1 JÉSUS-CHRIST CRUCIFIÉ ! « Je suis venu pour… » Aujourd`hui, l

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1 JÉSUS-CHRIST CRUCIFIÉ ! « Je suis venu pour… » Aujourd`hui, l
JÉSUS-CHRIST CRUCIFIÉ !
« Je suis venu pour… »
Aujourd’hui, l’on ne songe plus à nier l’existence historique de Jésus de Nazareth. On utilise
une autre méthode, celle qui consiste à “démystifier” son personnage, c’est-à-dire à le déposséder du
caractère miraculeux et divin que la “niaiserie et la crédulité des chrétiens” persistent à voir en lui.
Jésus de Nazareth n’est plus, pour beaucoup, qu’un philosophe comme tant d’autres avant et
après lui, lui qui a su marquer son époque d’une profonde empreinte. On parle de Jésus le
Révolutionnaire ; on évoque même “le communisme” de Jésus. Son influence sur le peuple étant
considérée comme séditieuse, il fut, simplement liquidé. C’est à peu près toute l’idée que l’on se fait
de lui dans certains milieux. Dans un film de Luis Bunuel, où le producteur athée met en scène divers
personnages religieux y compris le Christ, on a pu entendre certains critiques donner leur avis sur ce
personnage décidément obsédant qu’est le Christ, sur ce ton détaché et pédant que prennent ceux qui
sont au courant de tout – ou du moins qui veulent en donner l’impression. Mais que savent-ils au
juste de Jésus de Nazareth ? Parieraient-ils avec autant d’aplomb s’ils avaient lu le récit des témoins
du Christ que nous préserve l’Évangile ? Car hors l’Évangile, nous ne savons presque rien de Jésus.
Songeraient-ils à discuter le personnage de Voltaire ou de Rousseau avant d’avoir lu toute leur
œuvre ? Car ce qu’ils ont dit est l’expression même de leur pensée, c’est-à-dire de leur être.
“Un homme appelé Jésus, a vécu sous le règne de Tibère et est mort crucifié voilà
l’événement qui appartient aux données de l’histoire universelle. En ce qui concerne le détail de
l’existence et de la doctrine de Jésus, les Évangiles et les autres écrits du Nouveau Testament
demeurent la source unique.” (Les Évangiles et l’Histoire de Jésus – Xavier Léon-Dufour)
Ayons donc le bon sens et la loyauté de consulter ces sources au lieu de lire ce qu’un autre a
écrit ou raconté sur ce sujet.
Or, si l’on a le courage d’aller aux sources, on se heurte, comme un rocher, au personnage
qu’on y trouve – et l’on commence à comprendre pourquoi il vit encore aujourd’hui après deux mille
ans dans le cœur de millions de disciples.
En effet, on n’y trouve pas un philosophe qui donne simplement son avis sur le sens de
l’existence ; ni un enthousiaste ou un exalté qui cherche à agiter les foules par ses doctrines
politiques. On y trouve, au contraire, un homme parfaitement équilibre qui jette sur le monde et les
hommes un regard lucide et nécessaire. Il sait qu’il a une mission à remplir et il la définit clairement.
Elle dépasse infiniment toutes perspectives sociales ou politiques. Elle vise essentiellement à relier
l’homme avec son créateur – relier, c’est-à-dire leur à nouveau car l’union était rompue.
Nous allons noter aujourd’hui la plupart des grandes déclarations du Christ dans lesquelles il
définit sa mission parmi les hommes. Nous découvrions alors le véritable Christ ; celui qui se révèle
dans ce qu’il dit, dans le message qu’il apporte, tel qu’il a voulu se faire connaître au monde.
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POUR ACCOMPLIR LA LOI ET LES PROPHÈTES
« 17 Je suis venu pour accomplir la loi et les prophètes. » (Matthieu 5, 17) Cette déclaration
qui se place au seuil de son ministère public le situe d’emblée par rapport à l’Ancien Testament. Il
est venu accomplir, c’est-à-dire réaliser, toutes les prophéties de l’Ancien Testament à son égard. Il
est le Messie, l’envoyé de Dieu, annoncé par la Loi et les prophètes. Mais en même temps, il va
parfaire l’Ancienne Loi en révélant son sens profond. C’est ainsi qu’il s’impose aussi comme le
législateur de la Nouvelle Alliance entre Dieu et les hommes, alliance qu’il scellera par son sang.
Dès le commencement de son ministère public, il va chercher à prouver au peuple qu’il est
l’aboutissement de tout l’Ancien Testament, sa raison d’être en quelque sorte. Un jour, dans une
synagogue, on lui demande, selon la coutume, de faire la lecture. On lui remit le rouleau de la
prophétie d’Ésaïe.
L’ayant déroulé, il trouva l’endroit où il était écrit : « 18 L’esprit du Seigneur est sur moi,
parce qu’il m’a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres. Il m’a envoyé pour guérir ceux
qui ont le cœur brisé, 19 pour proclamer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le recouvrement
de la vue, pour renvoyer libres les opprimés, pour publier une année de grâce du Seigneur. » (Luc 4,
18-19)
Ce texte qu’il venait de lire, avait été écrit quelques six siècles auparavant. Tout le monde le
savait. Imaginez alors la surprise de ses auditeurs lorsque Jésus leur déclara : « 21 Aujourd’hui cette
parole de l’Écriture que vous venez d’entendre est accomplie. » (Luc 4, 21)
L’ère messianique annoncée par les prophètes était arrivée. Aujourd’hui l’aveugle va
recouvrer la vue et l’esclave retrouver la liberté. Et l’on sent que ce n’est pas tant du soulagement des
maux physiques dont il est ici question que de la guérison des âmes meurtries, aveugles et
prisonnières à cause du péché.
POUR APPELER DES PÉCHEURS
Il ne manque pas de préciser plusieurs fois le caractère “intérieur” de sa mission dans le sens
des âmes par exemple lorsqu’il dit : « 13 Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs à
la repentance. » (Matthieu 9, 13) et encore : « 11 Le Fils de l’homme est venu sauver ce qui était
perdu. » (Matthieu 18, 11)
Où est l’agitateur politique dans ces paroles ? Où est même le philosophe raisonneur et
subtil ? Et si l’on se plaît à voir en lui un révolutionnaire, qu’on veuille bien d’abord préciser ce
terme. Si, par-là, on veut dire qu’il est venu réveiller les consciences, les sortir de leur torpeur et de
leur enlisement pour leur faire sentir la misère de leur condition et leur faire connaître le salut de
Dieu, alors, d’accord pour le Christ révolutionnaire. Mais qu’on se garde bien de le séparer de sa
mission qui est essentiellement d’apporter au monde la guérison de son mal, c’est-à-dire du péché.
En sa personne, c’est Dieu lui-même qui intervient dans les affaires des hommes pour leur
montrer :
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Le seul chemin à suivre parmi tous ceux qu’on leur propose et tous ceux qu’ils ont essayés ;
La seule vérité parmi toutes les fausses certitudes et les promesses trompeuses qui les découragent et
les aigrissent.
La vie véritable, celle qui ne se laisse pas vaincre par la mort, mais qui jaillit jusque dans
l’éternité.
POUR ÉCLAIRER LE MONDE
« 12 Je suis la lumière du monde » a-t-il encore dit, « 12 Celui qui me suit ne marchera pas
dans les ténèbres mais il aura la lumière de la vie. » (Jean 8, 12) « 35 Celui qui marche dans les
ténèbres ne sait où il va » (Jean 12, 35) Et c’est bien là le problème de notre monde qui ne sait où il
va, ni dans quelle direction il doit aller.
La venue du Christ parmi les hommes est comparée à l’interruption de la lumière au sein de
l’obscurité – « 79 pour éclairer ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort »
disait la prophétie « 79 pour diriger nos pas dans le chemin de la paix. » (Luc 1, 79)
Oui, chers amis, le Christ est le seul espoir du monde. Mais parce que le monde vit sans
Christ ; parce qu’il le considère comme un simple personnage historique à peine plus intéressant que
Napoléon ou Socrate ; parce qu’il dédaigne son message nous nous trouvons au bord du gouffre,
menacés par la guerre universelle, minés par les conflits sociaux, sapés par l’inquiétude.
Pourtant nous ne manquons pas de moyens techniques ; nous ne manquons pas de savants ; ni
de professeurs ; ni de penseurs ; ni de philosophes. Mais il semble bien que nous soyons encore dans
l’obscurité et que notre civilisation soit un échec. Il suffit de jeter un coup d’œil au bilan de ces
soixante dernières années pendant lesquelles nous avons réussi à déclencher cinquante conflits ! … et
c’est un lieu commun que de parier de cataclysme universel ! On s’y habitue déjà !
POUR UN JUGEMENT
À cet égard, il faut rappeler une autre déclaration de Jésus que l’on passe sous silence
lorsqu’on ouvre le dossier « Jésus de Nazareth » pour discuter son cas : « 39 Je suis venu dans ce
monde pour un jugement, pour que ceux qui ne voient point voient et que ceux qui voient deviennent
aveugles. » (Jean 9, 39)
Ceux qui font profession de savoir et de connaître, et qui n’ont que faire de ses enseignements
pas plus que de ses avertissements parce qu’ils ont déjà décidé de ce qu’ils veulent croire, ceux-là
sont les vrais aveugles.
Ceux au contraire qui cherchent, ceux qui souffrent de ne pas connaître le vrai sens de leur vie
et de n’avoir aucune espérance valable, ceux qui confessent leur ignorance devant le mystère de la
vie, ceux-là sont prêts à recevoir la vraie lumière, celle qui éclair la route jusqu’au bout : celle qui
guide avec fidélité et vérité : celle qui réchauffe, réconforte et donne la vie. « 12 À tous ceux qui l’ont
reçue, à ceux qui croient en son nom, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu. » (Jean 1,
12)
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Par sa venue dans le monde, un discernement s’opère entre les hommes – en fait, un
renversement des rôles. La « folie des croyants » est la sagesse de Dieu. « 10 Je suis venu afin que
mes brebis aient la vie et qu’elles soient dans l’abondance. » (Jean 10, 10)
Il n’est pas possible de séparer le personnage historique du Christ d’avec cette mission qui
dépasse l’histoire et qu’il vient de rappeler. Elle est sa raison d’être. « Je suis venu pour cela. » Toute
explication, tout examen, qui ne tient pas compte de ces déclarations pour ne faire de lui qu’un
simple phénomène social en Palestine est inqualifiable. C’est l’aveuglement dont il a parlé ;
aveuglement d’autant plus profond qu’il est volontaire et farouchement entretenu.
CONCLUSION
Pour conclure, il faut rappeler encore une fois le but suprême de sa mission, qu’il exprime en
ces termes : « 28 Le fils de l’homme est venu non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie
comme la rançon de plusieurs. » (Matthieu 20, 28) « 28 C’est pour cela que je suis venu jusqu’à
cette heure. » (Jean 12, 28)
Comment peut-on méconnaître le sens que Jésus donne à sa mort ?
Il est venu pour être immolé est son sacrifice servir de rançon pour ceux qui voudront se
libérer de leur péché et retrouver la communion avec Dieu.
Dédaigner de prendre cela au sérieux, c’est rejeter le Christ dans sa totalité d’un seul coup.
IL y a peu de passages qui nous décrivent le Christ élevant la voix. Il y en a un qui mérite
d’être rappelé où Jésus, peu de temps avant sa mort, « s’écrie » devant la foule, comme pour insister
une dernière fois sur le sens de sa mission parmi les hommes : « 44 Celui qui croit en moi, croit non
pas en moi mais en celui qui m’a envoyé ; 45 et celui qui me voit, voit celui qui m’a envoyé. 46 Je
suis venu comme une lumière dans le monde, afin que quiconque croit en moi ne demeure pas dans
les ténèbres. 47 Si quelqu’un entend mes paroles et ne les garde point ce n’est pas mi qui le juge, car
je suis venu non pour juger le monde, mais pour sauver le monde. 48 Celui qui me rejette et qui ne
reçoit pas mes paroles a son juge ; la parole que j’ai annoncée, c’est elle qui le jugera au dernier
jour. 49 Car je n’ai point parlé de moi-même, mais le Père qui m’a envoyé, m’a prescrit lui-même ce
que je dois dire et annoncer. 50 Et je sais que son commandement est la vie éternelle. C’est pourquoi
les choses que je dis, je les dis comme le Père me les a dites. » (Jean 12, 44-50)
COMBIEN DE TEMPS ENCORE
RESTERONS-NOUS SOURDS À SON APPEL
ET RÉFRACTAIRES À SA LUMIÈRE ?
