le porc en recherche - Direction des services vétérinaires

Transcription

le porc en recherche - Direction des services vétérinaires
Direction des services vétérinaires
LE PORC EN RECHERCHE
Anne-Marie et Daphnée Veilleux-Lemieux
Table des matières
1.
2.
Utilité en recherche ................................................................................................................. 3
1.1
Agroalimentaire ............................................................................................................... 3
1.2
Sciences biomédicales ..................................................................................................... 3
Biologie .................................................................................................................................... 3
2.1
Races ................................................................................................................................ 3
2.2
Anatomie ......................................................................................................................... 4
2.3
Valeurs normales ............................................................................................................. 4
3.
Comportement ........................................................................................................................ 5
4.
Hébergement........................................................................................................................... 5
5.
Soins vétérinaires .................................................................................................................... 6
6.
Expérimentation ...................................................................................................................... 7
6.1
Anesthésie ....................................................................................................................... 7
6.2
Administration de drogues .............................................................................................. 8
6.3
Collecte de fluides ........................................................................................................... 8
6.4
Chirurgie .......................................................................................................................... 8
6.5
Euthanasie ....................................................................................................................... 9
Anne-Marie et Daphnée Veilleux-Lemieux
Le porc est une espèce animale souvent utilisée en recherche, pour plusieurs raisons :
disponibilité, animal domestiqué, ressemblance anatomique avec l’humain, etc. Avant de
procéder à la partie pratique de la formation, une brève session de théorie sera offerte. Gardez
à l’esprit que ce document contient des informations très résumées, et que beaucoup plus de
renseignements sont disponibles en ligne et dans des livres de référence.
1. Utilité en recherche
1.1 Agroalimentaire
Le porc domestique est utilisé en recherche dans le domaine de l’agroalimentaire dans le but
d’améliorer l’efficacité de l’élevage. De nouveaux outils sont développés pour permettre un
meilleur bien-être des porcs (ex. cages de mise-bas, surfaces de plancher, techniques, etc.).
Plusieurs études sont menées sur l’efficacité alimentaire. En effet, les éleveurs sont toujours à la
recherche de lignées de porc ou de diètes qui offrent une conversion alimentaire optimale (faire
« pousser » du cochon avec le moins de nourriture possible). De plus, l’environnement est au
centre de beaucoup de projets jumelés à l’efficacité alimentaire, afin de développer des diètes
qui polluent moins (ex. gaz à effet de serre). D’autres projets visant le traitement des déchets à
la sortie de la ferme sont aussi populaires.
1.2 Sciences biomédicales
Du côté de la recherche biomédicale, le miniporc est souvent utilisé vu sa grande ressemblance
anatomique avec l’humain. Le miniporc, développé dans les années 1950, est un modèle animal
utilisé dans plusieurs disciplines, dont la chirurgie et la xénotransplantation. Depuis quelques
années, il a d’ailleurs remplacé des chiens, chats et primates dans certains projets, incluant la
formation de médecins. Cependant, à cause de pressions de groupes de protection des animaux,
la majorité des universités nord-américaines ont décidé d’abandonner l’utilisation de porcs dans
la formation des médecins, préférant se tourner uniquement vers les mannequins ou les
cadavres.
2. Biologie
2.1 Races
Toutes les races de porcs domestiques et miniatures descendent du même animal, le sanglier
Anne-Marie et Daphnée Veilleux-Lemieux
sauvage. On observe au sein des différentes races une grande variété de taille, d’apparence et
de comportement. Parmi les races de porcs domestiques les plus utilisées en élevage, citons le
Landrace, le Yorkshire et le Duroc. Bien entendu, des croisements entre ces lignées sont souvent
obtenus pour arriver au produit voulu par les consommateurs de viande des différentes régions.
Un porc domestique adulte moyen peut facilement peser plus de 300 kg. Les races de miniporcs
ne dépassent pas les 100 kg une fois adultes, mais une variation importante existe. Les plus
petites races sont le Göttingen, le Sinclair et le Yucatan micro, qui pèsent généralement entre 35
et 55 kg une fois adultes. Le Yucatan mini et le Hanford sont un peu plus gros, pesant entre 70 et
90 kg à l’âge adulte. Ces miniporcs sont disponibles chez plusieurs fournisseurs reconnus, dont
Marshall BioResources et Sinclair Bio-Resources.
