Faouzi Chaâbi explique sa vision de la gouvernance locale

Transcription

Faouzi Chaâbi explique sa vision de la gouvernance locale
Les Petits Déjeuners de l’Excellence
Faouzi Chaâbi explique sa vision de la gouvernance
locale
Pour Faouzi Chaâbi, président du Conseil de l’arrondissement de Souissi, à Rabat, c’est à
partir de la commune que l’on construit la démocratie. Le député du PPS revient sur les
contraintes et les solutions pour une bonne gouvernance locale.
Devant un large parterre de parlementaires, d’élus locaux, d’acteurs sociaux et d’opérateurs
économiques, Faouzi Chaâbi, président du Conseil de l’arrondissement de Souissi, à Rabat, s’est penché
sur « L’état de la gouvernance locale à la veille de la réforme de la Charte communale», thème de son
intervention, hier mercredi 11 juin à Casablanca, lors de la 9ème édition des «Petits Déjeuners de
l’Excellence» organisés par le quotidien Aujourd’hui Le Maroc. Le député du Parti du progrès et du
socialisme (PPS) a commencé par dresser, sans détours, l’état actuel de la gouvernance locale au Maroc.
«Problème de légitimité de l’exécutif, des majorités formées sur la base d’intérêts personnels, une
absence de vision et de plan à moyen et long termes, des politiques dépensières, une absence de débats
de haut niveau, corruption, clientélisme, bureaucratie, laxisme total quant aux doléances des citoyens,
absence de contrôle systématique et de communication avec les citoyens… C’est ce qui caractérise,
malheureusement, notre gouvernance locale», lance-t-il. En parlant avec franchise des problèmes qui
rongent la gestion des affaires locales au Maroc, M. Chaâbi propose le lancement de trois chantiers. Il
s’agit de la légitimation de la représentativité, du choix réel entre les différents programmes ainsi que le
contrôle et l’évaluation du bilan de la mandature. Ainsi, le président du Conseil de l’arrondissement de
Souissi propose l’adoption d’une démarche systématique, à travers une refonte des textes législatifs et
réglementaires régissant la gouvernance locale. Le fils du célèbre homme d’affaires et député Miloud
Chaâbi a mis l’accent sur les limites du pouvoir des présidents des communes. «C’est quoi un président
de commune qui n’a pas les moyens d’exécuter ses décisions ?», s’interroge-t-il. Pour lui, pauvreté,
chômage, corruption ignorance, balkanisation politique, absence de démocratie au sein des partis
politiques, désintéressement des intellectuels et l’absence de civisme sont les principaux handicaps du
processus démocratique. Et malgré ces «contraintes», le député PPS croit dur comme fer que «la
démocratie locale n’est pas un rêve et qu’il suffit d’une véritable volonté politique». Au Maroc, la moitié
des électeurs vote par affection. «Argent, promesses, tribalisme… le vote affectif caractérise les élections
marocaines. Malheureusement, certains citoyens ne savent même pas le pourquoi de la chose et l’intérêt
de leur vote», note-t-il en démontrant que «c’est à partir de la commune que l’on construit la
démocratie». Pour M. Chaâbi, la solution est dans la croissance économique, le développement humain
(lutte contre l’analphabétisme, la pauvreté et le chômage), une convergence vers une bipolarisation
politique, une indépendance de la justice ainsi qu’un renforcement du civisme. La bipolarisation politique
est l’un des axes qui a suscité le débat. «L’Etat doit pousser vers la constitution d’une gauche et d’une
droite. Dans ce cas, ce sont les islamistes qui doivent clarifier leur position et choisir leur camp. Le PJD
pose problème parce qu’il ne s’exprime pas et ne précise pas dans quel camp il se trouve par rapport au
paysage politique», précise M. Chaâbi. Le mode du scrutin a été aussi soulevé par les participants. Suite
à une question de Jamal Berraoui, journaliste et observateur de la vie politique nationale, le député PPS
a dit que l’application du mode de scrutin à deux tours suscite les craintes de l’Etat à cause de la
longueur et le coût du processus ainsi que le risque de voir le taux d’absentéisme augmenter lors du
deuxième tour. «Ce qui est magnifique dans la politique, c’est qu’on peut copier un modèle et puis
l’adapter. Et c’est le modèle français que l’on connaît le mieux. Il faut qu’on arrive à élire le bureau du
conseil communal directement par le suffrage universel direct», ajoute-t-il.
Suite à une question posée par Omar Dahbi, rédacteur en chef d’ALM, à propos des indemnités des
présidents de communes et le principe du volontariat adopté par la charte communale, M. Chaâbi a
indiqué que, pour lui, l’Etat devrait revoir le système en vigueur estimant qu’il est anormal de demander
à quelqu’un de dédier la majorité de son temps aux affaires publiques sans contrepartie. «Un président
de commune perçoit une indemnité mensuelle qui est, dans le cas de la majorité des communes, de
l’ordre de 3000 DH alors qu’il consacre le plus clair de son temps à régler les problèmes d’autrui et gérer
des milliards de centimes. C’est une injustice. Il suffit de comparer son cas à la mission du parlementaire
qui, malgré le fait qu’il consacre très peu de temps à sa mission perçoit 36.000 DH. Il faut des
indemnités conséquentes pour les présidents de communes», indique-t-il.
Intervenant lors de ce débat, Jamaâ Mouatassim, député PJD à la Chambre des conseillers, a appelé à ce
que «l’Etat se retire de la gestion de la politique locale et renforce le rôle des présidents de communes».
Dans le même sens des idées, M. Chaâbi a souhaité, lui aussi, que «l’Etat lève sa main de la chose
politique», mais il a précisé que cela ne va pas permettre au PJD de rafler la mise dans les communales.
«Cela va prendre 10 à 15 ans, mais, après, les choses vont se stabiliser. Certains pensent que si l’Etat
lève sa main, le PJD va ratisser large. C’est faux ! Les députés PJD sont normaux, il y a du bien et du
mauvais chez eux. D’ailleurs, ils gèrent deux villes et ont commis des erreurs comme les autres !»,
conclut-il.