Une «zarzuela» retrouvée: Le Barón, de Moratín
Transcription
Une «zarzuela» retrouvée: Le Barón, de Moratín
René Andioc Une «zarzuela» retrouvée: Le Barón, de Moratín 2003 - Reservados todos los derechos Permitido el uso sin fines comerciales René Andioc Une «zarzuela» retrouvée: Le Barón, de Moratín On sait que la comédie Le Barón, dont la première eut lieu le 28 janvier 1803 au théâtre de la Cruz, était fille d'une «zarzuela» de 1787 destinée à une représentation «casera» chez la comtesse douairière de Benavente, Dª Faustina. Cette dernière possédait, comme sa fille la célèbre «condesa-duquesa», un théâtre particulier pour lequel Ramón de la Cruz, très lié à cette famille, avait notamment composé Le día de campo; à Dª María Josefa, Tomás de Iriarte avait offert pour sa part une autre «zarzuela», Los baños de Sacedón. La pièce primitive, que nous avons retrouvée, fut commandée à Leandro Fernández de Moratín par Cabarrús, que, grâce à Jovellanos, notre auteur accompagnait en qualité de secrétaire au cours de son voyage en France. D'après une lettre adressée à Jovino le 9 avril 1787, il semble que le jeune dramaturge se soit mis à l'oeuvre peu après son arrivée à Paris: «En fin -écrit-il-libre ya de este grave asunto (la rédaction définitive de son journal de voyage), voy a... disputar la corona melodramática al Poeta quadrillero: dura y repugnante ocupación en la qual me metió le mayor amigo de V. S.»; le genre n'était évidemment pas fait pour le séduire; nous aurons l'occasion de revenir sur ce point. Quoi qu'il en soit, à peine plus de deux mois lui suffirent pour mener à bien sa tâche: le 18 juin, il écrit à son correspondant et ami qu'il a enfin terminé la «zarzuelilla en dos actos intitulada Le Barón», ce qui, compte tenu des nombreuses sollicitations de la vie parisienne, témoigne d'une incontestable facilité. Cependant, les craintes qu'il manifestait déjà dans cette dernière lettre se réalisèrent: la pièce ne fut pas jouée chez les Benavente; quant au texte lui-même, on peut très vraisemblablement -290- supposer que Moratín, fidèle à ses principes, avait bien pris soin de le faire disparaître après avoir achevé la rédaction de sa comédie, elle aussi en deux actes. Pour ce faire, nous savions seulement, d'après l'Advertencia à cette comédie, que l'auteur avait supprimé, outre «lo añadido por mano ajena», tous les passages chantés (l'organiste José Lidón en avait écrit la musique); il avait également donné «a la fábula mayor verosimilitud e interés, a los caracteres más energía, y alterando le primer acto y haciendo de nuevo le segundo, de una zarzuela defectuosa compuso una comedia regular». Il pouvait donc être intéressant de retrouver le texte primitif, non seulement pour mieux connaître la genèse de la pièce, mais aussi et surtout pour pouvoir comparer deux développements différents d'un même thème, deux manières de traiter un même sujet suivant qu'il devait se plier aux lois de la «zarzuela» ou à celles de la comédie néoclassique. Nous ne disposions jusqu'à ce jour que du fameux plagiat d'Andrés de Mendoza, La lugareña orgullosa, jouée au théâtre de Los Caños del Peral le 8 janvier 1803, soit vingt jours à peine avant la première d'Le Barón (c'était là -nous aurons prochainement l'occasion d'apporter quelques précisions sur cette curieuse affaire- une revanche du comité de patronage du dit théâtre, dont l'autonomie avait été remise en cause par la Junte de Réforme à laquelle avait appartenu Moratín). Mais Mendoza ne s'était pas contenté de copier à la lettre le texte de la «zarzuela»; il avait également rajouté de nombreux passages de son cru de manière à rédiger une comédie en trois actes, et de ce fait, avait supprimé à son tour «lo cantable»; le dénouement, différent de celui que Moratín donne à sa pièce en 1803, nous paraissait simplement s'apparenter à celui de Los Menestrales descontentos, de Trigueros, en ce sens que le délinquant, appelé ici Luquillo et travesti en marquis, était publiquement démasqué. On ne pouvait donc se faire une idée exacte de l'original ainsi pillé et déformé. Nous avions renoncé à en retrouver le texte, quand un heureux concours de circonstances nous permit cette découverte: nous souvenant que Moratín évoque, dans l'Advertencia à sa comédie une représentation de la «zarzuela» à Cadix, et que d'autre part La Mojigata fut également jouée en province bien avant que son auteur ne songeât a la confier aux comédiens de Madrid, nous rappelâmes au bon souvenir d'un de nos amis en instance de départ pour Séville -celui-là même à qui nous dédions cet article avec la plus vive gratitude- le nom de notre dramaturge; sans grande conviction, il faut le dire. Une copie de ces deux pièces, à l'exclusion de toute autre, était conservée à la «Residencia de los PP. de la Compañía de Jesús» de cette ville (Fondo Saavedra, leg. 39): -291- l'hypothèse devenait présomption; un voyage à Séville en fit une certitude. Qui plus est, il y a tout lieu de croire que la copie de notre «zarzuela» est plus fidèle à l'original que ne le laisseraient supposer les affirmations de l'auteur: celui-ci reproche en effet à ses admirateurs d'en avoir altéré progressivement le texte durant son absence, de 1792 à 1797; mais celle dont nous disposons appartient à la collection constituée par Arias de Saavedra, grand ami -et, pendant une courte période, de 1797 à 1798 collègue- de Jovellanos (la liasse porte la mention: «Del tiempo del Ministerio y otras materias»); les confidences de Moratín à Jovino au sujet de sa pièce en 1787, leurs relations ultérieures, enfin l'amitié des deux hommes d'état, tout donne à penser que Saavedra n'avait pas en sa possession la première copie venue. L'écriture est en effet très soignée, le format est celui d'un petit cahier de 220 x 160 mm., sans pagination, mais chacun des deux actes occupe très exactement 38 pages. Titre: Le Varón/Zarzuela en dos actos. L'acte I n'offre pas avec celui de la comédie des différences telles que sa transcription intégrale nous ait paru nécessaire; on remarque en tout premier lieu -et l'on peut en dire autant de ses autres pièces- que Moratín possède une grande facilité; en homme rompu aux exercices poétiques de toute sorte (rappelons-nous ses talents de «repentista», son habileté à renouer une intrigue quand l'un des amis du petit cénacle d'Estala avait intentionnellement «tué» tous les personnages d'une tragédie à la fin du premier acte, etc.), il donne l'impression d'écrire «a vuela pluma», sans que le rythme octosyllabique -le plus conforme au génie de la langue parlée- paraisse constituer le moindre obstacle à cette «afluencia»: un enjambement, et la phrase repart de plus belle. Inévitablement, la tenue du style s'en ressent; et ceci explique les innombrables suppressions ou corrections que subit successivement le texte de n'importe laquelle de ses pièces avant de devenir -tout relativement- définitif. C'est aussi pourquoi l'image souvent étriquée que l'on donne de cet écrivain relève soit de la malveillance -le XVIIIe siècle fait encore trembler quelques nostalgiques du quichottisme et de l'empire sur lequel... etc.- soit plus simplement de l'ignorance. Mais la «difícil facilidad» chère à Moratín est tout le contraire de l'impuissance. Le texte de la première édition de la comédie n'étant pas facilement accessible, nous utiliserons ici celui de la B.A.E. (correspondant à l'édition de 1825), à quelques détails près identique, comme point de référence et nous bornerons à reproduire les variantes importantes ou les passages dont la suppression ultérieure, en 1803, n'a pas obéi à un simple souci de concision. Le générique de la «zarzuela» comporte deux personnages supplémentaires, -292- Antón, oficial de Sastre, et un Alcalde indispensable pour l'arrestation du faux baron au dénouement. Acte I, scène 1: A la fin de cette scène, après le dernier vers de sa tirade, Leonardo récitait ou plutôt chantait, comme le laisse supposer le changement de rythme et de style: Dila que amando muero a su desdén rendido, que de su lavio espero alivio a mi dolor; Que un pecho fementido que olvida quando quiere nunca lograr espere las dichas del amor. Le bref monologue de Fermina («¡Pobrecillo! Mucho temo...») constituait à lui seul, comme dans l'édit. de 1803, la scène 2; légère variante du dernier vers («... Esto es/una continuada guerra»), mais en outre, douze pentasyllabes chantés: Ciego Cupido, Dios inhumano, fiero tirano, ya he conocido tu crüeldad. En vez de gusto, dolor y susto das solamente: tu llama ardiente devora impía a quien se fía de tu deidad. Scène 3 («B.A.E.», 2: «Fermina.