La Bundeswehr en opération

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La Bundeswehr en opération
La Bundeswehr en opération
Publication éditée à l’occasion du 15e anniversaire du premier mandat
parlementaire autorisant des engagements armés de la Bundeswehr à l’étranger
La Bundeswehr en opération
Publication éditée à l’occasion du 15e anniversaire du premier mandat
parlementaire autorisant des engagements armés de la Bundeswehr à l’étranger
I N T R O D U C T I O N
Trois repères historiques : 1949, 1989 et 1994
Pour la République fédérale d’Allemagne l’année 2009 est
une année de commémoration bien particulière, d’une grande
importance également pour l’histoire de la Bundeswehr. La
consultation du « calendrier » des jours de commémoration
doit être autre chose qu’une formalité. Les repères historiques
peuvent aider à faire le point, à mieux situer et comprendre les
défis d’aujourd’hui et de demain.
Il y a 60 ans, la Loi fondamentale était adoptée, et la Républi­
que fédérale créée. Choisir la voie conduisant à un Etat de droit
libre et démocratique était la condition préalable à l’intégration
de l’Allemagne dans la communauté des Etats occidentaux.
Sur le chemin du recouvrement progressif de sa souveraineté
nationale, la jeune République fédérale devint en 1955 membre
de l’Alliance atlantique et entreprit peu après la constitution de
forces armées allemandes. La Bundeswehr a depuis une place
particulière dans notre histoire en tant que première et unique
armée de conscription d’une démocratie contrôlée par le pouvoir
parlementaire. En considération des expériences faites au cours
de l’histoire, le parlement a dès le départ assumé une responsa­
bilité particulière vis­à­vis de la Bundeswehr, qu’il s’agisse
de législation, de l’institution de la fonction de commissaire
parlementaire aux forces armées au profit du parlement
(Bundestag) ou de budgétisation.
2
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
La Bundeswehr est associée pour une grande partie à
Il y a 15 ans, le 22 juillet 1994, le Bundestag fut consulté
l’intégration de l’Allemagne dans la communauté des Etats
pour la première fois au sujet d’un engagement armé de
démocratiques et elle apporte une contribution décisive à
la Bundeswehr. Ce premier mandat parlementaire d’un enga­
la préservation de la paix et de la liberté de notre pays ainsi
gement armé (embargo des NU à l’encontre de la République
que de ses alliés et partenaires.
fédérale de Yougoslavie et surveillance de l’application de
l’interdiction de survol de la Bosnie­Herzégovine) inaugura une
En 2009, nous commémorons également le début de la
ère nouvelle pour la Bundeswehr en tant qu’une « armée en
révolution pacifique en RDA il y a 20 ans, la chute du mur
opération ». La réalité opérationnelle conditionne aujourd’hui
le 9 novembre 1989 et la réunification de l’Allemagne le
la structure et le quotidien de notre Bundeswehr. Au cours des
3 octobre 1990. Les conséquences du processus de réunifi­
15 dernières années, plus de 260 000 militaires, femmes et
cation, en particulier l’intégration du personnel et du matériel
hommes ont été en opération, c’est plus que l’effectif de paix
de l’armée nationale populaire (NVA) dissoute, ont alors
actuel de la Bundeswehr.
confronté la Bundeswehr aux défis les plus exigeants de son
histoire. L’intégration d’anciens personnels de la NVA et l’idée
Les trois repères – 1949, 1989 et 1994 – témoignent
d’une « armée de l’unité » ont joué un rôle exemplaire sur le
concrètement de la contribution apportée par la Bundeswehr
parcours de la réalisation de l’unité interne de l’Allemagne.
à la liberté et à la sécurité de notre pays depuis plus de 54 ans
et du fait que le lien entre les forces armées et l’ordre constitu­
La fin de la guerre froide fut également synonyme d’un
tionnel constitue le fondement de toute décision politique :
bouleversement fondamental de l’environnement de politique
pour la protection de l'Allemagne ainsi que de ses citoyennes
de sécurité, qui a profondément transformé la Bundeswehr
et citoyens.
en termes de missions et structurellement. Les défis à relever
en termes de politique de sécurité sont devenus plus complexes
et moins lisibles. Les risques et les menaces pour l’Allemagne
ne se sont pas amoindris au cours des dernières années, mais
ont enregistré une évolution et un glissement qualitatifs.
INTRODUCTION
3
S O M M A I R E
Introduction
2
1
La Bundeswehr jusqu’en 1989/90
6
1.1
Sous le signe de la « guerre froide » :
8
la création de la Bundeswehr et la période ayant précédé celle­ci
1.2
Sous le signe des « représailles massives » :
12
mise sur pied et montée en puissance de la Bundeswehr
1.3
Sous le signe de la « riposte graduée » :
17
la Bundeswehr entre politique extérieure de détente
et mutation de la société
2
La Bundeswehr dans un processus d’évolution :
22
de la défense du territoire national à une « armée en opération »
2.1
La réunification politique
24
2.2
La Bundeswehr « armée de l’unité »
26
2.3
Adaptation à une nouvelle donne sécuritaire
28
3
La Bundeswehr et le parlement
30
3.1
Le parlement et la création de la Bundeswehr
32
3.2
Les opérations extérieures de la Bundeswehr sous mandat parlementaire
38
4
La politique de sécurité et de défense de la République
40
fédérale d’Allemagne
4
4.1
Défis sécuritaires du XXIe siècle
42
4.2
Les fondements de la politique de sécurité allemande
44
4.3
La sécurité interconnectée
46
4.4
Le rôle de la Bundeswehr
48
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
5
Les opérations de la Bundeswehr aujourd’hui terminées
50
5.1
Irak
52
5.2
Cambodge
52
5.3
Somalie
53
5.4
Rwanda
53
5.5
Koweït
54
5.6
Macédoine
54
5.7
Indonésie
55
5.8
Ethiopie/Erythrée
55
5.9
République démocratique du Congo
56
5.10
Géorgie
58
6
Les missions actuelles de la Bundeswehr
60
6.1
Bosnie­Herzégovine
62
6.2
Kosovo
68
6.3
La lutte contre le terrorisme international
74
6.4
Afghanistan
78
6.5
République démocratique du Congo
88
6.6
Liban
90
6.7
La Bundeswehr dans la lutte contre la piraterie
94
7
Missions d’observation actuelles de la Bundeswehr
98
7.1
Soudan : UNMIS
100
7.2
Soudan : AMIS/UNAMID
102
8
Prévention nationale des crises/groupes de soutien en cas de crise
104
9
Distinctions pour déploiements à l’étranger
108
9.1
Médaille de la Bundeswehr pour militaires ayant servi en opération extérieure
110
9.2
Croix d’honneur de la Bundeswehr pour actes de bravoure
112
10
Le Mémorial de la Bundeswehr
114
Mentions légales
116
SOMMAIRE
5
Le chancelier fédéral Konrad Adenauer
(au centre) et le ministre fédéral de la
Défense Theodor Blank (à gauche)
rendent visite aux troupes à Andernach,
20 janvier 1956 (IMZ Bw/Munkler)
LA BUNDESWEHR
JUSQU’EN 1989/90
1
Le chancelier fédéral Konrad Adenauer
(au centre) et le ministre fédéral de la
Défense Theodor Blank (à gauche)
rendent visite aux troupes à Andernach,
20 janvier 1956 (IMZ Bw/Munkler)
1.1
Sous le signe de la « guerre froide » :
la création de la Bundeswehr et la période
ayant précédé celle­ci
1.2
Sous le signe des « représailles massives » :
mise sur pied et montée en puissance de
la Bundeswehr
1.3
Sous le signe de la « riposte graduée » :
la Bundeswehr entre politique extérieure
de détente et mutation de la société
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
7
1
1.1
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
Sous le signe de la « guerre froide » :
la création de la Bundeswehr et la période
ayant précédé celle­ci
[1]
[1] Le colonel comte Baudissin à Andernach vers
1956/57 (SZ Photo/Strobel)
[2] Le ministre fédéral de la Défense Theodor Blank
(au centre) et les généraux de corps d'armée Adolf
Heusinger (à gauche) et Hans Speidel (à droite)
fraîchement nommés devant l'entrée de la caserne
Ermekeil à Bonn, 12 novembre 1955 (Bundeswehr)
[3] Des soldats de la Bundeswehr aux urnes lors
des élections législatives de 1957 à Munich
(SZ Photo)
8
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[2]
[3]
Après l’effondrement au terme de la Deuxième Guerre
place dans l’Etat démocratique. Sur la base de ces travaux, elle
mondiale, l’Allemagne était moralement, économiquement et
élabora un mémorandum qui sera essentiel pour la mise sur pied
politiquement anéantie. Après la capitulation signée en mai
ultérieure de la Bundeswehr.
1945, elle faisait face à un avenir incertain sous occupation
alliée. Sous le présage d'une guerre froide naissante entre l'Est
Dès octobre 1950, Adenauer désigna le député CDU (Union
et l'Ouest, la partition politique du pays ne tarda pas à devenir
chrétienne­démocrate) Theodor Blank qui sera le « délégué du
une réalité. L’URSS mit en place une dictature communiste dans
chancelier fédéral pour les questions relatives au renforcement
sa zone d’occupation de l’Allemagne de l’Est et entreprit d’élar­
des troupes alliées ». Son service, appelé aussi « administration
gir systématiquement sa propre sphère d’influence. De l’autre
Blank » (Amt Blank), est considéré comme la cellule initiale du
côté, les puissances victorieuses USA, Grande­Bretagne et France
futur ministère de la Défense. Les conseillers militaires les plus
regroupèrent progressivement leurs zones d’occupation en Alle­
proches de Blank furent les anciens généraux de la Wehrmacht
magne de l’Ouest, créant ainsi dans cette partie de l’Allemagne
Hans Speidel et Adolf Heusinger. Dès le printemps 1951, ils
les conditions préalables à la mise en place de structures démo­
évoquaient avec des représentants des puissances occidentales
cratiques.
ce que pourrait être le cadre des futures forces armées ouest­
allemandes.
Par une politique conséquente d’arrimage à la communauté
des Etats occidentaux, la République fédérale, créée en 1949,
Considérées de prime abord comme des forces de l'Alliance et
accéda en 1955, sous l’égide de son premier chancelier fédéral
ancrées dans la démocratie, elles constituaient quelque chose
Konrad Adenauer, à une large souveraineté. Au fur et à mesure
de totalement nouveau dans l'histoire allemande. Leurs pères
de l’aggravation du conflit Est­Ouest et en regard de l’agressivité
fondateurs, considérant le poids de l’histoire, se trouvèrent
croissante de l’Union soviétique en matière de politique exté­
confrontés à un immense défi : une organisation militaire effi­
rieure, apparurent des systèmes d’alliance de sécurité occiden­
cace devait être mise en place, en accord avec la démocratie et
taux, en particulier l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique
un ordre sociétal pluraliste. Dans cette perspective, les anciens
Nord), créée le 4 avril 1949.
officiers Ulrich de Maizière et comte Wolf von Baudissin furent
les concepteurs les plus influents de l’idée de l’« Innere Führung »
L'un des éléments marquants de l'ancrage à l'Ouest de la Répu­
(formation morale et civique). Encore aujourd’hui, ce concept
blique fédérale d'Allemagne fut et demeure encore aujourd’hui
donne corps à la perception que le militaire doit avoir de lui­
sa participation militaire à la communauté de sécurité occiden­
même dans une démocratie – celle du « citoyen en uniforme ».
tale. Elle fut d'abord recherchée dans le cadre européen et
Ce rôle inédit a fait l’objet d’un ancrage dans la loi sur le statut
finalement concrétisée en 1955 par son adhésion à l'OTAN.
juridique des militaires (Soldatengesetz), qui entra en vigueur le
Au fur et à mesure du processus d’intégration à l’Occident,
1er avril 1956. Celle­ci ne restreint les droits civiques du soldat
le gouvernement fédéral réfléchissait déjà intensément depuis
que dans la mesure de l’absolue nécessité requise par le service.
1950 à la création de ses propres forces armées.
Ainsi, le soldat a­t­il le droit de s'impliquer largement dans la vie
L’éclatement de la guerre de Corée fin juin 1950 accéléra cette
vote actif et passif.
politique en dehors de la Bundeswehr et d’exercer son droit de
évolution. La menace émanant de l’Est semblait plus forte que
jamais. Le besoin urgent en troupes supplémentaires pour la
La structure militaire au sommet de la hiérarchie laissait égale­
défense de l’Europe occidentale rendit les Alliés plus ouverts
ment entrevoir un renouveau. La doctrine de l’interarmisation
vis­à­vis d’un réarmement de l’Allemagne de l’Ouest. En
suscita un grand intérêt. Dans « l’administration Blank » déjà,
concertation avec les Alliés, et sans en informer l’opinion
un seul département était compétent pour toutes les tâches de
publique, Adenauer fit convoquer une commission d’experts
planification militaire. Ce n’est que peu avant la mise en place
militaires. Celle­ci, réunie début octobre 1950 dans le couvent
que les directions de l’armée de terre, de l’armée de l’air et de
de Himmerod dans le massif de l’Eifel, consacra ses travaux aux
la marine furent détachées. Les intérêts des forces interarmées
questions de principe de la défense de l'Europe occidentale,
continuaient d’être garantis par le chef d’état­major de la
de la structure des futures forces armées ainsi que de leur
Bundeswehr. Le général Adolf Heusinger devint, le 1er juin 1957,
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
9
1
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
le premier titulaire de ce poste. Il était le militaire le plus gradé et
ment. Entre 1950 et 1953, le mouvement appelé « Ohne mich »
le premier conseiller du gouvernement pour les affaires militaires.
(ce sera sans moi), eut un grand écho dans la population.
Seul l'état­major de la Bundeswehr ou des armées et les services
Ce mouvement rassemblait dans de nombreuses manifestations
centraux lui étaient immédiatement subordonnés. S’agissant
des gens ayant des origines et des motivations les plus variées.
de questions générales, il était habilité à donner des instructions
Les protestations publiques n’ont jamais entièrement cessé
aux chefs d’état­major des trois armées, mais ceux­ci ne lui
depuis la création de la Bundeswehr. Au cours des années 50,
étaient pas directement subordonnés.
elles reprirent régulièrement, par exemple lorsque fut adopté le
service militaire obligatoire pour tous ou envisagée l’éventualité
La séparation fonctionnelle et organisationnelle des forces
d’un armement atomique de la Bundeswehr. Au Bundestag
armées et de l'administration de la Défense constituait, elle
également, le réarmement était un thème central. Les
aussi, une rupture majeure dans la tradition militaire allemande.
divergences d’opinion transcendaient tous les partis politiques.
En 1956, celle­ci fut inscrite dans la constitution. Les préroga­
Le SPD (Parti social­démocrate), le plus important parti
tives d’autorité sur l’armement et l’administration ainsi que sur
d’opposition, n’était dans le principe, certes, pas opposé au
les crédits affectés étaient ainsi confiées à des fonctionnaires
réarmement, mais il craignait une aggravation de la division de
civils. Toute une série de motifs avaient contribué à cette déci­
l’Allemagne qui pourrait résulter d’un plus fort ancrage à
sion. Il y avait en premier lieu l’idée de décharger les militaires
l’Ouest de la République fédérale.
des tâches administratives et de confier celles­ci essentiellement
à des spécialistes de l’administration. Ceci correspondait
Un aménagement des orientations constitutionnelles pour la
largement à un principe moderne, selon lequel les institutions
Bundeswehr fut opéré par l’entrée en vigueur, le 28 juin 1968,
étatiques – ici en l’occurrence les forces armées – se devaient
de ce que l’on appela les lois relatives à l’état d’urgence (Not­
de se concentrer sur leur cœur de métier respectif. En outre, il
standsgesetze). Elles constituent aujourd’hui encore le noyau
convenait d’aborder les affaires administratives et la politique
des lois constitutionnelles régissant les armées. Leur rédaction
d’acquisition sur la base des principes généraux de l’administra­
et finalement leur adoption par la grande coalition Kiesinger/
tion et de l’économie, et non pas selon le principe purement
Brandt furent notoirement accompagnées de discussions et
militaire de la passation d’ordres.
de controverses. Beaucoup de groupes sociétaux, tels que
syndicats, églises, scientifiques et médias, craignaient une
Dès le départ, l’administration de la Bundeswehr appliqua
entrave aux principes de l’Etat de droit et de la démocratie.
un principe très progressiste : au titre de ce que l’on appela
Il convient de noter que le débat touchant aux lois relatives à
« solution Bundeswehr », l’ensemble des forces armées devait
l’état d’urgence prit brusquement fin avec l’entrée en vigueur
être suivi et soutenu par une administration de la Défense
de celles­ci. Depuis, personne n’a prétendu sérieusement que
homogène. Des administrations autonomes pour les armées
ces lois aient jamais porté atteinte aux libertés individuelles ou
respectives, comme cela avait été en partie le cas dans les
aux droits civiques. En conclusion, la législation de 1968 portant
armées allemandes dans le passé, demeuraient exclues.
sur l’état d’urgence peut être considérée comme un exemple
d’aménagement réussi de la Loi fondamentale imposé par des
Les principes majeurs de la constitution interne des futures
défis politiques.
forces armées furent ainsi ancrés alors qu’étaient lancés dans
le même temps les préparatifs organisationnels en vue de la
La disposition centrale était et demeure l’article 87a alinéa 2 de
première phase de la mise sur pied des forces. Avant même
la Loi fondamentale (Grundgesetz, GG), selon les termes duquel
qu'elles ne prennent le nom de « Bundeswehr », les forces
les forces armées ne peuvent intervenir sur le territoire national
armées furent officiellement créées en 1955 par la mise en
qu’à des fins de défense et dans la mesure où la Loi fondamen­
place d'un « ministère fédéral de la Défense » le 7 juin et la
tale l’autorise expressément. L’objectif du législateur constituant
nomination, le 12 novembre 1955, des 101 premiers militaires
de 1968 était de poser d’emblée une réserve constitutionnelle
par le ministre de la Défense Theodor Blank.
à l’engagement des forces armées, c’est­à­dire à ne l’autoriser
que dans des cas clairement définis, l’inscrivant ainsi dans le
10
En République fédérale, le réarmement fut par périodes violem­
cadre de l’Etat de droit, et de conditionner un élargissement
ment contesté. Une grande partie de la population, marquée par
du contexte d’emploi des forces armées allemandes à une
le souvenir encore récent de la guerre, s’y opposait catégorique­
nouvelle décision du législateur constituant. Simultanément,
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
[1] Manifestation contre le réarmement,
8 janvier 1955 (SZ Photo)
on inséra dans la Loi fondamentale les habilitations expresses
régissant l’engagement des forces armées au­delà du cadre de
la défense : prestations d’assistance à la suite d’accidents et de
catastrophes (article 35 alinéas 2 et 3 de la Loi fondamentale ;
on avait encore en mémoire l’intervention juridiquement
insuffisamment fondée de la Bundeswehr lors du raz­de­marée
de Hambourg), engagement en cas d’état de défense ou de
tension (article 87a alinéa 3), soutien aux forces de police en cas
d’état d’urgence interne (article 87a alinéa 4 en liaison avec
article 91).
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
11
1
1.2
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
Sous le signe des « représailles massives » :
mise sur pied et montée en puissance
de la Bundeswehr
[1]
[1] Signature des accords de
Paris, 23 octobre 1954 (SZ Photo)
Après des années de préparatifs, la mise sur pied pouvait enfin
démarrer en 1956. Le 3 janvier, les premiers volontaires prenaient
leur service dans les unités d’instruction de l’armée de terre
(Andernach), de l’air (Nörvenich) et de la marine (Wilhelmshaven).
Des dizaines de milliers de candidatures, pour la plupart émanant
L'entrée en vigueur des accords de Paris le 5 mai 1955 ouvrit
d'anciens combattants de la Wehrmacht et tous grades confon­
la voie à la mise sur pied de forces armées ouest­allemandes.
dus, avaient été soumises au ministère de la Défense. Le comité
Dès le 9 mai, la République fédérale d’Allemagne, désormais
d’expertise du personnel avait vérifié dès 1955 les profils des
largement souveraine, devenait membre de l’OTAN.
candidats aux postes d’encadrement militaires, afin de garantir
que seules des personnes dont le comportement avant 1945
Toutefois, elle ne disposait toujours pas de forces qui lui
n’était pas suspect pouvaient être intégrées à la Bundeswehr.
étaient propres. De par son adhésion, elle s'était engagée
à placer sous le commandement de l'Alliance en l’espace
La constitution des effectifs était un grand problème à tous les
de trois ans douze divisions de l'armée de terre, un an plus
échelons d’affectation. C’est pourquoi un règlement juridique
tard 22 escadres de l'armée de l'air ainsi que 172 navires et
particulier prévoyait un transfert des cadres bien formés de la
bateaux de la marine. Les effectifs étaient limités à un maxi­
police fédérale des frontières vers les forces armées. Environ
mum de 500 000 hommes. En prenant en compte les forces
9 500 d'entre eux profitèrent de cette opportunité. Les
armées territoriales restant sous commandement national,
« groupes de service » des forces armées alliées constitués
le maximum était fixé à 605 000 hommes.
d'Allemands représentaient un autre vivier de recrutement
important. Les Alliés eux­mêmes, et les Etats­Unis en particulier,
prirent largement en charge la première dotation en équipement
12
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
de la Bundeswehr en armes et en matériel et fournirent leur
Adenauer, le nouveau ministre de la défense, Franz­Josef Strauß,
soutien à l’instruction et à la formation.
plaida vivement, à partir de fin 1956, en faveur de l’équipement
de la Bundeswehr en systèmes vecteurs d’armes nucléaires. Les
D’emblée, toute la planification partait du principe que les forces
têtes nucléaires elles­mêmes restaient sous autorité américaine.
armées ouest­allemandes ne pourraient être mises sur pied avec
Cette procédure fut adoptée fin 1957 comme « système à double
l’effectif nécessaire qu’en instituant un service obligatoire.
clé » pour tous les Etats membres de l'OTAN.
L’adoption du service militaire obligatoire pour tous suscita en
1956 une controverse et un débat parlementaire violents. Le
Contre la résistance de l’opposition parlementaire et un fort
7 juillet 1956, le projet de loi de la coalition gouvernementale
mouvement de protestation (« combattons la mort atomique »),
put finalement être adopté. Peu après, début avril 1957, les
commença en 1958 l’équipement de la Bundeswehr avec des
10 000 premières recrues du service militaire obligatoire faisaient
systèmes de missiles nucléarisables d’un type US ancien. A
leur entrée dans les casernes.
partir de 1963, l’armée de l’air reçut les missiles US à moyenne
portée « Pershing ». Ses nouveaux bombardiers « Starfighter »
Indépendamment de cela, les objectifs fixés initialement pour la
pouvaient également recevoir des armes nucléaires, ce qui était
montée en puissance des effectifs et des matériels s’avérèrent très
d’autre part déterminant pour leur mission. Depuis 1959,
rapidement être trop ambitieux. A plusieurs reprises, ils durent
l'armée de terre allemande était équipée des missiles américains
être nettement révisés à la baisse, entre autres lors d’âpres
à courte portée « Honest John », un système de vecteurs
négociations avec les Alliés. Ce n'est qu'en 1963 que la montée
nucléaires qui sera complété par des missiles américains à courte
en puissance de la Bundeswehr, alors forte de presque 400 000
portée plus performants du type « Sergeant » à partir de 1963.
hommes, fut achevée pour l’essentiel. La 12e et dernière division
de l'armée de terre devint opérationnelle et fut assignée à l'OTAN
En dépit de réserves initiales de la part des partenaires de
en 1965.
l’Alliance, le côté allemand gagna bientôt la confiance de
ceux­ci et fut associé de manière appropriée au commandement
L’intégration dans les structures internationales de l’OTAN a
militaire de l’OTAN. Avant même qu’une unité allemande ne soit
fortement marqué la Bundeswehr dès le départ. C’est pourquoi
assignée, le général Hans Speidel prit en charge, le 1er avril 1957,
un commandement militaire suprême traditionnel, tel que par
le commandement suprême des forces terrestres de l’OTAN en
exemple un état­major général national, n’était pas indispensable
Europe centrale. Dès 1961 et jusqu’à 1964, le général Adolf
pour elle, car la plupart des unités étaient sous commandement
Heusinger assuma en tant que premier Allemand la présidence
OTAN et leur conduite opérative devait relever des états­majors
du comité militaire permanent de l’OTAN. Es qualité, il apporta
de l’OTAN en cas d’état de défense. D’un autre côté, le droit
une contribution majeure au développement de la nouvelle
de regard dans l’Alliance donnait la possibilité d’influencer la
stratégie de l'OTAN de la « riposte graduée ».
planification de défense de celle­ci. Depuis fin 1954, la doctrine
de l'OTAN s'inscrivait sous le signe des « représailles massives »
Ce n’est que dans les années 60 que la Bundeswehr disposa d’une
(massive retaliation). Elle reposait sur la dissuasion nucléaire
capacité opérationnelle répondant aux standards OTAN. Dès
stratégique. En outre, elle prévoyait le recours précoce à des armes
1957, des unités de la marine et de l'armée de terre participaient
nucléaires tactiques si la supériorité conventionnelle d’un assail­
aux manœuvres de l'OTAN afin de faire avancer l’intégration
lant soviétique devait l'y contraindre. En raison de son infériorité
militaire. Au début des années 60, l’Allemagne et la France
conventionnelle, l’OTAN planifiait une défense le long du Rhin.
conclurent des conventions concrètes de coopération militaire,
A partir du milieu des années 60, renforcée par la Bundeswehr,
et à partir de 1961, la Bundeswehr fournit un contingent pour
l'OTAN put prendre davantage en considération les idées alle­
la force d’intervention mobile (AMF) de l’OTAN.
mandes d'une « défense de l'avant » à la frontière orientale de
la République fédérale d'Allemagne.
La Bundeswehr fit rapidement ses preuves en matière d'assis­
tance lors de catastrophes naturelles sur le territoire national ou
L’OTAN s’efforça, à partir du milieu des années 50, de compenser
à l'étranger. Au printemps 1960, l’armée de l’air achemina pour la
l’infériorité conventionnelle par l’équipement de ses forces avec
première fois du fret humanitaire vers la ville d’Agadir au Maroc,
des armes nucléaires tactiques. Soutenu par le chancelier fédéral
détruite par un tremblement de terre, des militaires du service de
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
13
1
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
[1]
Commandement
territorial du
Schleswig­Holstein
[1] Entretien avec des candidats souhaitant
entrer dans la Bundeswehr, 1956
(SZ Photo/Strobel)
[2] Extrait du Livre blanc 1975/76, page 97,
la « défense de l’avant » (Bundeswehr)
L'armée terri­
toriale assure
la liberté de
manœuvre
des forces de
l'OTAN.
