Le « risque chômage » des agents publics existe : comment l
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Le « risque chômage » des agents publics existe : comment l
44-47_D&J_RHF540 14/06/11 12:26 Page44 D r o i t e t j u r i s p r u d e n c e Adeline GUELLEC Juriste Clothilde POPPE Consultante Centre de droit Jurisanté, CNEH Le « risque chômage » des agents publics existe : comment l’indemniser ? e chômage n’est pas réservé au secteur privé. Comment répondre aux difficultés liées à l’adaptation de la réglementation du régime d’assurance chômage aux spécificités de la fonction publique ? C’est l’objectif de la circulaire du 21 février 2011 1 qui précise les situations ouvrant droit à l’assurance chômage pour les agents publics. Ces « agents publics » recouvrent à la fois les agents titulaires et les agents non titulaires (contractuels et stagiaires). Par principe, chaque agent, public ou non, a aujourd’hui droit à indemnisation de son « risque chômage ». L’article L. 5424-1 du code du travail précise effectivement que, le cas échéant, les agents publics bénéficient du versement d’un revenu de remplacement, au même titre et selon les mêmes modalités que les salariés du secteur privé. En application de l’article L. 5422-1 du code du travail, a droit à l’allocation d’assurance chômage tout travailleur qui remplit de manière cumulative les cinq conditions suivantes : être apte au travail, en recherche d’emploi, remplir certaines conditions d’âge et d’activité antérieure, et enfin et surtout, avoir été ou être privé involontairement d’emploi. L 44 N ° 5 4 0 - M a i - J u i n La notion de perte involontaire d’emploi est un des points fondamentaux du régime de l’assurance chômage. D’un point de vue général, il va de soi qu’elle recouvre tous les cas où l’employeur est à l’origine de la rupture de la relation de travail. Pour autant, cette notion peut aussi recouvrir, sous certaines conditions, des cas où le travailleur a lui-même désiré mettre fin à la relation de travail. La circulaire du 21 février 2011 revient sur la notion de perte involontaire d’emploi au sein de la fonction publique, en soulignant d’une part les cas qui sont exclus de sa définition, et d’autre part ceux qui y rentrent. Les pertes volontaires d’emploi privant l’agent public du droit au « chômage » ertains cas de « pertes volontaires d’emploi » sont communs au fonctionnaire et à l’agent non titulaire, et d’autres sont propres à chacune de ces deux catégories. C Les pertes d’emplois volontaires communes à tout agent public De façon logique et pérenne, certaines situations traduisent une volonté délibérée de l’agent public de quitter son emploi. 2 0 1 1 La démission non légitime Un agent public peut souhaiter interrompre de manière définitive sa carrière et rompre ainsi complètement le lien l’unissant à son employeur public pour divers motifs personnels. Outre la question de son effectivité, il est important d’identifier sa légitimité puisque c’est elle qui détermine le droit à l’indemnisation (cf. supra pour les cas de démissions considérées comme légitimes). 44-47_D&J_RHF540 14/06/11 12:26 Page45 e v u e h o s p i t a l i è r e d e F r a n c e 1. Circulaire DGEFP/DGAFP/ DGCL/DGOS/Direction du budget du 21 février 2011 relative à l’indemnisation du chômage des agents du secteur public. 2. Circulaire 463 FP du 11 février 1960, JO 26 février 1960, page 1895. 3. Relevant ce principe : CE req. Lorsque l’agent non titulaire refuse la proposition de renouvellement de son contrat à durée déterminée, l’employeur public peut légitimement refuser de l’indemniser au titre du chômage. Cependant, l’existence d’un motif légitime à ce refus permet de considérer que la situation de l’agent est assimilable à une perte involontaire d’emploi 4 (par exemple, obtention d’un emploi sur la base d’un CDI). Sur le web << Les pertes involontaires d’emploi ouvrant droit au bénéfice de l’allocation chômage ertains cas de « perte involontaire d’emploi » sont communs à tous les agents publics, et d’autres spécifiques à chacune de ces deux catégories. C Les pertes involontaires d’emploi « communes » Le licenciement Le licenciement d’un agent public pour insuffisance professionnelle entraîne toujours le versement de l’al- n° 227770 du 29 janvier 2003 CHU de Montpellier. 