Sténose nasopharyngée récidivante chez un chat traitée par

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Sténose nasopharyngée récidivante chez un chat traitée par
Dierenartsenwereld
Fabien Gérard, DMV ; Stéphanie Noël, DMV, PhD ;
Frédéric Billen, DMV, PhD, Dipl ECVIM ; Annick Hamaide, DMV, PhD, Dipl ECVS*
Sténose nasopharyngée
récidivante chez un chat traitée
par avancement d’un lambeau
muqueux nasopharyngé
Les sténoses nasopharyngées font partie du vaste diagnostic différentiel en cas de maladie
des voies respiratoires supérieures chez le chat (Tableau 1). En représentant environ 6% des
causes de rhinite chronique, elles se situent néanmoins loin derrière les rhinites infectieuses
et les tumeurs représentant chacune approximativement 40% des cas [1]. Les signes cliniques
comportent généralement du cornage et du jetage nasal chronique. Lorsque la sténose est
complète, une respiration buccale peut être observée. Dans certains cas, l’absence d’olfaction
entraîne de la dysorexie.
Cas clinique
Anamnèse
Kalinka, chatte Bleu Russe stérilisée
de 8 ans pesant 4,10 kg, est présentée
à la Clinique Vétérinaire Universitaire
(CVU) de Liège pour jetage et cornage
inspiratoire important associé à une
dysorexie et une respiration buccale.
Un mois avant sa présentation à
la CVU, Kalinka avait présenté une
toux émétisante importante suivie
rapidement par l’apparition d’un jetage
bilatéral séreux puis muco-purulent
et d’un cornage. Un traitement à base
d’antibiotiques (amoxicilline) et d’antiinflammatoires non stéroïdiens avait
permis une amélioration transitoire des
symptômes, ces derniers réapparaissant
dès le lendemain de l’arrêt des
médicaments. Un bilan sanguin
et des radiographies thoraciques
avaient alors montré une leucocytose
neutrophilique modérée (leucocytes :
27630/µL, neutrophiles : 18610/µL) et
un pattern bronchique important. Une
injection de céfovécine (Convenia®)
et de méthylprednisolone (Moderin®)
avait été réalisée sans amélioration des
symptômes. Kalinka n’est pas vaccinée,
vit avec deux autres chats ne présentant
aucun symptôme et est FIV et FeLV
négative.
Examen clinique
La chatte est alerte et présente un
cornage inspiratoire important, une
dyspnée mixte (temps inspiratoire
prédominant) avec une fréquence
respiratoire à 60 rpm. L’auscultation
respiratoire est parasitée par les bruits
du cornage des voies respiratoires
supérieures. La perméabilité nasale est
quasi inexistante bilatéralement. Le réflexe
laryngo-trachéal est négatif et le reste de
l’examen général est dans les normes.
Causes
Infectieuse :
- Virale :
- Bactérienne :
- Fongique :
Calicivirus, Herpesvirus.
Mycoplasma spp. , Pasteurella spp. , Bordetella spp., etc..
Aspergillus spp., Cryptococcus neoformans.
Inflammatoire :
Rhinite chronique (souvent secondaire à une infection virale)
Rhinite allergique
Polype nasopharyngé
Néoplasique :
Lymphome, adénocarcinome.
Corps étrangers : Epillets, herbe, etc.
Anomalie anatomique :
- Congénitale :
- Acquise :
Fente palatine, atrésie des choanes, syndrome brachycéphale.
Sténose nasopharyngée, fistule oronasale.
Tableau 1 : Diagnostic différentiel des maladies des voies respiratoires supérieures
chez le chat [8,9].
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Examens complémentaires
L’arbre respiratoire inférieur ne pouvant
être ausculté correctement et afin
de contrôler le pattern bronchique
initialement observé par le vétérinaire
référant, des radiographies du thorax
sont répétées. Celles-ci révèlent des
signes radiologiques compatibles
avec une pathologie bronchique
asthmatiforme féline : un pattern
bronchique généralisé avec une
augmentation du volume thoracique et
une atélectasie du lobe moyen droit.
Un bilan sanguin hématologique et
biochimique pré-anesthésique (urée,
créatinine et protéines totales) ne
montre aucune anomalie.
