gamification

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gamification
Cahier d’Inmédiats
DÉC.2014
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GAMIFICATION
SERIOUS GAMES ET MONDES VIRTUELS,
OUTILS DE MÉDIATION SCIENTIFIQUE ?
sommaire
12
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6
7
89
1011
Scénariser au travers des serious games et mondes virtuels Définitions
Intentions de départ
Nos expérimentations
L'île des sciences
Termitia : un jeu construit avec les publics
Jeux existants, en médiation
Réaliser son serious game
Gamification de la relation du visiteur au centre de sciences
Lexique Conclusion page
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Attribution CC BY - NC - SA
Direction : Claude Farge / Thomas Amourous - Membres du groupe Gamification : Marc Jamous
(Universcience) / Audrey Bardon (Science Animation) / Christopher Couzelin (Espace des Sciences) /
Vincent Jouanneau (Cap Sciences) / Virginie Klauser (Relais d’sciences) / Stéphane Lebrun (Relais
d’sciences) - Design graphique : www.e3agence.fr
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Gamification
Scénariser au travers
des serious games et mondes virtuels
Définitions
Le programme Inmédiats
Le programme Inmédiats, financé par les Investissements d’Avenir, est
porté par six centres de sciences : Cap Sciences, l’Espace des Sciences,
La Casemate, Relais d’sciences, Science Animation et Universcience.
Il a pour objectif d’expérimenter, d’évaluer et de développer de nouvelles
formes de médiation scientifique et technique en s’appuyant sur les
technologies numériques. Son action vise plus spécifiquement les 15-25 ans,
dont la désaffection pour les sciences est particulièrement notable, s’inscrivant
en opposition avec leur appétence pour les outils numériques. Parmi les axes
de travail, le chantier Scénarisation consiste à développer des serious games
et des mondes virtuels.
Sérious game : définition
Le groupe de travail Scénarisation a pour mission de développer et
évaluer des serious games, ces jeux qui s’écartent du simple divertissement
pour associer à un environnement ludique une intention “sérieuse”. Cette
dernière peut avoir pour finalité 1 de diffuser un message (transmettre un
savoir, une information neutre ou une opinion), d’entraîner (développer des
compétences cognitives ou physiques), ou d’échanger des données.
Outre l’engouement des jeunes pour le médium jeu vidéo (66,5% des Français
jouent à des jeux vidéo et 75,9% des 15-24 ans 2), le serious game semble
particulièrement pertinent pour les sensibiliser aux sciences, celui-ci favorisant
la visualisation, l’immersion et la motivation de l’usager.
Classification donnée par Ludoscience
Étude Les pratiques de consommation de jeux vidéo des Français, réalisée en mars 2013 par TNS Sofres
pour le Centre national du cinéma et de l’image animée.
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/ INMEDIATS 2014
INMEDIATS
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2014 / Gamification
À travers un univers immersif qui mélange informations réelles et fiction, riche
en interactions, en stratégies, en défis à relever, le joueur découvre, apprend,
s’entraine, s’implique, sans avoir le sentiment de “travailler”.
Mais trouver cet équilibre entre plaisir et difficulté - appelé aussi “flow” -,
construire un scénario à la fois ludique et scientifiquement exact, proposer une
expérience qui réponde aux attentes d’un public exigeant tout en baissant
les coûts de production, ou encore mettre en place un scénario de médiation
autour d’un jeu vidéo, est un travail particulièrement délicat.
Diverses expérimentations sont actuellement menées au sein des centres
Inmédiats pour dégager bonnes pratiques et stratégies d’usages des jeux
vidéo au service de la médiation scientifique et technique.
Mondes virtuels : définition et principe
Les mondes virtuels sont des mondes créés artificiellement, pouvant héberger
une communauté d'utilisateurs présents sous forme d'avatars qui ont la
capacité de s'y déplacer et d'y interagir. La représentation de ce monde et de
ses habitants est généralement en deux voire trois dimensions.
Ce monde peut simuler le monde réel, avec ses lois physiques telles que la
gravité, le temps, le climat, la géographie, ou tout au contraire être régi par
d'autres lois.
En tant qu’espace de mise en relation de personnes distantes en mode
synchrone, on peut aujourd’hui concevoir les mondes virtuels comme des
réseaux sociaux en trois dimensions.