Commande­
ment terri­
torial Nord
Commande­
ment terri­
torial Sud
[2]
14
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
La mission
de l'armée
de terre
Avec ses unités affectées
à l'OTAN, l'armée de
terre défend à proximité
des frontières et côte
à côte avec les alliés les
zones d'action qui lui
sont assignées.
santé y installant pour leur part un centre de secours. De manière
une distanciation d’avec la Wehrmacht. En 1965, consciente de
similaire, une assistance fut apportée en 1962 en Iran après un
sa propre tradition grandissante, la Bundeswehr reçut ses propres
destructeur tremblement de terre. Lors de la première grande
emblèmes qui lui furent remis par le président fédéral.
intervention sur le territoire national, pendant le raz­de­marée
qui affecta la côte de la mer du Nord en 1962, 40 000 soldats de
A l’instar de la nouvelle tradition dont se réclamait la Bundeswehr,
la Bundeswehr apportèrent leur assistance pour consolider les
le concept politiquement voulu de l‘« Innere Führung » (forma­
digues et les barrages et évacuer les populations. Neuf militaires
tion morale et civique) ne reçut pas toujours un accueil positif.
perdront la vie aux cours de ces engagements. L’intervention de
Ses adversaires le trouvaient trop peu militaire et trop éloigné
la jeune armée contribua grandement à surmonter les réserves
de la réalité. La rapide montée en puissance de la Bundeswehr
qui existaient dans la population du pays vis­à­vis de sa propre
laissait toutefois peu de temps pour s’attarder à ce type de
armée.
conflits. Dans le même temps, des scandales tels que le « drame
La Bundeswehr eut également de nombreuses difficultés à sur­
une vive attention de la population et jetèrent une lumière
monter lors de la montée en puissance interne. On était amené
peu avantageuse sur la mise en œuvre des principes de
à travailler avec d’anciens militaires qui, en raison de leur passé
l’« Innere Führung » au sein des unités.
de l’Iller » (1957) ou « l’affaire Nagold » (1963) suscitèrent
dans la Wehrmacht, étaient marqués non seulement militaire­
ment, mais aussi politiquement. Dans le même temps, l’Etat
Dans ce contexte, le commissaire parlementaire aux forces
démocratique imposait une nouvelle identité en rupture avec
armées Helmut Heye lui­même se dit alors « inquiet au sujet de
la continuité de la tradition militaire allemande. Les nouveaux
la Bundeswehr ». Sous cet intitulé, il se livra dans l’hebdoma­
modèles exemplaires sont encore aujourd’hui des événements
daire illustré « Quick » à une critique, allant au­delà de son
et personnages de l’histoire allemande qui symbolisent l’idéal
rapport annuel, de la mauvaise application des principes de
de liberté, en particulier les réformes prussiennes, qui sont
l’« Innere Führung » et déplora le manque de soutien non
intimement liées au nom de Gerhard von Scharnhorst, ainsi
seulement de la part des commandants militaires et des services
que la résistance militaire contre le régime national­socialiste.
au sommet de la hiérarchie, mais aussi de la part du parlement.
Le commandement de la Bundeswehr s'est appliqué à faire
Dans le climat tendu de la fin des années 60, des hauts gradés
reconnaître le mérite de la résistance militaire allemande, y
hostiles de l’« Innere Führung » donnèrent à nouveau de la
compris en allant à l’encontre de réserves largement répandues.
voix. Le chef d’état­major adjoint de l’armée de terre, le général
A titre fortement symbolique, la caserne de la Bundeswehr de
de division Hellmut Grashey, qualifia publiquement l’« Innere
Sonthofen, une ancienne école de cadres national­socialiste,
Führung » de « masque » qu’il était temps de faire tomber.
fut dénommée d’après le général d’armée Ludwig Beck, un des
dirigeants de la résistance contre Hitler. Dans son message relatif
Peu après, une étude réalisée sous la responsabilité du chef
au 15e anniversaire de l'attentat du 20 juillet 1944, le chef
d'état­major de l'armée de terre, le général de corps d'armée
d'état­major des armées Adolf Heusinger rendit pour la première
Albert Schnez, demandait la définition d’un nouveau modèle.
fois officiellement hommage à l'exemple que constituent les
Helmut Schmidt, alors ministre de la Défense du nouveau gou­
conjurés contre Hitler pour les militaires de la Bundeswehr.
vernement SPD/FDP, limogea Grashey et réserva un examen
Peu de temps après, d’autres casernes furent dénommées
critique à l’« étude Schnez ». Le concept de l’« Innere Führung »
d’après de telles personnalités de la résistance.
fut alors consigné à titre permanent dans le Livre blanc de 1970
comme étant un noyau essentiel de la Bundeswehr.
La nouvelle tradition dont se réclame la Bundeswehr trouva en
1965 un ancrage officiel dans ce qu’il est convenu d’appeler
l’« arrêté sur la tradition » (Traditionserlass). Les soldats de la
Bundeswehr ayant servi pendant la guerre devaient pouvoir
assumer les faits d’armes de la Wehrmacht ainsi reconnus. En
1982 suivit un deuxième « arrêté sur la tradition », qui marquait
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
15
1
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
[1]
[1] Le président fédéral Theodor Heuss, le général de
corps d’armée Hans Röttiger, premier chef d’état­major
de l’armée de terre, et le général d’armée Adolf Heusinger
rendent visite aux troupes lors d’une manœuvre de la
2e division d’infanterie mécanisée, 13 septembre 1958
(IMZ Bw/Baumann)
et démissionna le 12 août. Il avait tenté en vain d'obtenir du
ministère une modification organisationnelle qui lui paraissait
nécessaire. Finalement, il exprimera également publiquement
sa critique.
La démission de deux autres généraux haut placés fit que l’affaire
En 1966, la Bundeswehr fut secouée par plusieurs crises et graves
prit la dimension d’une « crise des généraux ». Ceux­ci désap­
accidents. Une série de crashs révéla de graves défauts techniques
prouvaient l’« arrêté sur les syndicats » du 1er août 1966, qui
sur l’avion de chasse alors le plus moderne de l’armée de l’air, le
autorisait les militaires sous contrat et les militaires de carrière à
« Starfighter ».
s’organiser en syndicats. Le chef d’état­major des forces armées,
Heinz Trettner, se considéra comme court­circuité par le ministre
La « crise du Starfighter » culmina en 1966, alors que 22 appa­
et demanda à être relevé de ses fonctions.
reils s’écrasèrent, coûtant la vie à 15 pilotes. En septembre 1966,
on eut également à déplorer un grave accident dans la marine,
Par ailleurs, cette année fut aussi assombrie par les répercussions
lorsque le sous­marin « Hai » sombra dans la mer du Nord et
de la première récession économique majeure dans l'histoire de
qu’un seul des 20 membres d’équipage put être sauvé.
la République fédérale. Depuis 1963, le budget de la Défense, en
hausse rapide auparavant, stagnait aux environs de 18 milliards
Le problème non résolu des « Starfighter » prendra une dimension
16
de DM. Des ressources financières restreintes contraignaient à la
politique au cours de cette même année. Le chef d'état­major de
réduction, au report et à la suppression de certains programmes
l'armée de l'air, le général de corps d'armée Werner Panitzki, ne
d'armement. En termes d’organisation, les économies étaient
voulait pas endosser cette responsabilité plus longtemps encore
surtout visibles dans l’armée de terre.
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
Sous le signe de la « riposte graduée » :
la Bundeswehr entre politique extérieure
de détente et mutation de la société
Les crises de Berlin (1961) et de Cuba (1962) conduisirent à une
1.3
à partir de 1973, le désarmement des forces conventionnelles
dramatique escalade de la guerre froide, au cours de laquelle les
en Europe (MBFR). Tandis que les efforts de désarmement
superpuissances purent entrevoir brièvement l’abîme d’une guerre
stratégique conduisirent en 1972 et 1979 à des traités de
nucléaire. Par la suite, les relations entre les USA et l’URSS com­
contrôle des armements, les négociations sur les armements
mencèrent à se détendre lentement, mais notablement. L’OTAN
conventionnels demeurèrent tout d’abord sans succès.
adopta en 1967 la nouvelle stratégie de la « riposte graduée »
(flexible response) qui misait sur une dissuasion militaire et un
Par ailleurs, la détente subit de lourds revers à la fin des années 70.
dialogue politique.
Depuis 1976, l’URSS renforçait son potentiel de missiles à courte
et moyenne portée à têtes nucléaires. C'est surtout l'adoption des
A partir de 1969, la nouvelle « Ostpolitik » (politique d’ouverture
missiles à moyenne portée SS 20 qui fut à l'origine d'un déséqui­
à l’Est) du gouvernement dirigé par Willy Brandt fut pour beau­
libre stratégique. A l’initiative du chancelier de l’époque, Helmut
coup dans la détente. Sa devise était « le changement par le
Schmidt, l’OTAN réagit le 12 décembre 1979 avec ce que l’on
rapprochement ». Peu de temps auparavant, des troupes du Pacte
appela la « double décision ». Celle­ci annonçait l’adoption des
de Varsovie envahissaient la Tchécoslovaquie alliée et mettaient un
nouveaux systèmes de missiles Pershing II et de missiles de croisière
terme à la politique de réforme du pays (« Printemps de Prague »).
si les négociations avec l’URSS devaient échouer. Dans le même
L’OTAN réagit avec vigilance, mais n’intervint pas militairement.
temps, la situation internationale s’aggrava encore avec l’entrée
des troupes soviétiques en Afghanistan le 25 décembre 1979.
La fin des années 60 vit une concrétisation de la détente de
la politique mondiale. A partir de novembre 1969, les USA et
De part et d'autre du rideau de fer, l'Europe centrale assista
l’URSS négocièrent à Helsinki la réduction des armements
à une dernière phase de réarmement nucléaire. L’espoir déçu
stratégiques (SALT), et l’OTAN et l’URSS négocièrent à Vienne,
d’une « paix sans armes » suscita au début des années 80
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
17
1
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
[1]
[1] Remise du premier char de bataille « Leopard »
au ministre fédéral de la Défense Kai­Uwe von
Hassel (à gauche) et au général de corps d’armée
Ulrich de Maizière, chef d’état­major de l’armée
de terre, 9 septembre 1965 (Bundeswehr)
[2] Couverture du premier Livre blanc paru en 1969
(Bundeswehr)
18
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[2]
un nouveau mouvement de protestation, faisant état de son
les universités de la Bundeswehr devint rapidement un critère
insatisfaction dans de nombreuses marches pour la paix et
identifiant de la formation des officiers.
manifestations monstres.
La formation des officiers d’état­major fut également réformée,
Au même titre que les évolutions en politique extérieure, la
leur qualification réévaluée et adaptée aux besoins du service
mutation de la politique intérieure conduisit également vers un
public. L'école d'état­major, fondée peu avant, en 1967, fut
nouveau conflit sociétal avec les forces armées.
dissoute. Le nouveau stage de base proposé aux futurs officiers
La Bundeswehr se trouvait dans une situation difficile. Les
de la Bundeswehr à Hambourg.
d'état­major est dispensé depuis 1973 à la « Führungsakademie »
scandales et affaires contribuaient à susciter le regard méfiant
et même l’hostilité d’une notable proportion de la population.
Au sein du corps des officiers lui­même se reflétaient des
Pour le mouvement appelé « opposition extraparlementaire »
visions variées du profil professionnel du soldat. Alors que
(Außerparlamentarische Opposition, APO), né du mouvement
l’« étude Schnez » de 1969, déjà mentionnée, incarnait
étudiant des années 60, l’armée incarnait l’atteinte à la liberté
l’attitude conservatrice au sein du commandement militaire,
et l’esprit antidémocratique.
un groupe de jeunes sous­lieutenants rédigea, en 1970, un
Dans les faits, la rapide mise sur pied de la Bundeswehr avait
(« sous­lieutenants 70 »). En réplique à cette initiative, les
conduit en termes d’organisation et techniquement à un
« capitaines de Unna » exigèrent, fin 1970, un recentrage
blocage des réformes. Egalement en termes de politique de
sur la mission militaire.
contre­projet portant sur la conception du métier de soldat
gestion des ressources humaines, la Bundeswehr courait le
risque d’être à la traîne de la mutation de la société. Le ministre
La nouvelle ère était aussi caractérisée par un renforcement du
de la Défense d’alors, Helmut Schmidt, donna pour cette raison
travail de relations publiques de la Bundeswehr. Ainsi, depuis
en 1969/70 le coup d’envoi d’un processus de réforme et
1969, les « livres blancs » du gouvernement fédéral traitant
de réorganisation. Au plus haut niveau de commandement,
de la politique de sécurité ont contribué à une plus grande
l’« arrêté de Blankenese » (Blankeneser Erlass) du ministre
transparence. Enfin, la Bundeswehr a su gagner des sympathies
fédéral de la Défense, en date du 6 avril 1970, précisa et
grâce au large soutien apporté lors des jeux olympiques de
conforta la position du chef d'état­major de la Bundeswehr et
Munich en 1972.
celles des chefs d'état­major des armées. Ces derniers devinrent
tant au niveau organique qu'au niveau hiérarchique les chefs
suprêmes de leur armée respective.
A d’autres égards également, la Bundeswehr était depuis
les années 70 de plus en plus en phase avec son temps,
indépendamment du persistant face­à­face interne entre les
Une réforme importante fut la réorganisation des filières de
« réformateurs » et les « traditionalistes ». Exemplaire fut à
formation initiale et continue dans les forces armées. Conformé­
ce titre la création du « Big Band » de la Bundeswehr en 1971.
ment aux recommandations d’une commission chargée de la
La même année, il y eut même un arrêté prenant en considéra­
formation, les militaires sous contrat et de carrière se voyaient
tion la nouvelle mode capillaire en autorisant les soldats à
proposer une formation professionnelle civile ou un diplôme
porter provisoirement un « filet à cheveux ». En 1975, les
scolaire de grande qualité. Ceci devait permettre de rompre
forces armées s'ouvraient pour la première fois aux femmes,
les structures sclérosées de l’effectif, mais aussi de rehausser
dans un premier temps toutefois aux seuls officiers féminins
l’attractivité du métier de soldat.
du service de santé.
Au centre de la réforme se situait la fondation d'établissements
La normalisation croissante était également visible dans les
d'enseignement supérieur de la Bundeswehr à Munich et
signes militaires distinctifs. A l’occasion du 25e anniversaire de
Hambourg le 1er octobre 1973. L’obtention d’un diplôme
la Bundeswehr, le président fédéral institua les distinctions
d'enseignement supérieur devint ainsi la règle pour les officiers.
honorifiques de la Bundeswehr auxquelles on avait délibérément
Quatre ans plus tard déjà, les limites de capacité étaient atteintes
renoncé lors de sa création.
avec un total de 4 570 étudiants inscrits. Faire ses études dans
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
19
1
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
[1]
[2]
[3]
[4]
[1] Des soldats américains participant à l’exercice REFORGER
Certain Shield sont accueillis à leur atterrissage en Allemagne par
le général de corps d’armée Klaus Naumann (à droite), (alors
général commandant le Ier corps d’armée, puis du 1er octobre 1991
au 8 février 1996 chef d’état­major de la Bundeswehr) ainsi que
par le général américain Crosbie E. Saint (2e de droite à gauche),
10 septembre 1991 (IMZ Bw/Modes)
[2] « Achats » aux Etats­Unis : trois destroyers de classe « Lütjens »,
ici le « Lütjens », sont mis en service en 1969 (IMZ Bw/Oed)
[3] Développement à l’échelle multinationale : premier vol du
MRCA Tornado, 14 août 1974 (IMZ Bw/Oed)
[4] Défilé du Corps européen à Paris, 14 juillet 1994 (Bundeswehr)
20
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
La modernisation et l’ouverture de la Bundeswehr améliorèrent,
et par la modernisation d’unités anciennes. Au début des
certes, les relations entre la société et les forces armées, mais
années 80, la mission de la marine allemande fut élargie à
certaines réticences demeuraient toutefois. La persistante impo­
l’espace opérationnel maritime en mer de Norvège.
pularité du service militaire obligatoire pour tous, la peur d’une
guerre atomique et la force sans cesse croissante du mouvement
Le concept de l’OTAN de la défense de l’avant intégrée ainsi
pacifiste conduisirent à une forte augmentation du nombre des
que le progrès technique rendirent indispensable, à la fin des
objecteurs de conscience. La confrontation publique atteignit
années 60 et surtout ensuite dans les années 70, la mise en
son paroxysme lors de la question du stationnement de nou­
service de nouveaux véhicules de combat et de nouveaux
veaux missiles à la fin des années 70 et au début des années 80,
systèmes d’armes. La Bundeswehr devenait ainsi mieux à même
lorsqu’il y eut même des encerclements de casernes ainsi que
d’accomplir sa mission de dissuasion conventionnelle dans le
des débordements de violence à l’encontre de la Bundeswehr.
cadre d’une « riposte graduée ».
La Bundeswehr était également en pleine mutation en termes
d’organisation et d’équipement.
Depuis la fin des années 60, la Bundeswehr fut dotée de nom­
L'armée de terre prit une nouvelle physionomie au travers du
fabriqués dans un cadre soit national, soit international. A titre
modèle 3 de l’armée de terre (à partir de 1970) et du modèle 4
d’exemple parmi de nombreux projets, l’armée de terre fut
(à partir de 1980). Au milieu des années 70, elle passait de
dotée du char de bataille « Leopard » et du VBCI « Marder »,
33 à 36 brigades sans que son effectif de 340 000 hommes ne
l’armée de l’air, entre autres, de l’avion polyvalent « Tornado »,
subisse de grands changements. Grâce à l’allégement et la
successeur du « Starfighter », et la marine de la frégate de la
breux gros matériels nouveaux, qui avaient été développés et
restructuration des unités et à la dotation avec de nouvelles
classe 122, développée conjointement par l’Allemagne et les
armes, la capacité de frappe de l’armée fut renforcée. Son noyau
Pays­Bas à partir de 1975.
dur restait constitué par l’artillerie ainsi que l’arme blindée et
l’infanterie mécanisée.
La coopération internationale croissante correspondait à l’inten­
sification de la coopération pratique avec les forces armées d’au­
La défense territoriale et les activités des réservistes, restées de
tres nations de l’OTAN. Dès sa mise sur pied, la Bundeswehr, en
compétence nationale, prirent une importance croissante. A la
particulier l’armée de l’air, avait externalisé une grande partie de
fin des années 60, les dizaines de milliers de militaires regroupés
sa formation et de ses manœuvres dans certains pays étrangers
dans les forces armées territoriales seront rattachés à la force
membres de l’OTAN. De même, de 1969 à 1993, ont eu lieu les
de manœuvre et placés sous le commandement du chef d'état­
exercices annuels REFORGER (Return of Forces to Germany) des
major de l'armée de terre. Dans le cadre du modèle 4 de l'armée
forces américaines, qui étaient suivis de grandes manœuvres
de terre, les 12 brigades de protection du territoire constituaient,
avec la Bundeswehr et d’autres forces armées de l’OTAN sur le
en cas de conflit, un renforcement notable de la force de
territoire de l’Allemagne de l’Ouest.
manœuvre.
A la fin de la période de la guerre froide fut prise une décision
A la fin des années 70, l’armée de l’air vit son effectif porté
déterminante. Au niveau politique le plus élevé fut décidé, en
à 110 000 soldats et fut dotée d’une nouvelle structure de
1987, entre la France et l’Allemagne la création d’une première
commandement. Lors de l’acquisition de nouveaux systèmes
grande formation multinationale, qui fut constituée en octobre
d’armes, les unités navigantes étaient prioritaires, bien que,
1990 en tant que Brigade franco­allemande. L’intégration des
toutefois, la composante atomique de leur mission opération­
forces armées des Etats de l’UE et des Etats membres de l’OTAN
nelle eut perdu de son importance.
fut ainsi encore renforcée. Elle est synonyme d’un processus
d’intégration progressive de nombreux éléments de l’armée de
La marine maintenait à un niveau égal ses effectifs d'environ
terre allemande dans des grandes unités multinationales de
38 000 hommes depuis la fin des années 60. Son importante
l’OTAN et de l’UE, qui perdura dans les années 90.
flottille de réserve fut dissoute vers le milieu des années 80.
En contrepartie, sa capacité opérationnelle fut considérablement
renforcée par la mise en service de nouveaux navires et bateaux
LA BUNDESWEHR JUSQU’EN 1989/90
21
Le mur de Berlin devant la porte
de Brandebourg après l’ouverture
de la frontière par la RDA
(IMZ Bw/Lehnartz)
LA BUNDESWEHR DANS UN PROCESSUS
DE MUTATION : DE LA DEFENSE DU
TERRITOIRE NATIONAL A UNE « ARMEE
EN OPERATION »
2
Le mur de Berlin devant la porte
de Brandebourg après l’ouverture
de la frontière par la RDA
(IMZ Bw/Lehnartz)
2.1
La réunification politique
2.2
La Bundeswehr « armée de l’unité »
2.3
Adaptation à une nouvelle donne sécuritaire
L A B U N D E S W E H R D A N S U N P R O C E S S U S D E M U TAT I O N :
D E L A D E F E N S E D U T E R R I T O I R E N AT I O N A L A U N E « A R M E E E N O P E R AT I O N »
23
2
2.1
L A B U N D E S W E H R D A N S U N P R O C E S S U S D E M U TAT I O N :
D E L A D E F E N S E D U T E R R I T O I R E N AT I O N A L A U N E « A R M E E E N O P E R AT I O N »
La réunification politique
[1]
[2]
[1] Signature du « Traité 2 plus 4 » par les ministres des Affaires étrangères
(assis de gauche à droite) James Baker (USA), Douglas Hurd (Royaume­Uni),
Edouard Shevardnadze (URSS), Roland Dumas (France), Lothar de Maizière
(RDA) et Hans­Dietrich Genscher (République fédérale d’Allemagne) à
Moscou, 12 septembre 1990 (IMZ Bw/Reineke)
[2] Cérémonie d’adieux aux unités du groupe des forces Ouest. Le chancelier
fédéral Helmut Kohl et le président russe Boris Eltsine passent en revue la
formation d’honneur du bataillon de garde sur la place Gendarmenmarkt,
31 août 1994 (IMZ Bw/Modes)
[3] Première promesse solennelle dans les nouveaux Länder à Bad Salzungen,
19 octobre 1990 (IMZ Bw/Zins)
[4] Cérémonie d’adieux aux troupes alliées occidentales stationnées à Berlin
avec cérémonie de grande retraite devant la porte de Brandebourg, 8 septem­
bre 1994 (IMZ Bw/Modes)
24
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[3]
En plus de l’exode massif, ce furent surtout les pacifiques
« manifestations du lundi » nées à Leipzig qui firent subir une
pression croissante au régime du SED. L’insatisfaction et la
déception des citoyens de la RDA vis­à­vis de l’ancien système
ainsi que la volonté de changements fondamentaux dans la
politique et la société constituaient le ferment de la « révolution
pacifique » qui conduisit à la chute du mur, à la fin du règne
du SED, et finalement à la réunification allemande.
Le parachèvement de l’unité allemande était toutefois tributaire
de l’approbation des quatre puissances victorieuses de la
Deuxième Guerre mondiale. Dès la fin du mois de janvier, le
chef de l’Etat et de parti soviétique Mikhaïl Gorbatchev opéra
une volte­face dans la mesure où il n’opposait plus d’objection
de principe à une union politique entre les deux Etats allemands.
Lors des « entretiens du Caucase » avec le chancelier fédéral
[4]
Helmut Kohl pendant le mois de juillet, il donna également son
accord pour qu’une Allemagne réunifiée puisse être membre
Avec l’accession au pouvoir du chef d’Etat et de parti soviétique
de l’OTAN. Entre les mois de mars et septembre 1990, les deux
Mikhaïl Gorbatchev fut initié un processus durable de détente
Etats allemands négocièrent avec les anciennes puissances
dans les relations entre les USA et l’URSS. La politique de
victorieuses dans le cadre des « entretiens deux plus quatre »
« perestroïka » (restructuration) et de « glasnost » (transparence)
l’avenir de l’Etat allemand. Le 31 août, les représentants de
de Gorbatchev conduisit, à partir de 1986, à de plus grandes
la République fédérale et de la RDA signaient le « Traité
libertés politiques pour les Etats membres du Pacte de Varsovie.
d’unification » par lequel, sur la base de l’article 23 de la Loi
Au printemps de 1989, le régime communiste commença à
fondamentale, la RDA adhérait à dater du 3 octobre1990 à
syndical « Solidarnosc
´´» avait fait connaître au monde la soif
l’espace géographique régi par cette Loi fondamentale. 45 ans
vaciller en Pologne. Depuis plusieurs années déjà, le mouvement
de liberté qui régnait dans la sphère d'influence soviétique.
après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, l’Allemagne avait
retrouvé son unité étatique et sa pleine souveraineté.
En République démocratique allemande (RDA), de plus en plus
de gens cherchaient un moyen de quitter le pays. Au cours de
Le retrait des troupes alliées de Berlin et de l’Allemagne de
l'été 1989, la Hongrie ouvrit inopinément sa frontière vers
l’Est fut ensuite rapidement effectué. Particulièrement significatif
l'Autriche. Beaucoup de citoyens de la RDA saisirent leur chance
fut le retrait par la Russie des 380 000 hommes du groupe des
et s’enfuirent à l’Ouest.
forces Ouest jusqu’alors présent sur le territoire de l'ex­RDA.
En été 1989, les protestations publiques prirent de l’ampleur en
1994, la brigade russe de Berlin fut la dernière formation à
Immédiatement après la cérémonie d’adieux officielle le 31 août
RDA. Les citoyens se rebellaient de plus en plus fortement contre
quitter l’Allemagne. Peu après, les Berlinois prirent congé des
le régime du Parti socialiste unifié de l’Allemagne de l’Est (SED).
puissances de protection alliées occidentales de Berlin lors d’un
Les citoyens revendiquaient la démocratisation (« nous sommes
cérémonial militaire.
le peuple ») et la réunification (« nous sommes un peuple »).
L A B U N D E S W E H R D A N S U N P R O C E S S U S D E M U TAT I O N :
D E L A D E F E N S E D U T E R R I T O I R E N AT I O N A L A U N E « A R M E E E N O P E R AT I O N »
25
2
2.2
L A B U N D E S W E H R D A N S U N P R O C E S S U S D E M U TAT I O N :
D E L A D E F E N S E D U T E R R I T O I R E N AT I O N A L A U N E « A R M E E E N O P E R AT I O N »
La Bundeswehr
« armée de l’unité »
La réunification allemande devint effective le 3 octobre 1990.