2.2 Anatomie
Plusieurs éléments anatomiques du porc sont semblables à l’humain. Le système tégumentaire
similaire fait en sorte que le porc est utilisé pour des études de toxicité cutanée ou de
traitement de plaie. L’estomac et le pancréas du porc et de l’humain se ressemblent, rendant
utiles des études sur les ulcères gastriques et la sécrétion pancréatique. Le système
cardiovasculaire est pratiquement identique à celui de l’Homme, mis à part que la veine azygos
se jette directement dans l’oreillette droite plutôt que dans la veine cave. Les reins sont
également très semblables.
Le porc possède une bronche supplémentaire qui origine de la trachée crâniale. Cette bronche
ventile le lobe crânial droit du poumon. Lors de l’intubation, il faut être prudent de ne pas
utiliser un tube trop long de peur d’intuber uniquement cette bronche. La femelle possède de
très longues cornes utérines, et le mâle, de très gros testicules et plusieurs glandes accessoires.
L’anatomie du pénis est particulière, avec le gland en forme de tire-bouchon. La glande
surrénale droite est adjacente à la veine cave, ce qui rend la surrénalectomie impossible chez
cette espèce.
2.3 Valeurs normales
Les porcs croissent très rapidement, peu importe la lignée. La croissance est un facteur à
prendre en compte lors de l’élaboration de l’étude, puisque quelques semaines peuvent avoir
un impact important sur les paramètres physiologiques mesurés. La durée de vie normale du
Anne-Marie et Daphnée Veilleux-Lemieux
porc est de 10 à 15 ans.
Valeurs cardiovasculaires et respiratoires normales du porc éveillé
PORC
MINIPORC
35-55 kg
MINIPORC
70-90 kg
90-110 bpm
68-98 bpm
98-112 bpm
86-123 mmHg
83-111 mmHg
86-92 mmHg
Fréquence respiratoire
16-25 rpm
11-29 rpm
21-29 rpm
Température
37-39,5 °C
37-38 °C
37-39,5 °C
44-55 mmHg
---
---
95-100 %
95-100 %
95-100 %
PARAMÈTRES
Fréquence cardiaque
Pression artérielle
moyenne
CO 2 expiré (CO 2 veineux)
SpO 2 (sous 100 %
d’oxygène)
Ces valeurs sous anesthésies tendent à être plus basses, à l’exception du CO 2 expiré et de la
saturation en O 2 . Des tableaux de valeurs hématologiques, biochimiques et reproductives sont
également disponibles dans les livres de référence.
3. Comportement
Le porc est un animal très social. En nature, les femelles vivent en groupe avec leurs petits. Les
mâles sexuellement matures sont plutôt solitaires. Dans un groupe, une hiérarchie s’installe
rapidement et l’agression est rare, tant qu’un nouvel individu n’est pas introduit. Il n’est pas
impossible d’observer des comportements agressifs lors de l’alimentation (surtout des morsures
de la queue et des oreilles). La simple séparation des animaux lors des repas règle
habituellement le problème. Le porc passe une grande partie de son temps à chercher de la
nourriture en nature. Le comportement d’exploration de l’environnement est donc très présent
et l’animal mange plusieurs petits repas dans la journée.
4. Hébergement
Comme mentionné précédemment, les porcs doivent être hébergés en groupe, lorsque possible.
