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Diarrhée aiguë au retour de voyage : aspects diagnostiques et thérapeutiques Traveler’s diarrhea: clinical and therapeutic aspects 쐌쎲 Jean-Ariel Bronstein*,***, Martial Richecoeur*, Xavier Nicolas** 왘 POINTS FORTS 왘 La diarrhée du voyageur (DV) débute en général de façon abrupte pendant le voyage ou peu de temps après le retour. 왘 L’évolution est le plus souvent favorable spontanément. 왘 L’étiologie infectieuse est habituelle et le germe le plus souvent rencontré est Escherichia coli entérotoxinogène (ETEC). 왘 Les stratégies de prévention englobent l’éducation concernant le lavage des mains ; l’ingestion d’aliments et de boissons sûrs ; la purification de l’eau ; la chimioprophylaxie à base d’antibiotiques ; les vaccins. 왘 Le traitement est d’abord symptomatique, puis antibiotique, après un bilan étiologique lorsqu’il existe des signes de gravité ou une suspicion de diarrhée invasive. Mots clés : Diarrhée du voyageur – E. coli entérotoxinogène – Traitement symptomatique – Fluoroquinolones. Keywords: Travelers’ diarrhea – Enterotoxinogen E. coli – Symptomatic treament – Fluoroquinolones. U ne diarrhée aiguë est définie par l’émission d’au moins trois selles liquides et/ou molles par jour depuis moins de 14 jours. La diarrhée aiguë est un des problèmes de santé les plus souvent observés chez les voyageurs qui se rendent dans les pays en voie de développement (PVD). En général, les épisodes de diarrhée du voyageur (DV) débutent de façon abrupte, pendant le voyage ou peu de temps après le retour. L’évolution est le plus souvent favorable spontanément. L’étiologie infectieuse est habituelle. Le germe le plus souvent rencontré est Escherichia coli entérotoxinogène (ETEC). * Service de pathologie digestive, HIA Brest. ** Service de médecine interne, HIA Brest. *** Institut de médecine navale du service de santé des armées, Toulon. La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. X - n° 7 - juillet-août 2007 ASPECTS ÉPIDÉMIOLOGIQUES Dossier thématique D ossier thématique Les principaux déterminants du risque de diarrhée sont le lieu habituel de résidence, la destination, et, sur place, le climat, les modes de vie et de voyage. Jusqu’à 50 % des voyageurs en provenance de pays industrialisés peuvent s’attendre à avoir au moins un épisode de diarrhée aiguë pendant un séjour de 2 semaines dans un PVD, et 20 % seront confinés au lit pendant une journée. Ces taux restent étonnamment constants depuis un demi-siècle. Le risque de souffrir de DV est variable en fonction de la destination. On décrit trois types de destinations : régions à risque faible (< 10 %) comprenant l’Europe du Nord, l’Australie, la NouvelleZélande, les États-Unis, le Canada, Singapour ; régions à risque intermédiaire (10 à 20 %) : Caraïbes, Afrique du Sud, pays du pourtour méditerranéen, y compris Israël ; régions à haut risque (> 30 %) : Asie (sauf Singapour), Afrique (sauf l’Afrique du Sud), Amérique centrale et du Sud, Mexique. Le type d’exposition, dépendant des modes de vie et de voyage, doit être identifié. Les aliments et l’eau contaminés sont les causes de la DV. Les taux d’attaque les plus élevés sont retrouvés parmi les campeurs, les trekkeurs, les amateurs de safari. Mais, paradoxalement, les hôtels chers ne sont pas plus sûrs que des établissements plus économiques (1). FACTEURS DE RISQUE Parmi les autres facteurs de risque associés à une probabilité accrue de contracter une DV figurent des facteurs génétiquement déterminés, l’hypochlorhydrie, les déficits immunitaires et la moindre immunité intestinale observée chez les enfants et les adolescents. Les personnes du groupe sanguin O sont plus à risque de développer une shigellose, une infection à norovirus ou un choléra. L’hypochlorhydrie gastrique, par levée de la barrière acide gastrique, accroît le risque de DV, notamment à Salmonella, et à Campylobacter. Les états d’immunodépression (sida, corticothérapie, traitement immunosuppresseur, déficit en IgA) sont propices à l’apparition d’une diarrhée. Un taux de CD4 bas favorise les infections à cryptosporidies, à microsporidies, à Isospora belli et à salmonelles (2). Les résections intestinales, l’existence d’anses borgnes ou la présence de troubles moteurs sont autant de facteurs facilitant la colonisation bactérienne. 