L'installation de la Bundeswehr dans les nouveaux Länder se
A partir de cette date, le ministre fédéral de la Défense détenait
fit en étroite coopération avec les nouveaux gouvernements
l’autorité de commandement sur les quelques 90 000 soldats
de ces derniers. La Bundeswehr maintint le contact avec les
restant de l’ancienne armée nationale populaire (NVA) de
troupes soviétiques en Allemagne et se mit en relation avec
l'ex­RDA. L’effectif de la Bundeswehr atteignait désormais
les forces armées de ses nouveaux voisins, à savoir la Pologne
521 000 soldats. Dès la mi­juillet 1990, sa réduction à 370 000
et la Tchécoslovaquie, plus tard la République tchèque.
hommes avait fait l’objet d’un accord germano­soviétique,
qui fut confirmé dans le cadre du « Traité Deux­plus­quatre »
Le service militaire obligatoire, réduit à 12 mois depuis le
du 12 septembre 1990.
1er octobre 1990, renforça la cohésion de notre pays. Il
rassembla des jeunes gens de l’Est et de l’Ouest pour servir
Face à cette situation, la Bundeswehr dut repenser rapidement
conjointement et apporta ainsi une contribution décisive à
sa philosophie et adapter ses structures militaires. Il devint
l’« armée de l’unité ».
bientôt évident que, dans le processus de réunification, le rôle
des forces armées fédérales allemandes ne toucherait pas que
les aspects de la politique militaire, mais qu’il leur reviendrait
également un rôle important en termes sociopolitiques.
Simultanément, la réunification initia une mutation de dimen­
sions historiques pour la Bundeswehr. Celle­ci s’accéléra au
cours des années 90 au fur et à mesure de l’évolution de
l’environnement de politique de sécurité.
En termes de ressources humaines et d’organisation, la Bundes­
wehr se voyait confrontée au plus important défi depuis sa
création. Pour l’intégration dans la Bundeswehr des matériels et
des personnels de la dissoute NVA et la création d’une « armée
de l’unité », il n’y avait en l’occurrence ni modèle disponible ni
planification à long terme.
Un nouveau concept de stationnement des unités et des services
tenait compte de la nouvelle situation prévalant après la réunifi­
cation. Dans les nouveaux Länder et à Berlin furent stationnés
58 000 soldats et mise en place une administration militaire
spécifique. Le commandement Est de la Bundeswehr et une
antenne du ministère fédéral de la Défense s'installèrent dans
l'ancien siège officiel du ministère de la défense nationale et
de la NVA à Strausberg.
[1]
26
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
Ecole technique
de la marine
Stralsund
Warnemünde­Rostock
Office de la marine
Sanitz
Laage
Flottille de
patrouilleurs rapides
Ladeburg
Escadre de
missiles sol­air
Strausberg
Berlin
Escadre de chasse
Postdam
Holzdorf­Brandis
Escadre de
missiles sol­air
Dresden
Musée de
l‘armée de l‘air
Ecole fédérale
d‘administration de la Défense
Institut fédéral des
hautes études de sécurité
Centre d’études
d’histoire militaire
Réseau de la formation
morale et civique 1)
Escadre de
transport aérien
Ecole d’officiers
de l’armée de terre
[2]
1)
> Ecole d'information et de communication
de la Bundeswehr
> Eléments du Zentrum Innere Führung
(Centre de formation morale et civique)
> Institut des sciences sociales de
la Bundeswehr
[1] Le drapeau de la RDA est baissé à Strausberg
pour la dernière fois, 2 octobre 1990
(Bundeswehr)
[2] Plan du transfert d’unités et d’organismes des
anciens Länder dans les nouveaux Länder en date
de l’année 1994 (Bundeswehr, Livre blanc 1994)
L A B U N D E S W E H R D A N S U N P R O C E S S U S D E M U TAT I O N :
D E L A D E F E N S E D U T E R R I T O I R E N AT I O N A L A U N E « A R M E E E N O P E R AT I O N »
27
2
2.3
L A B U N D E S W E H R D A N S U N P R O C E S S U S D E M U TAT I O N :
D E L A D E F E N S E D U T E R R I T O I R E N AT I O N A L A U N E « A R M E E E N O P E R AT I O N »
Adaptation à une nouvelle
donne sécuritaire
[1]
[2]
La Bundeswehr absorba 2 285 installations et emprises précé­
demment occupées par l’ex­NVA ainsi que le groupe des forces
Ouest et dont beaucoup nécessitaient une réhabilitation. Une
partie d’entre elles furent dépolluées et continuèrent d’être
[1] La Bundeswehr apporte son soutien lors de travaux civils
d’arpentage en Saxe et en Thuringe, 1995 (Bundeswehr)
[2] Tradition et modernité : la nouvelle Ecole d’officiers de
l’armée de terre à Dresde (Bundeswehr/PIZ Heer)
[3] Des chars de bataille de l'armée nationale populaire de
l'ex­RDA attendent leur destruction à Löbau, 15 avril 1992
(IMZ Bw/Modes)
utilisées militairement. D'autres furent affectées à une utilisation
civile (reconversion). Les camps de manœuvre furent débarrassés
des restes de munitions et autres pollutions résiduelles.
Parallèlement, la Bundeswehr accompagna le processus de
réunification en fournissant une assistance technique, entre
La Bundeswehr se vit aussi confrontée, en 1990, à l'héritage
autres dans les domaines de l’arpentage ou du déminage de
matériel du conflit Est­Ouest. Dans les nouveaux Länder en
l’ancienne « bande de la mort » le long de la frontière inter­
particulier, il convenait de procéder à un désarmement et de
allemande.
remédier aux conséquences de l’activité militaire sans égards
pour la nature et l'environnement.
La situation stratégique résultant de la réunification de l’Alle­
magne et de la désintégration de l’Union soviétique comme du
Selon les dispositions du « Traité Deux­plus­quatre », environ
Pacte de Varsovie conduisit à un changement fondamental dans
2 300 chars de bataille, 9 000 véhicules blindés et spéciaux,
la politique de sécurité et de défense de l’Allemagne.
5 000 systèmes d’artillerie, de défense antimissiles et antiaé­
28
rienne, 700 avions de transport et de combat, 192 navires et
Une menace militaire imminente pour l’Allemagne apparaissait
85 000 véhicules automobiles devaient être désarmés. Plus d’un
comme peu probable dans le nouvel environnement. Pour
million d’armes portatives, 295 000 tonnes de munitions et
autant, et globalement considérés, les risques n’avaient pas
4 500 tonnes de propergols pour missiles étaient à éliminer en
changé, mais avaient seulement connu un glissement qualitatif.
respectant l’environnement ou à affecter à un autre usage.
La Bundeswehr était tenue de réagir en conséquence.
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[3]
Une commission indépendante, convoquée par le ministre de la
Avec des impératifs de calendrier très serrés, la Bundeswehr
Défense de l’époque, Gerhard Stoltenberg, et chargée de définir
adapta ses structures à des exigences en partie entièrement
les futures missions de la Bundeswehr, proposa en septembre
nouvelles. Des capacités non requises jusqu’en 1989 pour la
1991 de faire également participer la Bundeswehr à des
défense de l’Allemagne faisaient défaut et durent être nouvelle­
opérations internationales des Nations unies. Le successeur de
ment créées. D’autres missions perdirent de leur importance.
Stoltenberg, Volker Rühe, promulgua le 26 novembre 1992 les
« Principes directeurs de la politique de défense », qui inaugu­
L’état des lieux réalisé sous le ministre fédéral de la Défense
raient une réorientation de la Bundeswehr. La mission principale
Rudolf Scharping et intitulé « La Bundeswehr au seuil du XXIe
de la Bundeswehr demeurait en l’occurrence la défense nationale
siècle » ainsi qu’une commission indépendante convoquée
et collective dans le cadre de l’Alliance, pour laquelle on mainte­
par le gouvernement fédéral d’alors sous la dénomination
nait les « forces de défense principales ». En outre, la Bundeswehr
« Sécurité commune et avenir de la Bundeswehr » pointèrent
devait être dotée de « forces de réaction aux crises », également
de nets déficits de la Bundeswehr et aboutirent à un concept de
dans la perspective de missions de prévention des conflits et de
« réforme intégrale de la Bundeswehr ».
gestion des crises dans le cadre de l’OTAN et d’engagements dans
le cadre de missions internationales en faveur de la paix. C’est
En mai 2003, le successeur de Rudolf Scharping, Peter Struck,
dans ce contexte que se situa la participation de la Bundeswehr
promulgua de nouveaux « Principes directeurs de la politique de
à l’opération des NU en Somalie.
sécurité », qui concrétisaient le besoin de réforme de la Bundes­
En raison de la situation en matière de politique de sécurité et
les plus probables que sont la prévention des conflits et la gestion
des crédits budgétaires disponibles, des plans pour une nouvelle
des crises à l’échelle internationale, le processus d’adaptation de
wehr. Afin de permettre à la Bundeswehr de faire face aux missions
réduction de l’effectif de la Bundeswehr à 340 000 soldats furent
la Bundeswehr – la transformation – fut renforcé. Trois nouvelles
rendus publics en juillet 1994.
catégories de forces furent créées : les forces d’intervention, de
stabilisation et de soutien. Ce processus donna le coup d’envoi
aux modifications de structure, d’équipement, d’armement et de
stationnement de la Bundeswehr.
L A B U N D E S W E H R D A N S U N P R O C E S S U S D E M U TAT I O N :
D E L A D E F E N S E D U T E R R I T O I R E N AT I O N A L A U N E « A R M E E E N O P E R AT I O N »
29
Vue dans la salle plénière
(BPA/Bienert)
LA BUNDESWEHR
ET LE PARLEMENT
3
Vue dans la salle plénière
(BPA/Bienert)
3.1
Le parlement et la création de la
Bundeswehr
3.2
Les opérations extérieures de la
Bundeswehr sous mandat parlementaire
L A B U N D E S W E H R E T L E PA R L E M E N T
31
3
3.1
L A B U N D E S W E H R E T L E PA R L E M E N T
Le parlement et la création
de la Bundeswehr
L’initiative politique promouvant la mise sur pied de forces
Aussi assista­t­on, de l’été 1955 au printemps 1956, et ce en
armées ouest­allemandes émana pour une part essentielle du
dépit de toutes les divergences, à un déploiement d’efforts
chancelier Konrad Adenauer. Le Bundestag afficha sa détermina­
communs et convergents au sein du parlement. De cette
tion à participer à la conception du fond et de la forme des
« grande coalition militaire » non officielle émergea le
nouvelles forces armées et à ne pas laisser le soin de cette tâche
« deuxième amendement militaire » de la Loi fondamentale,
au seul gouvernement. Sa participation était d’autant plus
lequel fut adopté par le Bundestag le 6 mars 1956, avec 20 voix
indispensable qu’il s’agissait d’ancrer la souveraineté militaire
contre seulement. Depuis, en temps de paix, c’est le ministre de
dans la constitution. C’est à plus des deux tiers de la majorité
la Défense qui détient le pouvoir de commandement sur les
requis que le Bundestag adopta, le 26 mars 1954, l’amendement
forces armées, le chancelier fédéral l’assumant en cas de surve­
nécessaire de la Loi fondamentale.
nance de l’état de tension ou de défense. Le président fédéral,
en tant que chef de l'Etat, ne conserve que des droits honori­
Conscients des expériences du passé – la fin de la guerre
fiques. Par conséquent, le « commandement suprême » est
remontait à peine à dix ans – les parlementaires, transcendant
soumis au contrôle du parlement. Par ailleurs, le Bundestag
les clivages politiques existant entre eux, s’accordèrent sur les
exerce de par son pouvoir budgétaire une forte influence sur
points essentiels, à savoir : les forces armées doivent être
les effectifs et la structure des forces armées. A travers la
assujetties au droit et à la loi et soumises au contrôle du
commission du budget, le parlement participe à l’élaboration
parlement, et le commandement militaire ne doit pas pouvoir
du budget de la Défense et contrôle les dépenses.
se rendre autonome.
32
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
[1] Le chancelier fédéral Konrad Adenauer lors
du débat sur le réarmement et l’amendement
de la Loi fondamentale, 26 février 1954
(Bundesbildstelle)
L A B U N D E S W E H R E T L E PA R L E M E N T
33
3
L A B U N D E S W E H R E T L E PA R L E M E N T
[1]
[2]
[1] Réunion de la commission de la Défense,
1955 (Bundestag/Neher)
[2] Fritz Erler (SPD) lors du débat sur le
service militaire obligatoire, 4 juillet 1956
(IMZ Bw/Munker)
[3] Le premier commissaire parlementaire
aux forces armées Helmut von Grolman
(à droite) lors de sa première visite officielle
auprès du ministre fédéral de la Défense
Franz Josef Strauß (à gauche), 9 avril 1959
(Bundesbildstelle)
34
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[3]
La question de l’adoption du service militaire obligatoire fut, en
le statut juridique des militaires, loi sur le service militaire
revanche, beaucoup plus fortement controversée.
obligatoire, loi sur les pensions des anciens militaires et de
De mars à juillet 1956, Bundestag et Bundesrat (la chambre des
armées, etc.).
leurs ayants droit, règlement de discipline générale dans les
Länder) menèrent une bataille sans précédent autour de cette loi
sur le service militaire. Le SPD suivit son porte­parole en matière
Au cours de ces dernières années, la commission de la Défense
de politique de défense, Fritz Erler, et rejeta le projet gouverne­
a continué d’être sollicitée dans le règlement de ces questions en
mental. Bien que traditionnellement tout à fait en faveur du
raison de l’augmentation du nombre des opérations extérieures,
service militaire obligatoire, le SPD privilégiait l’idée plus actuelle
par exemple dans le cadre de l’élaboration de la loi sur les
d’une armée professionnelle nettement plus restreinte et savait
pensions d’invalidité des militaires participant à des opérations
qu’une forte minorité de la population partageait cette analyse.
extérieures et de leurs ayants droit (Einsatzversorgungsgesetz)
Au petit matin du 7 juillet 1956, la décision du Bundestag
en 2004 ou de la loi sur le maintien au sein des armées des
tomba. Au terme de 18 heures de délibérations en session finale,
militaires blessés en opération (Einsatzweiterverwendungsgesetz)
le projet de loi fut adopté à la majorité des voix de la coalition
en 2007.
gouvernementale.
En dépit de cette évolution, l’axe d’effort de la commission s’est
Soucieux d’améliorer le contrôle des forces armées et de la poli­
déplacé vers le contrôle parlementaire de la Défense, autrement
tique de défense par le parlement, le Bundestag installa une
dit du ministère fédéral de la Défense, des forces armées et de
commission ad hoc. Celle­ci porta dans un premier temps le nom
l’administration fédérale de la Défense. La commission de la
de « commission pour les questions de sécurité européenne »
Défense est une institution imposée par la constitution au titre
pour devenir plus tard « commission de sécurité du Bundestag ».
de l’article 45a de la Loi fondamentale et est la seule commission
Sous son premier président, Franz­Josef Strauß (Union chré­
du Bundestag à pouvoir se constituer elle­même en commission
tienne­sociale, CSU), elle deviendra le précurseur de l'actuelle
d’enquête. En outre, la commission de la Défense joue un rôle
« commission de la Défense ». Plus tard, son président, Richard
important en matière de consultation sur les questions du
Jaeger (CSU), et son adjoint, Fritz Erler (SPD), travaillèrent à sa
budget de la Défense.
tête en bonne intelligence tout au long de la phase décisive de
la première législation militaire.
Au même titre que toutes les autres commissions, la commis­
sion de la Défense a le droit de se saisir, de sa propre initiative,
C’est aussi la commission de la Défense qui régla la question
de dossiers relevant de son domaine de compétence, au­delà
de l’appellation des nouvelles forces armées. C’est finalement
des dossiers qui lui sont transmis par l’assemblée plénière,
la dénomination de « Bundeswehr » qui l’emporta le 22 février
et de formuler des recommandations en la matière. Les
1956, loin devant les autres noms proposés, à savoir
délibérations sur de tels dossiers au sein de la commission
« Wehrmacht des Bundes » et « Streitkräfte ». La commission
reposent, dans la plupart des cas, sur un rapport demandé par
de la Défense traite toutes les questions relatives à la politique
la commission auprès du ministère de la Défense, présentant
de défense, qu’il s’agisse des engagements de la Bundeswehr,
une situation donnée ou exprimant un avis sur des informations
de l’acquisition de systèmes d’armes ou encore des rémunéra­
émanant de tiers. Bien que l’avis formulé par la commission
tions et des pensions.
de la Défense à l’issue de telles délibérations ne soit pas juridi­
La commission de la Défense remplit principalement deux mis­
moins une importance considérable du point de vue politique.
sions : elle prépare les décisions de l’assemblée plénière dans
Dans la pratique, cette procédure est l’instrument auquel
le cadre de la procédure législative et assiste également le
la commission a le plus souvent recours dans le cadre de
parlement dans l’exercice de sa fonction de contrôle vis­à­vis
l’exercice du contrôle parlementaire du gouvernement fédéral.
du gouvernement.
Elle correspond au droit octroyé aux commissions par le
quement contraignant pour le gouvernement, il revêt néan­
règlement intérieur du Bundestag de convoquer, à tout
Initialement, l’essentiel des activités de la commission de
moment, un membre du gouvernement fédéral à une session
la Défense se concentrait sur la législation militaire (loi sur
(article 68 du règlement intérieur du Bundestag).
L A B U N D E S W E H R E T L E PA R L E M E N T
35
3
L A B U N D E S W E H R E T L E PA R L E M E N T
[1]
[2]
[1] Le commissaire parlementaire aux forces
armées Reinhold Robbe (4e de droite à
gauche) remet le rapport annuel 2008 à la
présidente de la commission de la Défense
du Bundestag Ulrike Merten (2e de gauche
à droite), SPD, ainsi qu’aux porte­parole
de la commission, 26 mars 2009 (Deutscher
Bundestag/Lichtblick/Melde)
[2] Réunion de la commission de la Défense,
25 janvier 2006 (Deutscher Bundestag/Oed)
[3] La commissaire parlementaire aux forces
armées Claire Marienfeld rend visite au
contingent allemand IFOR, 18 mars 1996
(IMZ Bw/Modes)
36
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[3]
Enfin et surtout, la commission de la Défense imposa, avec
la synthèse des enseignements tirés au cours de l’année
le « deuxième amendement militaire », la fonction d'un
précédente. C’est essentiellement un « cahier de doléances »
« commissaire parlementaire aux forces armées » qui, en tant
et non un rapport de la situation globale de la Bundeswehr.
qu’organe auxiliaire, assiste le Bundestag dans l’exercice du
contrôle parlementaire sur la Bundeswehr.
Ce rapport procure au parlement et, du fait de sa retranscription
dans les média, à l’opinion publique un haut niveau de transpa­
A ce titre, la loi instituant le commissaire parlementaire aux
rence concernant l’état de choses à l’intérieur des forces armées
forces armées règle les questions de la nomination et du statut
et sert également de base aux parlementaires dans les processus
juridique. Le commissaire parlementaire aux forces armées est
de décision politique. Les rapports annuels sont donc un moyen
élu par le Bundestag à bulletin secret pour une durée de cinq
très utile pour attirer l’attention du parlement sur les préoccupa­
ans, à la majorité des membres du Bundestag, et est nommé
tions et les revendications des militaires et des forces armées
par le président fédéral. Faisant partie du pouvoir législatif,
dans leur ensemble.
l’organe sert également au parlement d’instance de contrôle
des forces armées. Le commissaire parlementaire intervient
Le premier à avoir exercé la fonction de commissaire parlemen­
dans deux cas de figure : sur instruction du Bundestag ou de
taire aux forces armées fut le général de corps d’armée (cr)
la Commission de la Défense aux fins de vérification de faits
Helmuth von Grolman, lequel prit ses fonctions le 3 avril 1959.
déterminés ou, et telle a été sa tâche principale jusqu’à mainte­
L’actuel commissaire parlementaire aux forces armées, Reinhold
nant, à sa propre initiative, selon son appréciation en conscience,
Robbe, est le dixième à exercer cette fonction importante depuis
lorsqu’il a connaissance de circonstances laissant supposer
son instauration.
une violation des droits fondamentaux des militaires ou des
principes de l’« Innere Führung ».
Autre organe assurant une fonction de contrôle : la commission
Par ailleurs, le commissaire parlementaire aux forces armées
Loi fondamentale prévoit que les effectifs, l’organisation et
occupe la fonction constitue égalemant une instance de recours.
l’armement de la Bundeswehr doivent apparaître dans le budget.
Tous les militaires ont le droit, quel que soit leur grade, de
La commission du budget examine et approuve le budget fédéral
du budget au sein du Bundestag. L’article 87a alinéa 1er de la
s’adresser à tout moment directement au commissaire parle­
et, ce faisant, également le budget de la Défense. Ses décisions
mentaire aux forces armées, c’est­à­dire sans passer par la voie
doivent être ratifiées par l’assemblée plénière du Bundestag.
hiérarchique. C’est la raison pour laquelle tous les militaires
reçoivent une instruction concernant les tâches de cet organe
dès leur formation de base.
Le commissaire parlementaire aux forces armées est habilité
vis­à­vis du ministère fédéral de la Défense et des organismes
qui lui sont rattachés à exiger la fourniture de renseignements
et la consultation de dossiers et à rendre visite à tout moment
– à l’improviste également – aux unités et services en Allemagne
comme sur les théâtres d’opérations. Ces visites créent un
rapport de proximité avec les personnels de la Bundeswehr et
véhiculent une impression authentique.
Le commissaire parlementaire aux forces armées soumet chaque
année au parlement un rapport des enseignements tirés. La
mission du commissaire parlementaire aux forces armées étant
celle d’une instance de contrôle et de recours, ce rapport fait
L A B U N D E S W E H R E T L E PA R L E M E N T
37
3
3.2
L A B U N D E S W E H R E T L E PA R L E M E N T
Les opérations extérieures de
la Bundeswehr sous mandat parlementaire
A la suite de la réunification allemande en octobre 1990, les at­
tentes des Alliés à l’égard de la République fédérale d’Allemagne
se sont accrues. Cette dernière devait assumer davantage de
responsabilités à l’échelon international et jouer un rôle plus actif
au sein des Nations unies, de l’OTAN et l’UEO. Durant la seconde
guerre du Golfe en 1990/1991, la communauté internationale
revendiqua même un engagement militaire de l’Allemagne en
dehors de la zone OTAN. Si l’Allemagne n'envoya pas de militaires
dans la zone de crise, elle stationna néanmoins des avions de
combat en Turquie. Ni le monde politique allemand ni la Bundes­
wehr n’étaient préparés à ces nouveaux défis.
La seconde guerre du Golfe déclencha en Allemagne la discussion
sur la question de la participation de la Bundeswehr à des enga­
gements armés sous mandat de l’ONU et de l’OTAN. Auparavant
déjà, des missions avaient à plusieurs reprises conduit la Bundes­
[1] Page de garde du document
d’information hebdomadaire
sur les opérations extérieures
« L’information du parlement »
(Bundeswehr)
[2] La Cour constitutionnelle
fédérale lors de la prononciation
du jugement relatif aux opérations
extérieures de la Bundeswehr,
12 juillet 1994 (ullstein bild/
Fotoagentur imo)
[1]
wehr à l’étranger, mais toujours pour des besoins humanitaires
et similaires, et si ses hommes étaient armés, ce n’était qu’à des
fins d’autodéfense.
Le jugement confirmait que la République fédérale d’Allemagne
La participation de la Bundeswehr aux missions mandatées par
en tant que membre légitime au sein de systèmes de sécurité tels
les NU en Somalie en 1992 et dans l’ex­République fédérale de
que l’ONU et l’OTAN était habilitée à participer avec ses forces
Yougoslavie à partir de 1993 exacerba le débat politique concer­
armées à des engagements prévus et régis par ces systèmes.
nant les engagements armés à l’étranger des forces armées
Cela inclut la participation à des engagements armés à l’étranger.
allemandes en vue du maintien et de l’imposition de la paix.
L’arrêt précisait cependant que tout engagement de ce type
Il atteignit son summum lorsque le SPD et le FDP (Parti libéral)
requérait en principe l’approbation préalable du Bundestag.
portèrent plusieurs plaintes devant la Cour constitutionnelle
En entérinant, également pour des raisons historiques, la
fédérale.
« réserve parlementaire », l’arrêt fonda le caractère d’« armée
parlementaire » de la Bundeswehr.
Cette dernière rejeta les plaintes dans son arrêt du 12 juillet 1994.
Les juges s’appuyèrent sur l’article 24 alinéa 2 de la Loi fonda­
A l’occasion de l’arrêt de la Cour constitutionnelle, une session
mentale pour justifier leur décision :
extraordinaire du Bundestag eut lieu le 22 juillet 1994, lors de
laquelle s’installa un débat passionné sur la signification de cet arrêt
« Pour sauvegarder la paix, la Fédération
pour la politique extérieure et de sécurité de la République fédé­
peut adhérer à un système de sécurité
rale d’Allemagne et des possibilités d’action qui l’accompagnent.
mutuelle collective ; elle consentira à cet
A l’issue de ce débat, la demande du gouvernement fédéral fut
effet aux limitations de ses droits de
acceptée par le Bundestag au scrutin nominal à 421 voix pour, 48
souveraineté qui établissent et garantissent
voix contre et 16 abstentions ; elle autorisa l’engagement armé
un ordre pacifique durable en Europe et
conformément à la décision du gouvernement fédéral du 15 juillet
entre les peuples du monde. »
1994 portant sur la participation des forces armées allemandes à
des opérations de l’OTAN et de l’UEO destinées à imposer les
38
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[2]
résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU visant à faire respec­
moins avoir été préalablement informé de la situation d’urgence.
ter l’embargo dans l’Adriatique et l’interdiction de survol de la
Les missions humanitaires n’impliquant pas les militaires dans des
Bosnie­Herzégovine.
interventions armées n’exigent pas l’approbation du parlement.
L’arrêt de la Cour constitutionnelle fédérale demandait au législa­
Le gouvernement fédéral s’engage à informer régulièrement le
teur de codifier de manière plus précise la forme et l’étendue de la
parlement des engagements en cours. Le Bundestag dispose en
participation du parlement dans le cadre d’engagements armés. Le
revanche d’un « droit de rétractation ». Il peut à tout moment
3 décembre 2004, le Bundestag adopta la loi portant sur la partici­
retirer son approbation concernant un mandat ayant déjà été
pation du parlement (Parlamentsbeteiligungsgesetz). Cette loi fixe
octroyé.
la procédure que doit suivre le gouvernement dans le cadre du
dépôt de demandes.