Les mondes virtuels développés dans le cadre d’Inmédiats se positionnent
comme :
de nouveaux espaces virtuels de culture scientifique ;
en ligne ;
accessibles à travers un navigateur internet ou depuis des terminaux
de type tablette, smartphone ou table tactile ;
en 3D ;
multiutilisateurs ;
dédiés à la jeunesse ;
des plateformes expérimentales de médiation scientifique.
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Gamification
Intentions de départ
Pourquoi scénariser dans un centre de sciences
La motivation à scénariser les contenus scientifiques provient de deux
constats.
Le premier, avec l’arrivée et la démocratisation d’Internet, est que le rôle
du centre de sciences dévie petit à petit de celui d’informateur/diffuseur
qu’il avait à la création des centres pendant les années 1990, vers celui de
“metteur en scène” de la science.
Face à ce premier constat, on peut s’interroger sur la pertinence de l’information
aujourd’hui diffusée au travers d’Internet. L’évaluation de l’information est
devenue une question cruciale. L‘utilisateur doit pouvoir trier dans ce déluge
informationnel pour trouver la “bonne” information et déjouer la désinformation
et l’information “médiocre”.
Dans ce contexte, le centre de sciences apporte un regard sur l’information
scientifique ou plutôt propose au visiteur de se forger un regard au travers
d’expériences immersives. La mise en scène permet au visiteur de vivre une
histoire dans un monde fictionnel ; elle le place en situation d’expérience au
sein d’un environnement non linéaire. C’est d’ailleurs cette non-linéarité qui
laisse le libre arbitre au visiteur et lui permet de se forger son propre jugement
sur l’expérience vécue.
Le deuxième constat est en rapport avec l’attractivité inhérente à la
scénarisation.
Les centres de sciences se partagent l’occupation du temps libre des
utilisateurs avec d’autres formes de culture et de loisirs dont les deux plus
importants sont le cinéma et les jeux vidéo en termes de parts de marché. La
scénarisation y joue un rôle primordial et leur large diffusion et consommation
ne sont plus à démontrer.
En scénarisant leurs contenus, les centres de sciences souhaitent toucher un
plus large éventail de publics et en plus grand nombre. Les outils numériques
tels que les serious games sont des bons supports pour exprimer une
narration interactive et la diffuser le plus largement possible au-delà des murs
des centres de sciences.
La scénarisation participe ainsi à la démocratisation des sciences en
dépoussiérant l’image négative du chercheur détenteur du savoir qui “tente”de
le divulguer au public, pour aller vers une expérience immersive plaçant sur un
pied d’égalité le chercheur et le visiteur.
/ INMEDIATS 2014
INMEDIATS
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2014 / Gamification
Multimédia et jeux vidéo dans un centre de sciences
Jeux vidéo ou multimédia ?
Depuis leur ouverture, les centres de sciences Inmédiats présentent dans leurs
expositions des dispositifs multimédias de médiation, dispositifs que nous
définirons plus simplement par “multimédia”. En revanche, la présentation de
jeux vidéo est plus récente.
Vouloir présenter un produit interactif numérique ludique dans un centre de
sciences impose au préalable de répondre à quelques questions :
- Quel est le contexte (exposition, espace d’animation, lieu ressources) ?
- Est-il pertinent comparé à d’autres supports (panneau, manip, objet…) ?
- Le contenu répond-il à la demande ?
- Pour quel public, pour quel usage (en self-service, avec une médiation) ?
Avant tout, s’agit-il d’un jeu vidéo ou d’un multimédia ?
Bien qu’ils aient beaucoup de points en commun (modes d’interactions,
supports, mono/multi joueurs...), la durée de consultation est pour nous un
critère de sélection pour l’usage qui en sera fait.
Pour un jeu vidéo, elle va de quelques minutes à aucune limite de temps. Il peut
être payant, à créer, sur support physique, à télécharger ou jouable en ligne.
En fonction de la typologie du jeu (serious game, puzzle game, bac à sable 1,
simulation...) le scénario ou l’interface utilisateur peuvent être complexes et
demander un temps de prise en main long.
Un multimédia est un produit de commande conçu et réalisé dans un
contexte précis : une exposition, un site Web, une structure itinérante...
Il répond à un propos et généralement à un seul objectif pédagogique. Les
interactions sont faciles à appréhender. Il peut être présenté sur tout type de
supports, et être multi-utilisateurs. La durée de consultation totale n’excède
pas vingt minutes en général.