135 Dossier thématique D ossier thématique ASPECTS ÉTIOLOGIQUES La recherche d’une cause bactérienne ou parasitaire est positive dans 60 à 85 % des cas. Les organismes les plus souvent isolés incluent Escherichia coli, surtout la souche ETEC, C. jejuni, diverses espèces de Salmonella et de Shigella. Parmi les bactéries plus rarement isolées figurent les espèces Aeromonas, Pleisiomonas, et Yersinia, ainsi que les vibrions non cholériques et, exceptionnellement, Vibrio cholerae. Clostridium difficile est une cause peu courante de DV qui doit néanmoins être envisagée chez les personnes qui prennent de la doxycycline à titre de prophylaxie antipaludéenne ou des antibiotiques pour d’autres raisons (3). Bien qu’ils soient rarement isolés, certains parasites peuvent causer une DV après une période d’incubation de 1 à 2 semaines. Il s’agit essentiellement de Giardia lamblia, Cryptosporidium parvum, Cyclospora cayetanensis, Entamoeba histolitica et, rarement, certaines espèces de Microspora, en particulier Enterocytozoon bieneusi. Des virus, notamment le virus de Norwalk et des rotavirus, peuvent aussi causer une DV quelques heures après l’exposition. Du point de vue épidémiologique, on assiste à une augmentation de l’incidence des DV à certains E. coli. C’est le cas d’E. coli entéro-aggrégant (EAEC) [4], associé à la DV dans les pays à hygiène faible (5). Certains agents pathogènes sont étroitement liés à des régions particulières, comme ETEC en Amérique latine, C. jejuni en Asie du Sud-Est et en Afrique du Nord, V. cholerae en Inde, au Bengladesh, en Équateur, au Pérou, à Bali, G. lamblia dans les régions montagneuses de l’Amérique du Nord, de la Russie (Saint-Pétersbourg) et du Népal, C. parvum en Russie et C. cayetanensis au Népal. Les fluctuations saisonnières sont également un facteur important ; par exemple, la campylobactériose est observée plus souvent en Afrique du Nord et au Mexique au cours des mois d’hiver, et la toxi-infection due à ETEC est une maladie d’été dans ces pays. La résistance aux antibactériens des isolats de bactéries entériques est un problème croissant dans les pays en voie de développement. La résistance aux tétracyclines et aux sulfamides est presque universelle. Quant à la résistance aux fluoroquinolones (FQ), elle augmente rapidement en Asie du Sud-Est. CIRCONSTANCES DIAGNOSTIQUES Le patient consulte pour diarrhée Le lien avec le voyage est alors envisagé dès l’interrogatoire. 왘 Il s’agit d’une diarrhée hydrique, isolée, évoquant un mécanisme sécrétoire. Le malade présente des vomissements suivis, quelques heures plus tard, d’une diarrhée aqueuse d’intensité variable selon les cas. L’apyrexie est habituelle. L’évolution est habituellement favorable en 3 jours. Néanmoins, des formes graves peuvent survenir aux âges extrêmes de la vie. 왘 Il s’agit d’une diarrhée aiguë avec émissions anormales (sang, glaires). Ce type de diarrhée évoque un mécanisme invasif bactérien ou parasitaire. Dans la forme classique, le malade présente de violentes douleurs abdominales, des vomissements et une 136 diarrhée faite de selles muco-sanglantes ou purulentes, réalisant un authentique syndrome dysentérique avec épreintes et ténesme. Une fièvre peut être présente. La prise en charge justifie la réalisation d’explorations complémentaires. 