pour l`enfant, mieux vaut un bon divorce qu`un mauvais mariage

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pour l`enfant, mieux vaut un bon divorce qu`un mauvais mariage
Conseils & Informations
Mme Prudor & Dr Salinier
Validé par le conseil scientifique de l’AFPA_2008
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Conseils devant un enfant de parents séparés
Un divorce (ou une séparation pour les couples non mariés) n’éclate pas comme un orage
soudain, il est l’aboutissement de certaines mésententes conjugales.
Un divorce est total quand rien ne subsiste en commun, pas même l’agressivité que chacun
porte à l’autre. Mais cependant les enfants sont là, témoins vivants du lien conjugal, réclamant
pour se développer harmonieusement, un père et une mère.
Cette situation apparaît clairement à beaucoup de parents désunis, qui mettent l’accent sur les
problèmes que la séparation impose aux enfants. Mais il ne faut pas oublier que le divorce est
un problème d’adultes : l’échec des parents ne doit pas être celui des enfants.
Des répercussions selon l’âge des enfants…
La capacité de l’enfant à supporter l’absence de l’un de ses parents évolue avec son
âge.
Jusqu’à 2 ans, la mère occupe une place importante pour lui. D’après Winnicott, la
grossesse a installé chez elle un état psychique spécifique lui permettant de s’identifier
aux besoins de son bébé dans une relation fusionnelle, état dont elle se dégage ensuite
peu à peu pour pouvoir le confronter à la frustration et au monde réel. Entre 6 et 9
mois en particulier, le nourrisson prend conscience de son être comme distinct de sa
mère. La vue d’un inconnu évoque l’absence de celle-ci et entraîne une angoisse, dite
« angoisse du 8ème mois », qui se manifeste bien souvent par un détournement du
regard, une moue ou des pleurs. La perte de l’objet maternel répétée pendant cette
période, dans le cadre d’un divorce, présente un très fort impact sur le psychisme de
l’enfant. Mais chaque cas est particulier, cet impact peut être nuancé si la présence
d’un frère ou d’une sœur plus âgé, évoquant la mère, lui procure un soutient.
Entre 3 et 6 ans, l’enfant aborde le conflit oedipien et quand les parents forment un
couple, le conflit se résout peu à peu, l’enfant acceptant d’être un enfant et se
consolant en s’identifiant à sa mère ou son père selon son sexe.
Quand l’un des deux est absent, ses souhaits d’éliminer le parent rival voient la
possibilité de se réaliser. Il est facile au garçon de séduire la mère et à la petite fille de
séduire le père, ce qui satisfait momentanément le parent rejeté par le conjoint. Mais
plus l’enfant est jeune, plus il risque de souffrir et de se culpabiliser car il n’a pas
encore effectué de refoulement de ces désirs incestueux. Il a besoin d’être rassuré sur
le fait qu’il n’est pour rien dans le divorce de ses parents.
Il n’y a pas de bon âge pour divorcer mais les choses seront mieux vécues si l’enfant a
une capacité bien établie de symboliser ce qui lui arrive, capacité bien installée vers
l’âge de 7-8 ans. Mais ne pas divorcer et l’exposer à des scènes de disputes conjugales
de même qu’à une tension dissimulée mais qu’il peut ressentir, l’angoisse tout autant
car il aime ses parents. Sa survie dépend de ces deux êtres qui, s’ils s’entendent, lui
donnent de la tendresse, de la sécurité, de l’autorité dans la liberté.
… et selon l’attitude des adultes
Le divorce de ses parents apporte aussi tout un lot de « bénéfices secondaires » pour
l’enfant : il a deux fois plus de cadeaux à Noël ou aux anniversaires… . Bien souvent, le
parent qui n’en a pas la garde va chercher à compenser le manque de temps passé
avec lui par toutes sortes d’attitudes : un peu moins de règles, un peu plus de
cadeaux… . L’enfant peut d’ailleurs profiter de cette situation, par exemple en se
plaignant auprès de celui avec lequel il vit : « avec papa (ou maman), j’ai le droit de ne
pas manger à table, j’ai eu une console… !», réussissant à le faire culpabiliser parfois à
le faire céder par crainte de perdre l’affection de son enfant.