-...¡Señora! / ¿Pues a qué santo es la fiesta?»): ¡Señora! ¡ay, ay! ¡qué guapas! ¡Que piedras Repara en las Arracadas que tiene puestas Mónª. tan relucientes! ¡Caramba! quiero verlas., quiero verlas: a ver una. -293Les interruptions réciproques de Fermina et la tía Mónica sont plus nombreuses; la première insiste davantage sur les défauts de sa maîtresse: («Y os llamaba majadera») porcallona y... Mónica Calla. Fermina ... y bruto (scène 5; «B. A. E.», 4) La tía Mónica demande à son frère deux mille réaux et ce dernier affirme en avoir reçu quatre mille (respectivement cent doublons et douze mille réaux dans la comédie; Moratín a donc dans cette dernière tenu compte de l'augmentation du coût de la vie). («D. Pedro.- ... a una viuda / Tan verde y tan peritiesa / Con paletina y brial.») ... a una viuda, y a una viuda petimetra que tiene arracadas guapas. (au début du XIXe siècle, la «petimetría» avait fait peu à peu place à d'autres modes; le «currutaco» était le nouvel élégant à la derniére; c'est sans doute pourquoi Moratín a préféré «peritiesa»). La fin de la scène 5 était bien plus longue, et Mónica chantait en dernier lieu les décasyllabes suivants: Obstinado mi hermano en su tema, se consume, se irrita, se quema si las cosas no van a su modo; por que en todo ha de ser le mandón. ¿Y qué importa que grite, que clame, y loquilla y tronera me llame, o enfadado se vaia o me riña, si a la niña la quiere le Varón. Scène 6 («B.A.E.», 5): Mónica demande une seule fois an baron dans quelle rue se trouve le «caserón» qu'il veut transformer en... château en Espagne. Dans la comédie, au contraire, la réitération de cette question et les dérobades successives de l'aigrefin constituent un nouvel élément comique. La seconde moitié de la scène était nettement différente dans la «zarzuela»: après que le baron ait offert son palais chimérique à la naïve Mónica, cette dernière est victime d'un quiproquo et semble croire que la «baronne» ne sera pas sa fille, mais elle-même; en premier lieu, ceci est en contradiction avec la fin de la scène précédente; en outre, le procédé consistant à affirmer l'enviable supériorité d'un conjoint d'âge mûr -294(Moratín se souvient sans doute de L'Avare) est déjà utilisé, avec beaucoup de bonheur, dans Le Sí de las Niñas que l'auteur avait terminée en 1801; c'est sans doute pour toutes ces raisons que Moratín a remplacé le passage par un dialogue entre les mêmes personnages au sujet de Leonardo, le rival heureux du baron. Cela permet également à l'auteur d'allécher au second acte la veuve Dª Mónica par la perspective d'un second mariage avec un grand, et de faire rire à ses dépens. Voici le texte primitif: («... todo es para vos. Mónica Señor»,) de vuestra benignidad no lo dudo; pero es fuerza conocer que ya pasó mi tiempo; y por más que quiera, los años... Varón Los años, ¡ah! ¡qué talento! ¡qué modestia! ¡qué virtud! Cada vez más me edifica, me embelesa este modo de pensar. ¡Los años! ¿qué más dijera una muger fatigada de vivir? esa prudencia, es verdad, muy pocas vezes en la jubentud se encuentra, pero produce portentos también la naturaleza... Y bien, decid, ¿quántos años podréis tener? Serán treinta lo más, lo más, ¿eh? Mónica Lo más. Varón Y al cabo, ¿qué edad es ésa? La mejor, la más feliz de la vida, quando muertas las locuras jubeniles, y las pasiones turbulentas triunfa la razón, y unidas las gracias y la belleza al talento y la virtud con irresistible fuerza, al corazón más revelde a su dominio sugetan. -295Mónica Mil gracias, Señor Varón. Varón ¡Estas son mugeres, éstas...! ya se ve, yo no me admiro: educada en tal escuela, ¿qué milagro que la hija un vivo retrato sea de su Madre? ¡ah! quiera le cielo apiadado de mis penas que esta unión apetecida efecto dichoso tenga. Si mi ventura cumplirse veo, y le himeneo una hermosura me da querida que agradecida premie mi fe, toda mi pena daré al olvido, y envanecido de mi cadena seré constante, feliz amante me llamaré. Il faut supposer que la mise en scène prévoyait un mouvement de surprise de Mónica apprenant que l'élue du baron était sa fille, mais, comme nous l'avons dit, le quiproquo n'était pas vraisemblable. Scène 7 «B.A.E.», 6): Comme bien d'autres scènes, celle-ci est plus longue que son homologue de la comédie. Cependant -et pour cause- Moratín n'a pas prévu le monologue qu'il fait réciter à Mónica dans l'édition de 1803: la scène commence par l'appel «¡Fermina!». Scène 10 («B.A.E.», 9): Assez différente de celle de la comédie, surtout après la lecture de la deuxième fausse lettre, dont les noms propres sont tout aussi fantaisistes, peut-être même trop, ce qui expliquerait que Moratín les ait allégés par la suite (Sant Angelo au lieu de Siete Torres, Claramunt Pérez de Quiñones au lieu de Quincozes, Adolfo Remestein Bramburg au lieu de Wolfango de Remestein). Scène 11: Elle est constituée par un long monologue du baron, -296- considérablement réduit dans l'édition de 1803, et rattaché à la scène 9 dans celle de 1825: Pues si le tal viejo se empeña en que no ha de dar la dote, todo mi proyecto vuela, ¿y entonces? salto de mata; a bien que poco se arriesga; ¡cáspita! yo no crehí que le tal hombre nos saliera con esta majadería; pero a bien que aunque se pierda todo, yo no pierdo nada; esto solo me consuela. Pues, Señor Varón, venzamos la dificultad que resta: a sitiar al viejo, a darle asalto y batirle en brecha; si se resiste, esta noche me ceno mis cinco leguas; a bien que hai luna, y si cede... si cede... lo mismo queda que hacer... en viendo el dinero en mi mano, a Dios Illescas, mañana dispongo el hato, y sin que nadie lo sepa (por no darle pesadumbre con mi apresurada ausencia) me marcho de aquí, y entonces yo seré Señor de veras. Por más que resista haré que desista y el dote me cuente; llegaré obediente llamándole tío, y al cabo confío que le embromaré. Con este dinero seré caballero, seré venerado, será celebrado mi genio bendito; amable, bonito, discreto seré. -297Scène 13 («B.A.E.», 11): Fermina y después Pasqual Fermina ¡Buena va la danza, buena! Esto es hecho; si Leonardo algún arbitrio no encuentra, todo se pierde, y mi Ama, tan grande y tan reverenda, sin conocer las resultas del disparate que intenta. ¡Valgame Dios! Los que dicen que los años dan prudencia. Viejecitos viejecitos, cascaditos, curtiditos curtiditos, con arrugas y verrugas, yo os confieso la verdad: que no es todo seso lo que es gravedad. («Pasqual.- ¿Me llamabas?», etc.). Dans la comédie, le passage est supprimé, et remplacé par un court dialogue entre le baron et Pascual qui arrive pour répondre à l'appel de Fermina. Scène 15 («B.A.E.», 13): Commence par une longue tirade de Leonardo; suit la réponse d'Isabel: «Leonardo, no es ocasión...» Le dialogue est en général plus déclamatoire que celui de la comédie; dans cette dernière Moratín a rajouté les vers de Leonardo: «¿Qué la diré?... /... De su enemigo perezca». La scène s'achève sur ce passage «cantable» du jeune prétendant; Si llevo en le pecho tu imagen querida, sabré con mi vida la tuia librar. Verás quán en vano vencer ha crehido quien no ha merecido tu afecto ganar. -298Enfin, l'acte I de la «zarzuela» comporte une seizième et dernière scène qui réunit Fermina, Isabel et Leonardo et commence par quelques vers rattachés dans la comédie à la précédente, sur laquelle s'achève l'acte: («Fermina. Siempre fue de los osados / ... Siempre la ha tenido adversa».) Amor da valentía al pecho más cobarde; por él en iras arde le que temió algún día, al peligro le guía, victorias mil le da. Isabel De amor lloro la pena que turbó mi sosiego; ni dócil a mi ruego de timidez me llena, ni el corazón serena que vacilando está. Fermina Si viene mi Señora y os halla de ese modo, por enmendarlo todo todo se perderá. Todos La suerte que hasta ahora causó disgusto tanto quizá de nuestro llanto se compadecerá. Au total, seize scènes, contre quinze dans la comédie en 1803, et treize dans l'édition de 1825. Acte II, scène 1: Scène un peu plus longue que dans la comédie: elle s'achève par un passage chanté: Fortunilla taimadilla, caprichosa, poderosa, si