왘 En pratique, la frontière entre mécanisme invasif et mécanisme toxinique est souvent difficile à établir cliniquement, certains agents infectieux pouvant réaliser les deux tableaux et des aspects intermédiaires. C’est le cas, par exemple, des formes précoces d’infection à Shigella sp. ou à Campylobacter. Une antibiothérapie préalable prescrite sur place ou par automédication peut également aboutir à une forme trompeuse. L’interrogatoire, l’examen clinique, les examens biologiques doivent rechercher des arguments en faveur d’un mécanisme invasif. Une diarrhée d’une durée supérieure à 3 jours ou l’apparition de douleurs abdominales évoquent un germe invasif. Des manifestations extradigestives (articulaires, oculaires, cutanées) contemporaines orientent vers une infection à Salmonella, Shigella, Yersinia, ou Campylobacter. La fièvre oriente vers un mécanisme invasif, mais n’est pas spécifique. De véritables diarrhées invasives peuvent ne pas être fébriles, notamment l’amibiase intestinale. Rappelons qu’une fièvre au retour d’une zone d’endémie palustre doit toujours faire éliminer une primoinvasion palustre. L’apparition d’un syndrome biologique et/ou d’une anomalie de l’hémogramme sont des éléments orientant vers un mécanisme invasif. La présence de leucocytes et/ou d’hématies dans les selles évoquent une infection par un germe entéro-invasif (salmonelles, shigelles, Campylobacter, E. histolitica) ou à germe non invasif mais dont les toxines sont susceptibles de générer des lésions muqueuses coliques (C. difficile toxinogène). Néanmoins, l’absence de leucocytes ne permet pas d’éliminer une diarrhée à germes invasifs, car sa sensibilité est de 50 %. Le gastroentérologue est sollicité pour une endoscopie basse L’endoscopie basse (rectosigmoïdoscopie le plus souvent) permettra : 왘 de rechercher des lésions muqueuses ; 왘 d’évaluer la topographie, la gravité des lésions ; 왘 d’envisager un diagnostic étiologique en cas de lésions typiques : présence de fausses membranes évocatrices d’infections à Clostridium, abcès en bouton de chemise évocateurs d’une amibiase ; 왘 de réaliser des biopsies à visée histologique, bactériologique, parasitaire (recherche d’amibe hématophage au microscope). Le prélèvement de liquide d’aspiration est utile pour rechercher une toxine de Clostridium et faire un examen parasitologique des selles. RECHERCHE DES SIGNES DE GRAVITÉ Tous les degrés de gravité peuvent être rencontrés, au niveau tant local que général. Certaines situations nécessitent une prise en charge médicochirurgicale urgente. En l’absence même de La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. X - n° 7 - juillet-août 2007 signes de gravité clinique, le terrain doit être pris en compte (âges extrêmes de la vie, femme enceinte, immunodéprimés, etc.). En cas de diarrhée glairo-sanglante, une altération de l’état général, l’arrêt des matières et des gaz, l’apparition d’un tympanisme, d’une défense abdominale, l’absence de bruits hydroaériques sont des signes d’alerte. Ils doivent faire rechercher une perforation, une colite hémorragique, une colectasie (dilatation du côlon transverse de plus de 6 cm) éventuellement associées à des signes cliniques (tachycardie > 120 bpm ; hyperleucocytose ; hypoalbuminémie < 30 g/l) signant alors un mégacôlon toxique. Ces tableaux s’aggravent avec le temps et sont favorisés par une automédication par lopéramide. Une déshydratation sévère, surtout observée en cas de diarrhée hydrique abondante, doit être reconnue et traitée. Le passage de germes entéro-invasifs dans la circulation générale peut être responsable d’une bactériémie, voire d’un choc septique qui imposent un traitement antibiotique à large spectre après la réalisation de prélèvements bactériologiques. Le syndrome hémolytique et urémique est une complication inhabituelle des shigelloses ou d’E. coli entéro-hémorragique (ECEH). Il se définit par l’association d’une anémie hémolytique avec présence de schizocytes, d’une thrombopénie (< 150 000/mm3) et d’une insuffisance rénale. La prise en charge est habituellement symptomatique (transfusions de culots globulaires dans 90 % des cas, transfusions plaquettaires, hémodialyse dans 50 % des cas). RECHERCHE DE LA CAUSE La recherche d’une cause est orientée par l’interrogatoire, l’examen clinique, les examens endoscopiques. Elle est confirmée par les examens microbiologiques. L’analyse bactériologique des selles (sur prélèvements frais ou conservés moins de 12 heures à 4 °C) comporte un examen