À CAUSE DE NOS PÉCHÉS
Le chapitre 53 du livre Ésaïe donne une description tellement précise, tellement vivante de la
mission du Christ, qu’on a, à juste titre, appelé ce passage ; le cinquième évangile. Ce fait est
d’autant plus frappant que ce texte prophétique a été rédigé environ cinq cents ans avant la réalisation
des événements qu’il rapporte. En voici quelques extraits :
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« 2 Il s’est élevé devant lui comme une faible plante, comme un rejeton qui sort d’une terre
desséchée ; IL n’avait ni beauté, ni éclat pour attirer nos regards, et son aspect n’avait rien pour
nous plaire. 3 Méprisé et abandonné des hommes, homme de douleur et habitué à la souffrance,
semblable à celui dont on détourne le visage, nous l’avons dédaigné, nous n’avons fait de lui aucun
cas.
4 Cependant, ce sont nos souffrances qu’il a portées, c’est de nos douleurs qu’il s’est
chargé ; et nous l’avons considéré comme puni, frappé de Dieu et humilié. 5 Mais il était blessé pour
nos péchés, brisé pour nos iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et c’est
par ses meurtrissures que nous sommes guéris.
6 Nous étions tous errants comme des brebis, chacun suivait sa propre voie ; Et l’Éternel a
fait retomber sur lui l’iniquité de nous tous. 7 Il a été maltraité et opprimé, et il n’a point ouvert la
bouche, semblable à l’agneau qu’on mène à la boucherie, à une brebis muette devant ceux qui la
tondent ; Il n’a point ouvert la bouche. »
Dans cette prophétie, il s’agit indiscutablement de Jésus de Nazareth. Toutes les grandes
prophéties de l’Ancien Testament gravitent autour de ce thème central ; la venue et la mission du
Messie. Ces prophéties sont réparties dans la plupart des livres dont l’ensemble constitue l’Ancien
Testament.
LES PROPHÉTIES DÉCRIVENT SA MORT
Ainsi, il avait été dit que le Messie serait trahi par un ami intime (Psaumes 41, 10). Le
prophète Zacharie avait même précisé que le prix de cette trahison serait 30 sicles d’argent (11, 13).
Ce même prophète annonce la désertion de ses disciples lorsqu’on viendra pour l’arrêter et le juger.
(13, 7).
Les Psaumes annoncent la soif terrible dont il sera tourmenté et le breuvage immonde qu’on
lui donnera. Ils précisent que ses vêtements seront tirés au sort, qu’aucun os de son corps ne sera
brisé, et, fait important par-dessus tout, qu’il ne serait pas retenu par liens de la mort.
Nous avons noté, que tout en dépeignant d’une manière tragique les souffrances du serviteur
de Dieu, Ésaïe insiste surtout sur le sens de ces souffrances et de cette mort… Il viendrait souffrir et
mourir afin d’effacer toutes les fautes, les égarements, les injustices, en un mot, tous les péchés des
hommes.
Perdre ceci de vue, c’est reléguer la crucifixion du Christ au rang des autres exécutions
capitales qui n’ont d’autre intérêt que le fait divers qu’elles constituent et d’autre valeur que celle de
renforcer la loi des hommes.
L’AGNEAU DE DIEU
Le récit de la vie et de la mort du Christ, tel qu’il nous a été rapporté par des témoins choisis
par Dieu, nous invite instamment à envisager Jésus de Nazareth comme l’agneau de Dieu qui ôte les
péchées du monde ; comme la rançon dont tous les hommes peuvent bénéficier pour payer le prix de
leur liberté d’âme ; comme le baume guérisseur de toutes nos infirmités.
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C’est ainsi, et ainsi seulement que nous pouvons comprendre « 3 cet homme de douleur
habitué à la souffrance ». (Ésaïe 53, 3).
Le récit biblique n’insiste pas sur sa jeunesse. Nous ne savons rien de son adolescence. C’est
à trente ans que nous le retrouvons, à l’âge où un homme est vraiment homme. C’est alors qu’il s’est
mis à prêcher sa doctrine où il n’était question que d’amour, et de loyauté envers Dieu et d’unité
entre les hommes. Il était entouré d’un bon nombre de disciples plus ou moins fidèles. Cependant, il
y en avait douze qui étaient constamment avec lui, vivant dans son intimité. Pour eux, Jésus était leur
vie, leur maître, leur Dieu. L’un d’entre eux s’appelait Pierre. Cet homme pensait aimer Jésus si for
qu’un jour il lui dit : « 35 Quand il me faudrait mourir avec toi, je ne te renierai pas ! » L’Écriture
ajoute que « 35 tous les disciples dirent la même chose. » (Matthieu 26, 35)
IL AIMAIT ON L’A HAÏ
Paradoxalement, Jésus qui aimait tant les hommes d’un amour sans limites, était haï. On était
jaloux de sa popularité. On voulait le « supprimer » et on y parvint. Un des douze, qui s’appelait
Judas, le trahit et le vendit à ses bourreaux pour trente pièces d’argent… le prix d’un esclave.
Les Évangiles ont su nous faire vivre l’angoisse de cette nuit qui précède sa mort. Jésus prie.
Il voudrait tant que ses disciples prient avec lui pendant cette heure cruciale, mais ils se sont
endormis. Il restera donc seul dans ces moments où toute son humanité transparaît. Une sueur
d’angoisse mêlée de sang coule de son visage. Il est douloureusement conscient du fait que l’heure
pour laquelle il est né, est arrivée. La coupe de souffrance est pour lui ; car le sacrifice expiatoire,
c’est lui ; l’holocauste, c’est lui. L’agneau de Dieu, c’est lui. La tentation de se soustraire à l’épreuve
est là, mais il se reprend vite et s’en remet entièrement à la volonté de son Père. « 36 Non pas ce que
je veux » lui dit-il, « 36 mais ce que tu veux. » (Marc 14, 36)
ON L’ARRÊTE
Cette nuit-là, des hommes armés de bâtons et d’épées vinrent se saisir de lui sous la direction
de Judas – « 56 Voyant cela, tous les disciples l’abandonnèrent et prirent la fuite. » (Matthieu 26,
56).
« 3… Méprisé et abandonné des hommes, homme de douleur et habitué à la souffrance … »
(Ésaïe 53, 3). « 58 Pierre le suivit de loin jusqu’à la cour du souverain sacrificateur, y entra et
s’assis avec les serviteurs, pour voir comment cela finirait. » (Matthieu 26, 58). Et c’est là que par
trois fois il renia Jésus, affirmant avec serment n’avoir jamais été avec « 69 Jésus le Galiléen ».
(Matthieu 26, 69).
UN SEMBLANT DE JUGEMENT
Pendant ce temps, Jésus était soumis à un semblant de jugement, une sorte de travesti, devant
le souverain sacrificateur.
« 67 Ils lui crachèrent au visage, et lui donnèrent des coups de poing et des soufflets, en
disant : 68 Christ, prophétise, dis-nous qui t’a frappé. » (Matthieu 26, 67-68).
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On le fit ensuite comparaître devant Pilate. Celui-ci, convaincu de son innocence, tenta
faiblement de raisonner la foule. Mais la bête trop avide de sang noble préféra libérer un criminel.
Quelques jours auparavant, tandis que Jésus entrait triomphalement à Jérusalem, cette même foule
avait pourtant crié et chanté « 9 Hosanna au Fils de David » (Matthieu 21, 9)… et maintenant elle
hurle : « 21 Crucifie-le – Crucifie-le ! » (Luc 23, 21).
PILATE LE LIVRE
Craignant pour son poste de gouverneur, Pilate le leur livre pour le supplice de la flagellation
avant l’ultime étape jusqu’à Golgotha. Tandis que l’Évangile découvre devant nos yeux le dos de ce
Galiléen harassé de coups et qui n’est plus qu’une plaie après la flagellation, la voix d’Ésaïe le
prophète rappelle au monde spectateur : « 5 Mais il était pour nos péchés, Brisé pour nos iniquités.
Le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, Et c’est par ses meurtrissures que nous
sommes guéris. » (Ésaïe 53, 5).
Les soldats ont présent, eux aussi, veulent se repaître d’un spectacle intéressant et gratuit. Ils
lui arrachent les vêtements et le couvrent d’un manteau écarlate. Puis, sur la tête bénie ils enfoncent
une couronne d’épines. Après s’être moqué de lui, après avoir souillé son visage de leurs crachats, ils
lui remirent ses vêtements et l’emmenèrent pour le crucifier.
BATTU ET CRUCIFIÉ
« 7 Il a été maltraité et opprimé, et il n’a point ouvert la bouche, semblable à un agneau
qu’on mène à la boucherie, à une brebis muette devant ceux qui la tondent ; et il n’a point ouvert la
bouche. » (Ésaïe 53, 7).
Crucifié comme un malfaiteur, entre deux malfaiteurs, on l’injuriait encore du pied de la croix
et on se moquait de lui. Certains de ceux qui étaient là, se souvinrent peut-être de ce qu’il avait dit
quelques temps auparavant : « 32 Lorsque j’aurai été élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à
moi. » (Jean 12, 32).
Cependant, sur sa croix, il n’attirait pour le moment que les regards curieux, les injures et les
mouches. Dans toute sa souffrance, il était seul, avec tous les péchés du monde sur lui. Et, dans cette
terrible solitude, l’agneau de Dieu souffrant, ensanglanté et mourant, s’écria : « 46 Mon Dieu, mon
Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Il y eut des ténèbres sur toute la terre. Le soleil refusa de
donner sa lumière pendant l’agonie du Fils de Dieu.
Environ 20 ans plus tard, en évoquant la mort du Messie, l’apôtre Paul s’écrira : « 7 À peine
mourrait-on pour un juste ; quelqu’un peut-être mourrait-il pour un homme de bien. 8 Mais Dieu
prouve son amour envers nous en ce que, lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort
pour nous. » (Romains 5, 7-8).
Chers amis, s’il ne me restait plus qu’un sermon à prêcher, cet ultime message contiendrait la
substance de ce que je viens de vous rappeler. C’est l’histoire, c’est la révélation, c’est l’événement
le plus considérable de toute l’histoire de l’humanité.
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« 16 Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui
ne périsse point mais qu’il ait la vie éternelle. » (Jean 3, 16).
Il est mort pour les riches, pour les pauvres, pour les rois et les bergers, pour les misérables
pécheurs que nous sommes et pour ceux d’entre nous qui se sentions justes et innocents car ils sont
sans doute les plus égarés.
COMMENT JÉSUS EST-IL MORT ?
Approchons-nous de la croix, en nous mêlant à la foule qui a crié : « 21 Crucifie-le –
Crucifie-le » (Luc 23, 21) et dont la haine ne sera assouvie que lorsque tout aura été consommé et
que la mort aura eu sa part.
Nous reprendrons ici le récit biblique, au moment où Pilate, voulant satisfaire la foule, leur
relâcha Barabbas et leur livra Jésus pour être crucifié, après l’avoir fait battre de verges.
Marc nous rapporte la scène dans un style bref, presque journalistique, mais terriblement
poignant pour ceux qui se sentent directement concernés par ce qui se passe.
« 16 Les soldats conduisirent Jésus dans l’intérieur de la cour, c’est-à-dire dans le prétoire,
et ils assemblèrent toute la cohorte. 17 Ils le revêtirent de pourpre, et posèrent sur sa tête une
couronne d’épines, qu’ils avaient tressée. 18 Puis ils se mirent à le saluer : Salut, roi des Juifs ! »
(Marc 15, 16-18).
ILS SE MOQUAIENT DE LUI
La pourpre était la couleur royale. Avant de clouer sur une croix que l’on préparait sans doute
déjà, les soldats romains veulent se divertir un peu en se moquant odieusement de celui qui avait
affirmé devant Pilate être le roi des Juifs. Des épines en guise de couronne. Un vague vêtement
pourpre et une sorte de roseau qu’on lui met dans la main droite pour figurer le sceptre royal.
Marc écrit : « 19 Et ils lui frappaient la tête avec un roseau, crachaient sur lui et fléchissant
les genoux, ils se prosternaient devant lui. » (Marc 15, 19).
Jésus est sans doute assis sur un trône improvisé pour compléter l’odieux travesti. Il est
immensément affaibli par la flagellation. Il ne dit rien. Les soldats auraient bien voulu déclencher en
leur victime quelque réaction violente qui aurait pimenté leur plaisir, mais celui qu’ils raillent et
qu’ils maltraitent souffre sans haïr. Plus tard, Pierre, dans son épître où il nous exhorte à la patience
dans la souffrance, évoquera cette scène qu’il vit sans doute de loin…
« 23 Christ vous a laissé un exemple » écrit-il « 23 lui qui injurié, ne rendait point d’injures,
maltraité, ne faisait point de menaces, mais s’en remettait à celui qui juge justement. » (1 Pierre 2,
23).
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VERS GOLGOTHA
Bientôt, fatigué de railler leur victime, ils lui arrachent son vêtement pourpre, lui remettent sa
tunique et l’emmènent pour le crucifier.