tu rueda nunca queda puede estar, si la vuelves si resuelves humillarme y olvidarme, ya del todo dame modo de escapar. A partir de là, l'étude comparative n'est plus possible; Moratín nous en avait prévenus dans son prologue: ainsi, la deuxième scène de la «zarzuela» -299- deviendra la quatrième de la comédie, l'auteur ayant estimé nécessaire de confronter Leonardo et le baron pour préparer la fuite de ce dernier, ce qui l'amène à rédiger une nouvelle scène 2 et une troisième entièrement constituée par les méditations salutaires de l'aigrefin. Il ne reste donc plus qu'à transcrire le texte de l'acte: le début de la scène 2 («B.A.E.», 4) s'éloigne de plus en plus de celui de l'édition de 1803, au point que les vers de D. Pedro («...Nada en sustancia /... Por su madre lo que gana / Por sí») nous paraissent constituer la limite au delà de laquelle on ne peut plus parler d'analogie. D. Pedro ... lo que gana por sí... ¡qué cabeza tiene esta muger! ¡qué atronada y qué loca!... (Hace que se va y el Varón le detiene.) V. quisiera hablaros en confianza sobre un asunto. D. P. Decid. V. No sé si hallaré palabras para disculpar un yerro que la inadvertencia causa de Doña Mónica; yo he ofrecido disculparla con vos... D. P. Muy bien, y ¿es el caso? V. Es el caso que, prendada de algún mérito que juzga hallar en mí, de la hidalga sangre que corre en mis venas, de lo antiguo de mi casa, en fin, habiendo crehido que en mí calidad no falta para merecer su agrado, después de algunas semanas de meditación, resuelve coronar mis esperanzas con la mano de Isabel, vuestra sobrina. D. P. ¡Ah; esto no es chanza Señor Varón! V. No por cierto; ni era justo os engañara con una cosa que... D. P. Vamos, Señor Varoncito, vaya vaya, que para juguete me parece que ya basta. V. ¿Juguete llamáis? D. P. No hablemos de eso; vamos, que me cansa ciertamente, y aunque tengo el genio alegre, me agrada mucho la formalidad. (Con mucha gravd.) V. Don Pedro, ninguno gasta más formalidad que yo. (Imitº el tono del Varón) D. P. Don Varón, no importa nada el gesto y la gravedad, que a serio nadie me gana, y seriamente os repito que no gusto de esas chanzas, ¿estamos?... por eso mismo vengo a reñir a mi hermana; yo no sé quién a extendido por el lugar que se casa Isabelita con vos, y cierto que si juzgara ser vos quien lo ha divulgado, yo os supiera dar las gracias. -300V. He perdido (aparte). ¿Y no sabremos a qué viene tan estraña aversión...? D. P. A que el decoro de una muger honrada es cosa mui respetable, y si alguno le profana con un embuste, y el vulgo da crédito a sus palabras pierde su opinión, la qual una vez amancillada en el concepto común, tarde o nunca se restaura. Isabel no necesita para ser afortunada viznietos de Emperadores. No es Princesa ni aun hidalga, pero es mui honesta, tiene mucha virtud, muchas gracias y no mui poca hermosura, con las quales circunstancias hai muchos en el lugar, muchos, muchos que juzgaran ser felizes con su mano; pero si corre la fama de que, olvidando quién es, estubo ya perdigada para Varonesa, entonces ¿quién la mirará a la cara? Cásese la Señorita, dirán, con un Par de Francia, o escoja el que más le guste de los Príncipes de Italia, que bajar desde un Varón de tan ilustre prosapia, tan noble, tan sumamente noble, y de prendas tan altas, a ser esposa de un pobre labrador, fuera afrentarla. Y dirán bien... V. No dirán bien, no Señor, si se casa conmigo, no dirán bien. Si faltara a mi palabra o desmintiendo el amor que me fuerza a idolatrarla fuera yo capaz de ser tan vil que la despreciara, entonces dijeran bien; pero si la unión sagrada del matrimonio la hiciese mi muger, y... D. P. ¡Pataratas...! Pero decidme: ¿juzgáis que tengo tan rematada la cabeza, que tan necio soi, que me han dado estas canas tan corto conocimiento que al instante me persuada a tal disparate? ¿a mí venirme con eso? Vaya, Señor Varón, que me hacéis muy poco favor. V. Extraña tenacidad es la vuestra, y cierto ignoro la causa que podéis tener; yo pienso que el amor todo lo iguala, y las prendas que decís de vuestra sobrina bastan a darla maior fortuna de la que conmigo alcanza; por mi parte... yo no sé... quizá la pasión me engaña... pero no sé en qué he podido desmerecer; si pensara que otro más digno podía gozar ventura tan alta, era capaz de cederle el triunfo, por que lograra Isabel mejor destino: tan generosa es mi llama que por hacerle feliz supiera dejar de amarla. Pero ciertamente ignoro qué defecto os desagrada en mí, si mi nacimiento, mi fortuna, o... D. P. Nada, nada... (Con ironía.) Señor Varón, yo no pongo -301en vuestros méritos tacha, eso no, fuera faltar a la justicia; las claras prendas del Sor. Varón merecen mil alavanzas. (A parte.) V. Ya he ganado. D. P. Yo no puedo dignamente celebrarla sino con la admiración y el respeto, y si pensaran todos los demás así no se oyeran mil infamias por el pueblo que vulneran vuestra opinión o la manchan. V. ¿Cómo así? pues... D. P. Son hablillas de la gente. V. Mi venganza... D. P. ¿Qué venganzas? No señor. V. ¿Por qué no? si así me agravian yo haré... D. P. Si son unos necios. V. No importa. D. P. Lenguas bellacas que no pueden ofender lo limpio de vuestra fama. V. Bien decís; como Isabel premiar quiera mi constancia y el dulce nombre de tío... D. P. ¡Oh! señor Varón, mil gracias, mil gracias; pero hasta ahora aún no está determinada cosa ninguna. V. ¿Qué escucho? D. P. No Señor. V. Pero ¿qué falta? D. P. Falta persuadirme a mí, y es cosa bien arriesgada el intentarlo. V. ¿Por qué? D. P. Porque... si os digo la causa os dará enfado. V. Decidla. Ya he perdido. (Aparte.) D. P. En dos palabras la diré: nadie en el pueblo os conoce; si no falla lo que habéis dicho de vos, mui pocos hai en España que os igualen; sois en suma un Gran Señor. Si son falsas las noticias que tenemos, sois un bribón, un canalla. Siendo un Señor, otras bodas merecéis, la suerte os llama por otra parte, dejad a Isabel, Señor, dejadla, que aun quando fuese verdad esa pasión extremada que la mostráis, y a tal punto una locura os arrastra, nosotros no estamos locos. Si sois -y muchos abrazan esta opinión- un tunante que ha venido a sonsacarla por chiste y fingir con todos grandezas desmesuradas a ver si puede quitarnos con astucias y patrañas el dinero y el honor, será burla mui pesada; pero yo estoi mui de aviso: cuidado con lo que trama el Señor Varón, cuidado, no se exponga, que le aguarda un mal rato, y esos chistes en Ceuta y Orán se pagan. Escena 3ª D. Pedro e Isabel D. P. No le ha gustado el sermón; fuese sin hablar palabra. ¡Qué bueno fuera, qué bueno! Enfín, puesto que mi hermana ha perdido la chabeta, no contemos para nada con ella, pero estas dudas es menester aclararlas. ¿Isabel? I. Señor, si puede moveros mi suerte infausta, -302si valen algo con vos estas lágrimas amargas, procurad desvanecer el riesgo que me amenaza, mi Madre por un capricho tiene mi boda tratada con el Varón; vos podéis tan sólo desengañarla; en vos hai autoridad que en todos nosotros falta; si me abandonáis, si llega a efecto, mi vida acaba, que a un precepto tan cruel ninguna prudencia basta. Vos la sabréis reducir, y habiendo salido vana toda nuestra diligencia, en vos tengo mi esperanza; en vano quiere Leonardo persuadirla, que obstinada en su parecer, ninguna reflexión con ella alcanza. Yo muero en tanto, y... D. P. ¡Morir! ¡Morir por eso, muchacha! Tú tienes un corazón más chico que una avellana. Sabes que te quiero tanto que siempre he sido en tu casa tu protector y tu amparo, que no hai cosa por extraña que fuere que me detenga cuando de tu bien se trata. ¿Te acuerdas que quando eras chiquitita me llamabas «el otro Papá»? ¿que has sido alivio de mis desgracias? ¿y te me quieres morir? ¡morir! y ¿qué me quedaba para consuelo después, si mi Isabel me faltara? No Señor; yo necesito que vivas, y afortunada, y mui contenta; ¡eh! dejemos esas locuras, que nada se consigue con llorar. I. ¡Ay, Señor! D. P. Pobre muchacha; vamos, vamos serenando esa aflicción, que me enfada ciertamente verte así; ten segura confianza, que por más que lo procure tu Madre, verá burlada su pretensión; voy allá, y verás qué función anda con ella; dame un abrazo (La abraza.) y a Dios. Escena 4ª Isabel sola Confusa, agitada, llena de temor estoi. Todo el cielo me amenaza, y ni puedo resistir mis penas y