La loi portant sur la participation du parlement entra en vigueur
le 24 mars 2005 et est appliquée régulièrement depuis. Elle fit
Selon les termes de cette loi, le gouvernement fédéral doit en prin­
ses premières preuves lorsqu’il s’agit de prolonger l’engagement
cipe demander l’accord du Bundestag avant le début de l’engage­
armé des forces allemandes destiné au soutien de la mission de
ment. La demande du gouvernement doit préciser la mission
surveillance AMIS au Darfour/Soudan.
opérationnelle, le théâtre d’opérations, la durée et le coût de
l’engagement, le cadre juridique, l’effectif maximal du contingent
Suite à la demande déposée par le gouvernement fédéral, la
à engager ainsi que ses capacités. Le parlement peut ensuite statuer
période de discrétion conformément à la « procédure d’approba­
en faveur ou contre cette demande à la majorité simple. Il n’est pas
tion simplifiée » arriva à expiration le 11 mai 2005 sans que ni les
possible de modifier la décision. Seuls des engagements en cas de
fractions ni les députés du Bundestag n’y eussent fait opposition.
menace imminente, tels que des opérations de sauvetage, peuvent
La demande fut ainsi considérée comme acceptée et le mandat
être approuvés a posteriori par le parlement. Celui­ci doit néan­
comme prolongé.
L A B U N D E S W E H R E T L E PA R L E M E N T
39
Symboles de l’intégration
de l’Allemagne (Bundeswehr)
LA POLITIQUE DE
SECURITE ET DE DEFENSE
DE LA REPUBLIQUE
FEDERALE D’ALLEMAGNE
4
Symboles de l’intégration
de l’Allemagne (Bundeswehr)
4.1
Défis sécuritaires du XXIe siècle
4.2
Les fondements de la politique de
sécurité allemande
4.3
La sécurité interconnectée
4.4
Le rôle de la Bundeswehr
LA POLITIQUE DE SECURITE ET DE DEFENSE DE LA REPUBLIQUE FEDERALE D’ALLEMAGNE
41
4
4.1
LA POLITIQUE DE SECURITE ET DE DEFENSE DE
L A R E P U B L I Q U E F E D E R A L E D ’ A L L E M A G N E
Défis sécuritaires
du XXIe siècle
[1]
[1] Réunion du Conseil des ministres
de la Défense de l’UE à Wiesbaden,
1er mars 2007 (IMZ Bw/Rott)
42
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
En ce XXIe siècle, la situation en matière de politique de sécurité
La recrudescence de la criminalité organisée, du trafic de
globale n’a plus beaucoup à voir avec les risques et les défis
drogue et des attaques lancées à partir d’Internet démontrent
auxquels l’Allemagne était encore confrontée à l’époque de la
la vulnérabilité des sociétés occidentales dans le contexte de
guerre froide. Plus fortement qu’autrefois, l’Allemagne est
la mondialisation. Que ce soit dans les domaines du commerce
appelée aujourd’hui à engager sa responsabilité dans le monde
international, des investissements, des déplacements ou de la
et à parer activement à ces risques et relever ces défis. Toutefois,
communication et du savoir, on assiste à une croissance des
engager sa responsabilité ne signifie pas forcément s’engager
dépendances réciproques. Toute perturbation ou interruption
militairement. Il revient au gouvernement fédéral et au parle­
durable du réseau de relations global aurait de lourdes
ment d’examiner de très près les instruments et ressources
conséquences sur la prospérité économique et la stabilité
qu’il conviendrait d’employer dans la défense des intérêts de
sociale. Dans de nombreux Etats, on observe un manque de
l’Allemagne en matière de politique extérieure et de sécurité.
respect de l’Etat de droit, des principes de démocratie et de
la bonne gouvernance et, pour certains d’entre eux, un
Après la guerre froide, et notamment au cours des dernières
effondrement et une déliquescence de l’Etat. Un extrémisme
années, les évolutions en matière de politique de sécurité prirent
religieux ainsi que les conséquences du changement climatique,
une dimension plus vaste et plus dynamique – les chances et
des flux migratoires et de la pauvreté de masse ou des pandé­
les risques liés aux évolutions en matière de politique de sécurité
mies viennent très souvent aggraver cette situation.
se côtoient –, eu égard en particulier au système de la commu­
nauté internationale et à la cohésion entre les Etats occidentaux.
Dans le contexte de la progression de la mondialisation et des
interdépendances, la sécurité de l’Allemagne est aujourd’hui
indissociable des évolutions en cours en Europe et dans le
monde.
Actuellement, la sécurité de l’Allemagne n’est pas menacée
par les forces armées d’un autre Etat, par contre, il existe de
nouveaux risques et dangers. Les plus grandes menaces
émanent du terrorisme international et de la prolifération des
armes de destruction massive et de leurs systèmes de vecteurs.
Des acteurs étatiques mènent, en dehors des mécanismes de
contrôle reconnus, des activités de recherche nucléaire,
conjuguées à des essais destinés à développer les technologies
propres aux missiles balistiques et à en augmenter la portée.
Ceci vient compromettre l’efficacité et la fiabilité de traités
internationaux, conduit à une instabilité régionale et globale
et oblige l’Allemagne à prendre des précautions pour assurer
sa protection.
LA POLITIQUE DE SECURITE ET DE DEFENSE DE LA REPUBLIQUE FEDERALE D’ALLEMAGNE
43
4
4.2
LA POLITIQUE DE SECURITE ET DE DEFENSE DE
LA REPUBLIQUE FEDERALE D’ALLEMAGNE
Les fondements de la
politique de sécurité allemande
Les objectifs et les principes de la politique extérieure et de
des Etats. La maîtrise des défis qui nous attendent exige la
sécurité allemande n’ont guère changé au cours des dernières
coopération multinationale au sein des Nations unies, de
décennies. Les grandes lignes de la politique de sécurité demeu­
l’Alliance atlantique et de l’Union européenne ainsi qu’entre
rent la garantie d’une vie dans la paix et la liberté, la protection
ces organisations afin qu’au XXIe siècle la sécurité puisse être
contre les menaces ainsi que le maintien de la sécurité et de la
garantie de manière durable. Chacune des organisations prise
prospérité. C’est dans ce cadre de référence que l’Allemagne
isolément n’a ni les compétences ni les forces nécessaires pour
encourage l’imposition du droit international, le respect des
relever ces défis. Elles ne peuvent être pleinement efficaces
droits de l’homme et des principes humanitaires. La politique
que si elles coopèrent entre elles.
extérieure et de sécurité est toujours au service de la paix.
La mission qui, en vertu de la Loi fondamentale, nous incombe
L’Allemagne est intégrée dans des institutions, organisations
de défendre l’Allemagne et ses alliés et de protéger les citoyens
et partenariats internationaux et contribue ainsi à consolider
contre les attaques, les menaces extérieures et le chantage
la sécurité, y compris à l’intérieur de ses frontières. Le pilier
politique demeure inchangée. Cela inclut la capacité de contri­
de la politique allemande de sécurité demeure le partenariat
buer à la prévention des crises et des conflits ainsi qu’à leur
transatlantique basé sur des valeurs et des intérêts communs.
maîtrise et à la conduite d’opérations de relèvement postérieures
Par ailleurs, il faut noter que l’un des objectifs majeurs dans le
à ces crises et conflits. A ce titre, échoient à la Bundeswehr un
cadre de la défense des intérêts de l’Allemagne consiste en un
rôle et une importance essentiels.
renforcement de l’Europe en tant que centre géographique de
44
prospérité sociale et de sécurité. Globalement, il s’agit pour
Une politique de sécurité responsable exige une base solide et des
l’Allemagne d’utiliser son influence au sein d’organisations
objectifs clairs. L’édition 2006 du « Livre blanc sur la politique
inter­ et supranationales dans le but de poursuivre l’amélioration
de sécurité de l’Allemagne et sur l’avenir de la Bundeswehr »
de la cohérence et de la capacité d’action de la communauté
constitue un document d’orientation et de référence en
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
[2]
[1] Le ministre fédéral de la Défense Dr. Franz
Josef Jung présente le Livre blanc 2006,
25 octobre 2006 (IMZ Bw/Rott)
[2] Le siège des NU à New York, 14 août 2007
(IMZ Bw/Rott)
matière de politique de sécurité et de défense de notre pays
Aussi le Livre blanc tire­t­il trois conclusions essentielles :
sur la base duquel la sécurité et la prospérité des citoyennes et
citoyens en Allemagne seront préservées à l’avenir également.
Premièrement :
Il y a lieu de faire face aux risques existants pour notre sécurité
L’ouvrage englobe en même temps les définitions des valeurs,
ainsi que pour les droits de l’homme sur la base d’une approche
objectifs et intérêts principaux de la politique extérieure et de
préventive.
sécurité de l’Allemagne et une adaptation rigoureuse de la
définition du terme de « sécurité » au nouveau contexte.
Deuxièmement :
En cette époque de mondialisation, il n’est plus possible de
qui, outre des moyens militaires, inclut en priorité des moyens
séparer sécurité extérieure et sécurité intérieure. Ces deux
politiques, diplomatiques, économiques ainsi que des moyens
dimensions de la sécurité sont intimement liées et font souvent
en faveur de l’aide au développement.
Il est nécessaire d’adopter une approche globale interconnectée
appel aux mêmes instruments. Les risques sécuritaires ne
peuvent plus être considérés uniquement ou essentiellement
Troisièmement :
sous des aspects militaires. Seule une approche globale de la
Les mesures de prévention des crises devront s’inscrire de plus
politique de sécurité, déployée à l’échelle nationale et dépassant
en plus dans un cadre multinational.
les compartiments de politique, ainsi que les structures de
politique de sécurité interconnectées correspondantes peuvent
La politique de sécurité allemande au XXIe siècle est donc
garantir la sécurité au XXIe siècle.
orientée sur une approche préventive, interministérielle,
interconnectée et multilatérale.
LA POLITIQUE DE SECURITE ET DE DEFENSE DE LA REPUBLIQUE FEDERALE D’ALLEMAGNE
45
4
4.3
L A P O L I T I Q U E D E S E C U R I T E E T D E D E F E N S E D E
LA REPUBLIQUE FEDERALE D’ALLEMAGNE
La sécurité interconnectée
Les conclusions émanant du Livre blanc 2006 forment la clé de
société civile. Il y a lieu de donner aux acteurs non étatiques la
voûte du concept de sécurité interconnectée. Le concept de
possibilité de s’impliquer activement dans le travail des acteurs
sécurité interconnectée signifie une plus grande harmonisation
étatiques. De nos jours, les stratégies purement nationales qui ne
et une orientation résolument interministérielle des objectifs,
sont pas intégrées dans un concept multilatéral n’ont que peu de
des processus, des structures, des moyens et capacités dont
chance d’aboutir à quelque chose. C’est pourquoi il convient
disposent les différents acteurs engagés dans le domaine de
d’harmoniser et de coordonner les activités et les programmes
la sécurité. La sécurité interconnectée évolue à l’échelon
aux niveaux national, régional et international. Qui plus est,
international et supranational et concerne au même titre les
la coopération étroite entre différents acteurs étatiques,
acteurs étatiques et non étatiques. Par conséquent, pour
économiques et sociaux dans un cadre multinational permet
reprendre la devise « la meilleure crise est celle qui ne sera pas »,
d’éviter que des Etats ou des organisations ne soient dépassés
une interconnexion des ministères est une condition indispensa­
par la situation à laquelle ils font face.
ble à une réussite durable, notamment dans le domaine de la
prévention des crises.
Le processus d’élimination des facteurs et structures entravant le
développement d’une région de crise ne peut et ne doit toute­
Les fondements de cette entreprise commune et interministé­
fois pas intervenir seulement de l’extérieur. Les forces sociales et
rielle ont été définis dès mai 2004 avec le plan d’action intitulé
politiques qui soutiennent durablement ce processus doivent
« Prévention civile des crises, règlement des conflits et consolida­
émerger de l’intérieur même de ces régions de crise. Il revient
tion de la paix ». Adopté par le gouvernement, ce plan d’action
aux sociétés respectives des pays partenaires de prendre à leur
est l’émanation d’une volonté politique de faire évoluer, au
compte les processus de réforme et de développement. La
niveau interministériel, les concepts de prévention des crises
prévention des crises structurelles doit donc intervenir dans un
déjà existants en définissant des options d’action concrètes et
esprit de coopération, dans la mesure où elle est tributaire de la
d’ancrer ces concepts dans la conscience collective.
volonté de paix de ceux qui sont directement concernés.
Ce plan d’action constitue un signe politique déterminant en
La prévention des crises structurelles passe par le développement
faveur d’une synergie interministérielle des instruments et
et le soutien, dans les régions de crise, de structures étatiques
ressources dont dispose l’Allemagne en matière de politique
démocratiques efficaces pour éviter les conflits et rassembler les
extérieure et de sécurité dans l’esprit du concept élargi de
moyens permettant de mettre en œuvre un large éventail de
sécurité. A travers la mise en œuvre du plan d’action, le
mesures de prévention des crises, par la promotion d’une société
gouvernement fédéral réaffirme sa détermination à axer
du savoir pour consolider les potentiels de paix au sein de la
progressivement ses contributions à la paix, à la sécurité et au
population civile ainsi que par la création d’une base écono­
développement, notamment dans des pays en voie de trans­
mique et écologique destinée à améliorer les perspectives
formation et de développement, davantage sur des actions
d’existence des personnes concernées.
préventives et à en accroître ainsi l’efficacité et la durabilité.
Il identifie la promotion de l’Etat de droit, des droits de l’homme,
Font également partie de la stratégie globale nécessaire
de la démocratie et de la sécurité, la réforme du secteur de la
l’évolution du droit international public, la judiciarisation des
sécurité, le soutien des potentiels de paix au sein de la société
conflits (juridiction pénale et d’arbitrage internationale), la poli­
civile ainsi que la garantie des chances d’existence comme étant
tique de défense des droits de l’homme en tant que politique
les leviers stratégiques d’une politique de prévention des crises.
préventive en faveur de la paix et l’intensification du recours aux
sanctions civiles. En améliorant les conditions économiques,
46
Par ailleurs, une stratégie de prévention des crises et de maîtrise
sociales, écologiques et politiques dans les pays de coopération,
des conflits exige, pour être cohérente, de renforcer la participa­
la politique de développement, en particulier, contribue à empê­
tion des organisations non gouvernementales (ONG) et de la
cher et à résorber les causes structurelles de la violence.
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
[1] Projet commun entre la Bundeswehr et
l’organisation humanitaire Cap Anamur : des
soldats de la Bundeswehr s’entretiennent avec
un membre de Cap Anamur, Kunduz, 19 octobre
2004 (IMZ Bw)
LA POLITIQUE DE SECURITE ET DE DEFENSE DE LA REPUBLIQUE FEDERALE D’ALLEMAGNE
47
4
4.4
LA POLITIQUE DE SECURITE ET DE DEFENSE DE
LA REPUBLIQUE FEDERALE D’ALLEMAGNE
Le rôle de la Bundeswehr
Dans un monde de globalisation et d’interconnexion, les fron­
Au regard des défis auxquels nous sommes confrontés en ce
tières nationales et les grandes distances n’offrent plus qu’une
XXIe siècle en matière de politique de sécurité, l’armée n’a donc
protection très limitée contre les évolutions déstabilisantes et les
pas perdu de son importance. L’importance de l’armée n’a fait
foyers de danger. Les risques d’aujourd’hui sont plus hétérogènes,
que se déplacer. Dans le contexte des défis en matière de poli­
plus diffus, plus complexes et le plus souvent guère prévisibles.
tique de sécurité internationale, les moyens militaires ne peuvent
plus être considérés comme des moyens primaires mais comme
L’Allemagne a reconnu que l’emploi de forces militaires peut être
des moyens complémentaires si l’on veut garantir la sécurité tant
nécessaire lorsque l’on veut contrer des crises dès leur émergence
au niveau international qu’au niveau national.
afin que celles­ci ne se transforment pas en conflits. Grâce au
large éventail de moyens d’action militaires et politico­militaires
L’armée et les capacités particulières dont elle dispose occu­
dont elle dispose, la force armée peut non seulement juguler
pent un rôle, important soit, mais pas exclusif. Les moyens
la violence ou y mettre fin par la contrainte, mais également
militaires ne sont censés être utilisés que là où les moyens
contribuer à résorber les causes de cette violence.
civils ne sont pas appropriés ou pas disponibles ou lorsqu’ils
Par conséquent, la Bundeswehr étant un instrument d’une
lieu que si, suite à une analyse de la situation politique et
politique globale et préventive de sécurité et de défense, il est
à une décision prise par le gouvernement fédéral et le
indispensable pour l’Allemagne que cette armée soit perfor­
parlement, il s’avère absolument nécessaire et indispensable.
mante. Elle doit être en mesure, sur la base d’un concept élargi
L’engagement des forces doit être limité et poursuivre un
s’avèrent infructueux. L’engagement des forces armées n’a
de sécurité interconnectée, d’assumer des tâches et des missions
objectif clairement défini. Il doit s’inscrire, dans toute la
s’inscrivant dans le contexte des défis du XXIe siècle. D’autant
mesure du possible, dans un environnement multinational.
plus que, sans les capacités militaires de la Bundeswehr, nous
ne serions pas en mesure d’honorer nos engagements pris au
niveau international.
48
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
[1] Un militaire de la Bundeswehr
chargé de la formation de la police
afghane (Bundeswehr)
Mais l’engagement de moyens et de capacités militaires ne peut,
Ces dernières années, la Bundeswehr a fait l’objet de profondes
abstraction faite de toutes les considérations politiques, être
mesures d’adaptation à ses nouvelles tâches. La structure, les
systématiquement exclu ou invoqué uniquement en cas d’échec
processus, le personnel et l’équipement ont été alignés sur l’évo­
d’autres options.
lution permanente des exigences. Ainsi, l’analyse en structures
interdépendantes a gagné les esprits au sein de la Bundeswehr.
Au niveau stratégique, les capacités militaires devraient être prises
en considération, tant sur le plan national que sur le plan multi­
Les contributions de la Bundeswehr dans le cadre de l’action
national, dès le début dans un processus de planification politique
globale menée par l’Etat en matière de prévention sécuritaire
intégré. Aux niveaux opératif et tactique, il est nécessaire d’établir
interconnectée sont multiples, allant de l’engagement des forces
une coordination prononcée avec les capacités et acteurs civils. Le
armées allemandes dans la mise en œuvre de mesures de sécuri­
fait que l’Allemagne continue de s’investir de manière soutenue,
sation d’éléments civils par des moyens militaires dans des régions
à travers l’engagement de la Bundeswehr, dans les opérations
de crise à la participation à des opérations de rétablissement et
multinationales lui garantit un droit de regard approprié, une
de maintien de la paix en vue de la mise sur pied d’institutions
marge de manœuvre et la possibilité d’exercer une influence au
étatiques et démocratiques et de la reconstruction économique
sein des organisations internationales.
et sociale, en passant par l’aide à la formation et à l’équipement
militaires, la fourniture de conseils en phase de transformation
Depuis le début des années 90, la Bundeswehr est de plus en
du secteur sécuritaire des pays en crise et le soutien actif des
plus souvent engagée dans des opérations extérieures. Les effectifs
pays candidats à l’adhésion à l’OTAN et à l’Union européenne.
des contingents déployés ont connu une croissance constante, et
les missions et les tâches sont devenues de plus en plus globales
L’exemple de l’Afghanistan illustre bien comment l’Allemagne y
mais aussi plus risquées. Actuellement, la Bundeswehr est enga­
suit, également avec ses forces armées, une approche élargie
gée dans des opérations extérieures avec un effectif d’environ
interministérielle s’inscrivant dans l’esprit de la sécurité intercon­
7 400 militaires masculins et féminins.
nectée, approche qui prend en compte à part égale les actions
d’urgence immédiates et les actions nécessaires à long terme.
LA POLITIQUE DE SECURITE ET DE DEFENSE DE LA REPUBLIQUE FEDERALE D’ALLEMAGNE
49
IFOR
(décembre 1995 à décembre 1996)
Mission de l'OSCE
SFOR
(août 2008 à juin 2009)
(décembre 1996 à décembre 2004)
UNOMIG
MACEDOINE
(mars 1994 à juin 2009)
(différentes opérations)
UNSCOM
(août 1991 à septembre 1996)
OEF
(KOWEIT : février 2002 à juillet 2003)
UNAMIC
UNMEE
(octobre 1991 à mars 1992)
(février 2004 à octobre 2008)
UNTAC
(mai 1992 à novembre 1993)
UNOSOM II
(août 1992 à mars 1994)
ARTEMIS
AMM
UNAMIR
(septembre 2005 à mars 2006)
(juillet à décembre 1994)
(juillet à septembre 2003)
EUFOR RD CONGO
(juillet à décembre 2006)
Un aperçu des anciennes opérations
extérieures de la Bundeswehr
Missions de l’OTAN
IFOR
Missions de l’UE
AMM
Missions des NU
UNAMIC
Implementation Force,
Bosnie­Herzégovine
Aceh Monitoring Mission,
Indonésie
United Nations Advance
Mission in Cambodia, Cambodge
MACEDOINE
CONCORDIA
UNAMIR
Opérations
Essential Harvest, Amber Fox,
Allied Harmony
Opération de l’UE en Macédoine
avec le soutien de l’OTAN
United Nations Assistance
Mission for Rwanda, Rwanda
Lutte contre le
terrorisme
international
SFOR
EUFOR RD CONGO
UNMEE
OEF
Opération de l’UE en République
démocratique du Congo
United Nations Mission
in Ethiopia and Eritrea,
Ethiopie/Erythrée
Operation Enduring Freedom,
2002/2003, au Koweït
Stabilisation Force,
Bosnie­Herzégovine
ARTEMIS
Opération de l’UE en République
démocratique du Congo
Mission d’observation de
l’OSCE en Géorgie
UNOMIG
United Nations Observer Mission
in Georgia, Géorgie
UNOSOM II
United Nations Operation in
Somalia II, Somalie
UNSCOM
United Nations Special
Commission, Irak
UNTAC
United Nations Transitional
Authority in Cambodia, Cambodge
La Bundeswehr participe
également à des opérations
extérieures ne figurant pas
dans cette liste
LES OPERATIONS DE LA BUNDESWEHR
AUJOURD’HUI TERMINEES
5
Un aperçu des anciennes opérations
extérieures de la Bundeswehr
5.1
Irak
5.2
Cambodge
5.3
Somalie
5.4
Rwanda
5.5
Koweït
5.6
Macédoine
5.7
Indonésie
5.8
Ethiopie/Erythrée
5.9
République démocratique du Congo
5.10 Géorgie
L E S O P E R AT I O N S D E L A B U N D E S W E H R A U J O U R D ’ H U I T E R M I N E E S
51
5
L E S O P E R AT I O N S D E L A B U N D E S W E H R A U J O U R D ’ H U I T E R M I N E E S
5.1
Irak
5.2
[1]
[2]
Cambodge
L’attaque du Koweït par l’Irak de Saddam Hussein en août 1990
Le régime de terreur des « Khmers rouges », la guerre avec
et son occupation survinrent alors que la République fédérale
le Vietnam et la guerre civile ont entièrement détruit les struc­
d’Allemagne se trouvait dans la phase finale des « entretiens
tures sociales et étatiques de ce pays. Un accord conclu en 1991
deux plus quatre » et que la réunification des deux Etats alle­
entre les différentes factions de la guerre civile confia aux Nations
mands était au centre de l’action politique nationale. La commu­
unies un rôle décisif dans le futur processus de paix. Le Cam­
nauté internationale réagit à la crise du Golfe, l’Allemagne en­
bodge fut placé sous la quasi­tutelle administrative de l’ONU,
voya des troupes pour protéger la Turquie, partenaire de l’OTAN.
afin qu’il puisse aménager sa transition vers un avenir de paix et
Le 17 janvier 1991, la coalition internationale lança une attaque
procéder à des élections libres.
contre l’Irak baptisée « opération Desert Storm » qui aboutira à
la libération du Koweït. Les combats prirent officiellement fin le
C’est sur la base de la résolution 717 du Conseil de sécurité des
28 février 1991. A la suite de cette guerre, le Conseil de sécurité
Nations unies du 16 octobre 1991 et d’une décision du ministère
des Nations unies décréta le 3 avril 1991 avec la résolution 687
fédéral de la Défense du 25 octobre 1991 que la Bundeswehr
l’instauration d’une mission de contrôle des armes NBC en Irak
participa à l’opération de préparation UNAMIC (United Nations
(UNSCOM).
Advance Mission in Cambodia) au Cambodge. Jusqu’à 15 mili­
taires issus du service de santé furent déployés d’octobre 1991
La Bundeswehr participa à l’opération UNSCOM (United Nations
à mars 1992 dans ce pays asiatique au titre de cette opération
Special Commission) d’août 1991 au 30 septembre 1996. 805
destinée à préparer la mission UNTAC (United Nations Transitio­
vols d’hélicoptère CH­53, soit l’équivalent de 3 982 heures de vol
nal Authority in Cambodia). C’est sur la base de la RCSNU
(armée de terre), et 4 452 vols avec l’avion C­160 « Transall »,
(Résolution du Conseil de sécurité des Nations unies) 745 du
soit 4 071 heures de vol (armée de l’air), furent effectués dans le
16 février 1992 et d’une décision du gouvernement fédéral du
cadre du soutien de cette mission en prestations de transport, en
8 avril 1992 que la Bundeswehr assura, du 22 mai 1992 au
capacités d’évacuation sanitaire ainsi qu’en capacités de trans­
12 novembre 1993, le soutien médical pour la mission UNTAC
port aérien destinées aux experts de l’UNSCOM. 30 soldats de
et pour certaines parties de la population civile avec environ
l’armée de terre étaient engagés à Bagdad (Irak) et sept soldats
150 militaires issus du service de santé et un hôpital de campagne
de l’armée de l’air à Bahreïn pour les besoins de cette mission.
doté de 60 lits. Environ 3 500 traitements hospitaliers et plus
de 110 000 traitements ambulatoires y furent réalisés. Avec la
mission UNTAC, la participation de l’Allemagne à des opérations
extérieures prenait une nouvelle dimension. C’était la première
fois qu’un contingent allemand d’une importance significative
était engagé dans une opération extérieure.