Une certaine tradition veut que Jésus soit tombé une première, une seconde et une troisième
fois en portant sa croix. La Bible ne donne aucune indication de ce genre. Il est superflu de vouloir
ajouter au récit biblique des détails de cette nature. La narration des évangélistes suffit amplement à
transmettre toute l’émotion et la douleur de cette étape. Il est probable que Jésus soit tombe plus de
dix fois, ce qui ne serait pas étonnant lorsqu’on sait quel supplice est celui de la flagellation. La Bible
nous dit seulement que les soldats « 32 forcèrent à porter la croix de Jésus un passant qui revenait
des champs, Simon de Cyrène. » (Matthieu 27, 32). C’est-à-dire qu’il était trop affaibli pour la porter
lui-même. Cependant, on le vit arrivant au lieu du crâne, c’est-à-dire Golgotha, en portant sa croix.
Là, ils lui donnèrent à boire du vin mêlé de fiel, mais il ne le prit pas. Ils le crucifièrent et se
partagèrent ses vêtements en tirant au sort pour savoir ce que chacun aurait. C’était la troisième heure
quand ils le crucifièrent. L’inscription indiquant le sujet de sa condamnation portait ces mots : « 37
Le roi des Juifs. 38 Ils crucifièrent avec lui deux brigands, l’un à sa droite, et l’autre à sa gauche.
Ainsi fut accompli ce que dit l’Écriture : IL a été mis au nombre des malfaiteurs. » (Matthieu 27, 3738). Les passants l’injuriaient et secouaient la tête, en disant : « 40 Hé ! Toi qui détruis le temple et
qui le rebâtis en trois jours, sauve-toi toi-même, en descendant de la croix ! ».
Les principaux sacrificateurs aussi, avec les scribes, se moquaient entre eux, et disaient :
« 42 IL a sauvé les autres et il ne peut se sauver lui-même ! Que le Christ, le roi d’Israël, descende
maintenant de la croix, afin que nous voyions et que nous croyions ! »
Ceux qui étaient crucifiés avec lui l’insultaient aussi.
AU PIED DE LA CROIX
Nous voici donc au pied de la croix. Le spectacle que nos yeux contemplent est atroce. Trop
de tableaux de maîtres nous dépeignent un Christ beau, au visage reposé, orné de quelques gouttes de
sang. Le Christ des peintres est souvent un Christ trop précieux, presque efféminé. Il ne faut pas
oublier que ce crucifié était fils de charpentier ; il connaissait donc le travail, la sueur, les mains
calleuses, la fatigue. C’était un homme, à 33 ans, dans la force de l’âge.
Sur la croix, c’est le même homme, mais marqué par la souffrance, déjà caressé par les doigts
pâles de la mort. Le spectacle est fait de sang mêlé de transpiration et de poussière. Il y a des
mouches qui collent, que même les violents spasmes d’agonie ne parviennent pas à chasser. Sur la
croix, nous voyons le recroquevillement grotesque d’un corps qui connaît le comble de la souffrance
physique, la grimace d’un visage que crispe la douleur, la suffocation d’une bouche desséchée par la
soif et le manque d’air.
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LE CRUCIFIEMENT
Le crucifiement était un mode d’exécution pratiqué par un grand nombre de peuples tels que
les Carthaginois, les Égyptiens, les Assyriens, les Scythes et les Huns ; on ne connaît même pas
l’origine exacte de cette forme de mise à mort, mais tous les peuples étaient unanimes sur un point :
c’était le supplice le plus atroce et le plus hallucinant.
C’est ce qui explique sa popularité parmi les peuples anciens.
Sur sa croix, qui avait tantôt l’aspect d’un T, tantôt l’aspect qui nous est familier, le supplicié
était en proie au délire, aux crampes, aux nausées, aux spasmes violents, à la soif et à la fièvre…
devant une foule curieuse, railleuse et réjouie.
La position anormale du corps rendait tout mouvement, même la respiration, atrocement
pénible. Certains médecins, partant de données physiologiques, ont émis l’opinion que la cause
déterminante de la mort des crucifiés devait être l’asphyxie provoquée par la tétanie des muscles
respiratoires, celle-ci due à la fixation des bras en position élevée.
En 1935, un médecin tchèque, le Dr. Hineck, dans un livre intitulé “Le martyre du Christ”,
fait des remarques très intéressantes à partir d’une punition grave qu’il avait observée pendant la
guerre de 1914, dans l’armée allemande où il était mobilisé comme tchèque.
“Cette punition”, écrit-il, “consistait à suspendre, par les deux mains, le condamné à un
poteau, ses pieds touchant à peine le sol par les pointes ; tout le poids du corps tirait donc sur les
deux mains. Or, au bout d’un certain temps, on voyait apparaître des contractions violentes de tous
les muscles ; elles commençaient par ceux des avant-bras, puis des bras et très rapidement
s’étendaient aux muscles inspirateurs, les grands pectoraux. La cage thoracique était alors maintenue
dilatée en inspiration forcée ; les poumons, gorgés d’air, ne pouvant plus se vider, l’asphyxie se
produisait. Le patient en présentait tous les signes : sa figure devenait violette, une sueur profuse
coulait de son visage et de toute la surface de son corps et, si on ne voulait pas le faire mourir, il
fallait le dépendre ! La punition, dit le Dr. Hineck, ne pouvait durer plus de dix minutes”.
JUSQU’AU BOUT
Or, durant la dernière guerre, les Nazis sont allés jusqu’au bout. Deux prisonniers de Dachau
ont assisté à ce supplice et en ont gardé un souvenir terrifiant. Ici, les pieds ne touchaient pas le sol ;
bientôt, la gêne respiratoire devenant intolérable, les patients exerçaient des tractions sur leurs bras
pour soulever le corps et libérer un peu la cage thoracique afin de permettre l’expiration ; puis,
fatigués, ils se laissaient retomber pour recommencer ensuite à se soulever. Après une heure de
suspension, les tractions devenaient de plus en plus fréquentes et de plus en plus faibles ; l’asphyxie
s’installait, progressive ; la cage thoracique était dilatée au maximum ; une sueur profuse baignait le
corps, coulant à terre et extraordinairement abondante dans les minutes qui précédaient la mort.
Après celle-ci, le corps était d’une rigidité extrême.
Ces suppliciés avaient les jambes pendantes ; les crucifiés, eux, avaient leurs pieds fixés au
poteau, sur lequel ils pouvaient prendre un point d’appui pour soulever le corps et ramener les bras
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près de l’horizontale, ce qui leur permettait de respirer. Puis la fatigue des membres inférieurs les
forçait à redescendre et l’asphyxie survenait à nouveau ; si bien que toute agonie, qui parfois était
très longue, se passait dans une alternative de redressements et d’affaissements jusqu’à ce que
l’épuisement des forces amenât l’asphyxie définitive.
L’appui sur les pieds prolongeait donc l’agonie, et ce fait éclaire lumineusement ce passage
de Jean 19, resté jusqu’ici sans explication satisfaisante : « 31 Les Juifs demandèrent à Pilate qu’on
rompît les jambes du crucifié et qu’on les enlevât. » Les jambes rompues, le point d’appui inférieur
manque et le supplicié ne pouvant plus se soulever, la mort survient rapidement par asphyxie.
Ces détails sont horribles, mais ils nous sont nécessaires pour nous réveiller dans notre
insensibilité, pour nous rappeler fermement à cette réalité que Jésus a souffert, qu’il « 5 était blessé
pour nos péchés, brisé pour nos iniquités. Le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et
c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. » (Ésaïe53).
Oh ! bien sûr, il aurait pu d’un seul coup se détacher de cette croix et balayer d’un seul mot
toute cette foule qui s’abreuvait avec avidité d’un spectacle gratuit. Mais il ne faut pas oublier qu’une
chose différencie ce crucifié de tous les autres condamnés de l’histoire humaine : on ne prend pas la
vie du Fils de Dieu. C’est Lui qui la donne ; car il est le « 11 le bon berger qui donne sa vie pour ses
brebis ». (Jean 10, 11).
« 18 Personne ne me l’ôte » avait affirmé Jésus « 18 mais je la donne de moi-même ». (Jean
10, 18)
Chers lecteurs, ne voulez-vous pas vous arrêter quelques instants pour réfléchir à la place que
peut et que doit prendre cet événement dans votre propre vie ?
MON DIEU POURQUOI ?
Sur la croix de Golgotha, le Christ mourant, fidèle à lui-même, partage ses pensées suprêmes
entre la terre et le ciel. Il pense encore aux hommes ses frères ; à ses bourreaux : « 34 Père,
pardonne-leur ! » (Luc 23, 34). Au brigand repenti : « 43 Je te le dis en vérité aujourd’hui, tu seras
avec moi dans le paradis ; » (Luc 23, 43) à sa mère : « 26 Femme, voilà ton fils ! » (Jean 19, 26).
Mais à côté de ces paroles qui descendent de la croix, il en est d’autres qui, de la croix, s’élèvent vers
l’invisible. C’est la prière de l’abandon confiant : « 46 Père, je remets mon esprit entre tes mains » ;
c’est aussi, auparavant, le cri déchirant de l’âme en détresse : « 46 MON DIEU, MON DIEU,
POURQUOI M’AS-TU ABANDONNÉ ? » (Matthieu 27, 46).
L’évangéliste qui écrit pour célébrer la grandeur de Jésus et inviter ses lecteurs à croire à sa
mission divine, se sent troublé au moment où il va déclarer que sur la croix, Jésus, oui Jésus luimême, a prononcé ces mots. Pour souligner ce qu’ils ont, en sortant de telles lèvres, de surprenant et
de tragique, il les transcrit dans la langue même dont se servait le Christ : « 46 Éli, Éli, lama
sabachthani ? » (Matthieu 27, 46).
Mes chers amis, cette parole unique qui plonge dans les ténèbres est pour nous comme une
invitation à venir abriter à l’ombre de la croix les “pourquoi” de nos angoisses et de nos douleurs.
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« 46 Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »
Cette parole nous étonne tout d’abord, parce qu’elle paraît contredit par les déclarations
antérieures du Sauveur. N’a-t-il pas annoncé qu’il fallait qu’il fût mis à mort ? N’a-t-il pas pris congé
des siens, en leur adressant des messages d’espérance et de certitude triomphante : « 33 Prenez
courage, j’ai vaincu le monde. » (Jean 16, 33). Lorsqu’il promenait son regard attristé sur ses amis
qui allaient tous l’abandonner lâchement, ne leur a-t-il donc oublié les pensées dont son cœur était
tout rempli ? Le voile du doute a-t-il dérobé au Fils bien-aimé le visage d’amour du Père ?
Notre perplexité vient du fait que ce cri de la croix ne correspond pas à l’idée générale que
nous aimons à nous faire du Sauveur. Quand nous tournons nos cœurs vers lui, nous, si souvent
vaincus, nous regardons à lui comme au grand victorieux, comme à celui qui a su chasser l’ennemi
faire reculer la souffrance et la mort même. Nous l’envisageons uni au Père d’une manière intime,
permanente ; Dieu est en lui et lui en Dieu.
POUR VAINCRE IL FAUT COMBATTRE
Lorsque nous relisons l’Évangile nous nous apercevons que ce cri de la croix n'set pas aussi
“isolé” que nous le supposons tout d’abord. Lorsque nous saluons en Christ, et à juste titre, le
Vainqueur, n’oublions-nous pas que pour vaincre, il faut combattre, et que l’âme du Christ fut celle
d’un lutteur ?
Souvenons-nous des premiers temps de son ministère, la scène du désert : Le Fils de l’homme
(car c’est ainsi qu’il aimait à être connu) est assiégé par l’Adversaire qui cherche la fissure, le défaut
de la cuirasse par où il pourra donner le coup mortel. Voyez le Christ dans le jardin de Gethsémané,
un autre désert puisque dorment ceux qui auraient dû veiller avec lui. Avec larmes et supplications il
présente son angoisse à celui qui pourrait le délivrer (Hébreux 5, 7). Devant la coupe amère il frémit,
et prie dans le silence de la nuit, face à face avec une destinée, dont il sait bien que Dieu la veut, ce
Dieu qui la conduit à cette heure fatale d’abandon en abandon, de solitude en solitude, d’obscurité en
obscurité. Toutefois, il ne peut s’empêcher de pousser le cri humain, qui s’en va rejoindre
l’universelle prière répétée sur tous les champs de bataille de l’histoire, aux chevets des mourants,
aux seuils des grands désespoirs, cette prière qui, en quelque heure aussi, a jailli du fond de notre
propre angoisse : « 39 Père, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi. » (Matthieu 26, 39)
Enfin sur la croix, environné de plus épaisses ténèbres encore, tandis que la chair meurtrie
crie sous l’intensité de la souffrance, l’appel désespéré d’un ancien Psaume monte aux lèvres du roi
supplicié : « 2 Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné. » (Psaume 22, 2)
Jésus adresse au ciel un « Pourquoi ? » qui demeure sans réponse. Voilà le fait certain,
saisissant. Mais qui sommes-nous pour mesurer, non seulement l’intensité, mais la qualité de cette
souffrance ? Les images atroces de la torture du corps, ces membres percés, cette soif dévorante, ces
spasmes des muscles tétanisés, ne constituent encore que la moitié de l’horreur du Calvaire et la plus
faible moitié ! D’autres furent crucifiés avant lui ou le furent plus tard ; cinquante ans après ce
drame, l’auteur de l’épître aux Hébreux rappelait que des martyrs chrétiens avaient été : « 37
Lapidés, torturés, sciés, tués par l’épée ! » (Hébreux 11, 37) Par les souffrances de sa chair, Jésus est
le frère d’une légion de victimes. Mais sur le plan de la souffrance morale, Jésus est seul ; ce n’est
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pas seulement l’esprit épuisé, qui perdant de vue le plan de Dieu, interroge en vain le ciel
désespérément silencieux ; c’est le cœur du Christ d’amour qui saigne ; la force maudite du péché du
monde qu’il a voulu briser pèse sur lui en cette heure.