Idéalement, les enclos doivent comprendre de la litière au sol, afin de permettre le
comportement d’exploration du porc. Si les animaux sont hébergés dans des cages avec
plancher grillagé, le comportement d’exploration se fait difficilement sans litière. Des jouets
Anne-Marie et Daphnée Veilleux-Lemieux
doivent aussi être fournis : objets suspendus sur lesquels le porc peut tirer, ou encore des jouets
au sol qui peuvent être déplacés. La température idéale varie selon l’âge, de 29 °C chez des
animaux de 6 à 8 semaines à 17 °C chez les adultes. Suffisamment d’espace doit être fourni pour
que les zones de défécation, d’alimentation et de sommeil soient distinctes. Les porcs
miniatures sont sujets à l’embonpoint, car ce ne sont pas des animaux qui font volontairement
de l’exercice. Le contrôle des rations est donc important. Il est préférable d’offrir l’eau par
système automatisé, puisque les animaux en consomment beaucoup et qu’elle doit être
disponible en tout temps. Le nettoyage des enclos devrait idéalement être fait
quotidiennement, au moins pour retirer les excréments. Les cages au plancher grillagé sont
souvent plus faciles à nettoyer, mais offrent moins d’enrichissement environnemental.
5. Soins vétérinaires
5.1 Préventifs
Comme chez les autres espèces utilisées en recherche, il est primordial d’avoir des porcs en
santé afin d’éviter les biais lors de l’analyse des résultats. En effet, les différentes infections
peuvent avoir un impact non négligeable sur une variété de fonctions biologiques, dont
l’immunité, la reproduction et l’oncogenèse, ainsi que sur l’infection expérimentale. Une
quarantaine pour les nouveaux individus ajoutés à un groupe est donc importante. Un
programme de vaccination et de traitement des parasites peut être requis, selon la provenance
des animaux et la durée d’hébergement prévue. Il faut aussi s’assurer de maintenir un haut
statut sanitaire et d’utiliser de bonnes pratiques de laboratoire pour prévenir la transmission de
maladies à l’intérieur du groupe et à l’humain. En effet, le porc est porteur de plusieurs
bactéries et parasites zoonotiques, ainsi que des virus. Il est toutefois possible de se procurer
des porcs SPF en recherche. Les observations quotidiennes et les examens vétérinaires réguliers
permettent de détecter les problèmes de santé. Selon les besoins, des sérologies et
bactériologies de contrôle peuvent être indiquées.
5.2 Curatifs
Les traitements curatifs sont plutôt limités chez le porc. C’est pour cette raison que la
prévention des maladies est primordiale. Lorsqu’un problème de santé (autre qu’une petite
plaie cutanée) est détecté chez un animal, il faut tout d’abord l’isoler des autres. Un examen
Anne-Marie et Daphnée Veilleux-Lemieux
vétérinaire est ensuite requis, avec collecte d’échantillons pour analyses bactériennes et
parasitaires. Les traitements, souvent antibiotiques, seront choisis selon les agents identifiés, ou
l’animal sera euthanasié.
6. Expérimentation
Il n’est pas toujours facile de travailler avec les porcs : ils sont peu coopératifs lorsque
contentionnés physiquement, peuvent se débattre et vocaliser. Le stress subi par l’animal peut
être très intense. La contention chimique et l’anesthésie sont très utiles, même pour des
procédures mineures.
6.1 Anesthésie
L’anesthésie chez le porc est plus complexe que chez d’autres espèces et demande de
l'entraînement afin d’être maîtrisée. La conformation anatomique du porc ne permet pas un
accès veineux ou artériel pratique : seuls les vaisseaux des oreilles sont facilement accessibles.
L’hyperthermie maligne, condition génétique, peut être induite par le stress, mais aussi par
l’anesthésie, l’halothane étant un des agents fréquemment incriminés. Cette condition est
observée chez les races de porcs domestiques uniquement. Une condition similaire existe aussi
en période de récupération de l’anesthésie et semble être reliée à un haut taux de lactate
sanguin. Si ce problème est observé, il faut demander au fournisseur des individus qui ne sont
pas reliés à l’animal en question, car cette condition a une tendance familiale.
L’intubation est difficile pour plusieurs raisons. La faible amplitude d’ouverture et la forme
allongée de la tête rendent difficile la visualisation directe du larynx. De plus, la présence d’un
diverticule œsophagien et la forme du larynx nécessitent souvent une série de rotations
particulières du tube endotrachéal pour entrer dans la trachée. Les porcs font aussi des
laryngospasmes; l’aspersion des aryténoïdes avec de la lidocaïne facilite l’intubation.