direct, une recherche de leucocytes fécaux (qui n’a de valeur que positive), une coloration de Gram, une coproculture sur milieux permettant la croissance de Salmonella, Shigella, Yersinia, Campylobacter spp. Des milieux de culture spéciaux sont utilisés en cas d’orientation clinique vers une cause particulière. En cas de diarrhée hémorragique, il est utile de demander un ensemencement (selles, biopsies) en milieu sélectif de Mac Conkey-agar permettant d’isoler les ECEH, dont le sérotype O157:H7, et sur milieu sélectif à l’ampicilline pour isoler Klebsiella oxytoca (selles, biopsies), notamment lorsqu’il existe une notion d’antibiothérapie. La recherche de toxine A et/ou B dans les selles sera demandée en cas de suspicion de diarrhée à Clostridium. La sensibilité de la coproculture est de l’ordre de 50 %. Une coproculture négative n’élimine pas une diarrhée d’origine infectieuse. Une fausse négativité peut être due à une antibiothérapie préalable, à la disparition du germe responsable de la diarrhée au moment du prélèvement microbiologique, à son caractère sousdominant, qu’aucune méthode d’enrichissement ne permettra d’isoler. La coproculture est négative en cas de diarrhée virale. L’amélioration des techniques d’isolement permettra à l’avenir de diminuer le pourcentage des diarrhées dites idiopathiques La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. X - n° 7 - juillet-août 2007 par la découverte de nouveaux germes jusque-là inconnus (6). Il n’est pas indiqué de réaliser systématiquement une coproculture, dans la mesure où la plupart des diarrhées ont une évolution favorable en 24-48 heures, temps nécessaire pour remettre le résultat. Les sérologies sont inutiles en cas de diarrhée aiguë. L’examen parasitologique des selles permet la mise en évidence des parasites sous leurs différentes formes : œufs, larves, kystes, formes végétatives, oocystes, spores, vers, anneaux. Il comprend un examen macroscopique et microscopique, direct et après concentration (ou enrichissement) du prélèvement. L’examen microscopique est le temps essentiel de l’analyse. Il permet de dépister les œufs et larves d’helminthes, les kystes et formes végétatives d’amibes et de flagellés, les coccidies et les spores de microsporidies. Lorsque l’on suspecte une parasitose particulière, la recherche doit être orientée par le contexte clinique, ce qui peut nécessiter des conditions particulières ou des techniques spéciales : recherche de formes végétatives mobiles d’E. histolitica sur selles fraîchement émises (moins de 2 heures) par exemple. Compte tenu des éléments cités précédemment, nous préconisons de réaliser une coproculture en cas de diarrhée invasive, ou de diarrhée cholériforme abondante (> 3 selles par jour) et/ou mal tolérée et/ou supérieure à 3 jours et/ou fébrile et/ou survenant sur un terrain particulier et/ou en cas de toxi-infection alimentaire collective. L’examen parasitologique des selles sera indiqué pour une diarrhée invasive au retour d’une zone d’endémie amibienne ou en l’absence d’une amélioration après un traitement antibiotique. Dossier thématique D ossier thématique PRÉVENTION Les stratégies de prévention englobent : l’éducation concernant le lavage des mains, l’ingestion d’aliments et de boissons sûrs ; la purification de l’eau ; la chimioprophylaxie à base d’antibiotiques ; les vaccins. La prophylaxie antibiotique (tableau) est habituellement efficace dans la prévention des DV, mais elle ne peut pas être recommandée de manière systématique en raison de son prix, de ses effets secondaires et de l’apparition de germes résistants aux antibiotiques. Elle ne doit être envisagée qu’au cas par cas chez des voyageurs à risque élevé et pour des séjours de courte durée (7). Les indications retenues sont : les voyageurs chez qui une Tableau. Chimioprophylaxie de la diarrhée du voyageur. Produit Fluoroquinolones Norfloxacine Ciprofloxacine Ofloxacine Lévofloxacine Rifaximine (8) Efficacité Posologie 80-100 % 400 mg/j 500 mg/j 300 mg/j 500 mg/j En cours d’évaluation 137 Dossier thématique D ossier thématique indisposition même passagère n’est pas acceptable, pour des raisons professionnelles, par exemple ; les personnes atteintes d’une maladie chronique chez qui les conséquences d’une DV pourraient être graves (insuffisants rénaux ou cardiaques, MICI…) ; les personnes infectées par le VIH avec un taux de CD4 bas, ou avec un autre déficit immunitaire. Pour le moment, il n’existe aucun vaccin efficace contre la DV. TRAITEMENT Il a pour but de soulager le patient, de traiter l’infection. Il sera symptomatique et étiologique. 