Et puis, la trahison de ses amis, l’aveuglement du peuple élu, la solitude hostile, voilà
l’amertume que rien ne vient adoucir, voilà le pressoir qui vient le broyer. C’est l’occasion dernière ;
profitant de ce dur combat de l’âme qui cherche à se libérer de la matière, l’Esprit du mal qui avait
jadis été repoussé, voudrait faire jaillir de cette douleur la révolte, et le blasphème ; lui cacher le ciel,
lui dire enfin : “Avoue que tu es vaincu, et que c’est moi qui triomphe !”
Dernier assaut de l’ennemi, faiblesse de la chair déchirée, poids du péché du monde, cri de
l’amour assassiné par ceux qu’il venait sauver, nous retrouvons tout cela, dans la voix du Christ à
l’agonie : « Mon Dieu, pourquoi ? » Nous pouvons dire cependant : “Heureux, êtes-vous de
connaître cette parole et de prêter l’oreille à cette voix ! Car ces accents, les plus graves de l’histoire,
font lever une clarté dans la nuit de nos souffrances et de nos doutes.” Nous pouvons y trouver la
consolation et la certitude dont nous avons tous soif.
CONSOLATION
Mon Dieu pourquoi ? Nous reconnaissons dans ce cri un Sauveur fraternel. En s’abaissant
jusqu’à nous il n’a pas voulu s’enfermer dans je ne sais quelle protection magique qui l’aurait rendu
invulnérable. Plus nous avons appris ce que c’est que de souffrir, plus nous avons entendu monter de
la terre les “pourquoi ?” des innocents écrasés, des corps tourmentés, des âmes déçues et blessées ;
plus nous avons mesuré la cruauté de certaines destinées, vouées à la douleur, plus nous avons frémi
devant les détresses incompréhensibles, les larmes inutiles, plus nous avons gémi devant des départs
prématurés, plus nous avons reconnu ce qui manquerait aux souffrances du Christ si nous en
effacions le “Pourquoi, mon Dieu ?” Sans aucun doute, par cette parole le Christ s’est rapproché de
nous, plus que par nulle autre et il nous la laisse moins comme une énigme pour notre raison que
comme un abri pour nos désespoirs.
Un nuage a pu s’interposer un instant entre le Christ et son Père. Jésus a pu, lui aussi, venir se
heurter à la porte close de l’incompréhensible mystère. Jésus n’a donc pas possédé une connaissance
facile et mécanique de tous les secrets éternels ; comme nous, il a marché, ici bas par la foi, et non
par la vue. À l’heure suprême, la foi n’a pas eu la puissance de savoir, elle n’a pu que pousser le
soupir interrogatif : Pourquoi ? Et c’est là pour nous une consolation car Dieu reprocherait-il aux
hommes de le fatiguer ou de l’offenser par leurs “pourquoi” douloureux ? Jésus plaide pour nous. Il a
dit aussi un jour : « Mon Dieu, pourquoi ? »
Cependant, gardons-nous d’abuser de cette arme que la croix nous procure. Si les souffrances
de Jésus étaient tout entière imméritées, les nôtres s’expliquent trop souvent, et pas nos infidélités
personnelles, et par le péché de la race dont nous sommes les complices. Mais il reste quand même
ici-bas un empire de souffrances que notre conscience doit loyalement dire imméritées, injustes,
inutiles.
Mes chers amis, vous aussi en une heure d’abandon, de chute ou de deuil, vous avez pu
penser, certain jour : Dieu m’abandonne. Vous avez connu l’angoisse de n’être pas compris, l’échec
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apparent de l’effort. C’est la cruauté de la solitude, l’absence des affections humaines, la désertion de
Dieu même ! Ces mots cruels qui étaient vides de sens pour vous, expriment peut-être aujourd’hui les
blessures de vous cœurs, les vraies blessures, celles qui laissent derrière elles des plaies béantes et
vous dictent le pourquoi douloureux ! Sachez que ce POUQUOI n’est pas un blasphème ; car le
crucifié étend sur votre cri l’ombre de son intercession : “Oh ! Père ! Tu entends tous ces
POURQUOI ? De ces affligés et de ces affamés, de ces pauvres et de ces vaincus. Ne t’irrite pas de
leurs plaintes. Embarqués sur l’océan des tempêtes, ils ignorent vers quelle rive les dirige le vent de
l’Éternel. Sois apaisé envers eux ! Ne t’ai-je pas dit, moi aussi Mon Dieu, mon Dieu pourquoi ?”
Cette communion de nos détresses avec sa détresse, c’est la consolation. Cependant,
singulièrement, si ce cri du Christ est tout pétri de doute, d’inquiétude … presque un reproche ; s’il
demeure une question sans réponse, il est quand même une certitude. Car ce cri est une prière. Jésus
ne dit pas : “Fatalité, pourquoi m’es-tu abandonné ? Nature, pourquoi gardes-tu le silence ?” Jusqu’à
l’heure la plus noire, Jésus parle à un Dieu qui l’entend ; c’est l’amour du Fils pour son Père.
Pourquoi les souffrances imméritées du Calvaire ? Les hommes ont essayé de répondre par
leurs théories. Ils ont construit les théologies de la croix dont certaines sont riches de hautes pensées.
Les apôtres même ont expliqués les souffrances du Christ en termes de sacrifice, de rançon pour les
hommes, car « 22 sans effusion de sang il n’y a pas rémission de péché. » Mais toutes ces
explications ne sont pas définitives. Et si elles ne satisfont qu’imparfaitement notre soif de savoir,
c’est que nous sommes appelés à reconnaître les conséquences, les répercussions du Calvaire dans
l’histoire. Car, voyez-vous, les souffrances du Golgotha ont appris aux humains à croire à l’amour, et
au pardon ; elles ont imposé à l’humanité égoïste la beauté du sacrifice ; elles ont convié les
consciences à haïr le péché ; elles ont consacré le Royauté du Christ, capable d’attirer à lui tous ceux
qui ont soif de justice et d’amour.
« Mon Dieu pourquoi m’as-t abandonné ? » Doute et certitude. Doute complet sur notre
possibilité de tout expliquer, de notre petit point de vue, de trouver la lumière en bas.
CERTITUDE
Dans la croix, nous trouvons l’événement décisif devant lequel nous avons tous à prendre
position. Si le Pourquoi ? du crucifié est resté sans réponse, c’est qu’il y a dans la pensée de Dieu des
intentions qui nous échappent, des motifs qui nous dépassent, c’est que de tous les désordres, et de
toutes les douleurs, Dieu peut faire surgir des trésors de vie et d’amour.
Tout l’incompréhensible de la vie et de ses croix ; tout l’incompréhensible de l’histoire et de
la grande croix qui la domine et lui donne un centre, ne peut que nourrir en nous la conviction
religieuse. C’est Dieu seul qui sait pourquoi. Ce que tu ne comprends pas aujourd’hui, tu le
comprendras plus tard, quand tu verras face à face le Dieu d’amour. Et c’est cela la certitude.
Le « Mon Dieu, pourquoi ? » du Fils de Dieu n’est pas une vraie défaite, puisque c’est
encore une prière qui emporte avec elle, auprès du Père, tous nos pourquoi, toutes nos larmes, toutes
nos inquiétudes… et c’est là une bienheureuse certitude.
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LE SILENCE DE LA CROIX
N’est-il pas surprenant que Jésus ait dit si peu de choses du haut de sa croix ? Pendant les six
heures où il fut horriblement suspendu entre ciel et terre, il n’a prononcé que sept paroles, une
quarantaine de mots en tout. Les commentateurs de tous les temps se sont saisi de ces quelques mots
pour en faire des volumes. Les prédicateurs en ont fait des sermons. On les a même mis en musique.
Et cela n’est pas étonnant car la bouche qui les prononce n’est pas quelconque. La circonstance n’est
pas banale. Nous sommes, devant la croix, en présence de Celui qui a dit : « 6 Je suis le chemin, la
Vérité et la vie ; nul ne vient au Père que par moi. » (Jean 14, 6)
UN SILENCE OPPRESSANT
Cependant, plus que ses Paroles, c’est son silence qui est impressionnant, oppressant même.
Nous nous demandons ce qu’il pouvait bien penser ; quelles émotions pouvaient bien remuer son
âme en un moment pareil ; car enfin, il était né pour ce jour-là. Il le savait. Il l’avait annoncé à
plusieurs reprises. Et maintenant c’était arrivé. L’agneau de Dieu était immolé. Alors pourquoi n’a-til pas profité de cette dernière occasion pour prêcher une dernière fois et clôturer ainsi d’une manière
magistrale son ministère parmi les hommes ? Il y a tant de choses qu’il aurait pu dire. Tant de
personnes l’avaient écouté, suivi, admiré. Une dernière fois il aurait pu prononcer un discours, un
dernier « sermon sur la montagne » à Golgotha. Il aurait pu au moins répéter certaines déclarations
qui avaient fortement impressionné son auditoire ; il avait dit par exemple : « 28 Le Fils de l’homme
est venu, non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie comme la rançon de plusieurs. »
(Matthieu 20, 28) « 32 Et moi, quand j’aurai été élevé de la terre, j’attire tous les hommes à moi. »
(Jean 12, 32) « 11 Je suis le bon berger. Le bon berger donne sa vie pour ses brebis. » (Jean 10, 11)
« 15 Et comme Moïse éleva le serpent dans le désert, il faut de même que le Fils de l’homme soit
élevé, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle. » (Jean 3, 15)
Il aurait pu dire et répéter tout cela et bien d’autre choses encore. Pourquoi donc a-t-il parlé si
peu ?
ÉSAÏE PARLE
Je crois que c’est Ésaïe qui nous ouvre le cœur du Christ ; plusieurs siècles avant l’événement
de la crucifixion, Dieu avait donné à ce grand prophète la grâce de contempler de loin, par
inspiration, la signification de la croix.
À nous qui pouvons, de ce côté-ci de la croix, embrasse d’un seul coup d’œil, et la prédiction
prophétique et sa réalisation, le langage d’Ésaïe est simplement étourdissant de vérité. Dans cette
perspective extraordinaire, il n’est pas possible de lire la prophétie d’Ésaïe sans ressentir la pulsation
d’une profonde émotion. Ésaïe nous dépeint le Christ sans le nommer. Il le voit « 3 Méprisé et
abandonné des hommes… » (Ésaïe 53, 3) dédaigné… se heurtant à l’indifférence générale tandis
qu’il offrait avec son corps un holocauste d’amour.
« 4 Cependant, ce sont nos souffrances qu’il a portées, c’est de nos douleurs qu’il s’est
chargé ; Et nous l’avons considéré comme puni, frappé de Dieu et humilié. 5 Mais il était blessé
pour nos péchés, brisé pour nos iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et
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c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. 6 Nous étions tous errants comme des brebis,
chacun suivait sa propre voie ; et l’Éternel a fait retomber sur lui l’iniquité de nous tous. 7 Il a été
maltraité et opprimé, et il n’a point ouvert la bouche, semblable à un agneau qu’on mène à la
boucherie, à une brebis muette devant ceux qui la tondent ; il n’a point ouvert la bouche. » (Ésaïe 53,
3-7)
SOUFFRANCES ET GUÉRISON
Jésus connaissait bien cette page d’Ésaïe. Les Écrits du prophète lui étaient familiers car il les
cite souvent dans ses discours au peuple. Et, sur la croix, il était tout à son œuvre, telle que le
prophète l’avait décrite : La rédemption des hommes – La rançon pour la liberté des hommes. Il était
soumis à ces souffrances indicibles qui apportaient paradoxalement la guérison aux hommes rongés
parle péché. Tout ce qu’il avait à dire, il l’avait dit. Son œuvre, en ce moment précis, en ce moment
crucial, ne consistait plus à parler, mais à se donner, à s’offrir volontairement, sur l’autel du monde, à
la place du monde, pour le salut du monde.
Toutefois, sa vie, il ne va pas l’offrir à un monde aveugle et anonyme. En parlant à ce brigand
repentant, puis à sa mère et à l’apôtre Jean, il nous a montré que sa vie il la donne pour chacun
d’entre nous en particulier, individuellement, pleinement. Tous les hommes sont concernés et aimés
par cette croix ; tous les hommes et chaque homme en particulier dans le secret de son cœur.