4. Pour exemple : CE 2003 soussections 1 et 2 réunies, N° 229251: « Le motif pouvant être lié notamment à des considérations d’ordre personnel ou au fait que le contrat a été modifié de façon substantielle sans justification de l’employeur » : location chômage, et ce droit bénéficie aussi aux stagiaires non titularisés pour le même motif. Prononcé dans le cadre d’une sanction disciplinaire, le licenciement d’un agent public peut entraîner le bénéfice du revenu de remplacement. Le licenciement issu d’une sanction disciplinaire n’évince pas toute forme d’indemnisation. Le bénéfice du revenu de remplacement tient uniquement à la nature du motif disciplinaire. il s’agit d’un agent de service dans un centre communal d’action sociale engagé en premier contrat emploi solidarité, puis selon des contrats ultérieurs de travail à durée déterminée d’une durée d’un an chacun. Son employeur lui fait une proposition de renouvellement de son contrat de travail pour une N ° 5 4 0 durée de trois mois seulement. Le juge retient que l’agent justifie d’un motif légitime de refus, se fondant sur les critères de l’ancienneté dans l’organisme qui l’emploie et l’absence de justification de l’employeur sur la réduction de la durée de son contrat de travail de douze mois à trois mois. - M a i - J u i n 2 0 1 1 Droit et jurisprudence L’agent non titulaire International Le cas particulier de l’exclusion temporaire des fonctions aurait pu induire certaines difficultés d’interprétation. Sanction disciplinaire au sens du titre 1 du statut général de la fonction publique, l’exclusion temporaire des fonctions emporte pour le fonctionnaire qui en fait l’objet la privation de la possibilité d’exercer son emploi pendant une certaine durée. A priori il s’agirait d’un cas de perte d’emploi involontaire pouvant être indemnisé. Cependant, Attractivité professionnelle Le fonctionnaire Tribune libre La retraite constitue le terme normal de la carrière d’un agent public. Elle suppose une demande de l’agent et une durée minimale d’activité ; sachant qu’elle est automatique audelà d’une limite d’âge préétablie. Il existe également cinq cas de mise à la retraite sans le consentement, voire contre le gré de l’agent public : la mise à la retraite d’office pour limite d’âge, à titre disciplinaire, pour insuffisance professionnelle, pour suppression d’emploi ou pour invalidité. Quel que soit le motif de cette mise à la retraite, celle-ci empor te les mêmes conséquences en termes de droits et d’obligations qu’une retraite accordée sur demande de l’intéressé, sauf dans le dernier cas : la mise à Les pertes d’emploi volontaires propres à chaque catégorie d’agents cette sanction n’entraîne finalement pour l’agent que la privation de la rémunération attachée à son emploi, mais ne le prive pas de cet emploi de manière définitive, puisqu’il a un droit à réintégration au terme de la période d’exclusion. Elle ne saurait donc emporter le bénéfice de l’allocation chômage. 3 Réflexions hospitalières La mise à la retraite la retraite d’office pour invalidité peut être accompagnée du versement de l’allocation chômage au fonctionnaire. Offres d’emploi Cette situation renvoie à celle d’un agent qui, sans exprimer son désir de cesser définitivement ses fonctions, place l’administration devant le constat qu’il ne les exerce plus, de manière durable, sans justification ni explication. Une circulaire 2 précise que l’abandon de poste « autorise l’administration à prononcer en dehors de la procédure disciplinaire l’exclusion du service par voie de radiation des cadres ». L’administration qui constate l’absence irrégulière met en demeure l’agent de reprendre ses fonctions dans un certain délai et l’informe des conséquences de son non-respect : la radiation pour abandon de poste. La volonté manifeste de l’agent de rompre le lien avec l’administration ne saurait constituer une perte involontaire d’emploi, excluant par là même toute possibilité d’indemnisation. Librairie L’abandon de poste Formation des cadres Actualités R 45 44-47_D&J_RHF540 14/06/11 12:26 Page46 D r o i t e t j u r i s p r u d e n c e Ainsi, la révocation, et la mise à la retraite d’office ouvrent droit à indemnisation de la perte d’emploi, indépendamment des fautes ayant justifié ces sanctions, même pénales. Le licenciement pour inaptitude physique est considéré comme une perte involontaire d’emploi une fois les droits à congé maladie et les possibilités de reclassement épuisés. Pour autant, le bénéfice de l’allocation chômage est aussi conditionné par l’aptitude au travail. Un agent déclaré totalement inapte au travail ne peut bénéficier de l’indemnisation de sa per te d’emploi involontaire. Cependant dans cer tains cas, le cumul entre la pension d’invalidité et