52
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
5.3
Somalie
5.4
[3]
Rwanda
[4]
Une autre opération extérieure relativement importante suivra
Les affrontements ethniques, cruels dans certains cas, ayant
pour la Bundeswehr, à savoir l’UNOSOM II (United Nations Ope­
persisté au Rwanda pendant une longue période entre la popu­
ration in Somalia). Suite à une guerre civile et à la désintégration
lation majoritaire, celle des Hutus détenant le pouvoir dans le
des structures étatiques, une catastrophe humanitaire de grande
pays, et celle des Tutsis minoritaires menèrent à une guerre civile
ampleur était à déplorer en Somalie. Pour y remédier, les Nations
sanglante, à laquelle l’accord de paix de 1993 devait mettre fin.
unies autorisèrent plusieurs opérations de paix dans ce pays est­
Les affrontements interethniques atteignirent pourtant leur
africain. Sur la base de la RCSNU 814 du 25 mars 1993 et de la
paroxysme en 1994 pour se transformer en un génocide qui aura
décision du Bundestag du 21 avril 1993, environ 1 700 militaires
fait plus de 800 000 victimes chez les Tutsis. Ce génocide ne
de l’armée de terre furent déployés à Belet Uen (Somalie), environ
prendra fin qu’avec l’arrivée d’une armée tutsie en provenance
600 soldats de la marine ainsi qu’environ 120 soldats de l’armée
d’Ouganda.
de l’air à Djibouti et à Mombasa (Kenya) pour assurer un pont
aérien entre le Kenya et la Somalie (du 25 août 1992 au 21 mars
Dans ce contexte, en soutien à la mission des Nations unies
1993) et le soutien logistique des troupes onusiennes (du
UNAMIR (United Nations Assistance Mission for Ruanda) au
28 août 1993 au 23 mars 1994). 650 vols humanitaires, environ
Rwanda, l’armée de l’air allemande installa, du 18 juillet au
30 projets d’aide humanitaire et plus de 18 000 traitements
31 décembre 1994, un pont aérien au départ de Nairobi (Kenya)
médicaux furent réalisés dans le cadre de cette mission.
et de Johannesbourg (Afrique du Sud) à destination de Goma
(Zaïre) et de Kigali (Rwanda) pour ravitailler les réfugiés rwandais.
Cette mission s’appuyait sur la RCSNU 872 du 5 octobre 1993.
30 soldats effectuèrent 80 vols à bord du Boeing 707 et 208 vols
à bord du C­160 « Transall ».
[1] L’hélicoptère de transport moyen CH­53 en
opération pour les Nations unies, 16 septembre
1996 (IMZ Bw/Modes)
[2] UNTAC, hôpital de campagne de la
Bundeswehr à Phnom Penh, 28 juillet 1992
(IMZ Bw/Modes)
[3] UNOSOM II, Belet Uen, 14 juillet 1993
(IMZ Bw/Modes)
[4] Un « Transall » sur la piste d’atterrissage
d’une escadre de transport aérien
(IMZ Bw/Modes)
L E S O P E R AT I O N S D E L A B U N D E S W E H R A U J O U R D ’ H U I T E R M I N E E S
53
5
L E S O P E R AT I O N S D E L A B U N D E S W E H R A U J O U R D ’ H U I T E R M I N E E S
5.5
Koweït
5.6
[1]
[2]
Macédoine
L’attentat perpétré par le réseau Al­Qaïda sur le World Trade
L'Ancienne République Yougoslave de Macédoine a été le théâtre
Center à New York et sur des cibles à Washington le 11 septem­
d’une intervention de stabilisation de la part de la communauté
bre 2001, et sur lequel nous reviendrons plus tard, conduisirent
internationale, en raison de son voisinage immédiat avec la
à de vastes opérations de lutte contre le terrorisme international,
région de crise que constituait le Kosovo, mais de plus en plus
dont une partie se poursuit encore aujourd’hui. En vue de
également en raison de tensions et de la menace d’une guerre
protéger la population koweïtienne et les forces de la coalition
civile entre différentes ethnies. Dans les années 2001 à 2003, la
stationnées au Koweït dans le cadre de l’opération Enduring
Bundeswehr participa en Macédoine aux opérations de l’OTAN
Freedom (OEF) contre d’éventuelles attaques terroristes ou
Essential Harvest, Amber Fox, Allied Harmony et Concordia.
militaires à l’aide d’armes de destruction massive, la Bundeswehr
Ces opérations s’appuyaient sur la RCSNU 1371 de 2001 et sur
déploya dans le cadre de l’OEF au Koweït, suite à la décision du
plusieurs décisions du Bundestag (29 août 2001, 27 septembre
Bundestag du 16 novembre 2001, 250 militaires spécialistes de
2001, 13 décembre 2001, 22 mars 2002 et 23 octobre 2002).
défense NBC équipés de six VAB de reconnaissance NBC de type
La Bundeswehr avait pour mission, en conjonction avec d’autres
« Fuchs » du 10 février 2002 au 4 juillet 2003. Egalement dans
partenaires de l’OTAN, de rassembler et de détruire sur le terri­
le cadre de l’OEF, l’armée de l’air fournit, du 26 novembre 2001
toire macédonien les armes ayant été remises volontairement
au 10 janvier 2002, un soutien en matière de transport aérien
par les groupes armés ethniques albanais (Essential Harvest)
destiné au transport des forces américaines de l’Allemagne
ainsi que de protéger les observateurs des organisations
vers la Turquie. A raison de 116 vols pour 1 250 heures de vol,
internationales (UE et OSCE). Environ 500 soldats allemands
environ 540 tonnes de matériel et 160 passagers furent trans­
participèrent à l’opération Essential Harvest (29 août 2001 au
portés.transportiert.
27 septembre 2001). Au total, 3 700 armes environ et près de
400 000 munitions, grenades et explosifs furent collectés.
Environ 220 et 70 militaires allemands respectivement participè­
rent aux opérations Amber Fox (du 27 septembre 2001 au
16 décembre 2002) et Allied Harmony (du 16 décembre 2002
[1] OEF Koweït, exercice de décontamination,
1er février 2003 (IMZ Bw/Pauli)
[2] Task Force Fox, poste d’observation allemand
à Skopje, 25 mars 2002 (IMZ Bw/Modes)
[3] Destruction d’armes (AMM)
[4] Un officier allemand (à gauche) s’entretient
avec le général de corps d’armée indien Lidder,
commandant de la force, Khartoum, 3 avril 2006
(IMZ Bw/Rott)
au 31 mars 2003) qui suivirent. Par la suite, l’Union européenne
réalisa pour la première fois une opération militaire PESD faisant
appel aux capacités de planification de l’OTAN (conformément
aux accords dits de « Berlin plus »), à laquelle participèrent
environ 400 soldats de 27 nations. 70 soldats de la Bundeswehr
furent engagés dans cette opération appelée « opération
Concordia » (du 31 mars au 16 décembre 2003).
54
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
5.7
Indonésie
5.8
[3]
Ethiopie/Erythrée
[4]
En vue de contrôler si l’accord de règlement pacifique du conflit
La Bundeswehr participa à la mission UNMEE (United Nations
passé le 15 août 2005 entre le gouvernement indonésien et le
Mission in Ethiopia and Eritrea) de février 2004 à octobre 2008
« Mouvement pour un Aceh libre » était bien respecté, l’Alle­
en détachant deux observateurs militaires. La mission surveillait
magne participa à la mission AMM (Aceh Monitoring Mission)
depuis juillet 2000 le cessez­le­feu négocié entre l’Ethiopie et
en envoyant quatre observateurs militaires. Cette mission d’une
l’Erythrée dans le cadre des « accords d’Alger » qui mirent fin
durée de six mois (du 15 septembre 2005 au 15 mars 2006) fut
à deux ans de conflit frontalier entre les deux pays. L’UNMEE
réalisée sur la base d’une décision du gouvernement fédéral du
soutint, par ailleurs, la commission frontalière indépendante
16 septembre 2005.
mandatée par les Nations unies dans le cadre de la délimitation
du tracé des frontières entre l’Ethiopie et l’Erythrée définitive­
C’est dans le contexte de la catastrophe du Tsunami (Noël 2004)
ment fixé en avril 2002. Le mandat de l’UNMEE consistait pour
que fut réalisée une mission de l’UE de désarmement et de réin­
l’essentiel en la surveillance de la zone démilitarisée et des
tégration d’anciens résistants au gouvernement indonésien dans
positions des parties au conflit, la coordination des activités
la province d’Aceh dans le nord de l’Indonésie. La mission AMM
des Nations unies dans les zones frontalières, notamment du
rassemblait environ 220 observateurs au total qui se trouvaient
programme humanitaire de protection antimines, ainsi que le
sur place depuis le 15 septembre 2005. Participèrent également
soutien de la commission frontalière (administration, logistique,
à la mission, outre les Etats de l’UE, les Etats membres de
déminage dans la zone de démarcation). Aucun progrès réel
l’ASEAN Thaïlande, Brunei, Singapour, Philippines et Malaisie
n’a été enregistré dans le cadre du processus de paix entre
(soit au total près de 90 observateurs). L’Allemagne était repré­
l’Erythrée et l’Ethiopie depuis la décision de la commission
sentée par neuf observateurs au total : cinq experts civils déta­
frontalière indépendante d’avril 2002. La commission frontalière a
chés par le ministère des Affaires étrangères et quatre soldats
fixé le tracé des frontières fin novembre 2007 et a déclaré sa
allemands en civil envoyés par la Bundeswehr.
mission comme accomplie. Pour diverses raisons, les deux parties
n’ont pas reconnu les décisions de la commission frontalière.
Placée sous le commandement de l’UE, la mission fut perçue
Bien que le Conseil de sécurité des Nations unies eût prolongé
dans toute la région comme un signe visible de l’engagement
la mission jusqu’au 31 juillet 2008 à travers la RCSNU 1798
actif de l’Europe dans le règlement d’un conflit qui couvait
(2008), les membres de la mission stationnés en Erythrée durent
depuis longtemps. Cela valut à l’Europe un regain de prestige
être transférés vers l’Ethiopie en février 2008 en raison du
en matière de politique étrangère en Asie du Sud­Est. La contri­
blocus des livraisons de gazole instauré par l’Erythrée. Le
bution de l’Allemagne y fut concluante. Le 15 mars 2006, la
31 juillet 2008, le Conseil de sécurité des Nations unies mit un
mission prenait fin pour les soldats allemands.
terme à la mission. L’exécution de la mission prit fin en octobre
2008.
L E S O P E R AT I O N S D E L A B U N D E S W E H R A U J O U R D ’ H U I T E R M I N E E S
55
5
L E S O P E R AT I O N S D E L A B U N D E S W E H R A U J O U R D ’ H U I T E R M I N E E S
5.9
République démocratique du Congo
En raison de guerres (civiles) interminables, d’une mauvaise gestion de l’économie, de la
corruption, des conflits ethniques, de l’ingérence de certains Etats voisins et du débordement
de conflits dans les Etats limitrophes (le Rwanda, par exemple), la République démocratique
du Congo, située au cœur de l’Afrique, est devenue l’un des foyers de crise du continent
africain. Jusqu’à présent, l’Allemagne a participé à deux reprises à des opérations aujourd’hui
terminées dans ce pays.
Artemis
EUFOR RD Congo
La première opération autonome de l’UE, baptisée « Artemis »,
Dans le cadre du processus de paix et en vue de la formation
qui fut menée dans les provinces orientales du Congo Ituri et
d’un gouvernement démocratique légitime, les parties au conflit
Kivu visait à empêcher une catastrophe humanitaire. Devant
convinrent de procéder à des élections présidentielles libres et
l’absence d’une puissance régulatrice et l’insuffisance des capaci­
transparentes pour le Congo. Les principaux rivaux étaient le
tés et prérogatives de la mission onusienne MONUC de l’époque
président en exercice, Joseph Kabila, et son opposant, l’ancien
(agissant en vertu du chapitre VI de la Charte des Nations unies),
chef rebelle Jean­Paul Bemba. Entre le 30 juillet et le 30 novem­
les Nations unies craignaient un massacre au sein de la popula­
bre 2006, la Bundeswehr participa à l’opération EUFOR RD
tion civile si la communauté internationale n’intervenait pas.
Congo de l’UE, lancée sur la base de la RCSNU 1671 (2006) et
C’est pourquoi l’Union européenne mit en œuvre l’opération
de la décision du Bundestag du 1er juin 2006, en déployant
Artemis, placée sous la conduite de la France, pour donner le
780 soldats dans la République démocratique du Congo. La
temps aux Nations unies de transférer les forces de la MONUC II
mission consistait à soutenir la mission de paix onusienne
dans la zone de déploiement de l’Ituri et d’établir la pleine capa­
MONUC (Mission des Nations unies en République démocratique
cité opérationnelle conformément au chapitre VII de la Charte
du Congo) dans le cadre de la sécurisation de ce qui constituait
des Nations unies. Le théâtre d’opérations principal des troupes
les premières élections libres depuis 40 ans. Un contingent
de l’UE était la ville de Bunia située à l’est du Congo.
d’environ 2 100 militaires issus des Etats membres de l’UE devait
empêcher toute perturbation dans le déroulement des élections.
La Bundeswehr soutint l’opération Artemis du 18 juillet au
A travers la mise en place d’un environnement sécurisé, la popu­
25 septembre 2003 en effectuant des missions de transport
lation congolaise fut encouragée à participer au scrutin. La pré­
aérien sur l’axe Allemagne­Ouganda avec le C­160 « Transall »,
sence du contingent européen contribua à ce que les élections,
en mettant à disposition un Airbus A­310 pour les besoins de
qui débutèrent au Congo le 30 juillet 2006, se déroulèrent pour
l’évacuation sanitaire (Medical Evacuation) ainsi que des officiers
une large part dans un climat calme et paisible. Le rapatriement
d’état­major en vue du soutien de la conduite de l’opération.
des soldats allemands stationnés à Kinshasa et à Libreville
Celle­ci était basée sur la RCSNU 1484 (2003) et le mandat du
(Gabon) débuta le 1er décembre 2006 et s’acheva le 22 décem­
Bundestag en date du 18 juin 2003. Au total, 35 soldats furent
bre 2006 conformément à la planification.
engagés dans les missions de transport aérien, environ 60 dans
les missions d’évacuation sanitaire et deux au quartier général
23 nations au total prirent part à l’opération. Cela représentait
Artemis en France. Près de 300 tonnes de matériels furent
un effectif de 2 400 soldats. Outre la France et l’Allemagne, les
transportées en plus de 1 370 heures de vol avec le C­160
deux plus grands pourvoyeurs de troupes, la Belgique, l’Italie,
« Transall ».
les Pays­Bas, la Pologne, la Suède, l’Espagne et le Portugal four­
nirent des contributions importantes ; par ailleurs, l’opération
[1] Visite à l’école primaire Saint­
Paul de Kinshasa, nouvellement
aménagée avec le soutien de
l’Allemagne, 24 octobre 2006
(IMZ Bw/Bienert)
[2] Théâtre d'opérations :
le Congo (Bundeswehr)
reçut également le soutien de la Turquie, de la Finlande, de
l’Autriche, de l’Irlande, de la Grèce, du Luxembourg, de la
Slovénie, du Royaume­Uni, de Chypre et, à titre temporaire,
de la Suisse. L’opération conduite par l’UE était sous commande­
ment allemand, le quartier général stratégique ayant été installé
au Commandement opérationnel de la Bundeswehr situé dans
la localité de Schwielowsee près de Potsdam.
56
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
CAMEROUN
GUINEE
EQUATORIALE
Libreville
Bunia
REPUBLIQUE
DU CONGO
OUGANDA
GABON
RWANDA
REPUBLIQUE
DEMOCRATIQUE
DU CONGO
Kinshasa
BURUNDI
TANZANIE
[2]
La zone de déploiement de la mission EUFOR RD Congo
englobait la totalité du territoire congolais à l’exception des
provinces de l’est (Orientale, Maniema, Nord­ et Sud­Kivu).
La zone de déploiement du contingent allemand était limitée
à Kinshasa.
L E S O P E R AT I O N S D E L A B U N D E S W E H R A U J O U R D ’ H U I T E R M I N E E S
57
5
5.10
L E S O P E R AT I O N S D E L A B U N D E S W E H R A U J O U R D ’ H U I T E R M I N E E S
Géorgie :
UNOMIG et mission d’observation de l’OSCE
UNOMIG
OSCE
A la suite de la dissolution de l’Union soviétique, un conflit armé
Le 27 août 2008, après la fin du conflit entre la Russie, l’Abkha­
émergea dans l’ouest de la Géorgie autour de l’Abkhasie, qui
sie et l’Ossétie du Sud, d’un côté, et la Géorgie, de l’autre, le
proclama son indépendance, un statut que la Géorgie ne recon­
gouvernement fédéral avait ordonné la participation de jusqu’à
nut pas. La mission baptisée « United Nations Observer Mission
15 observateurs militaires à une mission de l’OSCE en Géorgie.
in Georgia » (UNOMIG), organisée en août 1993 avec la partici­
La mission avait pour objectif de surveiller la bonne exécution
pation, par moments, de 136 observateurs militaires issus de
du plan de paix en six points axé essentiellement sur la frontière
33 Etats, avait en premier lieu pour tâche de surveiller la zone
administrative avec l’Ossétie du Sud. Dans un premier temps,
de sécurité mise en place entre la Géorgie et l’Abkhasie et de
l’OSCE ne demanda que l’envoi de deux observateurs militaires.
créer les conditions préalables à un retour sécurisé et organisé
Ces derniers furent déployés dans la zone de conflit le 28 août
des réfugiés de guerre. L’Allemagne participa à partir de 1994,
2008.
à travers l’envoi de jusqu’à 20 militaires, à la mission de paix
qui constituait un engagement non armé ne nécessitant pas
un mandat parlementaire. Le contingent allemand, composé
d’observateurs militaires et, avant tout, de personnels issus du
service de santé, comptait par moments 12 soldats. La Bundes­
wehr fut ainsi le pourvoyeur de l’ensemble du dispositif de
soutien médical prévu pour la mission et le plus grand contin­
gent militaire national.
Les missions d’observation, même non armées, peuvent abriter
des risques pour l’intégrité corporelle et la vie. Ainsi un hélicop­
tère des Nations unies fut abattu le 8 octobre 2001 lors d’un vol
de patrouille. 9 membres de la mission, dont un officier allemand
du service de santé, y trouvèrent la mort.
Le conflit qui, en août 2008, opposa la Russie et l’Abkhasie
soutenue par la Russie, d’un côté, et la Géorgie, de l’autre, n’a
pas pu être empêché par l’UNOMIG. La mission fut mandatée
par le Conseil de sécurité des Nations unies pour durer jusqu’au
15 juin 2009. En raison des évolutions politiques les plus ré­
centes dans la région, le mandat ne fut pas prolongé et
expira.
58
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
Cette mission a également pris fin en juin 2009.
[1]
ABKHASIE
FEDERATION DE RUSSIE
Soukhoumi
ZONE DE
SECURITE
Gali
OSSETIE DU
SUD
Tskhinvali
Zugdidi
GEORGIE
Tbilissi
TURQUIE
ARMENIE
AZERBAIDJAN
[2]
[1] Un militaire allemand (à
gauche) et un militaire suédois
(au centre) effectuent une
mission de reconnaissance en
Géorgie en qualité d’observa­
teurs non armés des Nations
unies. En arrière­plan, un
militaire russe armé assurant
la protection (Bundeswehr)
[2] Théâtre d'opérations :
la Géorgie (Bundeswehr)
L E S O P E R AT I O N S D E L A B U N D E S W E H R A U J O U R D ’ H U I T E R M I N E E S
59
EUFOR ALTHEA
KFOR
(depuis décembre 2004)
(depuis 1999)
ISAF
OAE
(depuis 2001)
(depuis janvier 2002)
UNIFIL
(depuis octobre 2006)
UNAMID
(depuis janvier 2008)
auparavant
AMIS
UNMIS
OEF
(depuis 2005)
(depuis novembre 2001)
EUNAVFOR ATALANTA
(depuis décembre 2008)
EUSEC RD CONGO
(depuis mars 2006)
Un aperçu des opérations
extérieures actuelles de la
Bundeswehr
Lutte contre le
terrorisme
international
Missions de l’OTAN
ISAF
Missions de l’UE
EUFOR ALTHEA
Missions des NU
UNAMID
OAE
International Security
Assistance Force, Afghanistan
European Union Force,
Bosnie­Herzégovine
KFOR
EUNAVFOR ATALANTA
Kosovo Force, Kosovo
Opération de l’UE de lutte contre
la piraterie au large des côtes de
la Somalie
African Union United Nations
Hybrid Operation in Darfur,
Soudan, succédant à l’opération
AMIS (African Union Mission
in Sudan)
Operation Active Endeavour,
zone méditerranéenne
(opération de l’OTAN en vertu de
l’article 5 du Traité de l’Atlantique
Nord)
UNIFIL
OEF
United Nations Interim
Force in Lebanon, Liban
Operation Enduring Freedom,
Base à Djibouti, Corne de
l'Afrique
EUSEC RD CONGO
EU Security Sector
Mission de réforme en
République démocratique
du Congo
UNMIS
United Nations Mission
in Sudan, Soudan
6
LES MISSIONS ACTUELLES
DE LA BUNDESWEHR
Un aperçu des opérations
extérieures actuelles de la
Bundeswehr
6.1
Bosnie­Herzégovine
6.2
Kosovo
6.3
La Bundeswehr dans la lutte contre
le terrorisme international
6.4
Afghanistan
6.5
République démocratique du Congo
6.6
Liban
6.7
La Bundeswehr dans la lutte contre la piraterie
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
61
Une patrouille de la SFOR quitte
le camp de Rajlovac, 20 juin 1997
(IMZ Bw/Modes)
BOSNIE­HERZEGOVINE
6.1
Une patrouille de la SFOR quitte
le camp de Rajlovac, 20 juin 1997
(IMZ Bw/Modes)
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
63
6.1
L E S M I S S I O N S A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
[1]
[1] Pont aérien international vers
Sarajevo, 8 août 1994 (IMZ Bw/Modes)
[2] Une équipe CIMIC allemande
constate les dommages de guerre dans
la banlieue de Sarajevo, 1er décembre
1997 (IMZ Bw/Modes)
64
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[2]
Avec la disparition de l’affrontement global qu’était le conflit
au­dessus de la Bosnie­Herzégovine. L’hôpital militaire, quant
Est­Ouest, l’effondrement de la Yougoslavie multiethnique a
à lui, a accueilli près de 800 patients pour un traitement en
donné lieu à l’éclatement d’une guerre civile opposant les diffé­
hospitalisation et environ 3 000 pour un traitement ambulatoire.
rentes ethnies en Bosnie­Herzégovine. L’expulsion des minorités,
l’escalade croissante des violences et les infractions massives aux
L’accord de paix négocié à Dayton et signé à Paris le 14 décembre
droits de l’homme ont amené la communauté internationale à
1995 (General Framework Agreement for Peace [GFAP] ou l’ac­
intervenir à partir de 1992 et à réaliser, avec la participation de
cord dit de Dayton) a mis un terme à la guerre en ex­Yougoslavie.
la Bundeswehr, plusieurs opérations militaires dans les Balkans
Aux termes de la RCSNU 1031 (1995), l’OTAN a été mandatée à
occidentaux.
la mi­décembre 1995 de surveiller les aspects militaires contenus
dans l’accord de Dayton et, au besoin, de les imposer par la force.
En dehors de l’aide humanitaire fournie dans le cadre du pont
Pour ce faire, elle a d'abord déployé en Bosnie­Herzégovine l’IFOR
aérien de Sarajevo (de juillet 1992 à mars 1996), la Bundeswehr
(Implementation Force, 1995/96) puis, à partir de décembre
a également participé aux opérations Sharp Guard (de juillet
1996, la SFOR (Stabilisation Force). La République fédérale
1992 à juin 1996) et Deny Flight (d’avril 1993 à septembre
d'Allemagne a fourni une contribution substantielle à ces enga­
1996). Environ 600 militaires allemands ont été engagés dans
gements militaires internationaux dès le début de la mission.
ces opérations sur la base des RCSNU 713 (1991), 757 (1992),
781 (1992) et 787 (1992). Durant l’opération Deny Flight, les
Depuis 1996, un total d’environ 63 500 militaires de la Bundes­
avions AWACS ont réalisé 5 048 vols de surveillance ; dans le
wehr ont participé sous le commandement de l’OTAN aux
cadre de l’opération Sharp Guard, plus de 74 000 navires ont
opérations de maintien de la paix en Bosnie­Herzégovine et
été interpellés, un peu moins de 6 000 arrêtés et inspectés
en Croatie. Les éléments allemands CIMIC (coopération civilo­
– dont quelque 260 par des unités allemandes – et plus de
militaire), mis en œuvre de juin 1997 à décembre 2004, avaient
1 400 navires ont été déroutés. La marine, elle, a effectué environ
au départ pour mission principale de fournir de l’assistance aux
700 vols de reconnaissance avec ses avions de patrouille
réfugiés et rapatriés. Dans ce contexte, ils ont, entre autres,
maritime.
remis en état environ 1 800 logements et reconstruit ou rénové
42 écoles. Depuis juin 2004, des militaires allemands CIMIC
Des militaires allemands ont également soutenu la mission
interviennent dans le cadre des LOU (Liaison and Observation
UNPROFOR (United Nations Protection Force). Pour appuyer la
Units) pour recueillir des renseignements nécessaires à l’appré­
force de réaction rapide déployée en ex­Yougoslavie et faciliter
ciation de la situation dans le secteur civil.
aux unités des NU le retrait éventuel de la Croatie, la Bundes­
wehr a, sur la base de la RCSNU 998 (1995) et de la décision
Après environ neuf ans, le 2 décembre 2004, l’OTAN a terminé
adoptée par le Bundestag le 30 juin 1995, participé à cette missi­
avec succès l’opération SFOR et transféré la responsabilité de
on du 8 août au 19 décembre 1995 en mettant à disposition
la stabilisation de la Bosnie à l’Union européenne. Pour assurer
environ 1 700 militaires, en mettant en place un hôpital militaire
cette mission, l’UE a, au titre de la PESD, lancé l’opération EUFOR
franco­allemand ainsi qu’en envoyant 14 avions de reconnais­
Althea, la plus importante opération militaire terrestre jamais
sance « Tornado » et un certain nombre d’avions de transport
réalisée sous la bannière communautaire européenne. Au
« Transall ». Sur les plus de 920 vols réalisés, 160 l’ont été
départ, l’EUFOR avait assumé son rôle avec les mêmes structures
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
65
6.1
L E S M I S S I O N S A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
et le même effectif que son prédécesseur, la SFOR. Le Bundestag
Toute autre réduction de l’engagement militaire international
a approuvé l'engagement pour la première fois le 26 novembre
sera fonction des progrès politiques concrets que le pays pourra
2004.
réaliser à l'avenir. L’Allemagne respectera les obligations qu’elle
a contractées, jusqu’à la fin de l’opération Althea conduite sous
Surveiller et recueillir des informations sur zone, servir dans les
états­majors internationaux et assurer le soutien et le ravitaille­
ment de ceux­ci, telles sont aujourd’hui les activités principales
des militaires allemands engagés dans le cadre de l’EUFOR Althea.