PLUS RIEN À DIRE
Il y a encore une autre raison qui peut expliquer le silence du Christ. C’est qu’il y a certaines
personnes à qui Jésus n’a plus rien à dire, car ses paroles ne les atteindraient même plus. Et elles
étaient toutes là, représentées aux pieds du supplicié.
Il y avait là des moqueurs qui se repaissaient d’un spectacle gratuit. Ils auraient bien voulu
l’entendre parler pour alimenter leurs sarcasmes.
Il y avait aussi ceux dont la haine à son égard était telle, que non satisfaits de le voir en proie
à la torture, mourant d’une mort trop lente à venir, ils se répandaient encore en injures et en
invectives. Les chefs religieux ne cachaient pas leur satisfaction. Ils avaient tant convoité sa mort
depuis le jour où ils l’avaient entendu pour la première fois. À présent, ils triomphaient. Ils le
mettaient au défi de se délivrer lui-même, et de leur prouver qu’il était véritablement le Fils de Dieu.
S’il parvenait à descendre de la croix, ils promettaient de croire en lui ! (Matthieu 27, 39-44)
À cette meute hurlante et sifflante de haine, Jésus n’avait rien à dire. Ô certes, il aurait pu les
balayer d’un seul mouvement de sa volonté et descendre de sa croix comme ils l’avaient suggéré,
pour les confondre, les écraser de sa puissance et leur faire demander grâce ! Mais il avait choisi de
boire la coupe jusqu’à la lie et ils étaient cette lie sale, visqueuse, amère. Il ne voulait leur opposer
que son silence « 3 d’homme de douleur habitué à la souffrance ». (Ésaïe 53, 3)
Même aux yeux de ceux qui passaient là et qui secouaient la tête sans rien dire, il n’était
qu’un condamné à mort comme les autres. Ce malheureux était peut-être innocent. Les autorités
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avaient été sévères. Qui aurait cru qu’il finirait ainsi ? Mais qu’y pouvaient-ils ?! Alors ils passaient
en curieux et secouaient la tête silencieusement.
Non, ce n’était plus le moment de menacer les insulteurs, de reprendre et confondre les
railleurs ou d’arrêter les passants indifférents.
En ce moment-là, rien n’était plus éloquent que son silence. La croix était en elle-même, le
dernier message d’amour de Dieu aux hommes.
C’EST NOUS QUI L’AVONS CRUCIFIÉ
Aujourd’hui cette sorte de gens qui se trouvaient au pied de la croix se manifeste toujours. Il y
a encore ceux qui se moquent ouvertement de la Parole de Dieu. Ils ne perdent aucune occasion pour
railler ce qui a trait à l’Évangile, son message et ses messagers. Ils se vantent d’être évolués, et à tout
jamais affranchis de ces “niaiseries”. Ce genre de sarcasme n’est pas très loin de la haine. De toute
évidence, ils ne savent pas ce qu’ils font. (Quelqu’un l’a déjà dit avant moi.)
Il y a ceux qui sans railler et sans haïr, mettent sincèrement en doute le contenu de l’Évangile.
Ils se sont imposé cette discipline de ne se soumettre qu’à l’approbation de la science et de leur
raison ; comme si la science ou leur raison pouvait tout expliquer, tout apporté, tout sauver. Ils ont
élevé la science, sans le savoir, au rang de la divinité, eux dont la raison repousse toute idée de Dieu.
Enfin, il y a ceux qui passent. Ils ne pensent pas ; Ils existent. Ils sont apathiques, indifférents
à tout ce qui ne les touche pas de près.
Les bras du crucifié s’étendent au-dessus de tous ceux-là, et au-dessus de tous les hommes de
tous les temps. Car la croix est le point de ralliement de l’humanité entière. Elle est silencieuse cette
croix, et pourtant comme elle est éloquente avec ses bras tendus ! Comme elle dit à chacun ce qu’il a
besoin d’entendre ! L’évocation de la croix a inspiré au théologien Karl Rahner cette belle
méditation :
“Venez PÉCHEURS, ou plutôt, car nous le sommes tous, venons devant cette Croix. Car c’est
nous qui l’avons crucifié, ce sont nos péchés dont il s’est chargé ; c’est notre péché qui a engendré la
mort dont il est la victime ; sa souffrance et sa mort sont l’œuvre de nos mains pécheresse…
Venez, AGONISANTS, car c’est son propre destin qui vous accable. Si vous mourez, c’est
parce qu’il est mort. Ah ! Sans doute, la cause universelle de la mort demeure bien le péché. Mais si
Dieu n’a pas banni de son royaume terrestre cette tare mortelle qu’est la faute, c’est que la loi
suprême qui régit l’économie de ce monde est l’amour qu’il porte à son Fils devenu notre chair, et
qu’en la mort de ce Fils… le monde s’est trouvé pris dans les filets de la miséricorde divine. Et c’est
pourquoi la mort, dans laquelle nous voyons le salaire du péché, et que nous souffrons comme telle,
n’est finalement autre chose que l’arrêt de mort du péché.
Venez, vous qui SOUFFREZ, et répandrez vos larmes devant la croix de Jésus. Est-il une
détresse, si désespérée qu’elle soit, dont il n’ait partagé la nuit ? Des larmes qui ne soient sanctifiées
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par les siennes ? Une souffrance guettée par la désespérance que n’adoucisse en rien le fait de savoir
qu’elle a été supportée par le Fils de l’Homme, qui était aussi le Fils de Dieu ?
Venez, PETITS ENFANTS, vous qui, à voir les choses en face, n’avez plus guère devant
vous et pour vous que la perspective de la mort. Agenouillez-vous devant ce Dieu à l’agonie. Ah !
Vous ne savez pas ce qui vous attend : la grâce la plus grande de votre vie, mais en même temps
l’acte le plus difficile. Et sachez bien que, pour recevoir cette grâce et accomplir cet acte comme il
faut, vous n’avez d’autre moyen que de mourir en lui et avec lui.
Venez, vous qui n’avez plus de PATRIE. Prosternez-vous et regardez cet homme qui a
accepté d’être rejeté par son propre peuple et traîné hors de la ville pour mourir au bord d’une route
après avoir marché toute sa vie un dur chemin sans rien pour reposer sa tête, plus pauvre que les
renards et que les oiseaux du ciel.
Venez, vous qui souffrez de la SOLITUDE. Vous n’avez pas à ouvrir la bouche, car le
solitaire de la Croix (ah ! y eut-il jamais quelqu’un de plus seul, de plus perdu dans l’immensité du
désert de la mort et de l’abandon dans lequel Dieu lui-même le laissait ?) connaît votre détresse et a
pris dans son propre cœur toute votre solitude amère, ne gardant rien d’autre que son amour pour
ceux qui souffrent de l’abandon.
Venez, vous les VEUVES, et vous les MAMANS qui pleurez la mort d’un enfant. Voyez
comment, par un effort suprême de sa sollicitude, et de son amour, son regard s’abaisse, à travers les
ombres de la mort qui l’enveloppent déjà, sur cette femme, sa mère, que sa mort va laisser seule.
Venez, vous tous qui AIMEZ, car nous sommes ici à la source de tout amour, et de ce pouvoir
suprême de transformer même les déceptions de l’amour en un amour plus fort que la mort, en un
amour capable, comme l’est seul celui du Christ, d’alimenter sa flamme à son propre brasier.
Venez, SAGES et SAVANTS de ce monde. Apprenez ici que toute science est vaine qui ne se
consume pas dans la sainte folie de l’amour ; apprenez que la logique de la Croix, folie pour les
Grecs et scandale pour les Juifs, est, pour ceux qui sont appelés au salut, sagesse de Dieu et
puissance de Dieu, et qu’il a plu à Dieu de sauver le monde par la Croix, afin que toute langue se
taise et que toute sagesse du monde s’abaisse devant la folie de l’amour de Dieu.
Venez, VOUS-MÊME qui estimez n’avoir pas la foi. Vous vous contenterez peut-être de
rester debout et de regarder. Ah ! Si vous avez un cœur d’homme, je veux dire si vous cherchez
humblement la lumière et que vous consentiez à en pas vous voiler la face devant l’amère détresse de
votre cœur, alors, je vous le dis, votre souffrance, que vous le sachiez ou non, est celle du Christ.
Entendez son grand cri : «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »
Ayez le courage de jeter sur lui le regard d’un amour fraternel, puisque lui, le Fils éternel du
Père céleste, s’est plongé dans ces ténèbres effrayantes et mortelles… Si vous avez l’impression
accablante que Dieu est mort dans votre cœur, est-ce là autre chose qu’une participation – ah ! Plaise
à Dieu que la foi vous fasse saisir cela ! – au destin même de ce Dieu qui a voulu mourir réellement
pour vous, connaître la mort pour que vous viviez et croyiez, que son absence la plus radicale n’est
pas le dernier mot de tout, qu’elle est enveloppée par son amour !
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Et je viendrai enfin MOI-MÊME, me mêler à cette longue théorie. Être singulier et
inexprimable, dont l’identité profonde est mystère, étincelle qui tremble entre deux abîmes, le néant
et l’infini, ignorant mon origine et ma destinée, comme j’ai peur de moi-même et des abîmes de mon
cœur ! Où alors être mieux que devant cette Croix qui dévoile le mystère de la destinée humaine et
sur laquelle Dieu nous fait connaître son vrai visage, celui de l’amour ? Je m’agenouillerai donc moi
aussi devant la Croix. Et je resterai en silence… Et si ce pauvre moi se content de cet amour
silencieux et s’abandonne ainsi avec la confiance de l’amour, alors il aura conscience de ne trouver
que dans la Crucifié sa véritable nature et son authentique image.”
Puissions-nous ne pas être endurcis dans notre égoïsme et notre orgueil au point de ne plus
entendre cet appel d’amour qui émane de Golgotha et qui s’adresse à chacun de nous.
LA RÉSURRECTION DU CHRIST
Aujourd’hui, je vais vous donner lecture d’un texte qui décrit l’événement le plus
extraordinaire et le plus retentissant de toute l’histoire humaine. L’auteur du récit que je vais lire est
un contemporain de l’événement qu’il rapporte. Il s’agit d’un ancien percepteur appelé Matthieu :
« 1 Après le sabbat, à l’aube du premier jour de la semaine, Marie de Magdala et l’autre Marie
allèrent voir le sépulcre. 2 Et voici, il y eut un grand tremblement de terre ; car un ange du
Seigneur descendit du ciel, vint rouler la pierre, et s’assit dessus. 3 Son aspect était comme l’éclair,
et son vêtement blanc comme la neige. 4 Les gardes tremblèrent de peur, et devinrent comme morts.
5 Mais l’ange prit la parole et dit aux femmes : « Pour vous, ne craignez pas ; car je sais que vous
cherchez Jésus qui a été crucifié. 6 Il n’est point ici ; il est ressuscité, comme il l’avait dit. Venez,
voyez le lieu où il était couché, 7 et allez promptement dire à ses disciples, qu’il est ressuscité des
morts. Et voici, il vous précède en Galilée : c’est là que vous le verrez. » (Matthieu 28, 1-7)
LE CHRISTIANISME
C’est à partir de ce moment que la face du monde commença de changer. C’est à partir de ce
moment que le nom de Jésus de Nazareth cessa d’être l’affaire d’une petit contrée quelque part en
Palestine, et qu’il commença de déferler irrésistiblement sur le monde entier, à la tête du plus grand
et du plus paradoxal mouvement de tous les temps : Le Christianisme.
Selon les documents de l’époque qui sont rassemblés dans la Bible, Jésus de Nazareth est
apparu à plusieurs centaines de témoins. Quelques jours après sa résurrection, il convoque ses plus
fidèles disciples pour leur confier une mission aussi immense qu’extraordinaire : « 15 Allez par tout
le monde », leur dit-il « 15 et prêchez la bonne nouvelle à toute la création. 16 Celui qui croira et qui
sera baptisé sera sauvé ; mais celui qui ne croira pas sera condamné. » (Marc 16, 15-16)
Quelques temps auparavant, il leur avait dit : « 8 Vous recevrez une puissance, le Saint-Esprit
survenant sur vous, et vous serez ms témoins à Jérusalem, dans toute la Judée, dans la Samarie, et
jusqu’aux extrémités de la terre. » (Actes 1, 8)
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QUE PENSER DE LA RÉSURRECTION
Que pouvons-nous penser de cette résurrection ? Quelqu’un serait donc revenu d’entre les
morts et c’est cet événement qui constitue la base même du Christianisme. En effet, nous pouvons
constater que la résurrection du Christ est le thème central des toutes premières prédications que
firent les disciples du Christ. Ces tout premiers sermons nous sont rapportés dan les premiers
chapitres du livre des « Actes des Apôtres ». En voici quelques extraits :
Au chapitre 2, écoutez avec quelle ferveur Pierre s’adresse aux milliers de Juifs qui
constituent son auditoire ce jour-là : « 22 Hommes Israélites, écoutez ces paroles ! Jésus de
Nazareth, cet homme à qui Dieu a rendu témoignage devant vous par les miracles, les prodiges et les
signes qu’il a opérés par lui au milieu de vous, comme vous le savez vous-mêmes ; 23 cet homme…
vous l’avez crucifié, vous l’avez fait mourir par la main des impies. 24 Dieu l’a ressuscité des liens
de la mort... » (Actes 2, 22-24)
Quelques jours plus tard, s’adressant encore à la foule, Pierre dit de nouveau : « 15 Vous avez
fait mourir le Prince de la vie, que Dieu a ressuscité des morts ; Nous en sommes témoins. » (Actes
3, 15)
COMMENT ÊTRE CERTAIN
Comment pouvons-nous être certains de l’une ou de l’autre proposition ? Sur ce point, la
certitude absolue n’existe pas. De même, comment pouvons-nous savoir si Charlemagne a bien été
couronné en l’an 800 ?