Afin d’investiguer les voies respiratoires
supérieures et inférieures, l’animal
est anesthésié et une endoscopie est
réalisée à l’aide d’un bronchoscope
pédiatrique flexible (Fujinon®). La
bronchoscopie est réalisée en premier
lieu afin de ne pas contaminer
l’endoscope avec les sécrétions nasales.
Les bronches sont macroscopiquement
normales mais l’analyse cytologique
et bactériologique du lavage
broncho-alvéolaire met en évidence
une inflammation majoritairement
neutrophilique (70%) stérile compatible
avec une bronchite chronique de type
asthmatiforme (suggérée par les images
radiologiques). Le chat étant nonsymptomatique de sa bronchite, il est
décidé de ne pas le traiter pour l’instant.
La rhinoscopie rétrograde (à 180°) met
en évidence une membrane obstruant
presque complètement le nasopharynx
et laissant un petit orifice d’environ 1
mm de diamètre comme seul passage
vers les choanes (Figures 1 et 2). Une
dilatation de la sténose à l’aide d’un
ballon (Figure 3) est effectuée jusqu’à
l’obtention d’une ouverture d’une
douzaine de millimètres pour une
pression insufflée dans le ballon de
12 atmosphères (CRE WIREGUIDED,
Boston Scientific, Cork, Irlande). Kalinka
rentre à la maison et doit recevoir
des gouttes de thiamphénicol et
acétylcystéine (Fluimicil Antibiotic ®)
dans chaque narine pendant 10 jours.
Kalinka est représentée environ 2
semaines plus tard pour cornage, jetage
mucopurulent gauche et dysorexie.
L’endoscopie rétrograde des voies
respiratoires supérieures montre
une récidive complète de la sténose
nasopharyngée (Figure 4).
Traitement chirurgical
Face à l’échec de la dilatation par ballon
et la dégradation de l’état général de
Kalinka, une prise en charge chirurgicale
est décidée. Un traitement à base de
prednisolone à 1 mg/kg SID per os et
par goutte nasale (Maxitrol®) est mis en
place 10 jours avant l’intervention afin
de limiter l’œdème postopératoire.
Figure 1 : Vue endoscopique
rétrograde du nasopharynx.
Cette vue générale distale
montre un rétrécissement
du diamètre du
nasopharynx à 1-2 cm du
bord libre du voile du palais
apparaissant de couleur
blanc nacré (image en
rotation).
Figure 2 : Vue endoscopique
rétrograde du nasopharynx.
Cette vue plus proximale
montre la présence d’une
sténose nasopharyngée
sévère. On observe une
ouverture de la taille d’une
tête d’épingle vers la partie
proximale du nasopharynx.
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L’anesthésie consiste en une
prémédication à l’aide de méthadone
(Confortan®) à 0.15 mg/kg et de
midazolam (Dormicum®) à 0.2 mg/
kg, suivie d’une induction à l’aide
d’alfaxolone (Alfaxan®) à 2 mg/kg puis
une maintenance sous isoflurane.
La suite de l’analgésie opératoire est
assurée par une infusion constante de
fentanyl (Fentanyl-Janssen®). Kalinka
est placée en décubitus dorsal et une
antibioprophylaxie peropératoire avec
de la céphazoline à 20 mg/kg (Cefazolin
Sandoz ®) est administrée par voie
intraveineuse. Deux points d’appuis sont
placés de chaque coté de l’extrémité
Figure 3 : Vue endoscopique
rétrograde du nasopharynx
après dilatation par ballon
de la sténose. La membrane
a été déchirée ce qui permet
de récupérer un passage
normal vers les choanes
Figure 4 : Vue endoscopique
rétrograde du nasopharynx.
Reformation de la
membrane obstruant
presque complètement le
passage vers les choanes.
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distale du voile du palais pour permettre
sa rétraction de manière atraumatique. Il
est incisé en son milieu depuis son bord
libre et jusqu’à sa jonction avec le palais
dur. Deux nouveaux points d’appui sont
placés sur chaque lèvre de l’incision du
voile du palais permettant une rétraction
optimale et laissant apparaître les tissus
cicatriciels responsables de la sténose
(Figure 5). Ces tissus cicatriciels sont
alors excisés à l’aide de ciseaux de
Metzenbaum (Figure 6).