Les usages
Une fois estimés la durée de consultation et le type de scénario, il convient
de savoir si celui-ci est adapté à l’usage auquel on le destine. L’expérience
d’Universcience en la matière nous amène à préconiser de présenter un
multimédia, en complète autonomie, dans une exposition, une médiathèque
ou tout autre lieu ressources. Un jeu vidéo est plutôt destiné à une présentation
dans des lieux ressources ou lors de séances avec un animateur/médiateur.
Jeu type Bac à sable ou Sandbox : jeu dans lequel le joueur a une grande liberté d’action.
Il peut agir et construire au gré de son imagination. Exemples : Minecraft, SimCity, Universe Sandbox
1
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Gamification
MULTIMÉDIA
JEU VIDÉO
Scénario avec un début et une fin
Interactivité dirigée
Scénario avec un début et une fin
Scénario de type Bac à sable
Scénario avec objectifs définis et
liberté de choix du joueur très limitée
Scénario très libre
Interactivité libérée
Durée de consultation
Limitée à 20 mn
Durée de consultation
De quelques minutes à aucune limite
de temps
Produit court couvrant 1 propos
et répondant à des objectifs
pédagogiques (1 à 3)
Produit généralement long
exclusivement ludique
Supports PC, tablette, smartphone, Web, installation
Mono / multi-joueurs
Contexte
Exposition, Web, médiathèque / lieux
ressources, Living Lab, Fab Lab,
espace de médiation
Contexte
Exposition (sous certaines conditions),
Web, médiathèque / lieux ressources,
Living Lab, Fab Lab, espace de
médiation
Produit autonome pour une utilisation
en self-service par le public
Produit à adapter pour une utilisation
en self-service par le public sinon
présence d’un médiateur / animateur
Interactions Surfaces tactiles mono ou multipoints, souris, clavier, manette,
partie du corps ou corps entier, capteurs (contact, présence, sensoriel, etc.)
/ INMEDIATS 2014
INMEDIATS
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2014 / Gamification
Nos expérimentations
L’île des sciences
L’île des sciences 1 est un prototype de monde virtuel propriétaire, immersif,
sécurisé. Il permet de tester de nouvelles présentations et modes d’accès à
des ressources multimédias (textes, images, sons, courtes vidéos, serious
games…) en utilisant les leviers ludiques des jeux vidéo et collaboratifs des
réseaux sociaux.
Gamification
Au-delà de la mise en scène virtuelle de contenus, il a fallu définir des règles
du jeu !
Le ressenti du joueur est affecté par plusieurs aspects du jeu :
les règles,
la manière de jouer,
la fluidité des règles une fois appliquées…
Cette réflexion, confrontée à des tests d’usage, nous a conduits à
développer des fonctionnalités propices à l’engagement du joueur/
avatar :
Définir une intrigue narrative ;
Augmenter la motivation des joueurs par des points à gagner, un
challenge à relever, des défis, des quêtes… en valorisant chaque succès
par des points ;
Passer des niveaux pour améliorer son classement ;
Accroître la diversité de types de jeux, pour séduire toutes les
sensibilités et élargir le spectre d’usagers ;
Encourager les échanges entre joueurs par des quêtes collaboratives ;
Créer d’autres contenus pour toutes les personnalités : jeux, vidéos,
articles, travail collaboratif, interviews, prise de décision, actions
“sportives”.
L’utilisation des avatars
Les jeunes, très attachés à l’image qu’ils donnent aux autres, accordent une
grande importance à leur apparence virtuelle.
1
www.ile-sciences.org
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Gamification
La personnalisation de l’avatar, sur la base de modifications spécifiques
limitées, permet de distinguer les joueurs entre eux, tout en les obligeant à
rester sur un canevas prédéfini.
L’apparence de l’avatar peut évoluer en même temps que le personnage dans
l’univers. Afin d’être à l’aise dans ses déplacements, une géo-localisation a été
mise en place.
Enfin la communication se fait par la visualisation des messages échangés ou
par un chat privé avec une personne de son choix. Reste encore à enrichir
la dimension “communautaire” en augmentant les possibilités d’interactions
avec les autres avatars : il faut créer une communauté d’avatars/usagers et
la faire vivre.
Usages dans les actions de médiation
De nombreuses présentations sur site, dans des espaces numériques en
Bretagne, cyberespaces et médiathèques ont démontré l’intérêt du jeune
public pour ce principe de monde virtuel.