Ou si Charles Martel a réellement défait les arabes à Poitiers en 732 ? Ou si Alexandre le
Grand a même existé ?
Nous sommes d’emblée plongés en plein domaine historique. La résurrection de Jésus-Christ
est un fait historique dont l’authenticité peut être établie par la méthode classique que l’on applique à
n’importe quel événement historique… Ceci veut dire que nous sommes obligés de consulter des
documents, si possible rédigés par des témoins de l’événement en question. Notre certitude dépendra
donc d’un témoignage. Plus précisément encore, notre certitude dépendra de la foi que nous plaçons
en ce témoignage.
C’est ainsi que l’apôtre Pierre s’adresse aux chrétiens de son temps qui espèrent en Christ :
« 8 … lui que vous aimez sans l’avoir vu », dit-il « 8 en qui vous croyez sans le voir encore, vous
réjouissant d’une joie ineffable et glorieuse, 9 parce que vous obtiendrez le salut de vos âmes pour
prix de votre foi. » (1 Pierre 1, 8-9)
Chers amis, ne croyons surtout pas que notre Dieu nous demande une foi aveugle, paradoxale
et illogique. Notre espoir est de montrer dans cette courte étude que la foi en Christ est un sentiment
raisonné et raisonnable qui est ancré dans une ferme assurance.
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CONCLUSIONS DE SAVANTS ET D’HISTORIENS
Il me semble opportun de rapporter les conclusions de certains savants et historiens qui n’ont
pourtant pas la foi, mais qui reconnaissent objectivement que :
1 – Jésus-Christ a existé, qu’il a eu des disciples et qu’il fut crucifié sous Ponce Pilate.
2 – Que l’apôtre Paul est bien l’auteur incontesté de l’épître aux Romains, de l’épître aux
Galates et des deux épîtres aux Corinthiens. L’épître la plus tardive ayant été rédigée moins de 28 ans
après la crucifixion du Christ.
3 – Ils admettent aussi que quelques années après la mort de Jésus de Nazareth, de
nombreuses assemblées furent établies dans les plus grandes villes de l’empire Romain, professant
toutes la foi en la résurrection du Christ.
Nous savions aussi que l’apôtre Paul fut fondateur de la plupart de ces Églises et que c’est
sous son impulsion que l’Évangile entra en Europe pour la première fois.
LES TÉMOINS
Ceux qui refusent de croire que Jésus-Christ est ressuscité d’entre les morts, ne se rendent pas
toujours compte de la portée et des implications de leur refus. Ils ne se rendent pas compte par
exemple qu’ils qualifient de MENTEURS et d’IMPOSTEURS ceux qui rendent témoignage à la
résurrection !
L’apôtre Jean commence sa lettre en écrivant…
« 1 Nous vous annonçons… ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce
que nous avons contemplé et que nos mains ont touché, concernant la parole de vie… » (1 Jean 1, 1)
Jean et tous les autres, ont-ils donc rendu un faux témoignage ?! Ont-ils menti ?! Mais
pourquoi ? Dans quel intérêt ?
Supposons un instant que tous ceux qui se sont dit témoins de la résurrection, soient en réalité
des menteurs et des imposteurs… Leurs espoirs viennent d’être douloureusement déçus puisque l’on
vient de tuer leur maître en le crucifiant. Ils décident donc de concert, de voler son corps et
d’annoncer partout qu’il est ressuscité.
Ont-ils gagné de l’argent ? L’honneur peut-être ? La position sociale enviée ?… Car tout
mensonge et toute imposture suppose un intérêt. Mais rien de tout cela. Au contraire, à partir du
moment où ils proclament « Vous avez crucifié le Prince de la vie, mais Dieu l’a ressuscité »… ils
deviennent des hors-la-loi. On les pourchasse. On confisque leurs biens. On les massacre – On les
donne en pâture aux fauves dans les arènes. Mais jusqu’au bout ils conservent leur certitude, car ils
savent bien en qui, ils ont placé leur confiance et la mort pour eux, constitue un gain.
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LE TÉMOIGNAGE DE PAUL
N’y a-t-il pas quelque chose d’étrange dans leur comportement qui indique qu’après tout ils
n’ont peut-être pas menti !
Sur ce point, le témoignage de l’apôtre Paul plonge le monde des incroyants dans la plus
profonde perplexité. Avant d’être l’apôtre que nous connaissons, Paul était un ennemi acharné des
chrétiens, et en cela, il pensait servir la cause de Dieu. De plus il était un hébreux de pure race, de la
tribu de Benjamin, membre d la secte rigide et respectée des Pharisiens, ayant étudié aux pieds du
pus éminent professeur de son temps, en l’occurrence, Gamaliel, les hautes autorités religieuses lui
confiaient des missions d’importance et ils était en droit d’espérer une carrière brillante…
« 7 Mais toutes ces choses »… dit-il dans une de ses lettres « 7 qui étaient pour moi des
gains, je les ai regardées comme une perte, à cause de Christ. » (Philippiens 3, 7)
À partir de ce moment, sa vie devient une suite de travaux et d’épreuves diverses qu’il subit
avec joie car ses yeux ont connu la gloire du Seigneur et ses oreilles ont entendu sa voix.
« 23 …Souvent en danger de mort »… écrit-il, « 24 cinq fois j’ai reçu des Juifs quarante
coups moins un, 25 trois fois j’ai été battu de verges, une fois j’ai été lapidé, trois fois j’ai fait
naufrage, j’ai passé un jour et une nuit dans l’abîme. 26Fréquemment en voyage, j’ai été en péril sur
les fleuves, en péril de la part de ceux de ma nation…27 exposé au froid, à la nudité, à la faim… 28
assiégé chaque jour par le souci de toutes les Églises… » (2 Corinthiens 11, 23-28)
Est-ce là le comportement d’un imposteur et d’un menteur qui cherche à préserver et accroître
ses intérêts ?
SEIGNEUR, JE CROIS
C’est avec indignation et courroux qu’il s’adresse à ceux qui doutent encore de la résurrection
du Christ : « 31 Chaque jour je suis exposé à la mort, je l’atteste, frères… en Jésus-Christ notre
Seigneur. 32 Si c’est dans des vues humaines que j’ai combattu contre les bêtes à Éphèse, quel
avantage m’en revient-il ? » (1 Corinthiens 15, 31-32)
Nous sommes bien obligés de constater qu’il n’a rien à gagner en prêchant la résurrection du
Christ. Humainement son attitude est déroutante. Il méprise la souffrance, lui et tous les autres
chrétiens. Il subit les outrages, les moqueries, les injustices, les calomnies. Ils sont des milliers
comme lui à donner leur vie parce qu’ils savent que Jésus est sorti du tombeau victorieux de la mort.
Resterons-nous insensibles devant ces témoignages ?
Nous laisserons-nous persuader que le sang des martyres a coulé pour préserver le mensonge
et l’imposture.
Cher amis, nous sommes restés impassibles et insensibles trop longtemps. Ne courons pas le
risque d’avoir dédaigné le salut que Dieu nous offre.
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Devant l’évidence, ouvrons nos cœurs à la foi et sachons prier avec ferveur : « 24 Seigneur, je
crois, viens au secours de mon incrédulité ! » (Marc 9, 24)
LA PRÉDICATION DE LA CROIX
Que peut-on prêcher à une génération qui n’a d’autre ambition que l’argent, la puissance et
les plaisirs sensuels ? Comment faut-il parler aux égoïstes, aux indifférents ? … à ceux qui vivent
dans le désordre et l’impureté ? Que faut-il dire à ceux qui sont imbus de leur savoir, arrogants et
moqueurs ? – ou simplement à ceux que ronge l’angoisse et qui souffrent ? …
Existe-t-il un thème, un message que le prédicateur puisse présenter à tous ceux-là à la fois ?
– car il y a des chances pour qu’ils soient tous plus ou moins représentés dans un auditoire de
moyenne importance.
Savez-vous que c’est précisément le problème auquel l’apôtre Paul dut faire face lorsqu’il
entra dans la célèbre ville de Corinthe ?
Capitale de la province romaine d’Achaïe, Corinthe était au premier siècle, la ville la plus
importante de la Grèce. On pouvait y compter près de 700 mille habitants. Grâce à ses deux ports et à
sa position stratégique à la croisée des grandes lignes commerciales, la ville était constamment en
activité, envahie par les voyageurs et les commerçants venant de partout.
Outre sa renommée commerciale, Corinthe était fière de ses écoles de rhétorique et de
philosophie et célèbre surtout par sa fabrication du bronze et de ses œuvres d’art.
Comme on peut l’imaginer, cette prospérité engendrait le luxe et l’amour des plaisirs. Si
Corinthe était l’une des villes les plus cosmopolites de l’empire, elle était aussi la plus frivole et la
plus dissolue. Soldats, marins, marchands, venaient dilapider leur salaire, leur solde ou leur bénéfice
en menant joyeuse vie.
“Vivre à la Corinthienne” était synonyme de vie de débauche. La religion elle-même, loin
d’endiguer cette marée de passions et de vices, en faisait l’objet d’un culte. Dans le temple
d’Aphrodite (gardienne de la cité), 1 000 prêtresses étaient vouées à la prostitution sacrée.
COMMENT ALLAIT-IL S’Y PRENDRE ?
Voilà dans quel milieu l’apôtre du Christ allait prêcher l’Évangile ! Quel message allait-il
annoncer ? Tous les éléments étaient réunis pour lui infliger un échec cuisant. Comment allait-il s’y
prendre ? Quel prodige oratoire allait-il déployer pour se faire entendre de cette ville corrompue ? De
quels trésors d’ingéniosité, de diplomatie et de philosophie allait-il se servir pour faire admettre son
Jésus d’amour, son Christ de souffrance, le Sauveur des hommes ?
Paul répond lui-même à ces questions que nous nous posons. Après des mois de lutte, de
prières, de travail, il se formera à Corinthe une communauté de chrétiens. Par son exemple, sa
persévérance et son message, il parviendra à arracher à la vase du péché une poignée de convertis.
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C’est à eux l’Église des Corinthiens, qu’Il écrira deux lettres que préserve le Nouveau Testament.
C’est dans la première de ces lettres qu’il rappelle son contact avec les habitants de la ville dissolue.
« 1 Pour moi, » écrit-il avec une pointe de fierté et de défi, « 1 quand je suis venu chez vous,
je ne suis pas venu vous annoncer le témoignage de Dieu avec le prestige de la parole ou de la
sagesse. 2 Non, je n’ai rien voulu savoir parmi vous, sinon Jésus-Christ, et Jésus-Christ crucifié » (1
Corinthiens 2, 1-2)
Voilà donc sa “recette” pour l’évangélisation d’une forteresse du péché ! Cela est assez
inattendu.
Il a donc délibérément écarté toute connaissance humaine et toute spéculation religieuse sans
rapport direct avec le salut de l’homme par Jésus-Christ.
LE CHRIST : CENTRE DU MESSAGE
Le Christ crucifié et ressuscité est le centre et la source du message de Paul. Toute la somme
de la sagesse, de la science et de la raison humaines n’est rien à côté du message de la croix. Il le sait.
Il en est convaincu et il le proclame.
On pense ici, irrésistiblement à ce mot de Pascal : “Humiliez-vous, Raison impuissante” et à
ce cri de victoire de l’apôtre Jean : « 4 La victoire qui triomphe du monde, c’est notre foi. » (1 Jean 5,
4)
Paul était pourtant capable de rivaliser avec tous les plus grands philosophes et penseurs de
son temps et même avec les anciens que l’on citait déjà copieusement. Il aurait pu agréablement
chatouiller les oreilles de ce peuple avide de connaissance et de beaux discours, par des
démonstrations d’art oratoire… car, quel intérêt pouvait donc avoir son Christ crucifié pour ce peuple
matérialiste et jouisseur ?