remediarlas. Oprimida de mi suerte, nada aguardo, nada intento, ni aminora mi tormento la esperanza del favor. El descanso de la muerte sólo busco y sólo pido, que en mi pecho llevo unido de las furias el horror. Escena 5ª Isabel y Fermina F. ¡Ay, señora, qué bohína anda allá dentro en la sala entre la Madre y el tío! Las puertas están cerradas pero tales voces dan, singularmente mi Ama, que las vecinas se asoman por troneras y ventanas, escuchando el alvoroto, y como ignoran la causa, -303juzgan que los dos hermanos se repelan y se arañan. ¿Leonardo? Pero aquí viene. Escena 6ª Isabel, Fermina y Leonardo I. En fin, ha salido vana tu esperanza, ya lo ves. L. No lo he visto, mucho falta que hacer... ¡quando yo te animo, Isabel, así desmayas! ¡Válgame Dios! ¿no ha de haber en ti valor y constancia? Tu tío está de tu parte, dice que al salir me aguarda aquí mismo, que esta noche han de quedar aclaradas las mentiras del Varón; que busque al punto me encarga a la justicia: con ella hemos de venir a casa; subiremos a su quarto, y si luego no declara quién es y no justifica lo que ha dicho veces tantas, por impostor sufrirá el castigo que le aguarda. No me detengas; a Dios. I. ¡Oh, quánto recela el alma! L. ¡Oh, quánto valor infunde el cariño de una Dama! I. Ciegos errores, falaz deseo, eternas creo mis penas ya. L. No más temores, que a mi deseo, amor, te veo benigno ya. Escena 7ª Fermina y Pasqual P. Pues, Señor, ya fui allá y dije que le esperaban al instante, que viniese corriendo, porque importaba muchísimo que viniese corriendo, porque mi Ama le necesitaba y porque... enfín, porque le aguardaban y era menester que a toda prisa y sin pararse en barras viniese a todo correr. F. ¡Qué bellísima retayla de sandeces! ¿y qué dijo? P. Dijo... si él no ha dicho nada. F. Pues, ¿no le has visto? P. Yo, no. F. No le has visto; ¿qué no estaba? P. Sí estaba. F. Y ¿qué? ¿no le dieron el recado? P. La Colasa se le dio. F. Y bien, ¿quándo viene? P. Si no viene. F. Pues di, acaba, ¿por qué no quiere venir? P. El bien quiere, pero falta que pueda. F. ¿Por qué? P. Porque parece que esta mañana el pobre sastre... no, ayer... yo no sé... no, ayer estaba en las Eras... hoi ha sido; subió a poner unas tablas al Palomar, y una red para tapar la ventana, y estando allí se le fue la cabeza porque andaba clavando clavos y el pelo se le enredó en una escarpia, y desde allí se cayó sobre el palo donde enganchan la garrucha quando quieren subir los sacos de paja, y desde allí se cayó al texado de su hermana, y desde allí cayó al suelo, y desde allí por la trampa -304de la cueba se cayó a la cueba porque estaba sin cerrar y desde allí se cayó en una tinaja de aguardiente, y de allí le llevaron a la cama; y mientras esté acostado no quiere salir de casa; con que no puede venir. F. ¡Para dar una embajada eres singular! P. Yo sí, eso ya lo ha dicho el Ama. F. Pero, ¿por qué no ha embiado al oficial que tomara la medida? P. Ya vendrá. F. ¿Quándo? P. Esta noche sin falta. Ya viene... sí,... ya está aquí: mira si yo te engañaba. Escena 8ª Fermina, Pasqual, y Antón mui pensatibo A. (A parte.) Él es sin duda. P. ¿Me voy? F. Vete y no vuelvas. (Vase Pasqual.) A. (A parte.) Jurara que es él. ¡Fermina! F. Oh, Señor Antón, con que ¿esa desgracia le ha sucedido a tu Amo? A. Tiene el pobre magulladas las costillas bravamente, la cabeza entrapajada, y entablilladas las piernas; se escurrió, bajó en volandas, cayó en duro, no avisó antes que se desplomara, y esto fue todo su mal. Y bien, ¿a qué es la llamada? F. Tienes que tomar medidas de vestidos a mis Amas. A. ¡Ah, sí! ya caigo, ¿y no hai también para ti una gala? F. No por cierto. A. Pues es mucho que el novio no te regale un buen vestido. F. ¿Qué Novio? A. Ese señor que se casa con la señorita: dicen que es una boda mui guapa; ya se ve, si es un Marqués, ¡qué buena vida te aguarda! ¡qué vestidos te pondrás de tafetán! y ¡qué gasas por la cabeza! ¡qué cintas! ¡qué plumas! y ¡qué peinada de Peluquero! y el novio, ¿es algún viejo fantasma? F. No, por cierto, que es buen mozo. A. ¡Oiga! mucho me alegrara de verle; ¡qué fortunón habéis logrado, bellacas! ¡qué fortunón! pobrecillo de mí, como yo encontrara alguna moza de sión ricota, que me sacara de estas agujas malditas, al instante me casaba, y entonces tiraba al pozo dedal, tixeras o plancha. Ah, toma, no se me olvide, has de enseñar a tus amas esa sortija que ayer, sabiendo que se casaba la Señorita, me han dado por si quisiera comprarla. Mira qué guapilla que es, cómo reluce, y barata; aquí viene en el papel el precio. (La da un papel.) F. ¡Ay, ésta es hurtada! A. ¿Hurtada? F. Sí; la conozco mucho mucho, si es de casa esta sortija. -305A. ¿Qué dices, muger? mira que te engañas; si no puede ser. F. ¿No puede ser? sobre que es de mi Ama. A. ¿De Doña Mónica? F. Sí; no hay duda, es suia. A. ¡Caramba! ¿Suia? pues bien, lo habrá dado a vender: estas alhajas corren de una mano en otra. F. ¡Sí, vender! ¡pues la estimaba poco! no puede ser eso... Vamos, alguna de tantas de estas venerables tías se la ha llevado enredada entre los dedos, no hai duda. Mi señora está ocupada allá dentro; esperarás un rato, y así que salga se la enseñaremos. A. Bien; a mí no me importa nada. F. ¿Tienes prisa? A. No por cierto. F. Pues espera. A. No te vayas (Hace qe se va y la deje Antón) Fermina, dame un poquillo de conversación; aguarda, escucha, dime: estas piezas de arriba, ¿están ocupadas? F. Si es el quarto del Varón. A. ¿Qué Varón? F. El que se casa con la Señorita. A. Pero ¿quién vive con él? F. La Gata negra, que se sube arriba y de noche le acompaña; nadie más. A. ¿Y su criado? F. ¿El criado? no los gasta. A. Pues ¿cómo? F. La varonía está mui deteriorada. A. Es que yo he visto una cosa y quisiera averiguarla. F. ¿Qué cosa? A. Quando venía, en una de las ventanas de arriba vi un personage... puede ser que la distancia me engañase, pero ¿qué? ¿qué engañar? aquella cara la conozco, no hai remedio. Como la luna le daba de frente, yo me paré, a la sombra de esa tapia, le miré, le remiré... yo no sé, pero jurara que le conozco. F. Pues nadie puede ser el que allí estaba sino el Varón. A. Adelante; será aprehensión. F. Pero acaba de decirme qué creyas que fuese. A. Es cosa mui larga de contar. F. No importa, dila. A. Pues va de cuento: yo estaba en Segovia con un cura extremeño que le llaman Dn Juan de Pedro Chinchilla Este me llevó a su casa, me puso a oficio, y en fin me mantubo con extraña caridad, hasta que supe hacer chalecos, casacas, chupas, botines, calzones y juboncillos y sayas. Entretanto, aparecióse cierto sobrino del Ama, estudiante vivaracho y enredador, que tiraba por clérigo; supo hacer -306el bribón tales gatadas que mi buen cura le dio hospedage; le pagaba los estudios, le vestía con decencia, le engordaba, y en suma el pobre Señor, sin recelarse de nada, se persuadió que sería Luquillas, mi Camarada, andando el tiempo, el honor de la Iglesia Segoviana. Yo, viéndome ya mocito, sin Padre, Madre ni hermana, con tal qual habilidad, quise ver qué tal andaba en Madrid de sastrería, y al fin resolví la marcha. Llegué a la Corte, encontré la facultad despreciada, miserable, hice mil cuentas, y hallé que multiplicaban los sastres de tal manera que no son más dilatadas las familias de Langosta en los campos de la Mancha. Vine a Illescas, y ya vi la cosa más moderada; respiré, me acomodé con el pobre Juan de Mata, el que cayó a la cueba, y como en estas jornadas andube tan agitado, no tube buenas ni malas noticias de mi país; habrá dos o tres semanas que escribí al cura, y ayer, amiga, tengo una carta en que me dice que el tal Luquillas, sin decir nada a nadie, tomó soleta, que se ha llevado en las garras una caja, una cadena y unos pendientes del Ama, que rompió una papelera en que mi cura guardaba el dinero, y se llevó para gastos de posada unos mil y tantos reales, que no saben dónde para, et cétera; esto es en suma lo que escriben, y me falta añadir que, sino tengo en los ojos telarañas, el suso dicho Luquillas en propia persona estaba en las ventanas de arriba cogiendo el fresco; jurara que es Luquillas y no otro, pero tú estás empeñada en que ha de ser el Varón; siendo así, no hablo palabra. F. Mira Antón, quizá ninguno de nosotros dos se engaña. A. ¿Ninguno? no puede ser. F. Tú no sabes lo que pasa, no lo sabes; pero dime: aquella cadena