Cependant, il apparaît nécessaire de favoriser l’intégration des principes
d’action des mondes virtuels dans la médiation scientifique. Ainsi, la médiation
humaine est importante pour une appropriation par les centres de sciences, et
le monde enseignant.
Un partenariat avec le Rectorat est ainsi en cours pour des expérimentations
dans des classes numériques afin de définir des parcours thématiques.
Termitia :
un jeu construit avec les publics
Science Animation a débuté en 2013 la réalisation d’un serious game de
type jeu d’action à partir de travaux de recherche sur les insectes sociaux :
Termitia. Financé par les bourses Estim-Universcience, ce projet a été porté
par les médiateurs de Science Animation, les chercheurs du Centre de
recherches sur la cognition animale (CRCA) et les développeurs de la PME
iTolosa.
Au centre de cette synergie : une construction ouverte impliquant les
publics cibles, qui s’appuyait sur les méthodes et conseils des groupes
Scénarisation et Living Lab d’Inmédiats.
/ INMEDIATS 2014
INMEDIATS
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2014 / Gamification
De l’objet de recherche à l’objet pour les 15-25 ans
En 2010, le CRCA a modélisé une termitière réelle en 3D.
Lors de la Fête de la science, le succès de cette visualisation auprès du public
a amené Science Animation à envisager de l’utiliser pour un serious game à
destination de jeunes peu sensibilisés aux sciences.
L’objectif était de valoriser un objet du patrimoine scientifique utilisé pour des
recherches et d’y associer les dernières découvertes sur les comportements
des termites. Mais également d’amener des jeunes férus de jeux vidéo à
envisager cette modélisation comme un objet de curiosité et d’aventures.
Le genre “jeu d’aventure-action” a très vite été envisagé, s’accordant à la fois
aux préférences des jeunes et aux données scientifiques (hostilité des termites,
univers labyrinthique...), offrant l’occasion de tester ce type de jeu pour un
serious game.
Une équipe pluridisciplinaire
Point de départ au projet : faire se rencontrer les chercheurs et développeurs,
afin qu’ils appréhendent leurs attentes et leurs méthodes de travail respectives.
Science Animation jouait le rôle de metteur en scène des contenus scientifiques,
de porteur du projet et de catalyseur des énergies en présence. Un projet de
thèse sur les serious games (Laboratoires LERASS - Université Toulouse III et
EFTS - Université Toulouse II) a rapidement rejoint le projet.
Peu de temps après, Science Animation a intégré un lycéen passionné de jeux
vidéo comme membre à part entière du comité de pilotage du projet.
Des tests réguliers avec les publics
Dès les premiers mois de développement, des tests ont été réalisés lors
d’évènements “grand public”, permettant de réinterroger en permanence les
choix effectués.
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Gamification
Ces premières séances ont permis d’évaluer l’attractivité du jeu, l’ergonomie,
les difficultés vécues ainsi que le rôle du jeu comme facteur déclencheur
d’un intérêt pour le sujet. Mais également de tester la compréhension de
la démarche Living Lab1 dans un évènement grand public et la médiation
nécessaire pour cela.
Ainsi, des ajustements ont été faits entre les différents tests :
- limiter l’accès à l’espace de test en faisant obligatoirement passer les visiteurs
par une première étape d’explications de la démarche ;
- ou encore mettre en place une signalétique et des supports de communication
clairs.
En effet, selon les types d’évènement, la notion de prototype a pu être mal
comprise, les publics s’attendant à une version finalisée.
La démarche Living Lab s’est ainsi avérée très pertinente pour jauger l’équilibre
entre jouabilité et contenus scientifiques. De plus, l’implication des futurs
publics a permis de développer un premier cercle de prescripteurs autour du
projet. Pour cela, la disponibilité de tous les membres de l’équipe projet prêts
à partager leurs savoirs et savoir-faire était un précieux atout.
Transmettre à travers un jeu
Les contenus scientifiques ont été intégrés dans l’ensemble des interactions
entre le joueur et l’environnement (comportement des termites, informations
affichées, cinématiques...). Il est signalé au joueur que l’ensemble des
informations sur les termites est issu de données réelles.
Termitia a par ailleurs été pensé dans une logique transmédia : le jeu est
complété par un documentaire animé apportant des éléments supplémentaires
sur le comportement des termites. Ces deux supports seront accessibles
gratuitement en ligne. La conception d’une exposition itinérante est aussi
envisagée, pouvant accueillir le jeu et le documentaire.