Pourtant, c’est ce message-là qu’il a présenté. C’est cette croix qu’il a décidé de planter au
milieu de la ville perdue. POURQUOI ? Parce qu’il était convaincu que ce dont ce peuple avait
besoin, ce dont le monde entier a besoin, c’est de connaître le Christ, sa croix, son message, son
salut. Il y croyait de toutes ses forces, de toute sa vie, de tout son esprit. Pour la croix, dit-il luimême, il a décidé de perdure tous les avantages matériels dont il était pourvu. Il aurait pu devenir un
personnage éminent dans la société juive. Il était promis à un avenir brillant. Il avait tout pour
réussir ; mais lorsque la croix du Christ s’est dressée en travers de son chemin, au lieu de l’écarter, il
l’a embrassée, reconnaissant en elle et en sa victoire, le salut de sa vie, la raison d’être de son
existence et l’espoir du monde (Philippiens, chapitre 3)
C’est pourquoi il dédaignait la philosophie humaine, ces raisonnements savants et arides. À
ses yeux, le véritable objectif de tout homme n’est pas de connaître toujours davantage pour la
satisfaction de savoir. C’est avant tout de connaître Dieu révélé en Christ.
2
UNE CAUSE
Dans le domaine de la pensée, le chrétien, au pied de la croix, connaît l’essentiel de ce qu’il
faut connaître pendant son bref passage sur la terre. Non seulement a-t-il appris à vivre en suivant
celui qui est le Chemin, la Vérité et la Vie, mais il a aussi découvert une cause pour laquelle il vaut la
peine de mourir.
C’est pourquoi « 2 Je n’ai rien voulu savoir parmi vous, sinon Jésus-Christ et Jésus-Christ
crucifié. » (1 Corinthiens 2, 2)
Votre prétendue sagesse humaine est une folie.
Avec vos raisonnements vous perdez le sens car Dieu n’y occupe aucune place. Vous vous
imaginez trouver des lumières, mais vous enténébrez vos cœurs (Romains 1, 21-22). Car vous ne
connaissez pas l’essentiel. Vous passez à côté de ce qui est primordial. Vous ne voyez pas ce qui est
fondamental. Levez les yeux et découvrez tout cela dans la croix ! Mais en quoi peut bien consister
un message sur le thème du Christ crucifié ?
Tout d’abord, la Bonne Nouvelle commence paradoxalement comme une mauvaise nouvelle.
TOUS COUPABLES
Cette croix nous dit d’abord que nous sommes coupables. Ce sont nos péchés qui l’ont rendue
nécessaire. Nous sommes tous coupables, sans exception, même le plus moral d’entre nous, même le
plus juste, le plus charitable, le plus droit (Romains 3, 23). Il est primordial de le reconnaître.
Mais, dira-t-on qu’est que le péché ? N’est-ce pas une exagération oratoire propre aux
prédicateurs que de dramatiser ainsi les défauts des hommes ? D’ailleurs qui n’a pas de défauts ?
N’est-il pas dramatique au contraire de minimiser la malédiction du péché. Regardez autour
de vous. Considérez ses effets. Ouvrez vos yeux et regardez en face le visage hideux du péché.
Voyez l’ivrogne sur le trottoir. Voyez ce foyer brisé. Ces enfants battus, abandonnés, mal aimés.
Voyez le trône de ce dictateur édifié sur les restes de ses victimes, érigé sur la dépouille de la liberté.
Voyez nos champs de bataille. Regardez ces visages qui passent, ces yeux pleins d’adultère, ces
bouches qui vomissent des insultes, ces langues qui s’agitent dans leur venin pour juger, pour
critiquer, pour médire et calomnier…
Exagération oratoire ? Non, c’est la triste réalité. Et que peut l’homme devant cet étalage de
vice, de souffrance, de misère, de laideur et de menaces ; devant ce règne du péché ? Rien ! Il ne peut
rien ou presque rien. C’est pourquoi la croix était nécessaire. C’est pourquoi la croix est le dernier
espoir du monde.
L’IMPUISSANCE DES HOMMES DEVANT LE PÉCHÉ
La croix dit encore qu’aucun homme ne peut se racheter lui-même. Tous ses efforts dans cette
voie demeurent impuissants. Vous ne pouvez effacer un seul de vos péchés par vous-mêmes. Or,
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« 23 Le salaire du péché c’est la mort ». (Romains 6, 23) Mais quelqu’un est mort à votre place, à
ma place. Pourquoi ? Ça ne s’explique pas par la raison. Un seul mot décrit la scène entière qui
comprend d’un côté l’humanité coupable, « 79 assise dans les ténèbres » (Luc 1, 79) et de l’autre la
croix – et ce mot c’est AMOUR. La croix révèle à l’homme un Dieu qui aime. Ce n’est pas le
potentat insensible et inaccessible ; le maître absolu qui domine, qui guette la faute pour punir et
écraser. C’est le Père qui attend le retour de son enfant ; qui est prêt à pardonner, qui « 16 a tant aimé
le monde, qu’il a donné son Fils Unique, afin que quiconque croit en Lui ne périsse point, mais qu’il
ait la vie éternelle. » (Jean 3, 16)
Alors, que faut-il faire ? Si vous vous posez sincèrement cette question, vous pouvez
entendre ce que le Christ lui-même commande après l’épreuve de la crois : « 16 Celui qui croira et
sera baptisé (immergé en tant qu’un adulte) sera sauvé. Celui qui ne croira pas sera condamné. »
(Marc 16, 16)
LE PARDON DES PÉCHÉS
Que vient faire le baptême dans la vie d’un homme ? Reconnaissons d’abord que si le
Seigneur en fait l’objet d’un commandement formel notre devoir est de le comprendre et de nous y
soumettre.
L’apôtre Pierre nous aide à le comprendre. Il explique que le baptême constitue « 21 un
engagement d’une bonne conscience envers Dieu, et qui maintenant vous sauve vous aussi par la
résurrection de Jésus-Christ, » (1 Pierre 3, 21) ; qu’il procure la rémission des péchés parce qu’Il est
l’expression de la foi et du repentir (Actes 2, 38).
Quant à l’apôtre Paul, il voit dans le baptême par l’immersion un rapport étroit avec la croix
du Christ. C’est là que le croyant rencontre la croix, et l’embrasse et l’accepte pour lui-même en
s’unissant à sa victime.
C’est là que le Sauveur du monde devient le Sauveur personnel du croyant.
Il écrit : « 3 Ignorez vous que, baptisés dans le Christ Jésus c’est dans sa mort que tous nous
avons été baptisés ? 4 Nous avons été ensevelis avec lui par le baptême dans la mort, afin que,
comme Christ est ressuscité des morts… nous vivions nous aussi dans une vie nouvelle. » (Romains
6, 3-4)
— “un engagement”…
— « pour la rémission des péchés »…
— « dans une vie nouvelle »…
Chers amis, c’est cela la prédication de la Croix. Elle est là pour pardonner, pour purifier,
pour renouveler. C’est pourquoi Paul l’a choisie – c’est pourquoi nous devons la choisir. Car il
n’existe aucun autre moyen, aucun autre instrument, aucun autre argument capable de vaincre le mal,
relever l’homme et lui donner une espérance.
2
L’ÉGLISE QUE JÉSUS A BÂTIE
Je vous propose de considérer avec moi l’Église que Jésus a bâtie telle qu’elle vivait avant
que ne s’achève le premier siècle de notre ère. La raison qui m’a poussé à choisir ce thème c’est
l’indifférence et l’ignorance que je constate autour de moi concernant les origines du peuple
chrétien… car c’est bien de cela qu’il s’agit. N’est-il pas hautement important de savoir comment et
quand l’Église a été fondée ? Comment elle vivait et priait au temps des Apôtres ? Ne serait-ce que
pour faire une comparaison entre l’Église d’alors et toutes celles d’aujourd’hui.
Toute la Bible est pétrie de ce sujet. L’Église, on la devine comme par transparence dans les
prophéties de l’Ancien Testament (Genèse 12, 1-3 ; Zacharie 2, 14-15 ; Ésaïe 2, 2-3 ; Jérémie 31, 3134). Dans le Nouveau Testament, elle est d’abord l’objet d’une promesse de Jésus : « 18 Je bâtirai
mon Église » (Matthieu 16, 18). Elle est ensuite abondamment présente dans les lettres des Apôtres
(les épîtres) comme l’atteste cette exclamation de l’apôtre Paul : « 16 Toutes les Églises de Christ
vous saluent » (Romains 16, 16). C’est toute la période qui sépare la promesse du Christ de cette
exclamation, que nous voulons examiner aujourd’hui.
QUELLE EST CETTE ÉGLISE ?
Quelles sont ces Églises de Christ dont parle l’Apôtre avec tant d’enthousiasme ? Quelle est
cette Église que le Christ promet de bâtir ? Ces questions valent bien qu’on s’y attarde, je vous
l’assure. Mais, disons-le tout de suite, notre seule source d’information sera le Nouveau Testament,
et en particulier le livre des Actes des Apôtres que l’on connaît trop mal.
Dès le second chapitre de ce livre, nous assistons à la naissance de l’Église. Animés du
souffle de Dieu, les Apôtres s’adressent aux habitants de Jérusalem et à tous les pèlerins qui sont là à
l’occasion de la grande fête juive de la Pentecôte. Aucun Juif n’avait entendu semblable discours… Il
était question du Messie tant attendu, que l’on attendait d’ailleurs encore, mais que ces hommes
affirmaient être déjà venus. Était-ce possible ? Comme preuves ils citaient les Écritures et affirmaient
être tous témoins de la résurrection de ce Jésus qui avait été exécuté à peine deux mois auparavant.
En conclusion, ils entendent cette déclaration extraordinaire : « 36 Que toute la maison
d’Israël sache donc avec certitude que Dieu a fait Seigneur et Christ ce Jésus que vous avez
crucifié. » (Actes 2, 36)
Voici ce que dit la Bible pour décrire ce qui se passa ensuite : « 37 Après avoir entendu ce
discours, ils eurent le cœur vivement touché, et ils dirent à Pierre et aux autres apôtres : Hommes
frères, que ferons-nous ? 38 Pierre leur dit : Repentez-vous et que chacun de vous soit baptisé au
nom de Jésus-Christ pour le pardon de vos péchés et vous recevrez le don du Saint-Esprit. 39 Car la
promesse est pour vous, pour vos enfants et pour tous ceux qui sont au loin en aussi grand nombres
que le Seigneur notre Dieu les appellera. 40 Et, par plusieurs autres paroles, il les conjurait et les
exhortait disant : Sauvez-vous de cette génération perverse. 41 Ceux qui acceptèrent sa parole,
furent baptisés ; et, en ce jour-là, le nombre des disciples s’augmenta d’environ trois mille âmes. 42
Ils persévéraient dans l’enseignement des apôtres, dans la communion fraternelle, dans la fraction
du pain, et dans les prières. » (Actes 2, 37-42)
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Le chapitre se termine sur ces mots : « 47 Et le Seigneur ajoutait chaque jour à l’Église ceux
qui étaient sauvés. » (Actes 2, 47)
LE PEUPLE DE DIEU
En quelques paragraphes, nous venons d’assister à la naissance de l’Église que le Christ avait
promis de bâtir. Nous avons en même temps un aperçu assez précis de la nature profonde de cette
Église.
Aujourd’hui, lorsque nous parlons d’Église, c’est surtout pour désigner l’édifice. À l’origine,
l’Église désignait exclusivement le peuple de Dieu, l’assemblée, la communauté. Cette communauté
avait ceci de spécial, c’est qu’elle comprenait des hommes et des femmes qui professaient tous la
même foi en Christ et qui s’étaient repentis et fait baptiser en son nom pour obtenir le pardon de leur
péchés ; certes, Jésus est mort pour tous les hommes, et son sang, versé une fois pour toutes,
demeura un capital disponible pour tous ceux qui voudront l’accepter pour leur purification. Mais
seuls ceux qui se convertissent font partie de ce peuple de Dieu… et le Seigneur ajoute à l’Église
tous ceux qui sont sauvés. À cet égard, les Apôtres nous expliquent clairement que ce salut
commence par le pardon des péchés (Actes 2, 38 ; Luc 24, 47 ; Luc 1, 77).
Les lettres aux Églises contenues dans le Nouveau Testament, insistent beaucoup sur cet
aspect exclusif et précieux de l’Église… d’une part, parce qu’il était dans le projet de Dieu depuis
toujours de se former un peuple de parmi tous les peuples ; d’autre part, parce que la constitution de
ce peuple a coûté le sang du Christ.