hurtada ¿la conocerás? A. Y mucho; y conozco una medalla de Santa Elena que tiene colgando. F. ¡Fuera chulada que yo la tubiera! A. ¿Tú? F. Yo, sí señor, ¿qué te espanta? A. Pues, ¿por dónde la has podido adquirir? F. Estas alhajas corren de una mano en otra. ¿Es ella? (Saca una cadena y se la enseña a Antón) A. Pintiparada, la misma..., a ver... sí, la misma, no hai duda; pero muchacha, ¿por dónde...? F. Antón, no es ya tiempo de detenernos en nada; ¿tienes la carta del Cura? A. Aquí no; la tengo en casa. -307F. Pues al instante, al instante por Dios te ruego que vayas por ella; no sabes tú lo que importa que la traigas; corre, que luego sabrás... A. Pero, ¿a qué viene...? F. Despacha, ve por ella. A. Pero ¿estás loca? F. Por Dios, ve a buscarla y vuelve volando. (Empujándole acia la puerta.) A. Pero... F. Hombre, ¿qué pero? si tardas en ir por ella nos pierdes. A. Pero... F. Corre. A. Si yo... F. Marcha. Escena 9ª Fermina sola F. Yo estoi loca, yo estoi loca; ¿qué es esto que por mí pasa? ¡Señor, haber descubierto sin querer tales infamias! Apenas llego a creher fortuna tan no esperada. ¡Qué dicha, qué gozo! De puro alvorozo estoi agitada, dudosa, turbada y fuera de mí. Ya el cielo piadoso alivio, reposo nos da favorable. ¡Varón miserable, ay triste de ti! Escena 10ª Fermina e Isabel F. ¿Y qué tenemos de nuevo, Señora? I. Que mi desgracia no tiene remedio, no; ya está visto, nada alcanza a persuadirla; en el mundo no hai muger más desdichada que yo; ¡separarme así de quien fino me idolatra! ¡romper los nudos de amor con indiferencia tanta! nudos que solamente la muerte debe romper; ¡inhumana ambición, que así nos ciegas y a delitos nos arrastras y a la injusticia! ¿qué importan las riquezas a quien ama? donde hai verdadero amor las demás pasiones faltan. ¿Qué me sirve la fortuna si así de mi bien me aparta? ni es fortuna la que turba la tranquilidad del alma. Un amante que adora constante ¿no procura más alta ventura si cupido a su ruego vencido la victoria que espera le da? No hai tesoro que temple su lloro si carece del bien que merece, ni el despecho que abriga en el pecho extinguir la fortuna sabrá. Escena 11ª Dª Mónica, D. Pedro y los dichos M. Siempre en consulta los dos; ¿qué negocios de importancia tendrán que tratar? ¿No he dicho Fermina, que me deshagas la bata azul al instante? que es menester ensancharla, de talle; ¿por qué no vas? ya sabes que no me agrada tanto palique. (Vase Fermina) D. P. Pues hija, no hemos conseguido nada con tu Madre, ni es posible -308reducirla: está empeñada en que has de ser Varonesa. M. Como yo mando en mi casa, como soi su Madre, como debe estar subordinada a lo que disponga yo, no es la pretensión extraña, Señor hermano, y lo mismo fuera que me predicaran quantos hai en el Lugar. Se casará. D. P. ¿Sí? M. Sin falta. D. P. Bien está; ya lo veremos. Pero mira que te engañas: la chica no ha de casarse con el Varón. M. No me hagas desesperar otra vez; ¿a qué has venido? ¿a inquietarla? ¿a llenarla de ilusiones la cabeza y que no haga cosa que la mande yo? I. No Señora, no es fundada esa sospecha; yo he sido, yo la que ha dado la causa; que mal puedo tolerar el disgusto que me mata, mal puedo contradecir a lo que padece el alma. Yo no sé, querida Madre, en qué os ofendí, en qué falta la triste Isabel, que así con tanto rigor se le trata. Si fue delito el amar a un hombre que destinabais para mi esposo, la culpa es vuestra, en vos castigadla, que en mí, señora, no fue inclinación declarada; obediencia fue; mi Padre, mi Padre no repugnaba estos enlaces; Leonardo era sólo el que juzgaba digno de mí; ¡quántas veces me dijo sus alavanzas! quántas me dijo: querida Isabel, tengo tratada tu boda, serás feliz si con Leonardo te casas. Sus prendas, su edad, su genio, me dan justas esperanzas que esta elección ha de ser la fortuna de mi casa; no es rico, pero su hacienda para sostenernos basta sin empeño ni estrechez; no es rico, pero casada con un hombre virtuoso, de una conducta embidiada en el pueblo, tú serás dichosa... ¡ay, desventurada Isabel! ¿quién te diría que este golpe te esperaba? Padre de mi corazón, ¿cómo así desamparada me dejaste? Si él viviera, si él viviera, ¡ah! no llorara yo la violencia que lloro, no me viera abandonada y oprimida. Padre mío ¿cómo tarda, cómo tarda la muerte? ¿cómo no rompe estos lazos que me apartan de vos? que los infelizes en el sepulcro descansan. M. Hola, ¿qué es esto, atrevidilla? ¡qué habladorcilla conmigo estás! Quítate presto de mi presencia, que la paciencia ya se me apura, y la blandura sirve de poco. ¡Lindo descoco tiene la niña! Ni paz ni riña -309con ella basta; ¡qué humillos gasta la picaruela! Tal es la escuela que tú le das. (Vase Isabel.) D. P. Yo no le di tal escuela, pero tú quieres casarla contra su gusto, y no es mucho que se aflixa. M. Si mirara la tonta lo que la importa esta boda, no pensara de ese modo. D. P. Desatino. M. ¿Desatino? ¿y a qué llamas desatino? ¿por ventura te parece cosa mala aspirar a más, querer mejorar en quanto alcanza nuestro ingenio la fortuna en sus caprichos tan varia? quando hallamos favorable la ocasión, ¿aprovecharla es malo, Señor hermano? D. P. No es malo, Señora hermana, si todos esos proyectos los dirige y acompaña la prudencia; cada qual en la clase en que se halla debe procurar ser más; pero con desatinadas ilusiones olvidarse de quién es, y en la esperanza de lograr maiores dichas que jamás ha de gozarlas abandonarse a la suerte y juzgar que le prepara el cielo en otra carrera lo que en la suia no alcanza mui poca prudencia arguïe, y si para mejorarla espera de los acasos dichas mal imaginadas qué, si no son imposibles están sólo reservadas a una alma grande que sabe merecerlas y buscarlas, es locura el pretenderlo; quando los auxilios faltan, quando la distancia es tal... M. Y ¿quál es esa distancia? ¿será la primera vez que un hombre ilustre se casa con una muger humilde? ¿quién ignora lo que arrastra una pasión? D. P. Las pasiones de nuestros tiempos, hermana, son en todo diferentes de aquéllas tan celebradas de nuestros Abuelos. Sí, los años hacen mudanzas en las costumbres; por eso aquellos prodigios faltan de iniquidad y virtud, que en esta edad ilustrada (si así se puede decir) son más pequeñas las almas, y no hai héroes ni malvados por que no hai exceso en nada. No es ya el amor un afecto violento que nos inflama es una galantería o un deleite, y en las varias combinaciones que admite, y según las circunstancias que ocurren, o es un comercio, que a la fortuna nos llama o es una razón de estado. Pero tú no miras nada; te imaginas que el Varón está que se despedaza por la muchacha; el Varón es un tunante que aguarda una ocasión oportuna para dejarte burlada; los que nacieron ilustres y poderosos no gastan ese género de amores; con sus iguales se casan; los pícaros que no tienen -310que perder andan a caza de viudas tontas, se hacen caballeros, fingen cartas, verbigracia, como esa que me has enseñado, engañan, pillan, y se van. Escena 12ª Fermina y dichos F. Señora. M. ¿Qué quieres? ¿ya estás cansada de coser? F. Quiero enseñaros una sortija mui guapa por si la queréis comprar. (Enseñándola la sortija que la dio Antón) M. A verla; pº muchacha, ¿no es ésta...? F. La vuestra. M. Sí. F. No hai duda, no hai que mirarla: es ella misma. D. P. En efecto, es ella; pero la hermana del señor Varón escribe con fecha de ayer que para en su poder; yo no sé estas cuentas ajustarlas; aunque si, bien puede ser. M. ¿Cómo ha de ser? D. P. Siendo falsa la tal carta, siendo falso que hai tal muger en España, hermana del tal Varón; siendo falso que tu alhaja haia salido de Illescas; siendo cierto que empeñada o vendida, de una mano en otra corrió borrasca y ha venido a tu poder; mira la historia bien clara, posible y fácil. M. ¿Ya vuelves al darme cordel? Mal haia tu pico. Sin duda ha sido que alguno de sus criados se ha descuidado con ella y después... D. P. Sí; pero falta saber cómo desde ayer que estaba en Madrid, se escapa la sortija y vuelve acá con presteza tan extraña que es menester que viniese por el aire, F. Yo apostara que el Varón... M. ¿No callarás? F. Yo, Señora, bien callara, pero... ¿es el Varón? D. P. Él mismo. F. ¡Qué puntualidad que gasta a las horas de refresco! Pero esta noche no hai nada. Escena 13ª Varón y dichas D. P. Señor Varón, a buen tiempo