PFLD5-009F CICRP Newsltr v03
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Mortalité secondaire à la cardiopathie ischémique au Canada (1979 à 1998) 35000 Hommes 30000 Femmes Morts 25000 20000 15000 10000 5000 0 1979 1984 1989 1994 1998 Statistique Canada. Biostatistiques, 1999 Le dépistage précoce est vital à la réduction du taux de mortalité liée à la coronaropathie. Le clinicien dispose d’un vaste arsenal d’épreuves invasives et non invasives pour y parvenir. Or, l’application et l’interprétation de ces épreuves diffèrent significativement selon le sexe. Vous trouverez ci- après un résumé de la conférence de consensus de la Société canadienne de cardiologie sur la cardiopathie ischémique chez la femme (2000) et de la déclaration scientifique de l’American Heart Association sur le rôle des épreuves non invasives dans l’évaluation clinique des femmes chez qui on soupçonne la présence de coronaropathie. Le présent article s’intéresse aux épreuves non invasives. Sélection des sujets pour les épreuves diagnostiques (probabilité prédiagnostique) La sélection des patients admissibles aux épreuves diagnostiques est beaucoup plus difficile lorsque la prévalence de la maladie est faible3,4. La prévalence de la coronaropathie est beaucoup moins élevée chez les femmes préménopausées. En effet, chez les moins de 70 ans, la fréquence de la coronaropathie chez la femme correspond à celle qu’on observe chez des hommes âgés de 10 à 15 ans de plus5. La probabilité prédiagnostique se fonde sur les antécédents de douleur thoracique et les facteurs de risque de la femme. Il existe des courbes de prévision du risque adaptées aux femmes symptomatiques et asymptomatiques6,7. D’après les résultats coronarographiques, la présence de douleur thoracique est moins susceptible d’être associée à la coronaropathie chez la femme préménopausée que chez l’homme. Par ailleurs, les femmes présentent plus de caractéristiques atypiques5. Cela dit, chez la femme, la présence de caractéristiques atypiques ne réduit pas la probabilité de coronaropathie dans la même mesure que chez l’homme. Les femmes sont plus susceptibles de ressentir une douleur au dos, à la mâchoire, à l’abdomen et au cou, des nausées, de la dyspnée Actualités de réadaptation cardiaque et de prévention de la maladie cardiovasculaire 7 et des symptômes de congestion. Elles se plaignent moins de diaphorèse8-14, mais sont plus sujettes aux infarctus du myocarde silencieux15. Les femmes peuvent présenter une combinaison de caractéristiques typiques et atypiques, par exemple, une douleur thoracique siégeant ailleurs qu’à la région antérieure, ou des équivalents angineux comme la dyspnée, les palpitations, la fatigue, les nausées ou la présyncope15,16. Chez les femmes, l’angine de poitrine stable chronique s’accompagne plus souvent d’accès au repos ou nocturnes, et est plus susceptible d’être déclenchée par le stress émotionnel10. Les femmes sont en outre plus enclines à l’attribution des symptômes et risquent ainsi de biaiser leurs soins en proposant que leurs symptômes sont plutôt d’origine non cardiaque10,16,18-20. Le tableau symptomatique peut traduire une angine typique, une angine probable (présence de certaines caractéristiques atypiques) ou une douleur thoracique imprécise (présence de caractéristiques atypiques seulement). La prévalence correspondante de coronaropathie significative à la coronarographie est de 60 à 75 %, de 30 à 40 % et de 2 à 7 %, respectivement. La Société canadienne de cardiologie propose de classer la douleur dans l’une de 3 catégories : typique (au moins 3 caractéristiques typiques), atypique (2 caractéristiques typiques) ou non cardiaque (maximum de 1 caractéristique typique; Tableau 1)29. Rappelons toutefois qu’il est important de tenir compte de l’âge de la patiente lorsqu’il s’agit d’évaluer la probabilité prédiagnostique au moyen de cette classification; la prévalence augmente en fonction de l’âge, surtout après 65 ans. Par ailleurs, cette classification visait à l’origine l’angine de poitrine stable chez une population principalement masculine, et non les syndromes coronariens aigus. Certains facteurs de risque classiques revêtent une plus grande signification pour la femme (Tableau 2)29. TABLEAU 1 Classification de la douleur thoracique Caractéristiques typiques Localisation rétrosternale Sensation de constriction, de brûlure ou de lourdeur Déclenchement par