de l'un des salaires les plus élevés de l'entreprise et qu'il disposait d'une certaine indépendance dans l'organisation de son emploi du temps, il ne ressortait pas des pièces produites qu'il aurait disposé d'un quelconque pouvoir de décision et de l'autonomie d'un cadre dirigeant, tel qu'exigé par l'art. L. 3111-2 CT. En l'espèce, le salarié occupait la fonction de "chef de service magasin". Il avait été licencié et contestait sa qualité de cadre dirigeant. Dans un arrêt du 15/06/2016, la Cour de cassation confirme cette décision en relevant que le salarié ne participait ni à la stratégie de l'entreprise, ni à ses instances dirigeantes. La cour d'appel avait accueilli sa demande de rappel d'heures supplémentaires au motif que si le salarié Cass. soc., 15/06/2016, n° 15-12894 Abandon de la théorie du « préjudice automatique » En avril 2016, la Cour de cassation a jugé qu’un salarié à qui l’employeur tarde à remettre le bulletin de paye et le certificat de travail ne peut être indemnisé à ce titre que s’il démontre avoir subi un préjudice, la réparation ne pouvant plus être automatique (cass. soc. 13 avril 2016, n° 14-28293 FSPBR). Cet arrêt de principe a ensuite été décliné dans une série de décisions concernant la clause de nonconcurrence, la mention de la convention collective sur le bulletin de paie et l’organisation de la visite de reprise (cass. soc. 17 mai 2016, n° 14-21872 D ; cass. soc. 17 mai 2016, n° 14-23138 D ; cass. soc. 25 mai 2016, n° 14-20578 FSPB). On pouvait donc penser que les juges remettraient en cause d’autres hypothèses dans lesquelles ils considéraient que le salarié avait automatiquement droit à réparation, sans qu’il lui soit nécessaire de justifier d’un préjudice. C’est chose faite dans un arrêt du 30 juin 2016 qui consacre l’abandon du principe selon lequel le non-respect de la procédure de licenciement cause nécessairement un préjudice au salarié. Dans cette affaire, un salarié licencié pour faute grave avait réclamé des dommages-intérêts pour inobservation de la procédure de licenciement. Ce dernier avait tenté de faire appliquer l’ancienne jurisprudence en relevant que l’inobservation des règles de forme du licenciement causait nécessairement un préjudice, qui devait être réparé (cass. soc. 16 décembre 1997, n° 94-42089, BC V n° 442 ; cass. soc. 7 octobre 1998, n° 96-43276 D ; cass. soc. 29 avril 2003, n° 01-41364, BC V n° 145). La Cour de cassation poursuit donc le toilettage de sa jurisprudence, et rejette les demandes du salarié. Elle rappelle que l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond, qui avaient constaté que le salarié n’apportait aucun élément pour justifier le préjudice allégué. Cass. soc. 30/06/2016, n° 15-16066 Coemploi dans un Groupe - exceptionnel Par trois arrêts rendus le 06/07/2016, la Cour de cassation se prononce à nouveau sur la notion jurisprudentielle de « co- emploi » au sein de groupes de sociétés, dans le cadre de litiges visant à faire déclarer des sociétés mères ou dominantes responsables solidairement des conséquences financières de licenciements économiques faisant suite soit à des réorganisations, soit à une mise en liquidation judiciaire d'entreprises ou d'établissements implantés en France. Alors qu'une partie de la doctrine s'interroge sur l'opportunité d'un abandon de la notion spécifique de coemploi hors lien de subordination juridique, la Haute Juridiction opte pour le statu quo et maintient sa jurisprudence admettant la qualification de coemployeur d'une société mère ou dominante du fait d'une « ingérence abusive » dans la gestion économique et sociale d'une autre société du groupe. A la lecture des arrêts du 6 juillet 2016, on remarque toutefois que cette notion est sous haute surveillance et que la chambre sociale entend la délimiter précisément ; les juges du fond étant