Figure 5 : Vue intraopératoire. Le voile
du palais est incisé dans
sa partie médiane (flèches
bleues) et des points d’appui
sont placés au niveau de
l’incision afin de pouvoir
rétracter les bords de la
plaie. Visualisation d’une
bande de tissu cicatriciel
formant la sténose (flèche
blanche).
Figure 6 : Le tissu cicatriciel formant
la sténose est excisé (flèche
blanche)
Figure 7 : Avancement du lambeau
muqueux nasopharyngé sur
les tissus cicatriciels de la
sténose.
Légende :
1 : Points d’appui sur le voile du palais
incisé dans sa partie médiane
2 : Plaie créée par l’excision du tissu
cicatriciel sténotique
3 : Avancement du lambeau muqueux
créé au plafond du nasopharynx
Un lambeau en avancement,
comprenant la muqueuse et la sousmuqueuse du plafond du nasopharynx,
est créé, avancé cranialement puis
suturé à la plaie résultant de la
dissection des tissus cicatriciels à l’aide
de points simples en deux couches
Figure 8 : Le lambeau muqueux en
avancement est suturé au
niveau de la plaie formée par
la dissection de la sténose
(flèche blanche).
Figure 9 : Le voile du palais a été
suturé en deux couches.
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à l’aide d’un fil de polydioxanone 5/0
(PDS ®) (Figure 7 et 8). Le voile du palais
est suturé de manière classique en deux
plans (Figure 9). Lors de son extubation,
un spasme et œdème laryngé nous
obligea à ré-intuber Kalinka, à lui
administrer une dose de succinate
de méthyl-prednisolone 30 mg/kg
(Solumédrol®) par voie intraveineuse
et à la laisser pendant son réveil sous
cage à oxygène. Kalinka est rendue
le lendemain à ses propriétaires, avec
de la céphalexine 20 mg/kg (Rilexine ®)
per os pendant deux semaines, de la
prednisolone 0.5 mg/kg (Prednisolone
Kela®) per os deux fois par jour à
dose dégressive pendant 2 semaines,
des gouttes à base de prednisolone
(Maxitrol®) et thiamphénicol plus
acétylcystéine (Fluimucil Antibiotic ®)
dans chaque narine deux fois par jour
pendant 2 semaines. Lors de sa sortie,
un léger cornage inspiratoire résiduel
est encore présent.
Une endoscopie de contrôle est réalisée
deux semaines après l’intervention
et montre la persistance d’une légère
sténose nasopharyngée et une parfaite
cicatrisation du lambeau muqueux.
L’état général de Kalinka s’est
amélioré, ses épisodes de cornage
et de respiration bouche ouverte ont
totalement disparus (Figure 10). Lors
d’un contrôle téléphonique, nous
apprenons que Kalinka est décédée un
an après son intervention chirurgicale
pour un motif sans relation avec la
Figure 10 : Vue endoscopique
rétrograde du nasopharynx à
2 semaines postopératoires.
Persistance d’un léger
rétrécissement du diamètre
nasopharyngien en regard
du site chirurgical. Bonne
cicatrisation du lambeau
muqueux et visualisation
d’un fil de suture (flèche).
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sphère respiratoire, et que durant cette
période, aucun épisode de cornage
ou de dyspnée inspiratoire n’avait été
observé par sa propriétaire.
Discussion
L’étiologie de la sténose nasopharyngée
n’est pas claire mais il est fort probable
que la formation de tissu cicatriciel
secondaire à une inflammation
nasopharyngée sévère en soit la
cause : ulcères (calicivirus - coryza),
corps étranger, remontée de suc
gastrique (vomissement) font partie des
étiologies suspectées. Chez l’homme,
les cas de sténose nasopharyngée
sont extrêmement rares et sont
secondaires à une tonsillectomie ou à
diverses inflammations dont les brûlures
chimiques [2].
Le diagnostic repose essentiellement
sur un examen endoscopique rétrograde
des voies respiratoires supérieures. La
radiographie ou l’imagerie en coupe
peuvent être utiles pour comprendre
la cause sous-jacente de la sténose
et permettent occasionnellement de
visualiser la membrane sténotique [3-4].
Le traitement de première intention
consiste en une dilatation par ballon
par endoscopie, utilisant des ballons
de dilatation de 10 à 15 mm de
diamètre [2-5]. Des sténoses très
caudales peuvent parfois être traitées
directement par dilacération du tissu
à l’aide de pince type Mosquito [1].