venís. F. Como si os llamaran con campanilla. D. P. Una duda se ha suscitado mui rara entre nosotros. F. Y sólo sois vos quien puede aclararla. D. P. ¿Conocéis esta sortija? V. Es mui bonita, me agrada mucho, cierto; sino fuera tan pequeña, la compraba para hacer algún regalo. D. P. Pero... V. Está bien trabajada, ciertamente; así a este estilo tengo en Madrid mis alhajas -311hechas con todo primor; las hice venir de Francia y... D. P. Buen pensamiento, pero lo que aquí se deseaba saber de vos era sólo si por dicha os acordabais de haberla visto otra vez. V. No por cierto; he visto tantas que... D. P. Sí; pero pocos días ha que os regaló mi hermana... V. Ah, sí, ya caigo; en efecto tiene mucha semejanza con ésta, mucha; las piedras de aquélla son más opacas y el anillo es más estrecho. D. P. ¡Haya diantre! pues jurara que... V. Sí Señor, se parecen, y es fácil equivocarlas. M. ¡Qué! tampoco: si en la mía las piedras no son tan claras como en ésta, y la lavor es mui diferente; vaya, no hai que hacer... F. Pero Señora... M. ¡Quieres callar! V. No, dejadla; por vuestra parte supongo que estáis bien asegurada de que... M. ¡Toma si lo estoi! por eso mismo me enfada que esta bachillera... Escena 14ª Leonardo y dichos L. El sastre está ahí fuera y aguarda licencia de entrar. M. Fermina, trahe los vestidos que estaban sobre las sillas; escucha, y aquella guarnición blanca de mi brial, corre; y tú (Vase Fermina) Leonardo, mientras en casa haia criados, no vengas por Dios a suplir sus faltas, que aunque lo estimo, no quiero que te molestes en nada. L. Yo no he venido por vos, y sino sabéis la causa de mi venida, Dn Pedro me dijo que me esperaba; por eso vengo. M. Mi hermano el Señor Dn Pedro manda en su casa, no en la mía. D. P. Y haré lo que me dé la gana en una y otra. M. Pero... D. P. Pero sí, Señora, en ambas haré lo que quiera, y tú no hagas caso. (A Leonardo) V. ¿Quién extraña que venga? Señora, al pobre hartas penas le acompañan; dejadle, no le casquéis, pobrecillo. Ve burladas sus esperanzas, se ve despreciado de su Dama, afligido, miserable, celoso, y después de tantas lacerias ¿le regañáis así? Pues no le faltaba al infeliz otra cosa para morirse de rabia. Escena 15ª Antón y dichos A. Señoras, dos horas ha que estoi haciendo antesala... ¡Luquillas! ¡hombre! ¡Luquillas! ¿tú aquí, vestido de gala, hecho un petimetre? ¿en dónde dejaste las hopalandas? -312V. ¡Caiga el cielo sobre mí! A. ¿Ni aun me miras a la cara siquiera? V. ¡Que este maldito estaba aquí! A. ¿No me hablas hombre? ¡un abrazo, un abrazo! ¿Sabes que he tenido carta y me escriben que te fuiste? V. Si este loco no se aparta le mato. A. Matarme, ¿cómo? ¿matar a tu camarada, Luquillas? V. Yo no entiendo, dejadme. A. ¡Hai cosa más rara! ¿no me entiendes? pues escucha lo que me han escrito... V. Calla hombre, o diablo, no me apures la paciencia. A. Que se escapa, (El Varón quiere irse y Antón le va deteniendo hta el fin de la escena.) Señores. V. Quita... A. Que importa mucho que no se nos vaya. V. Quita. A. Que ha robado al Cura. M. ¿Qué es esto, Antón? ¿en mi casa tal exceso? A. Que se va... Sí Señor, y quitó al Ama unos pendientes... Luquillas... que se escurre, y una caja y una cadena y... D. P. Leonardo, detenle. M. ¿Qué bufonada es ésta? ¡qué atrevimiento! V. ¿De esta manera se trata a un hombre de honor? A. Señores, que se me escurre, que se marcha, ya se fue, ¡válgame Dios! ya se fue. Escena 16ª Los dichos, menos el Varón M. ¡Que tal infamia haia de sufrir! A. Señora, si yo... M. ¿De este modo tratas a un caballero, a un Varón? A. Que me guinden en la plaza, que me tuesten, que me guisen con manteca y alcaparras si es Varón; ¿qué ha de ser Varón? pues sólo faltaba que me lo dijera a mí; un picarón que se escapa de Segovia, que se lleva en las uñas enredadas... (Saca una carta y se la da a D. Pedro que lee mientras dicen estos versos.) pero aquí está; ved si tengo razón, ésas son sus gracias. M. Todo es mentira, mentira y calumnias inventadas contra ese pobre Señor; pero teme mi venganza, bribón, si no te vas luego. D. P. No tan luego, que hace falta, Señora hermana; las cosas que dice están confirmadas en esta carta. A. Fermina tiene una cadena hurtada que él ha dado, y ésas son, ésas son las Arracadas (Reparando en los pendtes de Dª Mónica) de la Señora Lucía, ellas son, y sino basta lo que digo... -313D. P. Basta y sobra. L. Y una sortija que anda por aquí, ¿quién te la dio? A. Esta la dejó empeñada en la Botica, y quería por qualquier dinero darla: ahora mismo me ha contado el caso mui a la larga el Boticario. Escena 17ª Pasqual y dichos. P. Señora. M. ¿Qué quieres tú? P. Si os enfada que venga... M. ¿qué quieres? P. Yo, como siempre me regañan quando vengo, sentiría... D. P. Di lo que quieres, acaba. P. ¿Lo digo? M. Dilo; ¿qué esperas? P. ¿Yo esperar? no esperó nada, que sólo vengo a avisar... M. ¿qué? P. Que por esta ventana de arriba, no la grandota donde están las alcarrazas, sino la de más allá... M. Y bien ¿qué? P. Se descolgaba el Varón poquito a poco. M. ¿Qué dices? P. Eh, ya se enfada. L. ¿De veras? P. No, que son flores. D. P. Pues, al punto... M. Nada, nada, no hai que asustarse; pondría qualquier cosa; ¿a que es falsa la noticia y que...? Vozes dentro ¡Ladrones, (Vanse Leonardo, Antón y Pasqual) ladrones! D. P. ¿Lo ves, hermana? Corred. Escena 18ª Fermina, Isabel, D. Pedro y Dª Mónica F. ¡Señora, Señora! Vozes dentro ¡Ladrones! F. ¡Ay, qué desgracia¡ Vozes dentro ¡Ladrones! M. Pero, ¿qué es esto? D. P. ¿Aún no estás desengañada de lo que es? I. Que la justicia se nos ha metido en casa con un hombre que parece que salió desde las tapias de nuestro corral. Vozes dentro ¡Ladrones! D. P. Esta es la postrer hazaña del Varón. M. Aunque lo viera por mis ojos lo dudara. D. P. Pues ya lo ves: ahí está. Escena 19ª Los de la escena anterior, Leonardo, Antón y un Alcalde; los Alguaciles trahen al Varón atado, en chupa y con una capa vieja; Antón con una maleta que deja en el suelo. A. No hai que dudar, se escapaba Luquillas; esta maleta y este trage lo declaran. -314Alcalde Ha sido casualidad pillarle, porque llevaba tal portante que juzgamos nuestra diligencia vana; pero al saltar un arroyo dio tan fuerte costalada que no pudo levantarse; le cogimos, y en volandas le trahemos a que diga si gusta quál es la causa de fuga tan repentina. D. P. Señor Alcalde, mil gracias; la causa no la ignoramos, ya os informaré mañana de todo; llevadle ahora a la cárcel, que es alhaja mui preciosa el tal Luquillas e importa mucho guardarla. V. ¿A la cárcel? D. P. Pues, ¿en dónde pensaste dormir, canalla? A la cárcel, y de allí a Galeras; ¿qué esperabas? ¿no te lo dije? Llevadle. V. Advertid... D. P. No advierto nada. V. Confieso el delito, merezco grillete, azotes y brete, que he sido maldito; pero ya contrito pido compasión. L. ¡Picarón! D. P. ¡Picarón! V. Señora viudita, mi suegra futura, si tanta ventura el cielo me quita lugar al perdón. M. ¡Picarón! F. ¡Picarón! V. Ya veis malograda mi fuga indiscreta, tomad la maleta, yo no quiero nada, y quede anulada cadena y prisión. Todos ¡Picarón! ¡Picarón! V. Dulce dueño mío. (A Isabel) I. Me ruegas en vano. V. Venerable tío. (A D. Pedro) D. P. Echadle la mano. V. Señor Escribano, Ferminilla, Antón. Todos ¡Picarón! ¡Picarón! Escena 20ª D. Pedro, Dª Mónica, Isabel, Leonardo y Fermina D. P. Y bien, ¿qué tal? ya lo has visto. M. Ya lo he visto; avergonzada y confusa reconozco mi ceguedad; ¡cómo engañan las apariencias! Leonardo, hoi te cumplo la palabra que te di: tuia es mi hija. L. Yo, Señora, lo aceptara, pero... M. ¿Qué dudas? L. No es mucho que dude, quando burladas mis esperanzas he visto la ingratitud más villana que me llena de dolor y despecho al acordarla. Yo fui digno de Isabel mientras faltó en esta casa un competidor, y apenas en ella disteis entrada a ese impostor quando vi la fortuna declarada contra mí; ni tantos años de amor, ni vuestra palabra, -315ni la pública opinión, nada fue bastante, nada, a reduciros, y ahora, quando por inesperadas casualidades, el cielo una verdad nos declara tan funesta para vos, juzgáis que a templarme basta una dicha que el acaso, no vuestra elección, me guarda. ¿Qué? ¿tan poco mereció una pasión confirmada por los años? ¿tan común fue mi amor, que así lo agravian? I. ¡Ay, Leonardo! L. Mi querida Isabel, mi idolatrada Isabel, di si no es cierto lo