Depuis décembre 2007, ils sont logés soit dans le camp multina­
tional de Butmir, soit dans des maisons LOT (Liaison and Obser­
vation Teams) installées dans les villes de Sarajevo, de Foca,
de Gorazde et de Konjic, au beau milieu de la population. Les
quatre LOT allemandes ont pour vocation d’apprécier la situation
générale en mettant à profit leurs multiples contacts avec les
représentants de la vie publique et d’être disponibles pour la
population bosniaque grâce à leur présence en continu sur le
terrain. Les travaux que les LOT effectuent dans leurs zones de
responsabilité respectives sont dirigés par cinq centres de coordi­
nation régionaux. La présence des militaires des LOT apporte la
preuve que la communauté internationale continue à s’engager
militairement dans la région. Pour les citoyens bosniaques, ils
sont les garants de la sécurité et de la paix. Depuis le début de
l’an 2009, l'armée de l'air allemande assure au profit de l’EUFOR
le transport aérien tactique des malades et blessés (AirMedEvac)
pour une période de six mois.
L’évolution que la Bosnie­Herzégovine a connue ces dernières
années, et plus particulièrement la stabilité de sa situation sécuri­
taire ont permis de réduire la présence militaire de l’opération
Althea d'environ 6 500 soldats en 2004 à quelque 2 200 au
début de 2008. En mars 2009, le contingent allemand comptait
au total environ 140 soldats. Hier comme aujourd’hui, l’Allema­
gne et l’Europe attachent une importance particulière à ce que
l’évolution pacifique et démocratique dans les pays des Balkans
occidentaux se poursuive. Depuis 1995, des progrès considér­
ables ont pu être réalisés dans la mise en œuvre de l’accord de
Dayton. L'un des aspects essentiels de cette évolution positive
est la réforme déjà engagée des forces armées. Faciliter la mise
en œuvre de cette réforme, telle est depuis décembre 2004 la
mission principale du quartier général de l'OTAN à Sarajevo,
qui est situé, à l'instar de l’état­major de l’UE, dans le camp de
Butmir. L'Allemagne participe à ce quartier général en détachant
un officier supérieur comme conseiller auprès du ministère
bosniaque de la Défense.
66
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
la bannière de l’UE.
[1]
9 LOT
11 LOT
RCC 4
RCC 1
7 LOT
RCC 5
RCC 3
9 LOT
Sarajevo
Gorazde
RCC 2
9 LOT
Konjic
Foca
[2]
[1] La SFOR assure le transport
scolaire d’enfants serbes, 9 février
2000 (IMZ Bw/Wiecki)
[2] Théâtre d'opérations : la Bosnie­
Herzégovine (Bundeswehr)
LOT
RCC
Liaison and Observation Team
Regional Coordination Centre
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
67
Poste de sécurité de la Bundeswehr
devant le monastère des Saints
Archanges aux environs de Prizren,
23 février 2005 (IMZ Bw/Mandt)
KOSOVO
6.2
Poste de sécurité de la Bundeswehr
devant le monastère des Saints
Archanges aux environs de Prizren,
23 février 2005 (IMZ Bw/Mandt)
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
69
6.2
L E S M I S S I O N S A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
Lorsque, en 1998, le conflit du Kosovo s’est aggravé, tous les
Les 14 appareils ont effectué près de 500 sorties. Parallèlement,
efforts entrepris au niveau international visaient à obtenir
l’OTAN a conduit des opérations d’aide humanitaire au profit
une solution pacifique tant par des mesures politiques et diplo­
des réfugiés en Albanie et Macédoine. Jusqu’à 3 100 militaires
matiques que par des sanctions économiques, et à prévenir
de la Bundeswehr ont soutenu ces opérations. En adoptant le
d'autres actes de violence.
10 juin 1999 la RCSNU 1244 (1999), le Conseil de sécurité des
NU a réuni les conditions de l’engagement des personnels civils
Ces efforts se reflètent dans les résolutions 1160 et 1199 que
et militaires chargés de mettre en œuvre le règlement de paix
le Conseil de sécurité des NU a adoptées en 1998 en vertu du
au Kosovo.
chapitre VII de la Charte des NU. En octobre 1998, la menace de
frappes aériennes par l'OTAN a conduit le régime de Milosevic
Depuis, cette tâche est assurée par la KFOR (Kosovo Force),
à suspendre temporairement ses plans initiaux. Avec la participa­
l’UNMIK (United Nations Interim Administration Mission in
tion de l’Allemagne, on a ensuite mis en place une mission de
Kosovo), l'OSCE et l’UE. La mission prioritaire de la KFOR, forte
vérification de l’Organisation pour la sécurité et la coopération
de quelque 15 000 militaires en provenance de 33 nations
en Europe (OSCE) et envoyé une force d’extraction de l'OTAN en
(mars 2009), consiste à instaurer et à garantir un environnement
Macédoine en vue d’assurer la sécurité des observateurs de
sûr. Dans ce contexte, elle protège notamment les minorités et
l’OSCE.
le retour des réfugiés et des personnes déplacées, assure la
liberté de mouvement, confisque les armes illégales et réprime
C’est à l’automne 1998 que le Bundestag a mandaté pour la
la criminalité transfrontalière.
première fois plusieurs opérations liées à la crise du Kosovo.
Depuis le début de l’opération en juin 1999, des éléments CIMIC
Suite à l’échec des pourparlers de Rambouillet et de Paris en
sont également déployés au Kosovo où ils avaient pour mission
février et mars 1999 et face aux interventions systématiques et
prioritaire, tout comme en Bosnie­Herzégovine, d’organiser les
contraires aux droits de l’homme que des forces armées et de
relations civilo­militaires, de participer à la planification et à la
sécurité serbes ont menées à l'encontre des Albanais du Kosovo,
conduite des opérations militaires ainsi que d’informer, de con­
le recours à la force militaire est resté le seul moyen pour mettre
seiller et de soutenir les organismes et acteurs civils. En même
un terme à une catastrophe humanitaire qui avait déjà commen­
temps, ils étaient responsables de l’assistance directe aux popu­
cé. Dans le cadre de l'opération Allied Force, l'OTAN a réalisé des
lations, de la remise en état d’écoles et d’infirmeries ainsi que de
actions aériennes contre la République fédérale de Yougoslavie
la formation dans le domaine de l'agriculture.
pendant un total de 79 jours.
A l’époque, l'Allemagne a participé pour la première fois avec
des forces armées à une opération de rétablissement de la
paix de l’Alliance. La Bundeswehr y a pris part avec les avions
« Tornado » qu’elle avait déjà mis en œuvre en Bosnie­Herzégovine.
70
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
[2]
[3]
[4]
[1] La Bundeswehr distribue des repas dans
le camp de réfugiés de Neprostreno près de
Tetovo, 7 avril 1999 (IMZ Bw/Modes)
[2] Avion de combat « Tornado » de la 1re
escadre opérationnelle de l’armée de l’air
allemande avant son décollage à Piacenza/
Italie, 15 juillet 1998 (IMZ Bw/Noll)
[3] Un convoi de la Bundeswehr traverse
Skopje pour se rendre au Kosovo, 13 juin
1999 (IMZ Bw/Modes)
[4] Des membres du bataillon du génie de
Gera participent aux travaux de reconstruction
au Kosovo, 17 avril 2000 (IMZ Bw/Modes)
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
71
6.2
L E S M I S S I O N S A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
Depuis mai 2006, la KFOR s’articule en cinq MNTF (Multinational
est également possible si le besoin s’en fait sentir. De plus,
Task Forces). Son quartier général est situé à Pristina. En mai
l’EULEX se verra affecter environ 1 100 agents locaux dès qu’elle
2006, l’Allemagne avait d’abord pris le commandement de la
aura adopté sa structure définitive.
MNTF South et y occupe actuellement – selon un principe de
rotation – le poste de commandant en second. Les quelque
Après avoir été lancée officiellement à la mi­février 2008,
3 500 militaires dont cette force dispose à l’heure actuelle
l’EULEX Kosovo a atteint sa capacité opérationnelle début
viennent d’Allemagne, de Bulgarie, d’Autriche, de Suisse et
décembre 2008, date à laquelle l'UNMIK avait déjà largement
de Turquie. Fournissant en moyenne environ 2 200 militaires,
achevé le transfert des responsabilités. Cependant, l’indépen­
l’Allemagne est l’un des trois plus gros contributeurs de troupes
dance du Kosovo a également entraîné l’élargissement du
au Kosovo.
spectre d'engagement de la KFOR qui doit désormais accomplir
deux missions supplémentaires. D’une part, elle a pour rôle de
Après avoir déclaré son indépendance le 17 février 2008, la
coordonner le bon déroulement de la dissolution du KPC
République du Kosovo fut reconnue par la République fédérale
(Kosovo Protection Corps), une organisation de la protection
d’Allemagne le 20 février 2008. Jusqu’à présent, plus de
civile d’urgence qui, rassemblant aussi d'anciens combattants
50 Etats ont reconnu l’indépendance de l’ancienne province
kosovars albanais engagés dans la lutte de libération, doit être
serbe, dont la majorité des pays membres de l’UE et de l'OTAN.
dissoute en vertu des dispositions de la constitution du Kosovo.
La Serbie et la Russie, elles, n’ont pas encore franchi le pas
D’autre part, la KFOR a été chargée de faciliter et de surveiller
et continuent à désapprouver l’indépendance du Kosovo. Le
la mise en place au Kosovo des nouvelles forces de sécurité
8 octobre 2008, l’Assemblée générale des NU a décidé sur
militaires. Cette « Kosovo Security Force » (KSF) pourrait former
demande serbe de saisir la Cour internationale de justice en vue
le noyau des futures forces armées kosovares et constitue un
d’obtenir de celle­ci un avis d’expert non contraignant relatif
élément essentiel de la stratégie de sortie de l'OTAN. La mise
à la légitimité de la déclaration d’indépendance kosovare. Il est
sur pied de la KSF doit donc se faire avec la plus grande circon­
peu probable que la Cour internationale de justice présente
spection.
son avis avant 2010.
L’Allemagne participe aux efforts visant à réduire le KPC moyen­
Avec la déclaration d’indépendance, la communauté internatio­
nant une aide financière apportée par le ministère des Affaires
nale s’est vue investie de nouvelles missions qui sont indispens­
étrangères. Pour ce qui est de la création de la nouvelle KSF,
ables à la création d’un Kosovo multiethnique, démocratique
qui aura également pour tâche la protection civile d'urgence, la
et basé sur les principes de l'Etat de droit. Dans cette optique,
Bundeswehr soutient ce processus par le détachement de
l’UE a décidé la mise en place d'une mission civile de police et
15 conseillers et formateurs militaires ainsi que par la mise à
de justice (EULEX). L’Allemagne y participe avec environ 140
disposition de 204 véhicules usagés. La formation des premiers
policiers, juges et procureurs. Au fur et à mesure de sa montée
membres de la KSF, qui mettra probablement deux à cinq ans
en puissance, l'EULEX s'est vu confier des missions essentielles
pour atteindre sa pleine capacité opérationnelle, a débuté le
par l'UNMIK qui a nettement réduit sa présence. L’EULEX Kosovo
2 février 2009. Bien que les efforts déployés conjointement par
a pour vocation d'aider les institutions du Kosovo, y compris les
la KFOR, l'UNMIK et, en partie déjà, par l’EULEX aient permis
autorités judiciaires et les organismes chargés de l’application
d’améliorer nettement la situation sécuritaire au Kosovo, la
des lois, à progresser sur la voie de la viabilité et de la responsabi­
stabilité actuelle reste toujours fragile. La présence de la force
lisation. De plus, elle est appelée à faciliter la poursuite de la
internationale et, par là, la poursuite de la mission KFOR sont
mise sur pied et du renforcement d’un système judiciaire multi­
donc indispensables pour garantir un environnement sûr et
ethnique indépendant ainsi que de services de police et de
stable. Les militaires allemands apportent une contribution
douane multiethnique reposant sur l’Etat de droit. L'EULEX
substantielle à la stabilisation de la région tout entière.
Kosovo est la plus importante mission civile jamais lancée par
l’UE dans son histoire. Son effectif est d’environ 1 900 personnes,
parmi lesquelles figurent, en dehors des quelque 1 500 policiers,
des juges, des procureurs, des agents de douane et des experts
administratifs. L’envoi de quelque 300 policiers supplémentaires
72
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
MNTF N
Mitrovica
MNTF C
Pristina
Pec
MNTF W
Gnjilane
MNTF E
Prizren
MNTF S
[2]
[1] Une patrouille effectue des contrôles
à Prizren, 12 avril 2000 (IMZ Bw/Modes)
[2] Théâtre d'opérations : le Kosovo
(Bundeswehr)
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
73
Un attentat terroriste d’une
ampleur inattendue : le deuxième
avion civil détourné explose le
11 septembre 2001 dans le World
Trade Center à New York (dpa)
LA LUTTE CONTRE LE
TERRORISME INTERNATIONAL
6.3
Un attentat terroriste d’une
ampleur inattendue : le deuxième
avion civil détourné explose le
11 septembre 2001 dans le World
Trade Center à New York (dpa)
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
75
6.3
L E S M I S S I O N S A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
Le 12 septembre 2001, un jour seulement après les attentats
interdire, dans le cadre des missions de contrôle maritime, le
terroristes perpétrés à New York et Washington, le Conseil de
ravitaillement des groupes terroristes et les déplacements de
sécurité des Nations unies à adopté la résolution 1368 (2001)
ceux­ci en mer. A ce jour, c’est­à­dire entre mai 2002 et avril
selon laquelle ces attentats représentent une attaque armée
2009, cette force a été six fois commandée depuis un navire
contre les Etats­Unis d’Amérique et une menace pour la paix
amiral allemand pour une période de trois à quatre mois.
et la sécurité internationales.
La base des unités allemandes engagées dans la Corne de
La résolution a confirmé la nécessité de prendre toutes les
l’Afrique est le port de Djibouti en Afrique de l’Est. La Bundes­
mesures voulues pour écarter les futures menaces, tout en
wehr y a déployé un groupe de liaison et de soutien performant
soulignant le droit des Etats­Unis d’Amérique à la légitime
pour assurer le soutien logistique des militaires allemands sans
défense individuelle et collective reconnu à l’article 51 de la
lequel il ne serait pas possible de conduire une opération navale
Charte des NU. Le même jour, le Conseil de l’Atlantique Nord
d’une telle ampleur et d'une telle durée. Le volume du contin­
a décidé de considérer les attentats terroristes comme une
gent maritime allemand a été adapté au cours de l’opération :
attaque dirigée contre tous les membres de l’Alliance et ob­
à l’heure actuelle, les moyens engagés comprennent une frégate
ligeant ceux­ci, comme le prévoit l’article 5 du Traité de
porte­hélicoptères, le groupe de liaison et de soutien basé à
l’Atlantique Nord, à s’assister mutuellement. Le 2 octobre 2001,
Djibouti, une équipe de liaison auprès du commandement
l’OTAN a, pour la première fois dans son histoire, déclaré l’état
américain USNAVCENT à Manama au Bahreïn et, temporaire­
de défense collective. Le Bundestag a confirmé le 19 septembre
ment, un avion de patrouille maritime. L’Allemagne compte
2001 les obligations imposées à l’Allemagne par l’article 5 du
parmi les rares nations à soutenir l'opération de façon ininter­
Traité de l’Atlantique Nord.
rompue depuis 2002 par l'envoi de navires et d'avions de sa
marine.
Avec sa décision arrêtée le 16 novembre 2001, pour la première
fois le Bundestag a donné le feu vert à une coopération de forces
Parallèlement à l’opération Enduring Freedom, l’OTAN réalise
armées allemandes avec les Etats­Unis et les autres pays de la
en Méditerranée l’opération Active Endeavour sur la base de
coalition antiterroriste dans la lutte militaire contre le terrorisme
l’article 5 du Traité de l’Atlantique Nord. Initialement conçue
international. Sur la base de cette décision, la Bundeswehr prend
pour assurer une « présence ostensible » dans la région, Active
part aux opérations Enduring Freedom (OEF) et Active Endeavour
Endeavour a évolué vers une opération destinée à protéger les
(OAE). L’opération Enduring Freedom, conçue sur le long terme, a
navires de commerce des alliés contre des agressions terroristes.
pour objectif de neutraliser les installations de commandement
Dans ce cadre, des navires allemands (frégates, pétroliers,
et d’entraînement des terroristes, de combattre, capturer et
ravitailleurs et sous­marins) ainsi que des avions de patrouille
traduire ceux­ci en justice ainsi que d’empêcher des tiers durab­
maritime se sont vu attribuer une multitude de tâches dont,
lement de soutenir des activités terroristes.
entre autres, des escortes dans le détroit de Gibraltar, des actions
de surveillance maritime dans toute la Méditerranée, la fouille
Depuis le 23 novembre 2001, un airbus A­310, basé à l’aéroport
de navires suspects ainsi que la sécurisation depuis la mer des
de Cologne­Bonn, est mis à disposition pour assurer l’évacuation
jeux olympiques d'Athènes de 2004. Les opérations effectuées
sanitaire stratégique par voie aérienne (STRATAIRMEDEVAC)
dans le détroit de Gibraltar sont suspendues depuis le 29 mai
dans le cadre de l’opération Enduring Freedom et d'autres
2004.
engagements.
Les dangers émanant du terrorisme international n’ont pas
76
Début février 2002, un contingent de la marine allemande a été
encore été écartés. Les combattre de manière systématique par
déployé dans la Corne de l’Afrique pour participer à l’OEF. Avec
des moyens politiques, diplomatiques, d’aide au développement,
les navires et les avions des partenaires de la coalition, il forme
de police mais aussi militaires reste l’un des défis principaux
une force multinationale qui est engagée dans plusieurs zones
devant lesquels se trouve placée la communauté internationale.
maritimes (mer Rouge, mer d’Oman, golfe d’Aden, eaux du
L’Allemagne ne s’est pas soustraite à sa responsabilité.
littoral somalien, mer d’Arabie) pour protéger la navigation
Sa participation ininterrompue aux opérations Enduring Freedom
maritime internationale contre des attaques terroristes et pour
et Active Endeavour en témoigne clairement.
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
[2]
ARABIE SAOUDITE
OMAN
ERYTHREE
YEMEN
DJIBOUTI
ZONE D'OPERATIONS
SOMALIE
ETHIOPIE
KENYA
[3]
[4]
[1] Théâtre d'opérations : l’OEF (Bundeswehr)
[2] OAE : des patrouilleurs surveillent le trafic
maritime dans le détroit de Gibraltar, 3 décembre
2003 (Bundeswehr)
[3] OEF : la frégate « Mecklenburg­Vorpommern »
à Djibouti, 20 février 2003 (Bundeswehr)
[4] Le sous­marin « U 16 » quitte le port de
Eckernförde pour sa mission dans le cadre de
l’OAE, 20 janvier 2004, (IMZ Bw/Eisner)
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
77
Des soldats de la Bundeswehr
en patrouille à pied sur la route
principale de Feyzabad,
8 juin 2008 (IMZ Bw/Stollberg)
AFGHANISTAN
6.4
Des soldats de la Bundeswehr
en patrouille à pied sur la route
principale de Feyzabad,
8 juin 2008 (IMZ Bw/Stollberg)
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
79
6.4
L E S M I S S I O N S A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
[1]
En Afghanistan, la Bundeswehr apporte une contribution
en Afghanistan. Après la conclusion de cet accord, le Conseil
importante à la protection des citoyennes et citoyens en
de sécurité des Nations unies a délivré avec sa résolution 1386 le
Allemagne.
mandat pour une force internationale d'assistance à la sécurité,
mettant ainsi en œuvre une demande formulée en ce sens dans
L'intervention militaire de la communauté internationale a
l'accord de Bonn. Le Bundestag a mandaté l’engagement
permis d’interdire aux éléments terroristes d’Al­Qaïda et à ceux
de la Bundeswehr en Afghanistan pour la première fois le
qui les soutiennent de regagner leurs anciens sanctuaires et
22 décembre 2001. Les élections parlementaires et provinciales
zones d’opérations en Afghanistan. Le gouvernement fédéral
du 18 septembre 2005 qui ont entraîné la constitution, le
et la communauté internationale se sont fixé comme objectif
19 décembre 2005, du premier parlement afghan librement élu
de garantir la persistance de ce succès et de contribuer à la
depuis 1973 marquent la fin du processus de démocratisation
création d’un Etat afghane stable et en état de fonctionner.
prévu dans l’accord de Bonn.
Renforcer l’autonomie de l’Afghanistan, tels sont l’intérêt
principal de la communauté internationale et la clé du
succès.
Acteur majeur dans le cadre de l’ISAF, l‘Allemagne partage,
certes, la responsabilité de l’intégralité de l’opération, mais
l’essentiel de son rôle consiste à s’acquitter de l’obligation
80
Dans cette optique, le gouvernement afghan se voit apporter
politique et militaire particulière qu’elle a contractée vis­à­vis
des aides dans le cadre de l’opération otanienne International
du Nord de l’Afghanistan en étroite consultation avec les
Security Assistance Force (ISAF). Cette dernière est le fruit du
partenaires de l’Alliance. La contribution allemande à l’ISAF a
processus dit de Bonn qui consiste à mettre en œuvre les actions
pour but de permettre la reconstruction du pays avec des
visant à créer, comme cela a été convenu le 5 décembre 2001
moyens locaux. Tous les partenaires au sein de l'OTAN savent
dans l’accord de Bonn, des conditions stables et démocratiques
que la reconstruction est une condition essentielle de la sécurité
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
HQ RC
NORTH, FSB
PRT
Kunduz
Mazar­e Sharif
JOWZJAN
PRT
PRT
Taloqan Feyzabad
Feyzabad
KUNDUZ
BALKH
Taloqan
Kunduz
TAKHAR
BADAKHSHAN
FARYAB
Pol­e Khomri
Meymaneh
SAR­E POL
FSB
PRT
PAT
HQ RCN
SAMANGAN
BAGHLAN
Forward Support Base
Provincial Reconstruction Team
Provincial Advisory Team
Headquarters Regional Command North
(NOR) PRT Meymaneh
(SWE) PRT Mazar­e Sharif
(HUN) PRT Pol­e Khomri
[2]
[1] Construction d’une école à Chuga
près de Kunduz avec le concours de la
Bundeswehr, 10 décembre 2003
(IMZ Bw/Jeserich)
[2] Zone de responsabilité allemande
dans le nord de l’Afghanistan
(Bundeswehr)
et vice versa. La sécurisation de ce processus par des moyens
La participation de l’Allemagne à l'ISAF et son engagement
militaires reste donc indispensable.
dans le secteur civil ont pour but d'aider les organes d'Etat
Les trois champs d'action qui déterminent l’engagement alle­
afghan ainsi qu’au personnel des Nations unies et de la commu­
mand en Afghanistan seront, comme par le passé, les suivants :
nauté internationale des donateurs d’assurer la reconstruction
1. L’exercice du rôle de « Key Partner Nation » dans la région
du pays dans un environnement sûr. En même temps, lors des
afghans à maintenir la sécurité permettant au gouvernement
nord.
2. La coordination étroite de toutes les actions militaires avec les
efforts en matière de reconstruction civile.
3. La formation et le soutien des forces de sécurité afghanes.
contacts avec la population locale, il importe de créer un climat
de confiance et de montrer que les militaires de l’ISAF sont
là pour aider. A cet effet sont mis en place, dans un cadre
interministériel (du moins si l’Allemagne en est responsable),
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
81
6.4
L E S M I S S I O N S A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
[1]
[2]
[3]
[4]
[1] Des militaires allemands ayant trouvé
a mort sont accompagnés à leur dernière
demeure, Kunduz, 22 mai 2007
(Bundeswehr)
[2] Des soldats de la Bundeswehr en
patrouille à pied sur la route principale de
Feyzabad, 8 juin 2008 (IMZ Bw/Stollberg)
[3] Soldat en patrouille en montagne près
de Kaboul, 13 mai 2008 (IMZ Bw/Houben)
[4] Policier allemand chargé de la
formation de la police en Afghanistan dans
le cadre de la mission EUPOL, 4 juin 2008
(IMZ Bw/Stollberg)
82
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
des PRT (Provincial Reconstruction Team), constituées chacune
En dehors d’une nette amélioration des conditions de vie de sa
d’une composante civile et d’une composante militaire. Les PRT
population, l’Afghanistan enregistre aussi des progrès dans la
reflètent le concept fondamental sur lequel repose l’engagement
reconstruction du pays lui­même et de ses institutions
allemand en Afghanistan: la philosophie de l'« approche globale
> Le 4 janvier 2004, le peuple afghan s'est donné une constitu­
et intégrée ».
tion. Celle­ci confère au président, au gouvernement ainsi
qu’au parlement la légitimation démocratique sur les plans
L'idée de base de l’approche allemande est d'adapter la structure
d’une PRT aux particularités régionales, aux structures sociales
régional et national.
> A ce jour, quelque 3 500 écoles ont été construites et 30 000
ainsi qu’à l’évolution de la situation sécuritaire dans la région
enseignants ont reçu leur formation initiale et une formation
nord­est de l’Afghanistan. Elle est mise en œuvre grâce à la
continue. Le nombre d’élèves a quintuplé pour passer à
coopération entre des personnels civils et militaires en proven­
quelque 6,5 millions, dont un tiers de filles. Plus de 50 000
ance de quatre ministères fédéraux, soit le ministère de la
étudiants, dont un quart de femmes, sont aujourd’hui inscrits
Défense, le ministère des Affaires étrangères, le ministère de
à l’une des 19 universités du pays. Cela leur offre de meilleures
l’Intérieur et le ministère de la Coopération économique et du
perspectives d'avenir et contribue substantiellement à l’accélé­
Développement. L’approche intégrée confère aux PRT un maxi­
ration du processus de reconstruction. Dans le même temps,
mum de souplesse pour agir en fonction de la situation.
la formation réduit de manière draconienne la sensibilité des
jeunes à la propagande islamiste.