appelés à la plus grande rigueur dans l'analyse des indices permettant de caractériser une situation de coemploi. La chambre sociale de la Cour de cassation a ainsi jugé que ne peuvent suffire à caractériser une situation de coemploi au sein d'un groupe le fait : - que les dirigeants de la filiale proviennent du groupe et agissent en étroite collaboration avec la société mère (Cass. soc. 6 juillet 2016 n° 14-26.541) ; - que la politique du groupe déterminée par la société mère ait une incidence sur l'activité économique et sociale de sa filiale (Cass. soc. 6 juillet 2016 n° 1427.266) ou sur la politique de développement ou la stratégie commerciale et sociale de celle-ci (Cass. soc. 6 juillet 2016 n° 14-26.541) ; - que la société mère ait pris dans le cadre de cette politique des décisions affectant le devenir de sa filiale et se soit engagée à garantir l'exécution des obligations de cette dernière liées à la fermeture du site et à la suppression des emplois (Cass. soc. 6 juillet 2016 n° 14-27.266) ou se soit engagée au cours du redressement judiciaire de la filiale à prendre en charge le financement du plan de sauvegarde de l'emploi (Cass. soc. 6 juillet 2016 n° 14-26.541). Limitée aux situations d'ingérence abusive dans la gestion économique et sociale d'une société du groupe, privant celle-ci de ses prérogatives et de sa réelle autonomie, l'existence d'un coemploi est de plus en plus rarement admise par la jurisprudence. Mais plus rarement ne signifie pas plus jamais. En témoigne un autre arrêt de la Cour de cassation du 6 juillet 2016 rendu dans l'affaire « 3 Suisses », par lequel la chambre sociale a approuvé la décision de la cour d'appel de Douai d'avoir reconnu la qualité de coemployeur des deux sociétés en cause à partir d'une conjonction d'indices tels que notamment : la centralisation et le transfert au sein de la société mère des équipes informatiques, comptables et ressources humaines ; la perte d'autonomie décisionnelle de la filiale en matière de formation, de mobilité et de recrutement ; la prise en charge de tous les problèmes de nature contractuelle, administrative et financière rencontrés par la filiale ; le fait que le contrôle du service comptabilité clients de la maison mère s'exerçait jusqu'aux feuilles de caisse mensuelles que les responsables des boutiques de la filiale française devaient lui transmettre régulièrement ; ou encore la circonstance que le service juridique du groupe international était intervenu pour dénoncer les contrats conclus avec les retoucheuses à l'occasion de la fermeture de ces boutiques et qu'il s'était substitué à la filiale dans le cadre des poursuites pénales contre des salariés soupçonnés de détournement d'argent au préjudice de cette dernière. Pour la Haute juridiction, il y avait donc, dans ce cas d’espèce, confusion totale d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion abusive dans la gestion économique et sociale de la filiale, lui ayant fait perdre son autonomie et ses prérogatives d'employeur juridiquement indépendant. Cass. soc. 6 juillet 2016 n° 14-27.266, Sté Continental France c/A. Cass. soc. 6 juillet 2016 n° 14-26.541, Sté Proma SSA c/F. Cass. soc. 6 juillet 2016 n° 15-15.481, Sté 3 Suisses France c/A. Diffusion restreinte : cette publication est réservée aux adhérents de l’UIMM, son contenu ne peut donc en aucune manière faire l'objet, même partiellement, de reproduction, représentation, prêt, échange ou cession, d’extraction totale ou partielle de données et/ou d’un transfert sur un autre sup Pour tout renseignement complémentaire Jérémy DENNIEL Responsable des Affaires Juridiques et sociales UIMM Côte d’Or Tél : 03 80 77 85 05 - Port : 06 86 57 69 46 [email protected] Julie PAILLOT Juriste Droit social UIMM Côte d’Or Tél : 03 80 77 85 26 - Port : 06 43 49 61 56 [email protected]