Cependant l’autorité est aussi nécessaire aux enfants que l’affection, l’absence de
discipline entraînant des perturbations aussi graves qu’une autorité tyrannique. Sans
autorité, le sujet vit dans l’insécurité et l’anxiété. Même si cela est parfois difficile et
pose un dilemme à bon nombre de parents divorcés, il est donc important de rester
ferme et cohérent, d’essayer de rester en accord au moins sur les attitudes éducatives.
Par ailleurs, la tentation peut être grande pour les parents, du moins au début de la
séparation, de chercher à savoir comment vit l’autre, s’il fréquente d’autres personnes.
Il arrive que certains adultes interrogent leur enfant, le plaçant ainsi en position
d’ « espionner » son père ou sa mère. De même, lorsque la mésentente est si forte que
les parents ne s’adressent plus la parole, même pour aborder le sujet de l’éducation,
l’enfant devient intermédiaire, messager parfois de reproches.
Souvent, les couples passionnels qui se séparent placent leur enfant en position
d’arbitre ou de juge, situation illusoire de puissance qui l’empêche de retrouver son
statut d’enfant. Lorsque la place d’un enfant est excessive dans une famille, qu’il est
« tout » pour ses parents, ceux-ci, quand ils divorcent, respectent rarement le droit de
visite ou de garde alternée de l’autre, créant alors une situation conflictuelle pour
l’enfant qui se sent obligé de choisir.
D’autre part, en particulier pour les couples qui fonctionnaient en miroir, la séparation
peut être vécue par l’enfant comme la perte d’une part de son identité. Ces adultes
supportent difficilement tout éloignement de l’autre qu’ils ressentent comme une
véritable trahison à laquelle ils réagissent parfois par une dépression. Ils se raccrochent
alors bien souvent à leur enfant comme à une « bouée de secours », avec lequel ils
forment un nouveau couple replié sur soi.
Par conséquent, au traumatisme de la séparation peut s’ajouter un mal-être induit par
les attitudes et réactions des adultes, pouvant même contribuer à développer des
troubles importants de l’identité chez l’enfant qui ne peut alors plus discerner où est sa
place en tant qu’enfant.
Conserver l’image de chacun des parents
Si l’enfant souffre de l’impossibilité de se situer en face du couple, il souffre également
de l’absence du père. Le père intervient de façon symbolique comme tiers séparateur
dans le couple mère-enfant, permettant ainsi à chacun d’entre eux d’évoluer de façon
individualisée et de s’ouvrir au monde.
Il est donc important que l’enfant conserve pour le père ou la mère qui ne vit pas avec
lui une affection mêlée d’admiration, car comment adhérer à un modèle décrié par le
conjoint ? Quelle que soit la rancœur, l’agressivité entre les deux parents, l’enfant ne
doit pas entendre les réflexions désobligeantes envers celui qui ne vit plus au domicile.
Si le parent qui ne vit plus avec l’enfant continue à le voir, à s’intéresser à lui, alors
l’identification sera possible.
L’insécurité
L’enfant est en insécurité du fait des problèmes urgents à résoudre : ambiance
tumultueuse, appartement à changer voire ville, voire nom… Parfois la garde alternée
journalière peut être aussi difficile à vivre que la garde hebdomadaire ou mensuelle.
L’important est d’adopter un comportement cohérent avec soi-même et avec l’autre
parent. Cela apporte à l’enfant un cadre stable et rassurant afin d’essayer de
compenser les nombreux changements de repères apportés par la nécessité nouvelle
de ne voir ses parents que séparément et de devoir investir deux cadres de vie
différents.