l’allocation chômage reste possible : dans le cas d’une pension d’invalidité de première catégorie (c’est-à-dire si l’agent reste capable d’exercer une activité rémunérée), les allocations chômage sont versées mais minorent >> le montant de la pension ; dans le cas d’une pension d’invalidité de deuxième ou troisième catégorie (c’est-à-dire si l’agent n’est pas capable d’exercer une quelconque profession), l’agent, s’il s’inscrit à Pôle Emploi en tant que demandeur d’emploi, pourra bénéficier du cumul, tout en sachant que le montant de la pension d’invalidité sera alors minoré du montant de l’allocation au retour à l’emploi. La démission pour motif légitime L’ar ticle 4 du règlement général annexé à la convention d’assurance chômage en vigueur 5 a fait l’objet d’un accord d’application 6 qui expose les cas de démissions pouvant être considérées comme légitimes, donnant ainsi droit à indemnisation du risque chômage de l’agent (cf. encadré). Se pose alors la question épineuse de l’articulation entre allocation chômage et l’indemnité de départ volontaire. Par principe, le cumul entre les deux indemnités n’est pas possible, mais il souffre de deux exceptions : d’une part la démission de l’agent considérée comme légitime, d’autre par t la neutralisation du caractère volontaire du départ. En effet, la démission non légitime ne fait pas définitivement obstacle à l’indemnisation 7 si elle est reconsidérée par la suite dans deux types de situation : • un réexamen est possible lorsque les efforts de reclassement sont constatés par l’employeur public après un délai de 121 jours. Ce réexamen les fera bénéficier de l’allocation chômage à compter du 122 e jour, il est à l’appréciation discrétionnaire de l’employeur public ; • l’agent a perdu involontairement le nouvel emploi qu’il a occupé durant Agents publics - Motifs de démission donnant droit à indemnisation ■ Pour suivre : • soit son conjoint qui change de lieu de résidence pour exercer un nouvel emploi, ou qui est licencié ou mis à la retraite alors qu’ils bénéficiaient d’un contrat dit de « couple indivisible » comprenant une clause de résiliation automatique ; • soit ses ascendants ou la personne qui exerce la puissance parentale (s’il est mineur) ; • soit la personne avec qui il s’est marié ou a conclu un PACS dans les deux mois précédant sa démission. ■ Pour exercer un nouvel emploi ou pour suivre une action de formation, après un contrat emploi-solidarité ou un contrat d’insertion par l’activité, un contrat emploi jeunes. ■ Pour exercer un emploi sous CDD d’au moins 6 mois, sous CDI, ou pour suivre une action de formation qualifiante, après un CDD initiative-emploi (CIE), un contrat d’accompagnement dans l’emploi (CAE), un contrat d’avenir (CA), un contrat insertion-revenu minimum d’activité (CIRMA) ou un contrat unique d’insertion. ■ Pour cause de non-paiement des salaires pour des périodes de travail effectuées, ces arriérés étant constatés par une ordonnance de référé lui allouant une provision des sommes dues. ■ Lorsqu’il déclare avoir été victime d’un acte délictueux durant l’exécution de son contrat de travail, ou de violences conjugales (l’obligeant à changer de lieu de résidence) pour lesquels il justifie avoir déposé plainte devant le procureur de la République. ■ Pour conclure un ou plusieurs contrats de volontariat de solidarité internationale ou un contrat de volontariat associatif d’une durée continue minimale d’un an ou pour créer ou reprendre une entreprise dont l’activité a donné lieu aux formalités de publicité requises par la loi, mais a cessé pour des raisons indépendantes de sa volonté. 46 N ° 5 4 0 - M a i - J u i n 2 0 1 1 44-47_D&J_RHF540 14/06/11 12:26 Page47 e v u e h o s p i t a l i è r e d e F r a n c e Sur le web Attractivité professionnelle Droit et jurisprudence << International L’arrivée du terme de son contrat à durée déterminée ouvre droit de façon assez logique au bénéfice des allocations chômage (cf. infra). Le licenciement : qu’il ait eu lieu dans l’intérêt du service, ou suite à la perte des conditions de nomination entraînant la radiation de l’agent, il est aussi considéré comme une per te involontaire d’emploi ouvrant droit à indemnisation. La non-réintégration à l’issue d’un congé pour convenance personnelle ou de mobilité : ces deux types de congés emportent un droit à réemploi dans son emploi précédent dans la mesure permise par le service, et au moins une priorité pour être réemployé dans un emploi ou une occupation similaire. Cette priorité n’exclut