1
Amélioration de dispositifs avec les publics, voir le cahier Living Lab Inmédiats, p.11
/ INMEDIATS 2014
INMEDIATS
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2014 / Gamification
Jeux existants, en médiation
Des jeux vidéo comme Minecraft, World of Warcraft ou Civilization sont
parfois détournés de leur usage privé pour devenir des supports éducatifs
utilisés par des professeurs en milieu scolaire 1.
Dans une optique comparable, le projet Recensement mené depuis 2012 par
Universcience en partenariat avec le CNAM a pour objectif de recenser des
serious games susceptibles de sensibiliser le grand public, et notamment les
15-25 ans, aux problématiques scientifiques en utilisant les ressorts ludiques
et technologiques du jeu vidéo comme mode d’apprentissage.
Afin d’augmenter les chances de motiver notre public cible, nos choix se
sont majoritairement portés sur une sélection des jeux vidéo - à caractère
scientifique - plutôt que sur des serious games “étiquetés” en tant que tels,
parfois trop bavards, ennuyeux ou avec des contenus scientifiques très
dissociés du gameplay.
Les résultats du projet prennent dès à présent la forme d’une base de données
consultable en ligne 2, et dès 2015 il s’agira de la mise à disposition d’une
sélection des meilleurs jeux évalués par des scientifiques et le grand public,
pour leur présentation dans les centres Inmédiats.
Il reviendra alors à l’exploitant de chaque centre de sciences :
d’identifier des lieux de présentation potentiels,
de présenter ces jeux aux différents acteurs du centre (muséographe,
exploitant des lieux ressources, animateur/médiateur),
et d’en déduire les usages possibles.
Les jeux de la sélection
Universe Sandbox, Kerbal Space Program et SimCity5, trois jeux de la sélection
du projet Recensement, sont de type bac à sable. Ils permettent aux joueurs
d’agir et de construire au gré de leur imagination des univers gravitationnels,
d’assembler des engins spatiaux pour effectuer des missions, de bâtir et gérer
des villes. Les temps de jeu sont illimités.
En contrepartie, leur interface comporte de nombreux paramètres et la prise en
main est longue. Aussi, pour présenter ces jeux dans un centre de sciences, une
médiation humaine est nécessaire sous peine de décourager les futurs joueurs.
Sources :
http://www.netpublic.fr/2013/01/minecraft-comme-outil-pedagogique/
http://www.jeux-serieux.fr/2009/06/23/wowinschool-world-of-warcraft-comme-support-pedagogique/
http://jeuxserieux.ac-creteil.fr/?p=533
1
Base de données rassemblant des jeux de culture scientifique venant de tous les pays. Chaque jeu a été
testé et évalué sur sa qualité et son caractère éducatif. http://www.cite-sciences.fr/inmediats/seriousgame/
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Gamification
/ INMEDIATS 2014
L’animateur peut ainsi faire découvrir progressivement les fonctionnalités du
jeu à son public et faire évoluer avec lui une construction préparée à l’avance,
dans le cadre d’ateliers, d’événements ou dans un lieu ressource. Pour les
passionnés, de nombreuses vidéos ou échanges d’expériences entre joueurs
sont disponibles sur Internet : sites de communautés, blogs des éditeurs,
autres.
Puddle, The Bridge et DragonBox Algebra 12+, trois autres jeux de la sélection,
sont de type puzzles games ou jeux à énigmes.
Ici la progression est linéaire dans une structure avec des chapitres et des
niveaux. Ce type de jeux est bien adapté pour une utilisation en self-service
mais aussi pour des présentations avec une médiation humaine. Une version
adaptée des jeux a été développée dans le cadre du projet. Tous les chapitres
et niveaux sont notamment déverrouillés au démarrage du jeu ce qui permet
à l’intervenant d’accéder par exemple directement à un niveau du jeu pour
illustrer son propos.
En résumé, nous retiendrons qu’une médiation humaine est particulièrement
recommandée pour les jeux de type bac à sable et que les jeux de type puzzle
game conviennent pour tout type d’usage notamment en self-service sur des
postes autonomes.
➔ Universe Sandbox
Jeu type bac à sable
Cet écran affiche plusieurs menus et paramètres
avant de lancer une simulation sur le climat,
donnant au joueur une grande liberté.