que dige, si no es causa bastante para un despecho la ceguedad obstinada de tu Madre... ¡ah, sino fuera tan verdadera, tan rara esta pasión! Si tú fueras menos bella o más ingrata, supiera con más desvío dar a mi dolor venganza. Pero tú, digna mil vezes de mi amor y mi constancia, tú me rindes, y esos ojos todo mi furor desarman. Tuio soi; otros pudieran darte fortuna más alta, bien la mereces, y sólo esto me divide el alma; pero un corazón amante por ningún precio se paga. Si nos queremos los dos, Isabel, esto nos basta. I. Sí, Leonardo, la fortuna o favorable o contraria nada importa; la virtud maiores dichas prepara... también hai felicidad donde las riquezas faltan. D. P. Vaya muchachos, callad, callad, que ya se me saltan las lágrimas sin querer. Yo soi un pobre Juan Lanas, que no puedo ver a nadie llorar sin que me dé gana de llorar a mí también... Si os queréis de veras, nada os aflixa: aquí estoi yo. Mañana mismo, mañana os casaréis; ¡eh! ¿qué tal, Isabelita? ¿te agrada? El dote está prevenido: mi hacienda es vuestra, y mi casa; tomadlo todo, y queredme mucho, mucho, y Dios os haga mui venturosos. M. ¡Hermano! (Echándose a sus pies.) L. e I. ¡Señor! D. P. ¡Oh! son excusadas ceremonias. Abrazadme muchachos, que ya acabadas vuestras penas, sólo es tiempo de dar al cielo mil gracias, y olvidemos para siempre nuestras disputas, hermana. L. e I. No turbe la dicha presente el antiguo temor y la pena, que ya el cielo sus iras serena, y promete la felicidad. M. y F. Grato amor os dé ventura en unión honesta y pura que no alteren ni moderen ni los celos ni la edad. I. Ni de amor a la antorcha luciente los ardores apague Himeneo. L. Logren ambos el digno trofeo, siempre unidos en dulce amistad. M. y F. Grato amor os dé ventura en unión honesta y pura. Todos Que no alteren ni moderen ni los celos ni la edad. Fin -316Nous ne pouvons nous permettre, dans le cadre de cet article, une étude détaillée des différences que présente ce second acte avec son homologue de la comédie. Laissons ce soin au lecteur minutieux et tenons-nous en, si l'on veut bien, à celles qui nous ont paru fondamentales. L'intrigue repose ici avant tout sur la coïncidence, la péripétie, le coup de théâtre: l'élément déterminant en est Antón, personnage étranger au drame familial, dont l'arrivée déclenche un processus irréversible menant au dénouement; c'est d'abord (sc. 8) la découverte fortuite de la bague et de la chaîne dérobées qui fait soupçonner le faux baron -et permet de placer Mónica-, puis l'imposteur, dans une situation plaisamment embarrassante (sc. 12 et 13); c'est ensuite l'identification -une variété d'«agnición» ou d'«anagnórisis», en somme- du baron, alias Luquillas (sc. 15); c'est elle qui oblige ce dernier à prendre la fuite. En 1803, Antón a disparu: Moratín a renoncé à cette intrigue. Pourquoi cela? A ce qu'il semble, pour deux raisons, étroitement liées l'une à l'autre. La «zarzuela» est avant tout un divertissement; et dans ce cas particulier, on l'a vu, un divertissement destiné à une famille de la haute aristocratie. Obligé de tenir compte des lois de ce genre hybride, à la fois dramatique et lyrique, notre auteur a subordonné le «provecho» au «deleite», la leçon à l'agrément du spectacle; d'autre part, désireux de plaire et de s'imposer -il vient à peine d'être soustrait à la vie monotone de l'atelier, on ne connaît de lui que quelques poèmes- il sait que les Benavente n'ont que faire d'un enseignement qui ne concerne pas leur classe et que dispensera bien plus abondamment la future comédie. C'est pourquoi les caractères, de l'aveu même de Moratín, sont quelque peu négligés au profit de la mise en scène et du spectacle proprement dit: passages chantés, revirements soudains, accentuation de certaines attitudes (Isabel ne songe qu'à mourir, elle essaie d'émouvoir en évoquant son père défunt, etc.), comique de situations; l'arrivée spectaculaire de l'aigrefin flanqué de l'alcalde et des alguazils (sc. 19) est prétexte à un regroupement de tous les personnages qui vont répondre en choeur aux modulations du repentant Luquillas. En un mot, du mouvement et de la variété; le respect d'une morale assez simplette: le méchant est puni, la mère coupable s'humilie, le galant trop longtemps éconduit lui reproche âprement sa sottise. De toute évidence, le genre déplaît à Moratín qui, après avoir achevé Le Viejo y la Niña, n'a consenti à commettre une «zarzuela» que pour -317- être agréable à ses protecteurs: «Es género que no me gusta -écrit-il à Jovellanos -y no sé quién será le valiente que podrá excusar la inverisimilitud continua que trahe consigo. Si le he de decir a Vmd. con franqueza lo que siento,... mi opinión es que le arte de añadir por medio de la música energía y belleza a la declamación sin perjuicio de la verisimilitud todavía no se ha descubierto». Voilà le grand mot lâché: la vraisemblance, règle d'or des néoclassiques; pour prendre un cas extrême, il lui paraît en effet absurde qu'un ténor d'opéra blessé à mort pousse le dernier soupir sous forme de contre-ut. C'est que la transposition musicale des passions constitue en quelque sorte un obstacle à l'illusion de la réalité qu'un bon dialogue peut et même doit, selon Moratín, entretenir, de manière à ce que la fiction détermine chez le spectateur des impressions de même nature que celles qu'il peut éprouver dans la vie courante. En d'autres termes, la leçon qui se dégage scène après scène et s'insinue dans l'esprit du public -car c'est bien de cela qu'il s'agit- tend à s'estomper dans la mesure où, à intervalles réguliers, les personnages redevenus acteurs dénoncent par leur chant le caractère fictif de la situation et en déplacent le centre d'intérêt; cette alternance contribue à affaiblir la relation immédiate qui se fait entre le comportement des protagonistes et les critères habituels de jugement: il est évident par exemple que si Luquillas avait, comme on dit, un bel organe, l'impression défavorable causée par son imposture, devait être largement compensée par le plaisir d'entendre ses vocalises. Cet élément de diversion, nous le retrouvons sous une autre forme dans le duo «galán»-«gracioso» de la «comedia» du siècle d'or, ou bien encore dans la représentation du «sainete» par les acteurs de la pièce principale au cours d'une même séance, deux habitudes contre lesquelles s'élèvent également les réformateurs du théâtre. Pour toutes ces raisons, Moratín ne pouvait être satisfait de son premier essai lyrique; l'initiative ne venait d'ailleurs pas de lui, le genre ne l'attirait aucunement. Le texte de sa «zarzuela» était encore moins fait pour être soumis à l'appréciation du grand public, ce «pueblo» que les «ilustrados» s'efforcent précisément d'éduquer, entendons: d'endoctriner, pour le plus grand profit des classes dirigeantes (n'en déplaise à la «philanthropie» contemporaine qui croit dur comme fer à celle du XVIIIe siècle). Pour devenir «comedia regular», la pièce primitive devait donc subir d'importantes modifications; simple conséquence d'un changement d'optique: le deuxième acte de la comédie va maintenant s'organiser davantage -318- autour d'une idée directrice, d'une thèse que tous les éléments doivent concourir à illustrer, et que la «zarzuela» ne faisait qu'ébaucher. Les passages chantés sont évidemment supprimés. Mais dès le début de l'acte, une nouvelle scène 2 va opposer le baron et Leonardo; cette confrontation, dans laquelle se précisent justement certains traits de caractère des deux personnages, prépare plus logiquement que les révélations inattendues de l'«oficial de sastre» le dénouement; Leonardo apparaît ici comme un jeune homme fougueux, volontaire, et fermement décidé à défendre lui-même son bonheur menacé: seul un duel pourra mettre fin à la rivalité des deux hommes. Au cours d'un dialogue qui n'est pas sans faire songer à une parodie de l'entrevue de Rodrigue et Don Gormaz, le baron, dissimulant alors sa peur, essaie de dissuader son rival sous prétexte de générosité. Et cette lâcheté, qui dénonce plus nettement, sous ses airs de grandeur, la personnalité méprisable de l'imposteur, lui dictera, dès cet instant, sa conduite à venir; d'où la nécessité d'une troisième scène au cours de laquelle il réfléchit et se décide à fuir. En d'autres termes, la marche de l'intrigue est à présent plus étroitement liée au