« 25 Christ a aimé l’Église » dit l’apôtre Paul « 25 et s’est livré lui-même pour elle afin de la
sanctifier par la parole après l’avoir purifiée par le baptême d’eau. » (Éphésiens 5, 25)
« 28 Il se l’est acquise par son propre sang » (Actes 20, 28)
Ne voudriez-vous pas qu’il vous ajoute, vous aussi, à son Église ? « 11 Je suis le bon berger »
avait dit Jésus « 11 le bon berger donne sa vie pour ses brebis. » (Jean 10, 11)
Et, pour signifier que non seulement les Juifs mais aussi tous les autres peuples étaient
embrassés dans son amour, il ajoute : « 16 J’ai encore d’autres brebis qui ne sont pas de cette
bergerie ; celles-là, il faut que je les amène ; elles entendront ma voix, et il y aura un seul troupeau,
un seul berger. » (Jean 10, 16)
LE CHEF DE L’ÉGLISE
Concernant le chef de l’Église, il apparaît nettement dans les Écritures, que Christ était ce
chef suprême (Éphésiens 2, 20-23). La notion de représentant de Christ sur terre, telle qu’on la
conçoit aujourd’hui, est étrangère à la première communauté chrétienne. Les Apôtres partageaient la
même responsabilité et jouissaient des mêmes prérogatives (Matthieu 18, 18). Dans sa vision
l’apôtre Jean voit la ville céleste reposant sur « 14 douze fondements et sur eux les douze noms des
douze apôtres de l’Agneau.» (Apocalypse 21, 14). Certains parmi eux cependant, semblaient exercer
un surcroît d’influence. Ainsi Jacques, Pierre et Jean, l’apôtre Paul les appelle des « 9 colonnes dans
2
l’Église ». La notion d’un seul apôtre, prince des autres Apôtres et chef terrestre de l’Église n’existe
pas dans les Écritures. Les tâches sont partagées. Ainsi, l’apôtre Paul déclare que Dieu lui a confié
l’évangélisation des Juifs. Et pour montrer qu’il a autant d’autorité que les autres Apôtres, il n’hésite
pas à réprimander Pierre en public en des termes les plus sévères, lorsqu’il surprend ce dernier
agissant avec hypocrisie et par faiblesse de conviction (Galates 2, 7).
Il faudra attendre plusieurs siècles pour que se forme définitivement la notion d’un Pape,
évêque universel.
Mais c’est la communauté du premier siècle qui retient tout notre attention pour le moment.
SON CULTE
Voyons à présent en quoi consistait son culte. Nous venons de lire que les premiers chrétiens
« 42 persévéraient dans l’enseignement des apôtres, dans la communion fraternelle, dans la fraction
du pain et dans les prières. » (Actes 2, 42) Voilà résumés succinctement les divers éléments du culte
de l’Église sous la direction des Apôtres. Ce culte ne nous apparaît pas comme étant minuté par une
liturgie longue et compliquée, mais comme étant spontanée… peut-être du fait que les premières
assemblées se réunissaient souvent dans des maisons privées (1 Corinthiens 16, 19 ; Romains 16, 5 ;
Philémon 2 ; Colossiens 4, 15). Toutefois cela n’empêchait pas que tout se fit « 40 avec bienséance
et avec ordre » (1 Corinthiens 14, 40).
Examinons les principaux éléments du culte.
Dès l’origine, un jour particulier est mis à part pour la célébration du culte. C’est le dimanche,
premier jour de la semaine. Justin Martyr, qui se convertit au début du second siècle, explique la
raison du choix de ce jour “parce que c’est le jour auquel Dieu commença de créer le monde ; que
c’est ce même jour que Jésus-Christ notre Sauveur est ressuscité et qu’il est apparu à ses Apôtres…”
(Première apologie).
Pour les premiers chrétiens, le dimanche était donc avant tout la fête de la résurrection.
L’Église du Christ était également une Église priante et chantante. « 19 Entretenez-vous par
des psaumes, par des hymnes et par des cantiques spirituels, chantant et célébrant de tout votre cœur
les louanges du Seigneur ; 20 rendez continuellement grâces pour toutes choses à Dieu le Père, au
nom de notre Seigneur Jésus-Christ… » (Éphésiens 5, 19-20)
Toute l’assemblée participe activement et intelligemment. On ne distingue pas d’officiants
consacrés comme dans l’ancien culte mosaïque, intermédiaires entre Dieu et les hommes. Au
contraire, les Apôtres avaient enseigné que tout chrétien peut, pour sa part, au moyen de la médiation
de Christ, accéder auprès de Dieu et lui rendre un culte personnel (1 Timothée 2, 5 ; Hébreux 4, 1416).
La prédication, la lecture ou l’enseignement de la Parole occupaient évidemment une place
importante dans le culte.
2
Il semble aussi qu’une collecte en faveur des chrétiens nécessiteux était faite régulièrement
chaque semaine. L’apôtre Paul donne à cet égard de nombreux encouragements à la générosité (1
Corinthiens 16, 1-2 ; 2 Corinthiens 9, 1-6-15).
Mais sans aucun conteste, le centre, la raison d’être de ces assemblées dominicales, était la
Sainte Cène. Jésus l’avait instituée la veille de sa mort (Matthieu 26, 26) en recommandant
« 19 faites ceci en mémoire de moi ». (Luc 22, 19)
Plus tard, aux chrétiens de Corinthe qui avaient perdu de vue le sens profond de ce repas, Paul
dut rappeler : « 26 Toutes les fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous
annoncez la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne ». (1 Corinthiens 11, 26)
Double signification : Souvenir du sacrifice du Fils de Dieu et bienheureuse espérance,
anticipation même, de son retour (Jean 14, 1-3).
Les premiers chrétiens avaient coutume de parler de la « fraction du pain » pour désigner la
Sainte Cène. C’est ainsi que Luc, racontant une journée passé à Troas parmi les frères, en compagnie
de Paul, rapporte que : « 7 Le premier jour de la semaine nous étions réunis pour rompre le pain. »
(Actes 20, 7)
(Il est inutile de discuter ici du symbolisme du pain et du vin. Qu’il nous suffise de dire que,
d’après les Écritures, Jésus a clairement offert et le pain et le vin, comme représentant respectivement
son corps et son sang. En outre, toute l’assemblée des premiers chrétiens et non seulement quelques
privilégiés officiants, participait à ce repas sous les deux espèces. Il s’agit dans tout les cas de
manger le pain et de boire la coupe. Rien ne nous autorise à modifier cet ordre, pas même une
prétendue évolution liturgique qui nous paraît superflue, illégitime et dangereuse.)
Voilà brièvement comment se présentait au premier siècle l’Église que Jésus avait bâtie. On a
coutume de la désigner par le terme : l’Église primitive. Cette expression a une résonance
malheureuse… Un peu comme si l’on disait : l’Église préhistorique. Elle sous-entend chez certains
qu’il fallait bien qu’elle sorte de ce “primitivisme” pour se développer, s’améliorer, se moderniser.
Était-elle donc si imparfaite ? N’était-elle qu’un embryon d’Église ? Avons-nous gagné quoi que ce
soit à vouloir la changer, la transformer ? Au contraire, nous avons perdu sa pureté doctrinale, la
spontanéité de sa foi, l’ardeur de son espérance. Par nos manipulations, nous l’avons divisée et
défigurée.
Si les hommes avaient continué de respecter scrupuleusement les Saintes Écritures, notre
christianisme ne serait pas émietté comme il l’est aujourd’hui. Les hommes ont semé leurs traditions.
Ils ont aimé et imposé leurs opinions. Ils ont établi des dogmes et enseigné « 9 des préceptes qui
sont des commandements d’hommes » (Matthieu 15, 8-9). Ils ont rédigé des articles de foi et des
“CREDO” qui sont devenus leurs lois suprêmes. Dans leur égarement, ils ont même parfois interdit
la lecture de la Bible et tué ceux qui passaient outre cette interdiction. Ils ont récolté ce qu’ils ont
semé. Le sombre pressentiment de l’apôtre Paul se justifie pleinement : « 3 Je crains que vos
pensées ne se corrompent et ne se détournent de la simplicité à l’égard de Christ. » (2 Corinthiens
11, 3)
3
L’ÉGLISE AUJOURD’HUI
Alors aujourd’hui on essaie de lui refaire un visage à cette Église ; de la remanier à nouveau
car on comprend qu’on est peut-être allé trop loin… Mais combien de changements apportera-t-on
encore ? Et pendant combien de temps ? Aura-t-on par ailleurs le courage de changer, d’éliminer, de
condamner ou de modifier tout ce qui doit l’être ?
Sur ces questions, les plus optimistes restent pessimistes.
L’ÉGLISE DU CHRIST
Cependant, une chose demeure certaine, c’est que l’Église que Jésus a bâtie, telle que nous
venons de l’évoquer dans ses premières années, peut encore vivre aujourd’hui comme le démontrent
les milliers d’assemblées répandues dans le monde et qui portent, pour la plupart, le nom d’Église du
Christ.
Nombreux sont ceux qui ont compris que la solution ne consiste pas à réformer de vieilles
traditions moyenâgeuses, mais à restaurer l’Église de Jésus telle qu’elle vit dans les pages de
l’Évangile.
Connaître la nature de l’Église, c’est savoir où elle est. Les Apôtres ne sont plus, mais le
message qu’ils nous lèguent dans le Nouveau Testament est plus qu’une présence. Ils ont parlé une
fois pour toutes (Jude 3). IL nous appartient de recevoir leur parole issue de l’Esprit-Saint. Il nous
appartient de persévérer dans cet Évangile « 2 par lequel vous êtes sauvés » dit l’apôtre Paul
« 2 à condition que vous le reteniez tel qu’il vous a été annoncé ; autrement vous auriez cru en
vain ». (1 Corinthiens 15, 2)
Le message de la Bible produit une foi saine, vraie et vivante. Il exhorte à la repentance et au
baptême pour la rémission (pardon) des péchés.
Ceux qui suivront cette voie et cette voie seulement, seront fécondés par la même semence
que celle qui régénérait le cœur des premiers Chrétiens… Leurs péchés seront pardonnés et le
Seigneur les ajoutera à son Église.
L’auteur : M. RICHARD ANDREJEWSKI
Copier en forme de Word par M. Denis Tarko
3
TABLE DES MATIÈRES
JE SUIS VENU POUR……………………………………………………………………………….1
Pour accomplir la Loi et les Prophètes………………………………………………………………2
Pour appeler des pécheurs…………………………………………………………………………2-3
Pour éclairer le monde……………………………………………………………………………….3
Pour un jugement………………………………………………………………………………….3-4
Conclusion…………………………………………………………………………………………...4
À CAUSE DE NOS PÉCHÉS……………………………………………………………………...4-5
Les prophètes décrivent sa mort……………………………………………………………………..5
L’agneau de Dieu………………………………………………………………………………….5-6
Il aimait ; on l’a haï…………………………………………………………………………………..6
On l’arrête……………………………………………………………………………………………6
Un semblant de jugement………………………………………………………………………….6-7
Pilate le livre…………………………………………………………………………………………7
Battu et crucifié……………………………………………………………………………………7-8
COMMENT JÉSUS EST-IL MORT ?……………………………………………………………...8
Ils se moquaient de lui……………………………………………………………………………….8
Vers Golgotha………………………………………………………………………………………..9
Au pied de la croix…………………………………………………………………………………...9
Le crucifiement……………………………………………………………………………………..10
Jusqu’au bout……………………………………………………………………………………10-11
MON DIEU POURQUOI ?……………………………………………………………………..11-12
Pour vaincre il faut combattre…………………………………………………………………..12-13
Consolation……………………………………………………………………………………...13-14
Certitude……………………………………………………………………………………………14
LE SILENCE DE LA CROIX……………………………………………………………………...15
Un silence oppressant ……………………………………………………………………………...15
Ésaïe parle………………………………………………………………………………………15-16
Souffrances et guérison…………………………………………………………………………….16
Plus rien à dire…………………………………………………………………………………..16-17
C’est nous qui l’avons crucifié………………………………………………………………….17-18
LA RÉSURECTION DU CHRIST………………………………………………………………...19
Le Christianisme……………………………………………………………………………………19
Que penser de la résurrection………………………………………………………………………20
Comment être certain……………………………………………………………………………….20
Conclusions de savants et d’historiens……………………………………………………………..21
Les témoins…………………………………………………………………………………………21
Le témoignage de Paul……………………………………………………………………………..22
Seigneur, je crois………………………………………………………………………………..22-23
3
LA PRÉDICATION DE LA CROIX………………………………………………………………23
Comment allait-il s’y prendre…………………………………………………………………..23-24
Christ : Centre du message…………………………………………………………………………24
Une cause…………………………………………………………………………………………...25
Tous coupables……………………………………………………………………………………..25
L’impuissance des hommes devant le péché……………………………………………………25-26
Le pardon des péchés……………………………………………………………………………….26
L’ÉGLISE QUE JÉSUS A BÂTIE………………………………………………………………...27
Quelle est cette Église…………………………………………………………………………..27-28
Le peuple de Dieu…………………………………………………………………………………..28
Le Chef de l’Église……………………………………………………………………………...28-29
Son culte………………………………………………………………………………………...29-30
L’Église aujourd’hui………………………………………………………………………………..31
L’Église du Christ…………………………………………………………………………………..31
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