Faire participer la population concernée dès le début de la mission
> Jusqu’ici, environ 1 800 des 2 300 kilomètres de la route de
et dans des domaines aussi variés que possible permet de ren­
ceinture traversant l’ensemble du pays ont été renouvelés,
forcer le sens des responsabilités et la volonté de coopérer.
près de 25 % des 34 000 km de piste rurale ont fait l’objet
Il s'agit de donner un « visage afghan » à tous les efforts entre­
d’une remise en état. L’accès aux marchés qui a été rendu
pris dans le pays. Cela signifie non seulement de réaliser des
possible par ces travaux est une condition essentielle de
opérations avec la participation des forces de sécurité afghanes
ou de rendre celles­ci aptes à mener des actions en autonome,
l’essor économique.
> Un total de 7,7 millions d’engins explosifs ont été neutralisés
mais aussi de convaincre la population de plus en plus des pro­
sur une superficie d'environ 1 000 kilomètres carrés avec
grès que les autorités gouvernementales afghanes ont réalises
3 000 villages, soit environ deux tiers de la superficie où on
dans le domaine de la reconstruction.
présume la présence de mines. Aujourd’hui, les habitants
des régions concernées peuvent se rendre sans danger sur les
Placées sous le commandement de l'ISAF, les PRT apportent leur
terres dépolluées et y gagner leur vie par l’agriculture et
soutien à d'innombrables projets de reconstruction ; elles servent
l’élevage du bétail.
d’intermédiaire entre les parties au conflit, aident lors du désar­
> Plus de 5 millions de réfugiés sont déjà revenus et n’ont pas
mement des milices afghans et soutiennent la mise sur pied d'un
regretté leur décision grâce à l’aide substantielle internationale
corps de police national et de l'armée afghane. D’une manière
dont ils ont bénéficié (construction de 170 000 maisons,
générale, toutes ces actions et les contacts entretenus avec
aménagement de quelque 10 000 points d’eau...). Environ
les autorités et les populations locales contribuent à améliorer
5 000 familles ayant perdu leur domicile ont pu s'installer sur
l’environnement de sécurité.
les terres qui leur avaient été attribuées par le gouvernement.
> Près de 85 % de la population dans tout le pays a désormais
Les PRT de Kunduz et de Feyzabad sont dirigées par un organe
accès à des soins médicaux de base.
bicéphale composé d’un commandant militaire et d’un responsa­
> Les forces de sécurité afghanes ont déjà assumé la responsa­
ble civil du ministère fédéral des Affaires étrangères. A Taloqan,
bilité d’une partie de la ville de Kaboul et se verront confier,
la Bundeswehr dispose aussi d’une PAT (Provincial Advisory
selon les planifications actuelles, également celle de la province
Team).
de Kaboul.
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
83
6.4
L E S M I S S I O N S A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
Malgré les succès énoncés ci­dessus, l’Afghanistan affiche tou­
apporte un soutien considérable à l’aide à la reconstruction, aide
jours des déficits importants au niveau de la reconstruction de
qui a été nettement intensifiée, notamment ces derniers temps.
ses structures étatiques et sociales. Côté sécurité, la situation
reste tendue et freine le développement dans tous les domaines :
Alors que, en 2006, les sommes dépensées au titre de l’aide à
c’est notamment le Sud et l’Est mais aussi le Nord et l'Ouest de
la reconstruction s’élevaient encore à 80 millions d’euros, les
l'Afghanistan qui ont enregistré en 2008 un accroissement du
prévisions pour 2009 partent d'un montant de 170,7 millions.
nombre d’attentats et de tentatives d'attentat. La Bundeswehr
Les mesures de reconstruction effectuées par la Bundeswehr
a elle aussi à déplorer des soldats blessés ou tués au combat.
sont très nombreuses : à ce jour, elle a réalisé bien plus de 800
projets dans les domaines de l’infrastructure, de la formation et
L’ISAF a subdivisé le territoire afghan en cinq zones de responsa­
de la santé et investi pour cela environ 5,1 millions d’euros.
bilité. La stabilisation du Nord est assurée par l’Allemagne. Elle
dirige le commandement régional Nord dont le quartier général
De surcroît, depuis 2006, presque 10 millions d’euros (dont
et la base logistique sont implantés à Mazar­e Sharif.
5,07 millions issus du budget de la Défense) ont été consentis
pour financer les PDF (Provincial Development Fund). Jusqu’à
Dans cette région essentielle à la pacification du pays, la Bundes­
fin 2008, ils ont permis de réaliser dans les provinces de Kunduz,
wehr constitue l’épine dorsale de l’ISAF. L’Allemagne y porte
de Takhar et de Badakhshan plus de 350 projets de taille réduite
la responsabilité de 25 % du territoire afghan, c’est­à­dire
dans les domaines de l’alimentation en eau, de l’agriculture, de
d’une zone presque aussi grande que la moitié de l’Allemagne
l’infrastructure et de la formation.
et abritant près de 30 % de la population afghane.
Le fait que la Bundeswehr agit comme employeur et donneur
Compte tenu de la nécessité de doter le pays à terme d'une
d’ordre a également un impact sur le développement économi­
stabilité autonome et sachant que la sécurité de celui­ci a besoin
que du Nord de l’Afghanistan. Citons notamment, en dehors
d'un visage afghan, la Bundeswehr continue à focaliser ses
des quelque 850 personnels civils afghans travaillant pour le
activités sur la formation des forces de sécurité afghanes. Par ce
contingent allemand de l'ISAF, les programmes d’infrastructure
moyen, il est possible de rétablir la confiance de la population
militaire : construction d’une nouvelle piste de décollage et
dans la capacité d’action du gouvernement et de réduire
d’atterrissage à l’aéroport de Mazar­e Sharif grâce à l’investis­
progressivement l’engagement militaire. Depuis début 2009,
sement par l’OTAN d’un montant allant jusqu’à 31 millions
l’Allemagne met à disposition sept OMTL (Operational Mento­
d’euros (contribution allemande : environ 20 %), construction
ring and Liaison Team) pour la formation de jusqu’à 7 500 soldats
et entretien de camps, de routes et de ponts à Mazar­e Sharif,
afghans. La Bundeswehr assume la fonction pilote pour aider
Kunduz, Taloqan et Feyzabad ainsi que mise en place d’infra­
l’armée afghane à mettre en place une école logistique et envi­
structures au profit de l’ANA (Afghan National Army) et de
sage d'investir dans ce projet 8,5 millions d’euros d’ici à 2012.
l’ANP (Afghan National Police).
De plus, elle étudie les possibilités de soutenir les forces armées
afghanes dans la mise en place d’une école du génie à Mazar­e
En 2009 et 2010, l’Afghanistan connaîtra pour la deuxième fois
Sharif et d’un collège de défense à Kaboul. La formation du
depuis 2004 et 2005 des élections présidentielles et parlemen­
corps de police, elle aussi, continuera à être réalisée avec l’aide
taires démocratiques. La communauté internationale aidera la
des 45 policiers militaires allemands.
population afghane à les mener à bien. La Bundeswehr, elle
aussi, prend part aux préparatifs en ce domaine. L’inscription des
La Bundeswehr assume d'énormes responsabilités dans le con­
électeurs, une étape indispensable à la réalisation des élections,
texte international en engageant des unités dans le Nord de
et l’élection présidentielle, sont déjà achevées. Le fait qu’elles se
l’Afghanistan, en y assurant la présence de la QRF (Quick Reac­
sont déroulées pour une large part dans le calme est sans aucun
tion Force) et en apportant des contributions à l’opération dans
doute dû à la qualité avec laquelle ce processus a été préparé et
son ensemble. Le contingent allemand, actuellement fort de
accompagné par les militaires de la Bundeswehr et d’autres
quelque 4 300 militaires pour un plafond de 4 500 fixé dans le
acteurs.
mandat, constitue, de par son importance, le troisième détache­
ment engagé dans le cadre de l’ISAF. Depuis 2002, l’Allemagne
84
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
Mazar­e Sharif
RC NORTH
RC EAST
Bagram
Hérat
RC CAPITAL
Kaboul
RC WEST
Kandahar
RC SOUTH
[2]
[1] Construction d’aqueducs,
Dahana Ghori/nord de l’Afghanistan,
7 octobre 2007 (IMZ Bw)
[2] Division de l’Afghanistan en
commandements régionaux
(Bundeswehr)
RC
Regional Command
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
85
6.4
L E S M I S S I O N S A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
[1]
Le développement et la sécurité en Afghanistan sont largement
dans les pays voisins. Parmi ces derniers, c'est le Pakistan qui
tributaires de la situation en matière de trafic des stupéfiants.
exerce la plus grande influence sur la situation en Afghanistan.
Plus de 90 % de l’opium offert chaque année sur le marché
Les deux pays ont une frontière commune de presque 2 500 km :
mondial vient d’Afghanistan. Les bénéfices réalisés avec ce pro­
elle est en grande partie ouverte, se perd souvent dans le paysa­
duit servent à financer les milieux activistes de l’adversaire, l’ac­
ge montagneux qu’elle traverse et est donc difficile à contrôler.
tion clandestine des Taliban et le trafic d'armes. Pour promouvoir
Pour obtenir une amélioration durable de la situation en Afgha­
le développement et la sécurité en Afghanistan, il faut priver les
nistan, il est indispensable de protéger le pays contre toute im­
rebelles de leurs ressources financières. Si on a enregistré ces
portation d’instabilité et d’activités terroristes. Seule une coopé­
dernières années une diminution des surfaces utilisées pour la
ration avec les voisins permet de venir à bout de cette tâche.
production de drogues, c’est dû aux avantages proposés à ceux
qui sont prêts à gagner leur vie par un travail différent. Néan­
Etablir en Afghanistan une paix durable et une stabilité solide
moins, les vrais bénéfices sont ceux réalisés après la récolte,
demande avant tout du temps. Dans la plupart des cas, les amé­
c’est­à­dire lors de la transformation et de la vente du produit.
liorations, bien que visibles, ne s’obtiennent que ponctuellement
La lutte contre la drogue sur le territoire national relève de la
et graduellement. Avec notre approche interministérielle et
responsabilité du gouvernement afghan. Elle aussi doit revêtir un
intégrée, dont la mise en œuvre se reflète notamment dans
« visage afghan » pour remporter un succès durable et renforcer
l’engagement des PRT et les résultats mesurables obtenus par
la confiance de la population locale dans le gouvernement. Les
ceux­ci, nous avons emprunté la bonne voie pour renforcer la
Afghans n’ayant pas encore les moyens de résoudre le problème
sécurité et la stabilité en Afghanistan.
à eux seuls, l’aide apportée par la communauté internationale
reste indispensable.
La sécurité en Afghanistan est directement liée aux relations
entretenues avec les Etats de la région et à la situation régnant
86
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[2]
[1] La chancelière Angela Merkel rend
visite aux membres de la Bundeswehr en
Afghanistan, 6 avril 2009 (IMZ Bw/Beck)
[2] Une école obtient du nouveau mobilier
avec l'aide de la Bundeswehr (Bundeswehr)
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
87
L’emblème de l’opération de
l’UE au Congo (Bundeswehr)
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE
DU CONGO
6.5
L’emblème de l’opération de
l’UE au Congo (Bundeswehr)
Avec la mission EUSEC RD Congo (mission de conseil et
A l’heure actuelle, l'EUSEC est soutenue par deux officiers
d'assistance en matière de réforme du secteur de la sécurité
supérieurs de la Bundeswehr qui lui apportent leur expertise
en République démocratique du Congo), l’UE soutient depuis
en matière de réforme de l’armée de terre et de gestion du
2005, à la demande du gouvernement de transition congolais,
personnel. De plus, un sous­officier allemand a été détaché
la réforme des forces armées congolaises et la mise sur pied
comme conseiller adjoint pour faciliter la mise sur pied d’une
de brigades intégrées multiethniques.
brigade de l’armée de terre implantée à Kinshasa.
Elle est réalisée parallèlement à la mission EUPOL RD Congo,
La participation à cette mission civile dans le cadre de la
qui est responsable de la réforme de la police et de la justice
politique européenne de sécurité et de défense n’exige pas
congolaises, et en collaboration étroite avec la MONUC et le
de mandat du Bundestag.
Comité international d'accompagnement à la transition (CIAT1).
En plus de sa mission initiale consistant à conseiller les états­
majors et les brigades intégrées des forces congolaises, l’EUSEC
a mobilisé d’autres experts pour soutenir chaque armée de ces
forces dans son domaine spécifique.
Depuis décembre 2005, l’EUSEC assure aussi la gestion d’un
projet destiné à organiser le paiement des soldes des brigades
1
Le CIAT est composé de représentants des cinq pays membres permanents du
Conseil de sécurité des NU ainsi que de l'Afrique du Sud, de l'Angola et de la
Belgique.
intégrées, activités qui constituent pour l’instant le volet
principal de sa mission.
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
89
Maritime Task Force (MTF) de l’UNIFIL :
passation de commandement entre l’Allemagne
et l’Italie sur la frégate « Bayern » au large du
Liban (en arrière­plan, la frégate « Hessen »),
29 février 2008 (IMZ Bw/Rott)
LIBAN
6.6
Maritime Task Force (MTF) de l’UNIFIL :
passation de commandement entre l’Allemagne
et l’Italie sur la frégate « Bayern » au large du
Liban (en arrière­plan, la frégate « Hessen »),
29 février 2008 (IMZ Bw/Rott)
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
91
6.6
L E S M I S S I O N S A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
Le Conseil de sécurité des Nations unies a constaté dans sa
De plus, dans le cadre de la RCSNU 1701 et des résolutions
résolution 1701 (2006) du 11 août 2006 que la situation au
complémentaires, l’Allemagne apporte à la marine libanaise,
Liban après la guerre estivale entre Israël et le Hezbollah
sur une base bilatérale, un soutien important dans les domaines
constituait une menace pour la paix et la sécurité internationales,
de la formation et de l’équipement. Les actions d’aide à la
et a demandé aux parties au conflit de cesser les hostilités de
formation ont eu lieu aussi bien en Allemagne qu’au Liban.
façon définitive.
Le soutien allemand a pour but de rendre la marine libanaise
progressivement apte à protéger ses côtes en toute autonomie,
Par la même résolution, il a prolongé le mandat de l’UNIFIL
confortant ainsi de manière décisive le rôle du Liban lors de
(United Nations Interim Force in Lebanon), qui avait été établie
l’exercice de sa souveraineté.
en 1978, et a autorisé cette dernière à porter ses effectifs à
15 000 soldats. De plus, grâce à l’élargissement important de
D’octobre 2006 à fin février 2008, la MTF, initialement composée
sa mission au­delà du mandat fixé au titre des RCSNU 425 et
de 13 navires de différentes nations, était placée sous com­
426 (1978), l’UNIFIL peut désormais aider le gouvernement du
mandement allemand. Le 1er mars 2008, cette responsabilité
Liban à exercer son autorité sur l’ensemble de son territoire
a été confiée à l’EUROMARFOR (European Maritime Force), qui
national et contribuer de façon efficace à atteindre les objectifs
a été dirigée au départ par l’Italie, puis par la France. Depuis le
de la résolution.
1er mars 2009, la MTF est commandée par la Belgique. Même
après la passation du commandement, l’Allemagne continue
A terre, le théâtre d’opérations de l’UNIFIL est délimité au sud
à apporter des contributions maritimes substantielles à la MTF
par le fleuve Litani, à l’ouest par la frontière avec la Syrie et
de l’UNIFIL et à soutenir la marine libanaise.
au nord par la « Ligne bleue », la ligne d’armistice de 1978
reconnue par les Nations unies. En mer, il inclut une zone située
au large de la côte libanaise, à savoir les eaux territoriales
libanaises et l’espace maritime s’étendant jusqu’à environ
45 milles nautiques à l’ouest de la côte libanaise. Vient s’y
ajouter l’espace aérien au­dessus des deux zones précitées.
Sur la base de la décision du gouvernement fédéral en date du
13 septembre 2006, le Bundestag a mandaté, pour la première
fois le 20 septembre 2006, la Bundeswehr pour être engagée
dans le cadre de l'UNIFIL.
La MTF (Maritime Task Force) de l’UNIFIL au sein de laquelle
agit le contingent allemand soutient le gouvernement libanais
dans la sécurisation de sa frontière maritime. Parmi les missions
nombreuses figurent notamment le commandement de l’opéra­
tion maritime, la surveillance de la zone maritime située dans
l’espace opérationnel maritime défini par les Nations unies, la
sécurisation de la frontière libanaise depuis la mer, le contrôle
du trafic maritime – y compris les contrôles des cargaisons et
des membres d’équipage tels que prévus par les règles d’enga­
gement des NU – ainsi que le déroutement des navires suspects
et les opérations maritimes d’interdiction.
92
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
Nicosie
CHYPRE
SYRIE
Limassol
AMO
LIBAN
TTW
Beyrouth
AMO
TTW
Area of Maritime Operations
Territorial Waters
Damas
Naqoura
[2]
ISRAEL
[1] Formation de membres de la
marine libanaise sur le ravitailleur
« Elbe », 13 décembre 2008
(Bundeswehr)
[2] Théâtre d'opérations de la
MTF (Maritime Task Force Force)
de l’UNIFIL (Bundeswehr)
Amman
JORDANIE
Jérusalem
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
93
L’emblème de l’opération EUNAV­
FOR Atalanta à bord de la frégate
« Rheinland­Pfalz » (Bundeswehr)
LA LUTTE CONTRE LA PIRATERIE
6.7
L’emblème de l’opération EUNAV­
FOR Atalanta à bord de la frégate
« Rheinland­Pfalz » (Bundeswehr)
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
95
6.7
L E S M I S S I O N S A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
Au cours de l’année 2008, la fréquence des actes de piraterie
Le but que l’Union européenne poursuit avec l’opération EU­
au large des côtes somaliennes a augmenté dramatiquement.
NAVFOR Atalanta est de protéger les navires du PAM et du trafic
Au total, 251 navires ont été attaqués et des centaines de mem­
maritime général évoluant autour de la Corne de l’Afrique et
bres d’équipage ont été pris en otage. De plus, les attaques ont
jusqu’à 500 milles nautiques au large de la côte somalienne,
pris une nouvelle dimension : les pirates ont utilisé plus souvent
de dissuader les pirates présents dans ces zones et, par là,
des armes lourdes à chargement rapide et des lance­roquettes
d’endiguer la piraterie. Sur la base du mandat du Bundestag,
antichar, et ils ont étendu une partie de leur zone d’opérations
la marine allemande participe depuis le 19 décembre 2008 à
des eaux côtières à la haute mer.
l’opération avec une frégate porte­hélicoptères. En outre, sont
mobilisés des forces chargées de missions de protection, de
Le gouvernement fédéral a décidé le 10 décembre 2008 de
logistique et de soutien santé ainsi que des policiers militaires
participer à l’opération EUNAVFOR (European Union Naval Force)
et du personnel de liaison. A titre préventif, le mandat a été
Atalanta réalisée par l’Union européenne dans le cadre de la
formulé de manière à pouvoir déployer jusqu’à 1 400 soldats,
politique européenne de sécurité et de défense. Le 19 décembre
autorisant ainsi le recours à d’autres forces navales allemandes
2008, le Bundestag a approuvé cet engagement.
présentes sur zone si la situation l’exige.
L’opération EUNAVFOR Atalanta a pour mission de dissuader et
Dans la lutte contre les attaques, les forces engagées peuvent
de combattre les pirates opérant au large des côtes somaliennes.
arrêter des personnes pour les déférer aux autorités de poursuite
Elle doit d’une part assurer l’acheminement, compromis par
judiciaire. La poursuite judiciaire relève de la responsabilité
les attaques des pirates, de l’aide humanitaire destinée à la
nationale de l’Etat qui place les pirates présumés en garde à
population somalienne en détresse. L’opération doit d’autre
vue. Au cas où cet Etat ne voudrait ou ne pourrait pas procéder
part protéger le trafic maritime civil sur les routes commerciales
à une poursuite judiciaire, il peut remettre la personne en
de la région, empêcher les prises d’otages et les demandes de
question entre les mains d’un Etat tiers, tout en respectant les
rançons et imposer le respect du droit international.
standards juridiques en vigueur. Dans le cas de l’Allemagne,
une poursuite judiciaire ne sera engagée que lorsqu’il y a atteinte
La Somalie compte environ 1,1 million de personnes déplacées
à des biens juridiques importants ayant un rapport suffisant avec
internes. De surcroît, 3,25 millions de personnes, c’est­à­dire
l’Allemagne. A plusieurs reprises déjà, des frégates allemandes
bien plus d’un tiers de la population, ont, selon les Nations
ont réussi à repousser des attaques dirigées contre des navires
unies, besoin d’aide humanitaire. Ces chiffres révèlent que le
marchands et à arrêter les pirates présumés. Ces derniers ont
pays est l’une des principales régions de crise dans le monde sur
été ensuite remis aux autorités kenyanes en vertu d’un accord
le plan humanitaire. A cause de la situation sécuritaire difficile,
de transfert conclu par l’UE.
beaucoup d’organisations d’aide humanitaire ont finalement
été obligées de réduire fortement leurs activités en Somalie
Le 18 juin 2009, le Bundestag a décidé à une grande majorité
ou d’y mettre fin. 90 % de l’aide humanitaire fournie par les
l’extension du théâtre d’opérations vers les Seychelles, permet­
livraisons du Programme alimentaire mondial (PAM) est achemi­
tant ainsi à l’EUNAVFOR Atalanta de lutter aussi contre les
née par voie maritime. La protection assurée par l’opération
pirates agissant de plus en plus loin des eaux côtières.
EUNAVFOR Atalanta revêt donc une importance capitale pour
l’approvisionnement en vivres de la population somalienne.
L’opération EUNAVFOR Atalanta aide à faire davantage respecter
le droit et la loi. En même temps, elle contribue à améliorer la
La plus importante route commerciale reliant l’Europe, la pénin­
situation humanitaire en Somalie et à protéger le commerce
sule arabique et l’Asie traverse la zone maritime située au large
maritime. C’est pourquoi l’Allemagne porte un grand intérêt à
de la Somalie et notamment le golfe d’Aden. En tant que pays
la réalisation de cette opération et une participation active à
exportateur, l’Allemagne attache une importance particulière
celle­ci.
à la sécurité des routes commerciales, d’autant plus qu’elle est
également dépendante de l’importation de matières premières
qui arrivent en grande partie par voie maritime.
96
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
ARABIE SAOUDITE
OMAN
ERYTHREE
YEMEN
DJIBOUTI
ZONE D'OPERATIONS
SOMALIE
ETHIOPIE
KENYA
TANZANIE
[2]
[1] Des pirates sont embarqués sur la
frégate « Rheinland­Pfalz » à l’issue de
leur capture, 3 mars 2009 (IMZ Bw)
[2] Théâtre d'opérations de l’opération
Atalanta (Bundeswehr)
LES MISSIONS ACTUELLES DE LA BUNDESWEHR
97
Entretiens avec des réfugiés
dans le camp de Jebel Aulia,
3 avril 2006 (IMZ Bw/Rott)
MISSIONS D’OBSERVATION ACTUELLES
DE LA BUNDESWEHR
7
Entretiens avec des réfugiés
dans le camp de Jebel Aulia,
3 avril 2006 (IMZ Bw/Rott)
7.1
Soudan : UNMIS
7.2
Soudan : AMIS/UNAMID
M I S S I O N S D ’ O B S E R VAT I O N A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
99
7
M I S S I O N S D ’ O B S E RVAT I O N A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
7.1
Soudan : UNMIS
Le Soudan, le plus grand pays d’Afrique, est ébranlé par
plusieurs longues guerres civiles régionales qui ont des origines
ethniques, religieuses et économiques. La guerre qui sévit dans
le sud du Soudan a commencé dans les années 1980 lorsqu’un
conflit entre la partie nord, en grande partie arabo­musulmane,
et la partie sud, chrétienne et pluriethnique, a été aggravé
par une dispute concernant l’exploitation de riches gisements
pétrolifères.
Dans sa résolution 1590 (2005) adoptée le 24 mars 2005, le
Conseil de sécurité des Nations unies a décidé la création de la
mission UNMIS (United Nations Mission in Sudan) au Soudan.
[1]
Cette mission fait partie d’un engagement de grande envergure
de la part des NU au Soudan et vise à observer le respect de
l’accord de paix global signé à Nairobi le 9 janvier 2005 entre
le gouvernement soudanais et le Mouvement populaire de
africaine (UA) et des NU au Soudan/Darfour et coordonner avec
libération du Sud du Soudan (SPLA/M2). Cet accord a mis fin à
celles­ci le redoublement des efforts déployés pour encourager
une guerre civile sanglante qui durait depuis plusieurs dizaines
la paix au Darfour.
d’années et qui avait causé près de 2 millions de victimes et
déplacé environ 4 millions de personnes à l’intérieur du pays.