jeu de caractères mieux définis; point n'est besoin d'un Antón pour dénouer le drame. Enfin, les explications données à Mónica par le baron désireux de justifier sa prudente retraite permettent à l'auteur de faire miroiter aux yeux de la villageoise prétentieuse la possibilité de secondes noces avec un grand-moutardier imaginaire; ainsi, un surcroît de ridicule s'attache au personnage de Mónica dont la pièce dénonce la mentalité néfaste, mais en outre la leçon sera d'autant mieux perçue que la principale responsable de ce drame familial recevra dès lors un châtiment proportionné à sa faute: l'écroulement de ses propres rêve -et non plus seulement de ceux qu'elle nourrissait pour sa fille- va donner par contraste tout son relief au bonheur des victimes de son ambition; la «justice» du dénouement est en quelque sorte plus évidente, et c'est pourquoi Moratín n'a plus besoin des récriminations finales de Leonardo à l'adresse de sa future belle-mère. Cette attitude assez cavalière du jeune homme était d'autre part assez peu conforme à la morale familiale prônée par les réformateurs, tant sur la scène que dans les milieux gouvernementaux. Qu'une mère du peuple fût humiliée devant ses enfants, peu importait sans doute à un Benavente; mais on ne pouvait offrir ce spectacle au grand public alors même qu'on s'efforçait par ailleurs de restaurer l'autorité des parents à l'image de l'autorité monarchique, et que l'Immaculée Conception -c'est à dire la Vierge-Mère exempte de toute tache originelle- prêtait son concours à cette offensive idéologique. Aussi ne verrons-nous pas non plus dans la comédie la tía Mónica se jeter aux pieds de D. Pedro, réplique masculine, en quelque sorte, de Madame Jourdain: tout au -319- contraire, après que ce dernier ait tiré la morale de l'histoire, les enfants s'agenouillent devant la mère coupable, on s'embrasse avec effusion, et D. Pedro, s'il sermonne néanmoins sa soeur, le fait avec tendresse. Certes, Mónica a été ridicule, elle a fait rire à ses dépens, mais cette scène finale, dans laquelle la famille perturbée est enfin redevenue une famille exemplaire, redonne à la mère la respectabilité qui lui est due. Il est à peine nécessaire d'ajouter que dans cette pièce, les accusations sont presque exclusivement formulées par D. Pedro, et non plus par Leonardo, ou même Isabel, comme c'était le cas dans la «zarzuela». Quant au baron, la suppression des passages chantés rend inutile son arrestation; d'autre part, un châtiment banal n'avait plus sa place dans une comédie qui vise avant tout à stigmatiser non pas l'attitude de l'imposteur, mais bien celle de la villageoise orgueilleuse: la réapparition et le repentir du baron pouvaient constituer une diversion susceptible d'atténuer la véritable portée du dénouement. Moratín laisse donc fuir notre homme; mais c'est en cela même que se manifeste son habileté: se faisant l'interprète de la pensée de maints réformateurs, il prête à D. Pedro ces propos: «Que se vaya Enhorabuena... ¿Quién sabe? Tal vez le susto que acaba De llevar será su enmienda. Así le infeliz se salva De un presidio, en donde lejos De reprimirse las malas Inclinaciones, se aumentan, Donde los delitos hallan Castigo, no corrección». Enfin -et c'est la différence fondamentale entre les deux pièces- il suffit d'examiner les modifications apportées à certaines scènes de la «zarzuela» au cours de la rédaction de la comédie pour comprendre que la nouvelle destination de cette oeuvre entraînait nécessairement, sinon un changement radical d'optique, du moins un développement fort significatif de certains éléments simplement ébauchés -et pour cause- dans la pièce primitive; autrement dit, cette comparaison donne à Le Barón son véritable sens, sur lequel on a pu se méprendre. Dans la scène 2 de l'acte II de la «zarzuela» (dialogue D. Pedro-baron) D. Pedro s'inquiète surtout du «decoro» de sa nièce; la nouvelle de son éventuel mariage avec un grand sera sanctionnée par le mépris de ses -320- concitoyens: après cela, nul ne voudra plus d'elle comme épouse au village. Dans la comédie, par contre «B.A.E.», sc. 4), le même personnage oppose au «casamiento desigual» le bonheur simple des époux de même condition: le meilleur mari pour Isabel, ce n'est pas l'élégant corrompu de la ville, mais l'honnête jeune homme de son propre milieu campagnard; cette variation sur le thème de l'«alabanza de aldea» n'est pas gratuite, on s'en doute. Sa portée se précise dans la scène 6 qui est une refonte des scènes 5 et 11 de la «zarzuela»; dans cette dernière, D. Pedro critique la soif de promotion sociale de Mónica en termes assez généraux; dans la comédie, il en va tout autrement, et les tirades de D. Pedro, homme de bon sens -c'est-à-dire, comme nous allons voir, porte-parole de l'idéologie officielle- constituent la clé de toute la pièce; en premier lieu, les causes de l'ambition de la tía Mónica sont parfaitement dévoilées: rien d'autre qu'un sentiment d'infériorité sociale vis-à-vis de la classe privilégiée, celle de l'«aristocratie» villageoise; elle envie son aisance matérielle, le titre de «doña» que l'on donne aux «hidalgas», la place de choix qui leur est réservée à l'église; la lutte des classes est donc à l'origine de ce besoin de promotion. A ce mal, il n'y a qu'un remède: démontrer que les privilégiés auxquels on aspire à s'assimiler ne méritent pas un tel honneur: et ce que D. Pedro ne pouvait dire qu'en des termes généraux et voilés dans une pièce destinée aux Benavente, il le fait ici sans retenue: les nobles se marient non par amour, mais par intérêt, que l'épousée soit bossue, camarde ou borgne, le fiancé manchot, vieux ou affligé de goutte; en outre, leur «grandeur» dissimule mal une dépravation inqualifiable: la vie citadine constitue la somme de tous les vices. Certes, les témoignages du temps authentifient pour une bonne part ce tableau peu engageant, mais il va sans dire que l'auteur flatte démagogiquement l'esprit antinobiliaire des roturiers qui envient et critiquent à la fois -les deux attitudes sont complémentaires- les privilégiés. Et c'est précisément par l'amour que nos villageois sont supérieurs à ces derniers: c'est une inclination naturelle et non pas le fruit d'un calcul; ainsi la grave faute de Mónica est-elle de contrarier le choix des deux jeunes gens; mais on voit bien qu'il n'y a là rien de «révolutionnaire»: la liberté (?) de choix n'est reconnue que dans la seule mesure où elle fait obstacle à un projet de «casamiento desigual», où elle constitue un argument opposable a une tentative d'alliance entre deux classes différentes; la meilleure preuve en est le ridicule qui sanctionne la décision prise par Mónica de se remarier: son choix -tout est là- s'est porté sur un individu appartenant, lui, à une classe supérieure. Comment ne pas reconnaître l'écho d'une propagande qui emplit tout le siècle? Face à un besoin de mieux-être, à un souci de dignité qui animent d'une manière de plus en plus inquiétante les couches laborieuses et se -321- traduisent notamment par la désertion des campagnes et l'abandon de nombreux métiers manuels au profit d'activités non productives mais plus rémunératrices ou plus «honorables», les gouvernements successifs s'efforcent d'enrayer un processus grandement préjudiciable à l'économie dont l'intensification repose essentiellement sur l'accroissement de l'armée du travail et sa surexploitation. De la «honra» des métiers à la critique d'une certaine noblesse héréditaire, tout concourt à convaincre le peuple qu'il n'est de dignité, sinon de bonheur, que dans sa propre condition; cette «conformidad» qu'on ne cesse de lui prêcher d'une manière ou d'une autre, D. Pedro l'appelle «moderación», et l'élève -pouvait-il en être autrement?- au rang de vertu. Mais nous aurons l'occasion de revenir sur ce problème fondamental pour la compréhension de l'idéologie «éclairée» dans un prochain travail, un peu plus étoffé que le présent article dont le but n'était que de présenter un texte inédit. Acte II, scène 17. ______________________________________ Facilitado por la Biblioteca Virtual Miguel de Cervantes Súmese como voluntario o donante , para promover el crecimiento y la difusión de la Biblioteca Virtual Universal. Si se advierte algún tipo de error, o desea realizar alguna sugerencia le solicitamos visite el siguiente enlace.