➔ The Bridge
Jeu type puzzle game
Écran de la version adaptée du jeu, le joueur
sélectionne sa tranche d’âges.
Ces données statistiques seront exploitées
dans le cadre du programme Inmédiats.
INMEDIATS
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2014 / Gamification
Réaliser son serious game
Pourquoi initier nos publics à créer leurs serious games ?
La création d'un serious game n’est pas une chose facile.
Réaliser ce genre de projet demande des compétences variées, du temps et
un minimum de budget, même pour des productions modestes.
Une fois ces trois éléments réunis et le travail terminé, le serious game n’est
pas à l’abri d‘une comparaison avec les grosses productions du marché. En
effet, les publics 15-25 ans possèdent presque tous leur propre console de
jeux avec des titres dits “triple A 1”. Difficile pour nos centres de sciences de
rivaliser avec de telles productions vidéo ludiques.
Une autre approche existe :
Proposer à nos publics d’être acteurs dans la réalisation d’un serious
game au même titre que le mouvement Do It Yourself.
Détourner l’usage d’outils de création de purs jeux vidéo en y intégrant
du “serious” à l’intérieur.
Identifier le bon outil
Aujourd’hui, de nombreux logiciels offrent la possibilité à une personne ou
une petite équipe de donner vie à des projets sans être des programmeurs
dans l’âme. Ces outils proposent de nombreuses ressources (graphismes,
musiques, animations), d’autres demandent de tout créer. Ces logiciels bien
que payants disposent d’une version gratuite aux fonctionnalités limitées. Ils
sont donc une bonne alternative pour créer facilement des serious games
intégrant une bonne partie des leviers du jeu vidéo.
RPG MAKER
Prise en main : Facile
Type de jeu : Aventure/RPG
Site officiel : www.rpgmakerweb.com
Prix : 69 $
Version gratuite : oui avec ressources
limitées
Tutoriel : www.rpg-maker.fr
Une première expérimentation réalisée par Relais
d'sciences s’est portée sur RPG MAKER. Ce logiciel,
développé par Enterbrain, permet de créer des jeux
d’aventure ou de rôle de type japonais en 2D (JRPG).
Avec un peu d’astuce, il est même possible d’en faire
un jeu de stratégie. Son utilisation est simple, intuitive et
propose une riche bibliothèque de ressources.
Autres outils à découvrir :
Game maker, Construct 2, Scratch,
Sploder, Craftstudio
1
Jeux triple A : grosses productions du marché du jeu vidéo
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Gamification
/ INMEDIATS 2014
Former et co-construire avec nos publics
La formation de nos publics est une étape essentielle à cette démarche.
Au-delà du transfert de compétence sur l’outil, l’accompagnement sur
l’écriture du scénario, les mécaniques de gameplay et l’intégration d’éléments
sérieux sont au cœur du dispositif.
Diffuser et échanger autour des jeux créés
Placer les serious games réalisés face au public est un bon moyen d’avoir un
retour sur le travail effectué.
C’est aussi l’occasion d’établir un échange entre les créateurs et les joueurs
et ainsi amener à des hypothétiques versions 2 des serious games imaginés.
Ces diffusions et ces échanges peuvent aussi bien se concrétiser sur Internet
(blog, site dédié, forum ou réseaux sociaux...) qu’hors ligne (manifestations,
soirées spéciales, ateliers de création de jeux vidéo…).
COMMENT INVITER NOS PUBLICS À CRÉER LEURS SERIOUS GAMES
IDENTIFICATION / AUTO-FORMATION
SCRATCH
RPG MAKER
CONSTRUCT 2
CRAFT STUDIO
Réalisation d'un serious game test.
ex : Une aventure à dormir de bout “sur le thème du sommeil”
FORMATION / CO-CONSTRUCTION
Parcours culturels
scientifiques
ex : groupe scolaire
Travaux de recherche
ex : doctorants
Atelier de travail
ex : groupe jeune
non captif
Transfert compétences
ex : centres de sciences
Prise en main des outils - Écriture de scénario
Mécaniques de gameplay - Intégration du “serious”
Réel
Nuits
des chercheurs
Fête
de la Science
Centres de sciences
Journée-soirée
Journée scolaire
ex : EcolySciences
GlobalJam
Ateliers de création
de jeux vidéo
Virtuel
DIFFUSION / ECHANGES
Site Web
centres de sciences
Réseau sociaux
des créateurs
Sites
communautaires
wiki / forum / blog
STORES
GooglePlay / AppStore
Steam
INMEDIATS
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2014 / Gamification
Gamification 1 de la relation
du visiteur au centre de sciences
Pendant cinq ans, Cap sciences a étudié et développé un outil numérique :
Navinum©.
