Sténose pulmonaire chez le chien

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Sténose pulmonaire chez le chien
Sténose pulmonaire chez le chien
Par le Docteur Jean Philippe CORLOUER
Service de Médecine - Cardiologie, CHV FREGIS
Une malformation congénitale du coeur
La sténose pulmonaire est une cardiopathie congénitale
relativement fréquente (environ 20 à 28 % des cas de malformation du cœur). Selon certains auteurs, les mâles seraient
prédisposés.
La sténose pulmonaire du chien est due à un rétrécissement
de la base d’un gros vaisseau qui part du cœur, appelé tronc
pulmonaire. C’est le vaisseau qui envoie le sang du ventricule droit vers les poumons. La valve, située entre la « sortie
du cœur » et la base de ce vaisseau (ou valve pulmonaire),
est épaissie, fibreuse et partiellement soudée. Elle forme alors
un rétrécissement qui gène le passage du sang. Il s’en suit un
excès de travail pour le ventricule droit qui fini par se fatiguer
et être responsable du développement d’une insuffisance
cardiaque droite.
La sténose pulmonaire est parfois associée à d’autres anomalies cardiaques complexes (Tétralogie de Fallot en particulier)
Sténose pulmonaire chez le chien.
Lors de la contraction du cœur,
le sang contenu dans le ventricule droit (VD) a du mal à passer
(flèche) dans le tronc pulmonaire
(TP) à cause d’un anneau fibreux
(en vert) au niveau de la valve pulmonaire. (AG : oreillette gauche ;
AD : oreillette droite ; VG : ventricule gauche ; Ao : Aorte)
Les symptômes
Le plus souvent, et selon le degré de gravité, ils n’apparaissent que vers l’âge 10-12 mois, parfois beaucoup plus
tard. Les symptômes sont ceux d’une insuffisance cardiaque
droite tels que : fatigue à l’effort, syncopes, ascite, …
Le diagnostic
Si les symptômes remarqués par le propriétaire peuvent être
tardifs, la suspicion par le vétérinaire est normalement très
précoce. En effet, cette anomalie cardiaque est à l’origine
d’un souffle qui est présent chez le chiot. Il est classiquement
détecté lors du premier examen pré-vaccinal. Un souffle
cardiaque chez un chien peut avoir de nombreuses significations et doit être systématiquement exploré. L’objectif
sera, dans un premier temps, de déterminer la nature de la
maladie cardiaque responsable du souffle entendu (ici une
sténose pulmonaire) et, dans un deuxième temps, d’évaluer
Photo 1 : Radiographie du cœur
d’un chien de race Boxer atteint
d’une sténose pulmonaire. La partie droite du cœur (flèche jaune)
et le tronc pulmonaire (flèche
blanche) sont hypertrophiés.
les conséquences de la sténose pulmonaire sur le fonctionnement du cœur, c’est-à-dire déterminer le degré d’insuffisance
cardiaque. Pour ce faire, des examens radiographiques
(avec ou sans préparation), électrocardiographiques et surtout échocardiographiques et Doppler permettront de répondre à ces questions.
Selon le stade, la radiographie montre une déformation
du tronc pulmonaire et une augmentation de la taille du
cœur droit plus ou moins prononcées (photo 1). L’angiographie permet de visualiser le rétrécissement. L’électrocardiogramme (ECG) peut lui aussi présenter des modifications
dues à l’augmentation de la taille de la partie droite du cœur
(photo 2) mais parfois aussi des troubles du rythme ce qui
est généralement un signe de gravité. L’échocardiographie
et le Doppler sont incontournables pour établir le diagnostic différentiel avec d’autres malformations cardiaques mais
aussi de déterminer la gravité de l’atteinte (photos 3 et 4).
Photo 2 : Electrocardiogramme
(ECG) d’un chien de race West
Highland White terrier (WHWT). Les
modifications induites par la sténose pulmonaire se traduisent ici
par une grande onde négative
(flèche).
Le traitement
Le traitement de choix consiste à supprimer la cause et donc à « agrandir » l’orifice sténosé.
Il existe différentes techniques avec des contraintes, des coûts, des risques et des résultats
très différents. La plus « élégante » est certainement la dilatation par sonde à ballonnet sous
contrôle fluoroscopique mais les indications doivent être bien posées et la mise en œuvre
demande des compétences et un plateau technique très particuliers (Photo 5).
Il n’existe pas de traitement « médicamenteux » de la sténose pulmonaire. En revanche, si
des symptômes d’insuffisance cardiaque droite sont identifiés, certains médicaments pourront très significativement améliorer la qualité de vie du chien.
Races de chien prédisposées – Hérédité et génétique - Reproduction
La sténose pulmonaire est une cardiopathie congénitale qui touche de nombreuses races
de chiens. Les plus concernées sont certainement le Bouledogue français, le Boxer, le Bulldog anglais et le Fox terrier. Mais elle n’est pas exceptionnelle chez : Airedale, Basset Hound
Beagle, Berger Allemand, Bullmastiff, Chihuahua, Chow-chow, Cocker, Labrador, Mastiff,
Samoyède, Scottish Terrier, Schnauzer, Terre-Neuve, West Highland White Terrier
L’origine génétique est prouvée chez le Beagle, selon un mode polygénique, et fortement
suspectée dans d’autres. Il est donc fortement déconseillé de faire reproduire les chiens
atteints de sténose pulmonaire
Photo 3 : Echocardiographie avec Doppler continu sur un
chien de race Bulldog anglais atteint d’une grave sténose
pulmonaire. Le rétrécissement à la base du tronc pulmonaire est responsable d’une très importante augmentation
de la vitesse d’éjection du sang, représentée par le cône
blanc (flèche) qui ne devrait dépasser la ligne rouge pointillée.
Photo 4 : Echocardiographie avec Doppler
couleur sur un chien de race Chihuahua atteint d’une sténose pulmonaire. La colonne
de sang éjectée du ventricule droit (VD) et
matérialisée par la couleur est brutalement
resserrée au niveau de la sténose. La sténose
est due à une malformation de la valve pulmonaire, située entre le ventricule droit et le
tronc pulmonaire.
Photo 5 : Traitement d’une sténose pulmonaire chez un chien de race TerreNeuve. Un ballonnet (étoile) est introduit
depuis le vaisseau d’une patte arrière
jusque dans le cœur au niveau de la sténose (flèche) qui le déforme. Il est alors
fortement gonflé pour « déchirer » la sténose.
Les points importants
La sténose pulmonaire est une malformation cardiaque congénitale fréquente chez le
chien
L’auscultation du chiot permet de la suspecter mais des examens complémentaires
(radiographie, électrocardiogramme, échographie, Doppler) sont indispensables pour
établir le diagnostic
Le pronostic est variable selon la gravité mais l’évolution vers une insuffisance cardiaque
se fait en moyenne en 6 ans
Il n’y a pas de traitement médicamenteux mais dans certains cas une dilatation sous
contrôle fluoroscopique peut être indiquée.
Certaines races sont prédisposées