En sus, l’UNMIS est autorisée en vertu du chapitre VII de la
Dans le cadre de la mission UNMIS, 10 000 militaires au
Charte des NU à garantir la protection du personnel, des installa­
maximum sont déployés. Ce contingent est secondé par une
tions et du matériel ainsi que la sécurité et la libre circulation du
composante civile qui participe à la mise en place de structures
personnel des NU, des organismes humanitaires et du personnel
démocratiques s’inspirant des principes de l’Etat de droit. En
des commissions de surveillance, constituées de membres des
2005, les NU ont formellement sollicité, à plusieurs reprises,
anciennes parties au conflit et de personnel des NU. De la même
le concours du gouvernement fédéral. Pour la première fois, le
façon, l’UNMIS est autorisée, sans préjudice de la responsabilité
22 avril 2005, le Bundestag allemand a approuvé l’envoi d’un
du gouvernement soudanais, à protéger les civils rencontrés
maximum de 75 soldats.
sous menace imminente de violence physique. L’UNMIS est
également chargée de soutenir les anciens belligérants dans la
La mission, définie dans les résolutions pertinentes du Conseil
promotion des principes de l’Etat de droit et le maintien des
de sécurité des NU, consiste à contrôler, de concert avec les
droits de l’homme.
anciennes parties au conflit, l’observation de l’accord de paix
de Nairobi et à apporter un soutien au programme de
La contribution de l’Allemagne à la mission UNMIS représente
désarmement, de démobilisation et de réintégration des anciens
le plus grand apport provenant d’un seul pays quant aux
combattants ainsi qu’aux programmes des NU mis en place dans
observateurs militaires et l’une des plus importantes parmi
la région. Il s’agit notamment d’aider les anciens belligérants
celles qui émanent des nations européennes dans le cadre global
à mettre en place des projets de déminage humanitaire et à
de la mission. En mars 2009, 35 militaires allemands étaient
organiser un corps de police civile. En outre, l’UNMIS doit se
engagés dans le cadre de l’UNMIS.
tenir en rapport étroit avec la mission commune de l’Union
2
100
Sudanese People’s Liberation Army/Movement
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[2]
[1] Des observateurs des NU participent à la
mission UNMIS lors de la diffusion des ordres
au camp de Rumbek/Sud­Soudan, 5 avril 2006
(IMZ Bw/Rott)
[2] Un observateur allemand des NU en
compagnie d’enfants réfugiés au camp de Jebel
Aulia, 3 avril 2006 (IMZ Bw/Rott)
M I S S I O N S D ’ O B S E R VAT I O N A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
101
7
M I S S I O N S D ’ O B S E RVAT I O N A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
7.2
Soudan: AMIS/UNAMID
[1]
Le Darfour, région située à l’ouest du Soudan, constitue un
L’axe majeur de l’OTAN reposait sur le soutien apporté lors
autre foyer de crise. Le conflit, qui a fini par prendre la forme
de transferts stratégiques de contingents africains de l’AMIS
d’un nettoyage ethnique, pour accéder au pouvoir politique
et le renforcement de la capacité de commandement de l’UA
et maîtriser les facteurs économiques, entre la population
(« Capacity Building »).
africaine du Darfour et, principalement, la milice arabe à cheval
« djandjaouid », soutenue par le gouvernement soudanais,
L’aide fournie par l’UE a principalement porté sur les secteurs
a coûté la vie à plus de 250 000 personnes et est à l’origine de
police (formation et conseil) et armée (transport aérien, postes
l’exode de plus de 3 millions d’habitants. Parallèlement à cette
d’état­major logistique, aide à l’équipement, conseil en planifi­
crise intérieure au Soudan, le conflit qui règne au Tchad ne
cation, observateurs militaires, surveillance aérienne). Tout
laisse pas d’exercer son influence sur le Darfour. La décision
d’abord, il s’agissait de transferts et de remplacements de
d’envoyer l’AMIS (African Union Mission in Sudan), qui a pour
troupes en ayant recours à des capacités de transport aérien
but d’observer le respect de l’accord de cessez­le­feu conclu
fournies par les nations ou prises à bail. D’autres prestations
à N’Djamena (Tchad) entre le gouvernement soudanais et les
visaient à renforcer la faculté de l’UA de prendre en charge des
groupes de rebelles « Armée/Mouvement de libération du
responsabilités. Par ailleurs, l’UE a fourni 28 officiers destinés
Soudan » (A/MLS3) et « Mouvement pour la justice et l’égalité »
aux états­majors opérationnels de l’AMIS pour l’aide logistique
4
(JEM ), a été prise par l’UA le 28 mai 2004 au Darfour.
et 16 observateurs militaires.
L’AMIS a reçu le soutien de l’UE (à partir de juillet 2005) et
En se référant aux résolutions 1556 (2004) et 1564 (2004)
de l’OTAN (à partir de juin 2005) au niveau du transport
adoptées par le Conseil de sécurité des Nations unies les
aérien stratégique, de la formation, de la planification et de
30 juillet et 18 septembre 2004, le Bundestag a mandaté, le
l’équipement.
3 décembre 2004, la Bundeswehr afin qu’elle fournisse un
soutien à l’AMIS.
Depuis décembre 2004, une contribution essentielle de
[1] Des militaires de l’Union africaine
(AMIS) descendent d’un Airbus allemand
à N’Djamena pour changer d’avion,
20 novembre 2004 (IMZ Bw/Treybig)
l’Allemagne à la mission AMIS a résidé dans l’aide régulière
apportée lors du remplacement des troupes du contingent
africain, soit en ayant recours à des véhicules de la Bundeswehr,
soit en prenant à bail des capacités de transport aérien civil.
3
4
102
Sudan Liberation Army/Movement
Justice and Equality Movement
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
EGYPTE
ARABIE
SAOUDITE
LIBYE
Depuis le 1er janvier 2008, l’UNAMID (African Union/United
Nations Hybrid Operation in Darfur) a pris la relève de l’AMIS
au Darfour. Etant donné que l’AMIS n’avait pu atteindre les
SOUDAN
objectifs fixés, le gouvernement soudanais a accepté en été
2007 le stationnement d’une « mission hybride » UA/NU
TCHAD
composée de 19 500 militaires masculins et féminins au
ERYTHREE
Khartoum
maximum ainsi que de deux composantes policière et civile.
Sur le plan du droit international, la base en est la RCSNU 1769
Al­Facher
du 31 juillet 2007. La tâche essentielle de l’UNAMID est de
continuer à mettre en application, sans délai et de manière
efficace, l’accord de paix au Darfour ainsi que les conclusions
issues des négociations de paix menées sous la direction des
envoyés spéciaux des Nations unies et de l’Union africaine.
ETHIOPIE
L’UNAMID doit assurer, outre sa propre défense, la protection
REPUBLIQUE
CENTRAFRICAINE
de la population civile en proie à des coups de main armés.
Pour ce faire, la mission peut se prévaloir d’un mandat solide
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE
DU CONGO
en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations unies.
OUGANDA
KENYA
Darfour
Le mandat allemand pour la participation à l’UNAMID, adopté le
Sud­Soudan
15 novembre 2007 par le Bundestag et prévoit une implication
de 250 militaires au maximum dans les secteurs suivants :
> Transport aérien stratégique,
> personnel individuel affecté aux organes de commandement
Près de la moitié de tous les remplacements de contingent
(rotations) est effectuée en collaboration avec la France. Il s’agit
et quartiers généraux formés dans le cadre de l’UNAMID,
concrètement de l’utilisation de la base française de N’Djamena
> experts chargés de tâches de liaison, de conseil et de soutien,
au Tchad, de l’emploi en commun d’engins aériens allemands et
> aide à l’équipement technique et à la formation visant les
français ou même du financement commun des rotations. Au
nations qui envoient des troupes et
total, l’Allemagne a participé directement ou indirectement à
> sûreté rapprochée et aide d’urgence.
huit remplacements de contingent.
L’Allemagne envoie des experts destinés à l’état­major du
Malgré l’aide apportée par la communauté internationale, les
quartier général de l’UNAMID basé à Al­Facher (situation en
quelque 8 500 militaires et policiers déployés durant la phase
mai 2009 : 3 militaires allemands) et continuera d’assurer le
finale de l’AMIS n’ont pu obtenir une amélioration durable de la
transport aérien lors de relais de personnel du contingent
situation humanitaire et sécuritaire. Après de longs pourparlers
des Etats contributeurs de troupes.
diplomatiques, les Nations unies et l’Union africaine ont donc
décidé, avec l’assentiment du gouvernement soudanais, de
mettre en place la mission de paix UNAMID, conduite en
commun par l’UA et les NU.
M I S S I O N S D ’ O B S E R VAT I O N A C T U E L L E S D E L A B U N D E S W E H R
103
Drapeau sur le toit du Bundestag
à Berlin, 15 juillet 2003,
(IMZ Bw/Stollberg)
PREVENTION NATIONALE
DES CRISES/GROUPES DE SOUTIEN
EN CAS DE CRISE
8
Drapeau sur le toit du Bundestag
à Berlin, 15 juillet 2003,
(IMZ Bw/Stollberg)
P R E V E N T I O N N AT I O N A L E D E S C R I S E S / G R O U P E S D E S O U T I E N E N C A S D E C R I S E
105
8
P R E V E N T I O N N AT I O N A L E D E S C R I S E S / G R O U P E S
D E S O U T I E N E N C A S D E C R I S E
L’Allemagne est consciente de sa responsabilité vis­à­vis de la
Selon la situation, les KUT sont composés de quelques militaires
protection de ses ressortissants à l’étranger et en mesure de les
et de membres du ministère des Affaires étrangères et conseil­
évacuer d’un milieu peu sûr situé en zone de crise. Pour effectuer
lent sur place le directeur de la représentation diplomatique
des opérations de sauvetage et d’évacuation, la Bundeswehr
allemande respective et ses collaborateurs. En temps de crise,
dispose de forces spécialisées.
et si nécessaire, les groupes de soutien apportent une aide
active lors de l’évacuation de ressortissants allemands, voire de
Dans le cadre de la prévention des crises affectant les représen­
ressortissants de l’UE et d’autres pays, qui dépendent de cette
tations diplomatiques à l’étranger et des mesures préventives
aide ou qui en ont fait la demande auprès de l’ambassade
ayant pour but de protéger les ressortissants allemands se
d’Allemagne. Le groupe de soutien procède constamment à
trouvant à l’étranger, le ministère fédéral des Affaires étrangères
une évaluation de la situation, se tient en contact avec les Etats
et le ministère fédéral de la Défense ont conclu, en l’an 2000,
partenaires, développe et vérifie en permanence les options
un accord interministériel concernant « l’envoi de groupes de
d’action et assure ou coordonne l’aide médicale.
soutien en temps de crise » (Krisenunterstützungsteam, KUT)
auprès des représentations diplomatiques allemandes à
Depuis qu’on a décidé, en 2002, d’envoyer des KUT auprès des
l’étranger » et, par la suite, un accord relatif à la mise en œuvre
représentations diplomatiques allemandes à l’étranger, plus de
d’un système d’information de prévention des crises.
50 missions ont été effectuées dans presque 90 pays différents.
Il a été procédé à des évacuations de ressortissants, entre autres,
L’objectif poursuivi par l'emploi des KUT est d’élaborer la meil­
en Bolivie, en Côte d’Ivoire et, récemment, au Liban.
leure protection des ressortissants allemands à l’étranger en cas
de situations de crise. Pour y parvenir, il s’agit surtout d’apporter
Grâce à l’introduction du système de KUT et à la création d’une
un conseil approprié aux ambassades concernées, de rassembler
banque de données pour prévenir les crises, tant le ministère
les informations pertinentes dans les régions menacées de crise
fédéral de la Défense que le ministère fédéral des Affaires
et d’élaborer une planification et une préparation préventives
étrangères disposent d’un instrument de prévention et de
de mesures d’évacuation en temps de crise aiguë. Pour atteindre
maîtrise des crises qui permet aux deux ministères de réagir
ce but, l’expertise disponible aux ministères fédéraux des Affaires
rapidement et de façon informelle dans le monde entier en cas
étrangères et de la Défense est mise à contribution de la façon
de crise et de développement de crise. La mise en service de
la plus appropriée et fédérée dans les KUT, qui alors, de manière
ces groupes de soutien a fait preuve de ses qualités par­delà les
préventive, sont mis en action dans les Etats dans lesquels une
domaines de compétence ministérielle.
crise semble possible, est prête à se déclencher ou s’est déjà
déclarée.
Au cours de la planification annuelle en matière de prévention
des crises ou à la demande du ministère fédéral des Affaires
étrangères, les groupes de soutien sont envoyés auprès des
représentations diplomatiques allemandes à l’étranger lorsqu’une
crise est en train ou sur le point de se développer. La durée de
l’intervention dépend de la situation sur le terrain, mais en
général ne dépasse pas quelques jours. L’envoi sur place de KUT
ne correspond pas à une intervention armée de forces militaires
allemandes à l’étranger, mais à l’envoi de personnels ayant
le statut diplomatique issus de différents ministères en vue
d’apporter conseil aux représentations diplomatiques respectives
situées à l’étranger. De ce fait, l’accord du parlement n'est pas
obligatoire. Les membres d’un groupe de soutien sont placés
sous les ordres de l’ambassadeur concerné.
106
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
[1] Des membres de la division des opérations
spéciales sont prêts à intervenir dans le cadre
d’opérations de sauvetage, d’évacuation et de
protection, 31 janvier 2006
(PIZ Heer/Bannert)
P R É V E N T I O N N AT I O N A L E D E S C R I S E S / G R O U P E S D E S O U T I E N E N C A S D E C R I S E
107
Un signe visible de remerciement :
la médaille de la Bundeswehr pour
militaires ayant servi en opération
extérieure (Bundeswehr)
DISTINCTIONS POUR DEPLOIEMENTS
A L’ETRANGER
9
Un signe visible de remerciement :
la médaille de la Bundeswehr pour
militaires ayant servi en opération
extérieure (Bundeswehr)
9.1
Médaille de la Bundeswehr pour militaires
ayant servi en opération extérieure
9.2
Croix d’honneur de la Bundeswehr
pour actes de bravoure
D I S T I N C T I O N S P O U R D E P L O I E M E N T S A L’ E T R A N G E R
109
9
D I S T I N C T I O N S P O U R D E P L O I E M E N T S A L’ E T R A N G E R
9.1
Médaille pour mili­
taires ayant servi en
opération extérieure
Le 26 juin 1996, au cours d’une cérémonie organisée à Bonn,
La médaille de la Bundeswehr pour militaires ayant servi en
le ministre fédéral de la Défense Volker Rühe a procédé à la
opération extérieure est décernée aux participants à des actions
remise des premières médailles de la Bundeswehr pour militaires
humanitaires et des opérations de maintien ou de rétablissement
ayant servi en opération extérieure. Il a décerné à 26 militaires
de la paix à l’étranger. Cette médaille, qui comporte trois échelons,
masculins et féminins, des réservistes et des employés civils la
est faite de métal bronzé, argenté ou doré et présente sur son
récompense, créée par lui en avril 1996, pour leur engagement
avers l’aigle, emblème de la République fédérale d’Allemagne,
sous statut militaire sur les Balkans, en Bosnie­Herzégovine
entouré d’une couronne de laurier. Le ruban, aux couleurs
(IFOR). Ces personnes ont été les premières à recevoir cet insigne,
nationales (noir, rouge et or), est assorti d’une agrafe qui spécifie
ce qui montre de manière particulièrement visible que les forces
la mission. Jusqu’à présent, il existe 35 agrafes correspondant aux
armées sont passées d’un corps procurant une formation mili­
35 opérations/missions à l’étranger dans lesquelles la Bundeswehr
taire à une armée en opération. Outre cette médaille, il existe
a été engagée. Elles vont de l’intervention au Kosovo (KFOR), en
une seconde décoration militaire, décernée en particulier aux
passant par l’opération anti­terroriste de la marine allemande dans
membres de la Bundeswehr en mission à l’étranger : la croix
la région de la Corne de l’Afrique (Enduring Freedom), l’aide
d’honneur de la Bundeswehr pour actes de bravoure, distinction
militaire fournie lors du tsunami en Indonésie (Aceh) et du trem­
créée par le ministre fédéral de la Défense Dr. Franz Josef Jung.
blement de terre au Pakistan (Swift Relief), à l’affectation de
militaires à des missions effectuées par les Nations unies, par
exemple au Soudan/Darfour (UNAMID) jusqu’à l’intervention
en Afghanistan dans le cadre de l’ISAF (International Security
Assistance Force).
En février 2009, le ministre fédéral de la Défense a accordé la
35e agrafe dans le cadre de l’opération Atalanta conduite avec
la participation de la marine allemande pour lutter contre la
piraterie au large des côtes somaliennes. La médaille pour
militaires ayant servi en opération extérieure, tous échelons
confondus, a été décernée jusqu’ici plus de 200 000 fois.
Depuis 2004, la participation réitérée à la même mission peut être
récompensée par l’attribution des nouveaux échelons argent et or
de la médaille. La médaille en bronze continue d’être décernée
après 30 jours de service dans une opération à l’étranger, celle en
argent est remise après 360 jours de service et celle en or après
690 jours. Il n’est pas obligatoire que ce service ait été effectué
en une seule et même fois. En 2003, le président fédéral Johannes
Rau a approuvé la modification correspondante du décret de
création. Jusqu’à présent, il y a 4 969 titulaires de la médaille en
argent et 273 de la médaille en or (situation au 20 avril 2009).
En outre, le décret de création a été complété pour que les membres
de forces armées étrangères puissent être récompensés. Ils peuvent
recevoir une distinction en raison de services exceptionnels rendus
à la Bundeswehr pendant des opérations à l’étranger.
110
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
[2]
[3]
[4]
[1] Médaille IFOR
(Bundeswehr)
[2] Médaille SFOR en argent
(Bundeswehr)
[3] Médaille SFOR en or
(Bundeswehr)
[4] Médaille Atalanta
(Bundeswehr)
D I S T I N C T I O N S P O U R D E P L O I E M E N T S A L’ E T R A N G E R
111
9
D I S T I N C T I O N S P O U R D E P L O I E M E N T S A L’ E T R A N G E R
9.2
Croix d’honneur
pour actes
de bravoure
[1]
[1] Remise des médailles KFOR de la
Bundeswehr et de l'OTAN au contingent
allemand KFOR, mai 2006 (Bundeswehr)
Les nouveaux échelons (argent et or) remontent à l’initiative du
Le 13 août 2008, le ministre fédéral de la Défense Dr. Franz Josef
Commandement des forces terrestres à Coblence. Ils tiennent
Jung a créé, comme cinquième et nouveau degré de distinction,
compte du fait que, depuis la création de la médaille en 1996,
la croix d’honneur de la Bundeswehr pour actes de bravoure. Le
le nombre des opérations a augmenté dans une mesure qui
18 septembre 2008, le président fédéral Horst Köhler a approuvé
n’était absolument pas prévisible. Suite aux événements du
cette récompense de la Bundeswehr pour actes de bravoure. Le
11 septembre 2001, les opérations internationales dans lesquelles
10 octobre 2008, la révision du décret de création a été publiée
la Bundeswehr a été engagée ont pris une dimension encore
dans les deux journaux officiels Bundesanzeiger et Bundesgesetz­
plus importante. Pendant les opérations, les exigences aussi ont
blatt et, de ce fait, est entrée en vigueur. Depuis lors, il est possible
augmenté et, surtout, sont devenues multiples. De nombreux
de rendre hommage aux militaires qui a ont fait preuve d’actes
militaires et des civils ont déjà participé à plusieurs opérations et
d’une bravoure exceptionnelle allant bien au­delà de ce qu’exige
assumé les risques et supporté les contraintes de telles missions.
la loi relative au statut des militaires. Aux termes du § 7 de cette
De manière générale, les décorations sont remises dans le pays
loi, la vaillance fait partie des devoirs élémentaires d’un soldat,
d’engagement par les commandants locaux au cours d’une
homme ou femme. Ils prêtent serment, ou promettent solennel­
cérémonie militaire qui a lieu juste avant le retour vers la terre
lement, de « défendre vaillamment le droit et la liberté du peuple
natale.
allemand ». Il n’existe rien de comparable dans les autres corps de
La médaille pour militaires ayant servi en opération extérieure
d’une exposition au danger de sa propre intégrité corporelle.
métier. Ceci inclut de prime abord l’acceptation tacite du principe
est une distinction nationale qui a reçu l’approbation du
président fédéral et qui est conforme aux dispositions de la loi
La fréquence de plus en plus rapprochée des opérations extérieu­
sur les titres, ordres et insignes datant du 26 juillet 1957.
res conduites sur le plan mondial avec la participation de la
Bundeswehr est à l’origine de la création de la croix d’honneur
de la Bundeswehr pour actes exceptionnels de bravoure. Ces
missions internationales posent de hautes exigences et présen­
tent un danger pour la vie et la santé des soldats. Depuis la
112
L A B U N D E S W E H R E N O P E R AT I O N
[1]
[2]
[3]
[1] Croix d’honneur de la Bundeswehr pour actes
de bravoure (Bundeswehr)
[2] Croix d’honneur de la Bundeswehr pour actes
[3] Croix d’honneur de la Bundeswehr pour actes
de grand mérite, notamment pour des actions
individuelles remarquables lors de l’accomplisse­
ment du devoir militaire au risque de l’intégrité
corporelle de la personne ou de sa vie
(Bundeswehr)
de grand mérite, notamment pour des actions
individuelles remarquables lors de l’accomplis­
sement du devoir militaire sans risques pour
l’intégrité corporelle de la personne ou sa vie
(Bundeswehr)
participation de l’Allemagne aux opérations aériennes de l’OTAN
lui incombait. Le cas échéant, il faut également présenter le style
au Kosovo contre la Serbie en 1999, les messages adressés par des
de commandement exceptionnel mis au jour dans la situation
députés, les remarques exprimées sur Internet, des pétitions desti­
concrète de la mission ainsi que le mode d’action indépendant,
nées au Bundestag, les commentaires des associations de person­
résolu et couronné de succès, adopté dans une situation incertai­
nel de réserve et des publications dans la presse ont montré que
ne.
les citoyens et citoyennes, les hommes et femmes politiques et les
médias approuvent l’attribution d’une distinction pour récom­
La révision du décret de création datant du 13 août 2008 a enrichi
penser le courage. Un signe clair et net fut donné le 13 décembre
les cinq degrés de distinction, en sus de la récompense pour actes
2007 par la commission des pétitions du Bundestag : Les députés
de bravoure, de deux autres décorations spéciales : la croix d’hon­
ont accueilli positivement la résolution recommandée par la
neur en argent bordée d’émail rouge pour services exceptionnels,
commission, qui prévoyait d’examiner la reconnaissance des
en particulier actions individuelles remarquables sans risques pour
services particulièrement remarquables rendus par des membres
l’intégrité corporelle de la personne ou sa vie, et la croix d’honneur
des forces armées en leur décernant un insigne de bravoure.
en or bordée d’émail rouge pour services rendus au risque de
l’intégrité corporelle de la personne ou de sa vie. De cette manière,
Toute proposition de remise d’une croix d’honneur de la Bundes­
et à la différence du passé, les croix d’honneur se voient rehaussées
wehr pour actes de bravoure doit être justifiée par écrit. Il doit
de l’extérieur et se distinguent de celles qui sont décernées pour
ressortir de manière claire et nette de cette justification que les
fidèle accomplissement du devoir et services rendus dépassant la
actes méritoires dépassent de beaucoup ce que l’on peut atten­
moyenne.
dre de la « vaillance élémentaire » (devoir de base stipulé au § 7
de la loi sur le statut des militaires). Il faut décrire concrètement
L’hommage rendu en décernant la médaille pour militaires ayant
dans quelle mesure la personne a dû faire montre d’un compor­
servi en opération extérieure ou la croix d’honneur pour actes de
tement courageux et d’une maîtrise de la peur, tout en mettant
bravoure ne constitue pas une distinction matérielle, mais corre­
en grand danger sa vie et sa santé, pour remplir avec endurance
spond à un geste significatif hautement symbolique en tant que
et patience et dans le respect de la morale la mission militaire qui
preuve tangible de gratitude et de reconnaissance.
.
D I S T I N C T I O N S P O U R D E P L O I E M E N T S A L’ E T R A N G E R
113
A l'intérieur du Mémorial se trouve
une salle du silence : la Cella
(IMZ Bw/Bienert)
LE MEMORIAL DE LA BUNDESWEHR
10
A l'intérieur du Mémorial se trouve
une salle du silence : la Cella
(IMZ Bw/Bienert)
Les militaires de la Bundeswehr se sont engagés par leur serment
C’est pour cette raison que le ministre fédéral de la Défense
à servir loyalement la République fédérale d'Allemagne et, sur la
Dr. Franz Josef Jung avait décidé d’ériger au second siège du
base de notre ordre constitutionnel, à défendre vaillamment le
ministère, en plein cœur de Berlin, un mémorial dont la première
droit et la liberté du peuple allemand. Cela implique également
pierre fut posée le 27 novembre 2008. L’inauguration a eu lieu
en dernière instance de risquer son intégrité corporelle ou sa vie.
le 8 septembre 2009. L’emplacement a été sciemment choisi :
Depuis la mise sur pied de la Bundeswehr en 1955, plus de 3 100
les principales décisions du parlement et du gouvernement sont
militaires et civils sont morts pour notre pays dans l’exercice de
prises à Berlin et mises en œuvre pour la Bundeswehr au siège
leurs fonctions, ce chiffre comprenant aussi les décès dans le
du ministère fédéral de la Défense de Berlin, à savoir au Bendler­
cadre des opérations extérieures.
block.
Honorer la mémoire des personnes qui ont perdu leur vie lors
Le Mémorial permet de rendre hommage à tous les membres de
de leur engagement pour la communauté est considéré au sein
la Bundeswehr : aux militaires, aux membres de l’administration
de toutes les sociétés comme un devoir collectif et fait partie
de la défense ou à d’autres personnels civils qui ont donné leur
intégrante de l'identité culturelle. Les forces armées rendent
vie pour notre pays lors de l’exercice direct ou indirect de leurs
hommage à leurs soldats disparus dans différents lieux commé­
fonctions. Les différentes formes de service peuvent ainsi être
moratifs : l’armée de terre à Coblence, l’armée de l’air à Fürsten­
honorées dans l’esprit d’une identité professionnelle commune
feldbruck et la marine à Laboe. Jusqu’à présent, il manquait
à tous les membres de la Bundeswehr.
toutefois un lieu central permettant d’honorer dans un cadre
digne la mémoire de l’ensemble des membres de la Bundeswehr,
A l’intérieur du Mémorial, on peut lire la dédicace suivante qui
militaires ou civils, morts pour la République fédérale d’Allemagne
résume l’idée maîtresse de ce monument : « Aux membres de
dans l’exercice de leurs fonctions.
notre Bundeswehr morts pour la paix, le droit et la liberté ».
LE MEMORIAL DE LA BUNDESWEHR
115
MENTIONS LEGALES
Editeur
Bundesministerium der Verteidigung
Stauffenbergstraße 18
10785 Berlin
Situation
Juin 2009 (2 ème édition)
Conception
Gratzfeld, Wesseling
Crédits photographiques :
> AMM (Aceh Monitoring Mission)
> BPA (Office de presse et d’information du
gouvernement fédéral)
> Bundesbildstelle (Photothèque fédérale)
> Bundesministerium der Verteidigung
(Ministère fédéral de la Défense)
> Bundeswehr
> Deutscher Bundestag/Bildarchiv (Bundestag/
photothèque)
> dpa (Agence de presse allemande)
> Einsatzführungskommando (Commandement
opérationnel de la Bundeswehr)
> IMZ Bw
(Centre d’information et de médias
de la Bundeswehr)
> PIZ Heer (Centre d'information et de la presse
de l’armée de terre)
> SZ Photo (Süddeutsche Zeitung/photothèque)
> ullstein bild/Fotoagentur imo (ullstein bild/
agence photo imo)
Impression
Köllen Druck+Verlag GmbH, Bonn
Informations complémentaires sur le web :
www.bmvg.de
www.bundeswehr.de
www.weissbuch.de
www.einsatz.bundeswehr.de
Cette publication a été élaborée dans le cadre du travail
d’information du ministère fédéral de la Défense.
Elle est distribuée gratuitement et n'est pas destinée à
la vente.
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MENTIONS LEGALES