Grâce à la RFID 2, cet outil permet aux visiteurs de récupérer du contenu et
de personnaliser leurs visites en fonction de leurs intérêts, leurs niveaux de
connaissance ou de leurs éventuels handicaps. Les équipes ont ainsi pu écrire
le scénario, le canevas qui va accueillir toutes les expériences.
Comment architecturer ces informations et comment les livrer d’une manière
attrayante, simple et intelligente aux publics en fonction de leurs expériences
personnelles ?
La gamification était alors la méthode la plus adaptée :
Elle centre sa mécanique sur l’utilisateur et personnalise son expérience.
Elle permet une approche transmédia (le visiteur peut retrouver
son contenu sur tous les dispositifs connectés qu’il soit dans un lieu
physique, sur le Web ou sur les mobiles).
Elle valorise ses choix, ses actions et l’engage un peu plus dans sa
découverte personnelle des sciences et techniques.
Elle nourrit l’échange entre le centre de sciences et ses utilisateurs et
incite même à la participation.
Elle apporte un ton moins sérieux, plus attractif pour les publics
distants de la culture scientifique (dont les 15-25 ans).
Les principes de gamification ont été testés pendant plus de 30 ans
dans les jeux vidéo.
Cap sciences a donc abordé la relation du visiteur comme un jeu vidéo où
les différents niveaux se joueraient dans les différents médias de culture
scientifique diffusés par le centre de sciences.
Technique qui applique les codes liés au monde des jeux vidéo à des domaines auxquels ils n’étaient pas
destinés.
1
L'abréviation RFID signifie “Identification par Radio Fréquence”. Cette technologie permet d’identifier un
visiteur, d’en suivre le cheminement et d’en connaître les caractéristiques tout au long du parcours de visite
grâce à une carte émettant des ondes radio, sans contact (carte donnée à l’entrée de Cap sciences).
2
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Gamification
/ INMEDIATS 2014
Principes de gamification à Cap sciences
Les équipes ont travaillé sur une mécanique, une règle du jeu qui permet de
mesurer les actions des visiteurs, valorisant ainsi leur engagement.
Médailles, points d’expériences et statuts jalonnent le parcours et la progression
de chaque visiteur.
La mécanique consiste à le faire entrer dans une boucle d’engagement.
Auparavant, le visiteur participait à une relation courte avec le centre de
sciences, bornée dans une simple visite. Aujourd’hui, l’expérience visiteur
propose d’aller plus loin.
La gamification organise les expériences de visite et permet une navigation
“ergonomique” du visiteur dans ses contenus.
Ses contenus sont agrégés en fonction de ses centres d’intérêt. C’est pourquoi
la gamification n’a pas été appliquée à l’ensemble de la relation au centre de
sciences mais est applicable à différents “univers” qui peuvent correspondre à
différents centres d’intérêt du visiteur.
Par exemple :
un visiteur peut être intéressé par la conquête spatiale mais pas par la
biodiversité. Le système de gamification va alors lui permettre d’évoluer dans
l’univers du spatial sans le “polluer” avec du contenu autour de la biodiversité.
Son parcours reste libre. Il peut participer à un évènement, visiter une
exposition, consulter du contenu en ligne… Chaque interaction est valorisée
par une médaille et lui est spécifiée. Le gain d’un certain nombre de médailles
va lui valoir un “statut” dans cet univers et lui accorder des avantages en lien
avec le spatial. Cette reconnaissance doit l’encourager dans cette relation et le
motiver à progresser au sein de cet univers.
Il peut ainsi progresser de statut en statut selon le schéma suivant :
STATUT 1
STATUT 2
Engagé
Néophyte
Engagé et moteur de
son engagement
Participe à l'Univers
Découvre la gamification
Gain concret
et instantané
Gain symbolique
STATUT 3
Proactif
Participe de manière
fréquente
Invitation
à des évènements
STATUT 4
Contributeur
Participe
par des productions
Mise en avant de son
contenu visible par la
communauté
STATUT 5
Prescripteur
Anime le réseau
Co-construit et anime
la communauté
ECHELLE D'ENGAGEMENT
INMEDIATS
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2014 / Gamification
Lexique
Boucle de jeu
Ensemble d’actions et de tâches à réaliser plusieurs fois dans un jeu pour
atteindre l’objectif final. Une boucle de jeu peut elle-même en contenir plusieurs.