l’effort ou l’émotion Soulagement rapide par le repos ou la nitroglycérine Caractéristiques atypiques Localisation à la région thoracique gauche, à l’abdomen, au dos ou au bras; absence de douleur à la région thoracique médiane Vive ou passagère Accès répétés ou douleur persistante Non liée à l’exercice CCS 2000 8 TABLEAU 2 Facteurs de risque de coronaropathie chez la femme Majeurs Postménopause (sans HTS*) / âge supérieur à 65 ans Diabète Maladie vasculaire périphérique Intermédiaires Hypertension Tabagisme Dyslipidémie Mineurs Obésité Sédentarité Antécédents familiaux de coronaropathie Autres facteurs de risque de coronaropathie * Hormonothérapie substitutive CCS 2000 TABLEAU 3 Algorithme pour l’investigation de la douleur thoracique Probabilité élevée de coronaropathie (supérieure à 80 %) Angine de poitrine typique associée à l’un des facteurs suivants : • Postménopause et/ou âge supérieur à 65 ans • Diabète • Angiopathie périphérique • 2 facteurs de risque intermédiaires Angine de poitrine atypique associée à l’un des facteurs suivants : • Postménopause et/ou âge supérieur à 65 ans + au moins 1 facteur de risque intermédiaire • Diabète + au moins 1 facteur de risque mineur ou intermédiaire • 3 facteurs de risque intermédiaires ou 2 facteurs de risque intermédiaires + 1 facteur de risque mineur Probabilité intermédiaire de coronaropathie (20 à 80 %) Angine de poitrine typique + 1 facteur de risque intermédiaire ou au moins 2 facteurs de risque mineurs Angine de poitrine atypique + postménopause et/ou âge supérieur à 65 ans Douleur non ischémique associée à l’un des facteurs suivants : • Postménopause et/ou âge supérieur à 65 ans • Diabète + au moins 2 facteurs de risque mineurs et/ou intermédiaires Faible probabilité de coronaropathie (inférieure à 20 %) Angine de poitrine typique, préménopause et absence de facteurs de risque Angine de poitrine atypique et absence de facteurs de risque majeurs Douleur non ischémique et absence de facteurs de risque majeurs CCS 2000 Actualités de réadaptation cardiaque et de prévention de la maladie cardiovasculaire Par suite de l’évaluation de la probabilité prédiagnostique de coronaropathie, le clinicien doit décider s’il est nécessaire de procéder à une investigation plus poussée pour confirmer le diagnostic, puis stratifier la patiente en fonction du risque qu’elle présente. Électrocardiographie d’effort L’électrocardiographie (ECG) d’effort est la méthode la moins coûteuse et la plus accessible de stratification du risque pour les patients chez qui on soupçonne une coronaropathie. Sa valeur prédictive est toutefois moins élevée chez la femme que chez l’homme. Chez la femme, la sensibilité et la spécificité de cette épreuve sont de 61 % et de 70 %, respectivement, tandis que chez l’homme, elles atteignent 68 % et 77 %21,22. Bon nombre de phénomènes ont été proposés pour expliquer cet écart. Une plus faible prévalence de la maladie peut donner lieu à un plus grand nombre de résultats faussement positifs. Les études de coronarographie ont démontré que la fréquence d’atteinte multivasculaire est plus faible chez la femme4,23-25. Par ailleurs, comparativement aux hommes du même groupe d’âge, les femmes sont plus sensibles au déconditionnement, et donc moins susceptibles d’atteindre la fréquence cardiaque voulue. En outre, elles présentent au départ plus d’anomalies du segment ST-T. Enfin, elles sont généralement plus âgées au moment de la consultation et donc plus souvent atteintes de comorbidités liées au vieillissement, par exemple l’hypertension s’accompagnant d’hypertrophie ventriculaire gauche. Tous ces facteurs peuvent nuire à l’utilité de l’ECG d’effort. L’effet des estrogènes sur le segment ST peut également produire des résultats faussement positifs. La structure chimique de ces hormones, qui s’apparente à celle de la digitale, risque de provoquer une réponse pseudodigitalique faussement positive à l’ECG26. On a démontré que la sensibilité de l’ECG d’effort varie selon la phase du cycle menstruel27 ainsi qu’en présence d’estrogénothérapie28. Enfin, d’autres facteurs, tels que les différences anatomiques de la paroi thoracique et le fait que les seuils reflétant une anomalie à l’ECG d’effort ont été établis chez une majorité d’hommes, influent sur la validité de cette épreuve29. L’échelle DTS (Duke Treadmill Score) est l’outil le plus souvent utilisé pour calculer le risque au moyen de