pas la possibilité pour l’agent de s’inscrire sur les listes de demandeurs d’emploi, et de bénéficier des allocations pour perte d’emploi. ■ Tribune libre Lorsqu’elle constate qu’un de ses agents a fait l’objet d’une condamnation pénale emportant privation de ses droits civiques, l’administration a obligation de procéder à sa radiation d’office des cadres ; elle n’empêche cependant pas l’agent concerné de prétendre au revenu de remplacement 8. Certaines hypothèses liées notamment aux changements de position du fonctionnaire doivent faire l’objet de précisions. D’après la jurisprudence administrative, lorsqu’il paraît impossible pour l’administration de procéder à la réintégration du fonctionnaire au cours ou au terme d’une disponibilité, il bénéficie du droit à l’allocation chômage si : • la mise en disponibilité lui a été imposée, • sa réintégration à l’issue ou au cours de cette période n’est pas possible faute de poste vacant, • sa disponibilité intervient à l’issue d’une période de disponibilité expirée, un détachement ou une période de mise hors cadre. Le juge considère en effet que lors ou au terme d’une période de disponibilité, bien que les liens statutaires unissant le fonctionnaire à son employeur public ne soient pas rompus, l’absence de rémunération, qui est une des caractéristiques de la disponibilité, est assimilable à une perte d’emploi, de surcroît involontaire et donc indemnisable. Si le fonctionnaire qui a été mis en disponibilité dans son administration d’origine, a été recruté en tant L’agent non titulaire Réflexions hospitalières Le fonctionnaire taire d’emploi de la part du dernier établissement qui les employait 9. Enfin, le licenciement du fonctionnaire qui a refusé trois propositions d’emplois lors de sa prise en charge à la suite de la suppression de son emploi ou après une période de disponibilité bénéficie du versement de l’indemnisation chômage. Offres d’emploi Les pertes involontaires d’emploi propres à chaque catégorie d’agents qu’agent non titulaire par un autre employeur public, ou comme salarié par un employeur privé, mais a perdu cet emploi, il peut bénéficier de l’allocation chômage s’il ne peut réintégrer son administration d’origine. Aussi, puisque le changement de position statutaire sans réintégration d’un fonctionnaire peut entraîner sa mise en disponibilité, la possibilité pour lui de bénéficier de l’allocation chômage suivra la même logique : • à l’expiration d’une période de détachement, la réintégration du fonctionnaire n’est pas possible du fait de l’absence de poste vacant, il sera placé en disponibilité d’office. Il bénéficiera alors des allocations de remplacement. C’est d’ailleurs l’administration d’origine qui refuse la réintégration qui a la charge de l’indemnisation chômage ; • à l’expiration d’une période de mise hors cadre, le fonctionnaire qui n’a pas pu être réintégré dans l’hypothèse où il est mis fin à cette période - devenue rarissime - avant le terme fixé est placé en disponibilité d’office et bénéficie de l’allocation chômage ; • à l’expiration d’une période de recherche d’affectation, les directeurs placés en disponibilités d’office doivent également recevoir une indemnisation pour perte involon- Librairie au moins 91 jours ou 455 heures, juste après sa démission non légitime. Il a ainsi droit à l’allocation chômage car le caractère illégitime de sa démission est neutralisé. Formation des cadres Actualités R 5. La convention en vigueur date du 19 février 2009. Les partenaires sociaux ont conclu une nouvelle négociation le vendredi 25 mars 2011 sur le dispositif d’assurance chômage. L’accord a été signé par le MEDEF, la CGPME et l’UPA côté employeurs, et par la CFDT, la CFE-CGC, la CFTC et la CGT-FO côté salariés. Cet accord doit à présent être traduit dans une convention qui, au 1er juin 2011, prendra la suite de celle du 19 février 2009. La majorité des règles d’indemnisation issues de la convention du 19 février 2009 est maintenue. 6. Accord d’application n° 14 du 19 février 2009 pris pour l’application des articles 2, 4 e) et 9 § 2 b) du règlement. 7. Ces deux hypothèses de « régularisation » des départs N ° 5 4 0 - volontaires s’appliquent aussi bien à la démission qu’à l’abandon de poste. 8. Pour exemple : CE 21 juin 2006 req. n°269880, Commune de la Faute-sur-Mer. 9. La proposition de loi Fourcade du 24 mai 2011 prévoit que le CNG versera ces allocations chômages aux lieu et place de leur dernier employeur (art. 9 bis B, texte adopté n° 665). M a i - J u i n 2 0 1 1 47