La routine de ces boucles peut être cassée par des évènements ponctuels afin
d’éviter que le joueur se lasse.
Gamedesign
Terme désignant le processus de création et de définition des règles d’un jeu
de société, jeu vidéo ou jeu de cartes.
Gameplay
Terme caractérisant des éléments d'une “expérience vidéoludique”, c'est-àdire le ressenti du joueur quand il utilise un jeu vidéo.
Le gameplay se définie en général par trois caractéristiques :
la caméra (ou le champ de vision du joueur),
le(s) personnage(s)
le contrôleur.
Cet anglicisme a pour équivalent en France ou au Québec le terme “jouabilité”.
Gamification
Technique qui applique les codes liés au monde des jeux vidéo à des domaines
auxquels ils n’étaient pas destinés.
Leveldesign
Ce terme désigne la construction des différents niveaux ou cartes d’un jeu
vidéo. La qualité d’un bon leveldesign est étroitement liée aux caractéristiques
du gameplay.
Monde virtuel
Monde créé artificiellement, pouvant héberger une communauté d'utilisateurs
présents sous forme d'avatars qui ont la capacité de s'y déplacer et d'y
interagir. Ce monde peut simuler le monde réel, avec ses lois physiques, ou,
tout au contraire, être régi par d'autres lois.
Puzzle game
Type de jeu vidéo basé sur la réflexion et la résolution d’énigmes. Les énigmes
peuvent faire appel à des compétences liées à la logique, la stratégie, la
reconnaissance de formes, la résolution d'ordre.
Serious Game
Jeu vidéo qui s’écarte du simple divertissement pour associer à un environnement
ludique une intention sérieuse (apprentissage, entraînement, simulation,
échanges de données…).
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Gamification
Conclusion
Ce livre blanc présente des réalisations des centres de sciences du programme
Inmédiats. Des échanges transversaux nous ont permis d’avancer plus
efficacement. Par exemple, tous les projets décrits dans cet ouvrage, alors
qu’ils n’étaient que dans leur phase de conception, ont été analysés, discutés
et critiqués lors d’une séance.
Ces années de réflexion nous ont entraînés les recommandations suivantes :
Impliquer les 15-25 ans en amont, dans la production du projet,
comme il a été fait pour Termitia, de même que pour la sélection des
jeux à adapter dans le projet Recensement, où nous avons fait tester
un premier panel de jeux par des volontaires âgés de 14 à 18 ans pour
arriver à notre choix final.
Ne pas chercher à expliquer trop de notions scientifiques dans
un même produit, au risque de donner un aspect “trop sérieux” à la
production. Deux à cinq notions suffisent, quitte à diffuser différemment
le même message.
Monter des partenariats, car la production d’un jeu vidéo ou d’un
monde virtuel est coûteuse. Mais attention aux choix des partenaires : un
éditeur de jeu vidéo peut influencer le contenu. L’éditeur aura tendance à
vouloir reprendre un moteur ou un type de jeu qu'il a déjà réalisé. Il sera
réticent à réaliser des développements lourds et donc coûteux pour un
produit unique. Quelquefois, il vaut mieux choisir l’éditeur en fin de phase
de conception. D’autres fois, plutôt très en amont, mais dans ce cas,
nous aurons moins de liberté 1.
Plutôt que de réaliser un nouveau produit, fouiller l’existant et l’intégrer
dans un cadre scientifique est aussi intéressant. Cependant, attention, il
est difficile d’associer un jeu vidéo ou un monde virtuel à une exposition.
La place de ces produits hautement scénarisés est plutôt dans les
lieux de médiation, comme les Living Labs, Fab Labs, bibliothèques,
médiathèques, en présence de médiateurs ou en autoformation.
Enfin, l’idée d’associer nos visiteurs à la production de produits scénarisés,
comme décrit dans le chapitre “Réaliser son serious game” nous paraît très
riche. Peut-on alors rêver à des “Game Labs”, associant plusieurs centres de
sciences : des laboratoires où visiteurs et médiateurs créeront des jeux vidéo
à caractère scientifique ?
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Mais la contrainte peut être stimulante. Elle permet de cadrer aussi le contenu.
/ INMEDIATS 2014
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