l’électrocardiographie d’effort. Le score obtenu sur cette échelle incorpore la durée de l’effort, la déviation du segment ST et les symptômes angineux. On a évalué sa validité auprès d’une population de 976 femmes et déterminé qu’elle fournit des données diagnostiques et pronostiques exactes chez les femmes chez qui on soupçonne une coronaropathie. D’ailleurs, l’obtention d’un score traduisant un faible risque sur l’échelle DTS a permis d’écarter la présence de coronaropathie plus efficacement chez les femmes que chez les hommes30. D’après l’enseignement classique au moyen du théorème de Bayes, cette épreuve est le plus utile chez les patients qui présentent une probabilité prédiagnostique de coronaropathie intermédiaire7, soit la catégorie où s’inscrivent la majorité des femmes (risque de 20 à 80 %). Chez les femmes dont la probabilité prédiagnostique est faible, le nombre de résultats faussement positifs serait trop élevé31, tandis que chez celles dont la probabilité est élevée, il est préférable de passer directement à la coronarographie. Cela dit, on peut quand même effectuer une ECG d’effort chez ces dernières; si les résultats sont positifs ou non concluants, il convient de procéder à la coronarographie. Si les résultats sont négatifs, il peut être souhaitable de soumettre la patiente à une période d’observation. Selon la SCC, l’ECG d’effort et l’évaluation au moyen de l’échelle DTS doivent être employées en présence d’une probabilité intermédiaire de coronaropathie, chez des femmes tolérantes à l’effort dont le tracé électrocardiographique initial est normal. Les épreuves d’imagerie à l’effort sont recommandées chez les femmes qui sont incapables de fournir l’effort maximum ou qui présentent des résultats anormaux à l’ECG. Si la probabilité de coronaropathie est élevée, il convient de soumettre la patiente à une ECG d’effort ou à une coronarograhie19. Les recommandations conjointes actuelles de l’American College of Cardiology et de l’American Heart Association relativement aux épreuves d’effort appuient une telle démarche chez les femmes symptomatiques. Elles stipulent que les éléments de preuve recueillis à ce jour ne justifient pas de procéder systématiquement à des épreuves de dépistage en l’absence de symptômes32. Au cours d’études antérieures, la portée pronostique de l’épreuve d’effort s’est révélée variable33-35. Le recours à des paramètres tels que les réponses chronotrope et hémodynamique augmente l’exactitude de ses résultats. La présence de symptômes cardiaques n’a pas une valeur prédictive aussi élevée chez la femme que chez l’homme34. On a démontré que les mesures relevées en situation d’effort maximal sont d’une grande valeur pronostique. Au cours d’une des études menées à ce chapitre, l’augmentation d’un équivalent métabolique a réduit la mortalité toutes causes confondues et les manifestations cardiaques de 23 % chez les femmes et de 17 % chez les hommes36. Comme on l’a énoncé précédemment, le DTS fournit des données pronostiques propres au sexe. Les taux de mortalité coronarienne après 5 ans s’inscrivent entre 5 et ≥ 10 %, selon que le score traduise un risque faible ou élevé. L’intervalle de ces taux est plus élevé chez l’homme : il est de ≤ 9 à ≥ 25 %20. D’une façon générale, chez les femmes dont le score DTS traduit un faible risque, la mise en route d’un programme de modification des facteurs de risque, accompagné ou non d’un traitement anti-ischémique, suffit. Chez celles dont le risque est élevé, la coronarographie s’impose. Enfin, en présence d’un risque intermédiaire, il convient de poursuivre l’investigation, ce qui comprend habituellement l’imagerie cardiaque en situation d’effort. Imagerie nucléaire La scintigraphie myocardique au thallium ou au sestamibi marqué au technétium est également très répandue. Non Actualités de réadaptation cardiaque et de prévention de la maladie cardiovasculaire 9 seulement ces épreuves permettent-elles de repérer les patients atteints de coronaropathie, mais elles fournissent de précieuses données pronostiques en définissant plus clairement la gravité de la maladie. Cela dit, elles sont plus coûteuses et moins accessibles que les épreuves d’effort classiques; la sélection des patients est donc importante. L’effort peut être fourni par l’exercice ou simulé au moyen d’agents médicamenteux (dobutamine avec ou sans atropine, ou vasodilatateurs tels que le dipyridamole ou