Les drogues principalement utilisées en prémédication sont le télazol et la xylazine, qui produit
une anesthésie légère convenable pour des procédures peu invasives. Si une anesthésie
générale est requise, l’induction au propofol peut être faite au besoin pour permettre
l’intubation. Une fois intubé, l’animal peut être maintenu sur infusion de propofol ou sur un
anesthésique gazeux comme l’isoflurane. Un ou des analgésiques doivent être administrés
durant une procédure invasive : analgésie locale, mélange de morphine, lidocaïne et kétamine
Anne-Marie et Daphnée Veilleux-Lemieux
en infusion, fentanyl en infusion, AINS IM, etc.
6.2 Administration de drogues
Les voies communément utilisées sont les voies veineuses et artérielles (oreilles), la voie orale
(dans la moulée, avec un lance capsule robuste, avec un tube gastrique), la voie sous-cutanée
(cou, flanc ou patte arrière), intramusculaire (patte arrière ou cou). Pour les injections souscutanées, l’utilisation d’une aiguille papillon permet une injection sans contention.
6.3 Collecte de fluides
La collecte de sang peut se faire de différentes façons, qui seront plus ou moins adaptées selon
la taille de l’animal et le volume de sang requis. Sur un petit animal, il est possible de
ponctionner plusieurs sites sans anesthésie. Cependant, puisque le porc est peu coopératif, il est
possible qu’une sédation soit nécessaire. Les vaisseaux auriculaires sont réservés pour de petits
volumes uniquement (attention aux hématomes si l’artère est ponctionnée). Les veines et
artères fémorales, veines jugulaires et artères carotides sont souvent utilisées. D’autres sites
incluent : veine céphalique, épigastrique crâniale superficielle, veine cave crânial, plexus
brachial, etc.
L’urine peut être récoltée par cathéter; cependant, seules les femelles peuvent être
cathétérisées, et la procédure doit être faite sous anesthésie. La cage métabolique peut servir à
récolter l’urine et les fèces, mais l’urine est souvent contaminée par les fèces.
Le liquide cérébrospinal (LCR) peut être prélevé, sur un animal anesthésié et avec une technique
aseptique, au niveau de la cisterna magna (cou).
La bile et les sécrétions pancréatiques peuvent être récoltées avec un cathéter chronique, placé
en laparotomie.
6.4 Chirurgie
Les chirurgies doivent être faites sous anesthésie et de façon aseptique ! La pose de cathéter
intraveineux ou artériel est souvent pratiquée pur l’infusion de diverses drogues à l’étude.
L’utilisation d’un vascular access port nécessite aussi la cathétérisation. Il faut faire attention à la
période postopératoire chez les porcs : les autres porcs peuvent attaquer l’animal qui vient de
Anne-Marie et Daphnée Veilleux-Lemieux
subir une chirurgie, car il est plus faible. Il peut être préférable d’héberger l’animal en enclos
individuel pour quelques jours après la chirurgie.
6.5 Euthanasie
L’euthanasie des porcs utilisés en recherche doit répondre aux lignes directrices du CCPA. En ce
sens, plusieurs techniques sont acceptables. La surdose de pentobarbital intraveineux sous
sédation est la technique la plus fréquemment utilisée. Une surdose d’anesthésique à inhaler
est aussi acceptable. Certaines méthodes physiques peuvent être utilisées, généralement sur
des animaux de plus grande taille, mais elles doivent être très bien maîtrisées et suivies d’une
seconde méthode qui assure le décès de l’animal. De cette façon, l’utilisation d’un pistolet à tige
perforante (à la jonction entre 2 lignes imaginaires qui relient les oreilles aux yeux) est
acceptable, tout comme l’étourdissement par décharge électrique, tant que la procédure est
suivie de l’exsanguination ou de la décérébration de l’animal. Le tout doit se faire le plus
rapidement et le plus humainement possible.
Anne-Marie et Daphnée Veilleux-Lemieux