왘 La réhydratation : les solutions de réhydratation orale sont le plus souvent suffisantes (et de réalisation simple, par exemple : eau purifiée 1 l, sel 5 ml ([1 cuillère à thé], sucre 40 ml [8 cuillères à thé]). Chez la plupart des adultes atteints de DV non compliquée, l’hydratation peut être réalisée avec des jus en conserve, des boissons gazeuses, de l’eau et des bouillons salés. À l’inverse, des boissons contenant de la caféine, les produits laitiers, le jus de pomme, le jus de prune, le jus d’orange sont susceptibles d’aggraver la diarrhée. Il faut consommer une quantité de liquide qui permet d’étancher la soif et de maintenir des urines jaune clair. 왘 Les ralentisseurs du transit sont le plus souvent à la fois sûrs et efficaces. Ils réduisent le nombre des selles, mais ils ne guérissent pas de la diarrhée. Le lopéramide permet de réduire la durée de 65 % et la sévérité de la DV chez les adultes et les enfants de plus de 2 ans. Il faut toutefois être prudent en cas de diarrhée invasive. D’autres molécules, comme le racécadotril, ont un effet antisécrétoire sur la muqueuse de l’intestin grêle. Elles agissent en inhibant l’hypersécrétion muqueuse sans ralentir le temps de transit orocæcal ni colique. Elles n’induisent ni constipation ni mégacôlon toxique. Leur tolérance est jugée bonne chez l’enfant et l’adulte. 왘 Les antibiotiques (tableau II) [9] ont prouvé leur efficacité dans la DV. Ils minimisent la sévérité et la durée des symptômes (10). Le cotrimoxazole fut l’antibiotique de choix pendant plusieurs années, mais, en raison de la progression de résistances, son utilisation est plus limitée. Cet antibiotique est maintenant recommandé en cas d’échec du traitement par FQ, ou en cas d’échec du traitement par métronidazole dans les régions où les cyclosporidiases sont fréquentes (par exemple : Népal entre avril et juillet, Mexique en été). Les FQ ont fait la preuve de leur efficacité dans le traitement de la DV. Ces molécules ingérées par voie orale sont bien absorbées, leurs concentrations fécales sont importantes. Les FQ ont une longue demi-vie, permettant une prise unique ou deux prises journalières. Elles sont devenues le traitement de choix dans la DV de l’adulte modérée à sévère. Elles soulagent les symptômes et en réduisent la durée de 3-4 jours à moins de 2 jours (11). Une simple dose de FQ est aussi efficace qu’un traitement de trois jours, sauf en cas de diarrhée invasive (12), où un traitement de trois jours est recommandé (13). L’azithromycine (AZH) a une bonne activité in vitro contre les entérobactéries. Son activité antibactérienne est jugée 8 fois plus importante que celle de l’érythromycine. L’AZH s’est montrée aussi efficace que la ciprofloxacine en cas de diarrhée aiguë à Campylobacter chez des militaires américains en Thaïlande (14). Une autre étude plus récente a confirmé une efficacité comparable de l’AZH et de la lévofloxacine chez des voyageurs au Mexique (15). L’AZH est une alternative aux FQ dans les zones d’endémie forte à Campylobacter résistant aux FQ et doit être prescrite chez l’enfant. L’AZH est habituellement bien tolérée et peut être utilisée chez l’enfant, mais n’a pas d’AMM pour la femme enceinte. En pratique, on proposera une antibiothérapie probabiliste centrée sur les FQ dans les situations suivantes (figure) : en Éliminer une primoinvasion palustre Réhydratation Évaluation de la sévérité Diarrhée hydrique 1 à 2 selles par jour Symptômes modérés Diarrhée hydrique modérée / sévère / > 3 jours / terrain fragile / fébrile / TIAC Traitement symptomatique ÉVITER LE LOPÉRAMIDE Diarrhée invasive Coproculture : standard / orientée Ex. parasitologique des selles : après échec du traitement ATB / d’emblée si retour de zone d’endémie amibienne Antibiothérapie probabiliste : FQ ± Métronidazole : zone endémie amibienne Figure. Conduite à tenir en cas de diarrhée aiguë au retour d’un voyage. Tableau II. Traitement médical de la diarrhée du voyageur (d’après Al-Abri et al. [9]). Produit Commentaire Lopéramide 4 mg initialement, puis 2 mg à chaque selle liquide, 16 mg/j maximum Fluoroquinolones Ciprofloxacine Norfloxacine Lévofloxacine Ofloxacine 750 mg en dose unique – 500 mg x 2/j pendant 3 jours 800 mg en dose unique – 400 mg x 2/j pendant 3 jours 500 mg en dose unique – 500 mg x 2/j pendant 3 jours 400 mg en dose unique – 200 mg x 2/j pendant 3 jours Azithromycine 138 Posologie 1 000 mg en dose unique ou 500 mg/j pendant 3 jours 10 mg/kg pendant 3 jours chez les enfants À partir de 2 ans Non contre-indiqué chez l’enfant – Efficace contre Campylobacter La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. X - n° 7 - juillet-août 2007 cas de diarrhée hydrique modérée à sévère ; en cas de diarrhée > 3 jours ; en cas de diarrhée survenant sur un terrain fragile ; en cas de diarrhée fébrile ou invasive. ■ 7. Rendi-Wagner P, Kollaritsch H. Drug prophylaxis for travelers’ diarrhea. Clin RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 9. Al-Abri SS, Beeching NJ, Nye FJ. Traveller’s diarrhoea. Lancet Infect Dis 1. Cartwright R. The role of hygiene and public health programs in reducing the 10. De Bruyn G, Hahn S, Borwick A. Antibiotic treatment for travellers’ diar- incidence of travelers’ diarrhea. Comment on consensus paper by Steffen et al. J Travel Med 2004;11:189-90; author reply 190. 2. Brink AK, Mahe C, Watera C et al. Diarrhea, CD4 counts and enteric infections in a community-based cohort of HIV-infected adults in Uganda. J Infect 2002;45:99-106. 3. Golledge CL, Riley TV. Clostridium difficile-associated diarrhoea after doxycycline malaria prophylaxis. Lancet 1995;345(8961):1377-8. 4. Jiang ZD, Lowe B, Verenkar MP et al. Prevalence of enteric pathogens among international travelers with diarrhea acquired in Kenya (Mombasa), India (Goa), or Jamaica (Montego Bay). J Infect Dis 2002;185:497-502. 5. Huang DB, Nataro JP, DuPont HL et al. 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Avec beaucoup d’humour, Rémy Salmon décrit le parcours du combattant qu’il a dû livrer avant de pouvoir reprendre son activité professionnelle. Il met en lumière, vus par l’œil du “médecin-malade”, les dysfonctionnements des services hospitaliers et plaide pour la nécessité du deuxième avis médical, chance souvent interdite au vulgum pecus. Dans le cas de Jean-Marc Majeau (2), il s’agit de la découverte d’un cancer du côlon chez un gastroentérologue de 46 ans. Le choc de passer d’un coup du statut d’athlète bien portant et bon vivant à celui de malade cancéreux est remarquablement décrit. Après sa convalescence, Jean-Marc Majeau va se lancer dans un tour de France à vélo (sans dopage !) appelé Cyclogalloscopie. Cette action de communication avait pour but d’attirer l’attention sur l’intérêt du dépistage du cancer colorectal et sur la nécessité de transformer l’image du La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. X - n° 7 - juillet-août 2007 cancéreux dans notre pays. Jean-Marc Majeau rejoint par ailleurs un point de l’éditorial de ce numéro en faisant remarquer que les cuvettes des toilettes “à la française” ne facilitent pas l’observation de ses selles, surtout quand un liquide désinfectant coloré vient les noyer ! Au total, deux livres démontrant qu’il est toujours difficile d’être malade, et peut-être encore plus quand on est médecin. ■ 1. Rémy Salmon. Tout ce que les chirurgiens ne peuvent pas vous dire. Paris : Éditions Anne Carrière, 2007. 2. Jean-Marc Majeau. À demain matin. Paris : Jean-Claude Gawsewitch Éditeur, 2007. Marc-André Bigard (Nancy) 139