l’adénosine). Le recours à un agent médicamenteux élargit l’éventail des patients admissibles à ces épreuves. Chez les femmes, l’épreuve d’effort au thallium a une sensibilité de 78 % et une spécificité de 64 %13, mais elle présente certaines limites. Elle donne plus de résultats faussement positifs à cause de l’atténuation des tissus mous (tissus mammaires) des régions antérieure et antérolatérale37. Par ailleurs, le volume ventriculaire est inférieur chez la femme, ce qui peut également fausser les résultats38. Le sestamibi marqué au technétium offre une meilleure précision pour ce qui est du dépistage de la coronaropathie chez la femme; il s’agit d’ailleurs du radiotraceur de référence dans cette population. Il permet d’évaluer à la fois l’irrigation myocardique et la fonction ventriculaire gauche39,43. L’atténuation des tissus mammaires n’est pas aussi problématique avec cet agent, dont la technique (MUGA) permet en outre de mesurer la fraction d’éjection au premier passage. Sa spécificité est de l’ordre de 91 %40,42. Le dipyridamole et l’adénosine sont des vasodilatateurs employés lors des épreuves d’imagerie en situation d’effort. Elles sont particulièrement utiles chez les femmes, qui sont souvent incapables de fournir l’effort maximum. Les données portant sur l’emploi du dipyridamole chez la femme sont limitées (n = 43), mais elles semblent être comparables chez les deux sexes41. L’adénosine a été évaluée dans une plus grande cohorte42. Sa sensibilité et sa spécificité se sont chiffrées à 91 % et à 86 %, respectivement pour ce qui est de déceler une coronaropathie significative, à savoir une sténose luminale > 50 % visible à l’angiographie. La sensibilité dépendait moins des manifestations initiales et de la probabilité prédiagnostique42. L’analyse ultérieure de cette cohorte a révélé une sensibilité de 91 % et une spécificité de 7 % pour le dépistage d’une coronaropathie grave ou importante43, résultats comparables à ceux qu’on obtient chez les hommes. Mentionnons également que les femmes sont plus susceptibles de présenter une douleur thoracique, de l’essoufflement et d’autres symptômes secondaires à la vasodilatation. Comme la proportion de tissu adipeux est plus grande chez la femme que chez l’homme, le volume de distribution des vasodilatateurs est moindre, et leur concentration sérique peut être plus élevée par suite du réglage de la dose en fonction du poids44. La ventriculographie isotopique d’effort constitue une autre épreuve d’imagerie nucléaire employée pour déceler la coronaropathie et établir le pronostic. Plus précisément, elle sert à repérer toute altération de la fonction systolique ventriculaire 10 gauche en situation d’effort. Chez la femme, l’exercice peut faire augmenter le débit cardiaque en augmentant le volume télédiastolique sans toutefois faire baisser le volume systolique, contrairement à ce qu’on observe chez l’homme. Elles ne présentent donc pas nécessairement, contrairement aux hommes, une augmentation de la fraction d’éjection45. Par conséquent, la portée d’une variation de la fraction d’éjection en situation d’effort est relativement imprécise chez la femme, ce qui restreint l’utilité de la ventriculographie. La scintigraphie myocardique possède une forte valeur prédictive de la présence d’une coronaropathie et du risque coronarien chez la femme. D’après l’analyse de données colligées obtenues auprès de plus de 7500 femmes, l’obtention d’un résultat normal à cette épreuve a été associée à un taux de manifestations cardiaques annuel inférieur à 1 %46. En revanche, l’obtention de résultats anormaux est associée à un risque accru en proportion du nombre de zones atteintes. Le groupe d’étude END (Economics of Non-invasive Diagnosis) a démontré que le pronostic s’assombrit chez les deux sexes à mesure qu’augmente le nombre de zones ischémiques; le taux de mortalité après 3 ans peut atteindre 15 % lorsque 3 zones vasculaires sont atteintes. La présence d’une ischémie d’effort importante (> 2 zones) s’est révélée moins courante chez la femme que chez l’homme. Le nombre de zones atteintes est le principal facteur prédictif de mortalité chez la femme47. Contrairement aux autres épreuves, qui ne font qu’écarter ou confirmer la présence d’une coronaropathie, la scintigraphie myocardique présente l’avantage de fournir une description de l’évolution du risque d’après le degré d’ischémie. On a récemment