Une seule procédure de dilatation par
ballon permet dans la majeure partie
des cas d’obtenir un résultat clinique
satisfaisant. Une reformation partielle
de la sténose est fréquente mais est
généralement compatible avec une
qualité de vie convenable (quelques
bruits de stertor sont entendus par les
propriétaires de manière épisodique).
Dans certains cas, plusieurs séances
de dilatation peuvent s’avérer
nécessaires pour obtenir une ouverture
raisonnable. Plus rarement, comme
dans le cas de Kalinka, la sténose
se reforme à l’identique et d’autres
mesures interventionnelles, telles que
détaillées ci-dessous, doivent être
mises en place. En médecine humaine,
une injection in situ de corticostéroïde
dépôt (acétate de triamcinolone)
via une aiguille endoscopique est
recommandée pour ralentir le
processus de cicatrisation. Chez le
chat, ceci est difficilement réalisable à
cause de l’étroitesse du nasopharynx
et une corticothérapie orale, à des
doses anti-inflammatoires, est dès
lors généralement recommandée.
L’utilisation in situ de mitomycin C,
une anthracycline antimicrobienne
inhibant la prolifération fibroblastique,
est également décrite pour éviter la
formation de tissu cicatriciel mais, une
fois de plus, aucune étude n’a encore
été réalisée chez le chat.
La pose d’un stent métallique est une
option interventionnelle pour prévenir
la reformation de la sténose. Celleci nécessite la réalisation préalable
d’une endoscopie et d’un scanner afin
de déterminer la conformation et la
longueur de la sténose afin de calculer
au plus juste les dimensions du stent.
Le stent est placé au niveau de la
sténose sous contrôle endoscopique
et/ou fluoroscopique et ensuite dilaté
grâce à un ballon prévu à cet effet
[4]. Plusieurs complications ont été
rapportées rendant cette technique
imparfaite: migration du stent, formation
de granulome inflammatoire sur le stent,
absence de ré-épithélialisation complète
et incorporation de poils et de nourriture
dans les mailles du stent. La pose d’un
stent temporaire en silicone créé à
partir d’un drain thoracique vient d’être
décrite [6]. Celui-ci est fixé au palais
mou avec un point simple et enlevé
après 3 à 4 semaines. Les résultats
semblent prometteurs, seules des
rhinites temporaires, dues au passage
d’aliments par le stent, ont été décrites
occasionnellement.
Enfin, l’autre option est la procédure
chirurgicale consistant en un
avancement sur le site de la sténose
d’un lambeau muqueux élevé depuis
le nasopharynx, tel que réalisé chez
Kalinka. Peu de données à long terme
à propos des complications et du
pronostic sont disponibles sur cette
technique. Dans un cas de sténose
nasopharyngée décrit précédemment
et traité grâce à ce lambeau muqueux
en avancement, une endoscopie
de contrôle a montré une guérison
complète de la sténose 28 mois après
l’intervention [7].
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Conclusion
Le traitement d’une sténose
nasopharyngée reste un défi clinique
pour le praticien. Différentes options
thérapeutiques sont possibles et
restent à l’appréciation du clinicien. Une
procédure de dilatation par endoscopie
reste un bon choix de première intention.
Dans notre cas, vu l’absence totale
d’évolution après la première séance de
dilatation, la pose d’un stent métallique et
l’option chirurgicale étaient deux options
thérapeutiques possibles. Alors que
l’état général de Kalinka déclinait, l’option
chirurgicale a été privilégiée. L’avantage
majeur de notre procédure chirurgicale
a été de pouvoir exciser totalement les
tissus cicatriciels responsables de la
récidive de la sténose. L’administration
postopératoire de corticostéroïdes, en
local et en systémique afin d’éviter la
formation d’une nouvelle membrane,
a peut-être participé à la réussite du
traitement chirurgical.
Références :
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Clinique Vétérinaire Universitaire
Faculté de Médecine Vétérinaire,
ULg
Quartier Vallée, 2
Avenue de Cureghem, 3 B44
Sart Tilman
4000 Liège
04/3664200
www.cvu.ulg.ac.be
Contact : [email protected]
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