Un enfant qui se sent en sécurité, porté par le regard positif de ses parents, n’a pas
besoin, en grandissant, de garder un contact permanent avec eux. Souvent, même, il
pleure moins et supporte mieux les séparations. Il a appris que même si ses parents
s’éloignent un peu, ils reviennent toujours en cas de besoin.
La culpabilité
L’enfant peut ressentir le départ du parent qui quitte le foyer comme un abandon, et
peut se considérer comme responsable croyant qu’il a été assez méchant pour qu’on le
quitte, et que peut-être l’autre parent le laissera aussi, ne l’aimera plus.
Le vœu de l’enfant est que ses parents soient toujours uns et il se sent responsable de
leur bonne entente. Il souhaite revenir en arrière plutôt qu’aller vers l’avant, à la
période où tout allait pour le mieux à ses yeux. Certains d’ailleurs régressent ou
développent inconsciemment un symptôme, attirant l’attention sur eux plutôt que sur la
mésentente parentale, s’assurant alors parfois la présence des deux parents auprès
d’eux.
La connaissance que peut avoir l’enfant de la bonne entente de ses parents au moment
de sa naissance peut l’aider à accepter la dure réalité actuelle.
L’organisation de la vie de l’enfant
Une organisation, une vie sociale et familiale sont nécessaires au bien-être de l’enfant.
Les visites, week-end, vacances et surtout leur régularité et leur répétition, la certitude
du versement de la pension alimentaire pour les plus grands, donnent à l’enfant une
sécurité qui l’aide à accepter les situations et la peur de l’abandon.
Un divorce bien accepté des parents
Les parents divorcés qui s’entendent si bien qu’ils prennent leur repas ensemble
peuvent développer chez l’enfant un sentiment de superficialité : « tout le monde
s’aime mais personne ne s’entend… », lui donnant parfois l’illusion qu’une réconciliation
est toujours possible. Il ne pourra pas alors investir de nouveaux repères.
La qualité de l’amour parent-enfant, la disponibilité, est plus importante souvent que la
quantité de temps passé.
Cette réassurance ne pourra s’établir pour l’enfant que si les parents ont retrouvé leur
équilibre (s’il n’est plus éternelle victime, dépressif…) et l’acceptation de nouveau
conjoint peut se faire plus facilement, après y avoir préparé l’enfant bien entendu.
Personne n’ignore que la séparation atteint l’enfant au plus profond de sa personnalité,
peut être source d’inadaptation sociale, mais qu’il est aussi préférable à un climat de
haine et de tension. Françoise Dolto disait que « pour l’enfant, mieux vaut un bon
divorce qu’un mauvais mariage. ». En effet, il souffre de la séparation de ses parents
quoiqu’il arrive mais entre deux maux, il faut choisir le moindre : mieux vaut deux
parents séparés mais heureux que malheureux ensemble.
Etre encore des parents
On peut comprendre que l’on peut quand même s’aimer sans se supporter, et si les
conjoints ne sont plus ensemble ils ne sont pas moins parents aimants dans la plupart
des cas.
S’ils savent laisser leurs désaccords de côté pour se concentrer sur les besoins de leur
enfant, s’ils réussissent à adopter des attitudes éducatives cohérentes, alors leur enfant
finira par accepter peu à peu leur divorce et à s’adapter à sa nouvelle vie.
Mais parfois, les conflits sont tellement lourds qu’une telle entente malgré la séparation
leur est trop difficile. L’enfant trouve parfois un soutien auprès d’une fratrie plus âgée
ou même d’une personne extérieure à la famille, lui permettant de surmonter
l’événement. Mais cela n’est pas toujours le cas et il arrive que la séparation de ses
parents représente pour lui un véritable traumatisme, entraînant l’apparition de
symptômes divers (troubles du comportement, du sommeil, de l’appétit…). Dans ce
cas, un suivi thérapeutique doit être envisagé.

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