démontré l’efficacité des agents médicamenteux simulant l’effort physique pour ce qui est de la stratification du risque chez les femmes diabétiques qu’on sait ou soupçonne être atteintes d’une coronaropathie. Les taux de mortalité coronarienne annuels se sont chiffrés à 1,6 % chez les femmes diabétiques présentant des résultats scintigraphiques normaux (comparativement à 0,8 % chez les non diabétiques), à 4,1 % (vs 2,8 %) en présence d’anomalies modérées et à 8,5 % (vs 6,1 %) lorsque les résultats traduisaient un risque élevé48. Échocardiographie L’échocardiographie d’effort améliore l’exactitude de l’ECG d’effort chez les deux sexes; d’une façon générale, sa sensibilité s’établit à 85 % et sa spécificité, à 77 %49. Cette technique est avantageuse chez les femmes qui présentent au départ des anomalies électrocardiographiques pouvant nuire à l’interprétation de l’épreuve d’effort. La simulation médicamenteuse peut servir d’adjuvant à l’échocardiographie; elle est d’ailleurs très utile chez les femmes incapables de fournir l’effort maximum. Tong et Douglas ont examiné 8 études ayant fait appel à l’échocardiographie médicamenteuse et relevé une sensibilité et une spécificité de 86 %50. D’après Mieres et ses collaborateurs, la validité de l’échocardiographie d’effort (fourni par l’exercice ou d’origine médicamenteuse) est comparable chez les deux sexes2. Actualités de réadaptation cardiaque et de prévention de la maladie cardiovasculaire L’échocardiographie est utile pour déterminer le pronostic des femmes qu’on soupçonne être atteintes de coronaropathie. Sawada et son équipe ont démontré qu’un résultat normal à cette épreuve chez une patiente présentant une bonne tolérance à l’effort est associé à un excellent pronostic. D’une façon générale, les manifestations cardiaques ne sont survenues que chez les patientes incapables d’atteindre 85 % de la fréquence cardiaque prévue ou 6 équivalents métaboliques51. McCully et son équipe ont obtenu des résultats comparables, même lorsque la probabilité prédiagnostique de coronaropathie était intermédiaire ou élevée. Ils ont également démontré que le sexe n’est pas un facteur prédictif indépendant de mortalité, ce qui vient de nouveau étayer que la validité de l’échocardiographie d’effort est comparable chez les deux sexes52. Les anomalies du mouvement des parois cardiaques provoquées par l’effort se sont révélées de meilleurs facteurs prédictifs que les modifications du segment ST ou la tolérance à l’effort. Une étude a démontré que 31 % des femmes chez qui l’échocardiographie évoquait une coronaropathie ont été victimes d’une manifestation cardiaque, comparativement à 4 % de celles qui ne présentaient aucun signe d’ischémie53. Cette observation s’applique également aux femmes soumises à une épreuve d’effort médicamenteuse au dipyridamole ou à la dobutamine. La fréquence des manifestations s’est chiffrée à < 1 % sur 3 ans lorsque les résultats de l’échocardiographie étaient normaux, même en présence d’une dépression du segment ST54. En revanche, au cours d’une étude menée à la clinique Mayo, le risque de manifestations cardiaques quadruplait lorsque l’échocardiographie à la dobutamine donnait des résultats positifs55. Ces résultats indiquent que l’échocardiographie est un outil très puissant pour ce qui est d’évaluer le risque chez les femmes qu’on soupçonne être atteintes d’une coronaropathie, et qu’elle est plus révélatrice que l’ECG clinique et l’ECG d’effort. Elle est particulièrement utile chez les femmes qui sont incapables de fournir l’effort maximum ou qui présentent des anomalies à l’ECG. Tomodensitométrie La tomodensitométrie ultra rapide permet de rechercher la présence d’une coronaropathie sous-jacente en décelant la calcification coronarienne d’origine athéroscléreuse56. Elle est relativement sensible chez les hommes (87 %) ainsi que chez les femmes de plus de 60 ans (97 %). Chez les femmes de moins de 60 ans, toutefois, sa sensibilité est beaucoup moins élevée (50 %), sans doute à cause des effets des estrogènes et du fait que la calcification des plaques athéromateuses est moins importante qu’elle ne l’est chez l’homme57. Selon les recommandations conjointes de l’AHA et l’ACC, il convient de réserver le dépistage tomodensitométrique de la coronaropathie à une sélection de femmes exposées à un risque intermédiaire d’ici l’obtention de données supplémentaires en cette matière. Conclusion Le dépistage de la coronaropathie et la stratification du risque coronarien sont tout aussi essentiels chez la femme que chez l’homme. Le présent résumé nous apprend que le clinicien doit savoir modifier sa démarche chez les patientes de sexe féminin; il doit être sensibilisé au fait que les femmes sont en proie à la sous-orientation, que leur première consultation est souvent motivée par l’angine de poitrine plutôt que par un infarctus aigu du myocarde et qu’elles sont plus susceptibles que les hommes de présenter des caractéristiques atypiques et d’attribuer leurs symptômes à une cause non cardiaque. Il doit également être conscient des différences d’application et d’interprétation des épreuves non invasives chez la femme. L’algorithme suivant a été élaboré conjointement par l’AHA et l’ACC pour faciliter l’évaluation des femmes qui présentent des symptômes évoquant une coronaropathie2,32,37. Femmes présentant des symptômes de douleur thoracique atypiques ou typiques exposées à un risque intermédiaire ou élevé Résultats normaux à l’ECG au repos et tolérance normale à l’effort Diabète, résultats anormaux à l’ECG au repos ou faible tolérance à l’effort Épreuve d’effort sur tapis roulant (ETP) Imagerie cardiaque en situation d’effort Faible risque selon l’ETP Risque intermédiaire selon l’ETP Modification des facteurs de risque et/ou traitement anti-ischémique Tolérance à l’effort ou absence de symptômes en cours d’effort de faible intensité Intolérance à l’effort (troubles orthopédiques, AVC, bloc de branche gauche, etc.) Effort physique Simulation médicamenteuse Résultats normaux ou anomalies minimes; fonction VG normale Anomalies modérées ou graves ou réduction de la FE Cathétérisme cardiaque Actualités de réadaptation cardiaque et de prévention de la maladie cardiovasculaire 11 Références 1. 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Obstacles à l’orientation vers la réadaptation cardiaque Sherry L. Grace, Ph. D., Université York et University Health Network L es données publiées soutiennent fortement que les femmes sont moins susceptibles d’être orientées vers un programme de réadaptation cardiaque (RC) que les hommes. Au cours de notre étude, réalisée auprès de 900 patients cardiaques provenant de 10 hôpitaux de l’Ontario, 28 % des sujets ont été dirigés vers un tel programme, mais les hommes étaient près de 2 fois plus susceptibles de l’être que les femmes1. Les obstacles à l’orientation des femmes vers la RC peuvent se dresser à plusieurs niveaux : ils peuvent relever du patient, de l’équipe soignante ou du système de santé. En 2002, Benz Scott et ses collaborateurs ont présenté un résumé intéressant sur les obstacles relevant du patient2. Ils soulignent entre autres l’existence de preuves selon lesquelles les femmes sont moins susceptibles que les hommes d’être orientées vers la RC, car elles sont généralement plus âgées au moment de leur première manifestation cardiaque et qu’elles reçoivent moins d’appui de la part de leur conjoint. « Les obstacles à l’orientation des femmes vers la RC peuvent se dresser à plusieurs niveaux : ils peuvent relever du patient, de l’équipe soignante ou du système de santé. » 12 Le présent article vise à résumer les travaux qu’a effectués notre équipe sur les obstacles relevant du personnel soignant et du système de santé, lesquels demeurent à ce jour grandement inexplorés. Bien que nos recherches ne se concentrent pas expressément sur les facteurs faisant obstacle à l’orientation des femmes vers la RC, elles portent pour la plupart sur la réduction de la disparité d’accès à la RC observée entre les sexes. Attitude et perception du médecin De nombreux facteurs contribuent à la sous-utilisation de la RC, y compris les tendances des médecins en matière d’orientation vers de tels programmes. Nous avons sondé un échantillon aléatoire de 179 cardiologues, chirurgiens cardiaques et médecins de famille ontariens au sujet des facteurs influant sur l’orientation vers la RC3. Dans l’ensemble, ces praticiens ont manifesté une attitude positive relativement à l’orientation de leurs patients vers la RC. La plupart du temps, ils dirigent les patients vers un tel programme lorsqu’ils ont l’impression que le sujet est suffisamment motivé, et en raison du caractère global de la RC, qui traite plusieurs facteurs de Actualités de réadaptation cardiaque et de prévention de la maladie cardiovasculaire