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QUEL AVENIR POUR DEUTSCHE BANK EN BELGIQUE ?
Trends/Tendances - 02 Jul. 2015
Pagina 36
Le groupe allemand en pleine réorganisation
Nouveau management, nouvelle stratégie : la grande banque allemande vit une profonde crise. L’heure est à la
rationalisation afin de reprendre le bon chemin. Avec quelles conséquences pour ses activités belges ? Eléments
de réponse.
John Cryan réussira-t-il à remettre Deutsche Bank en selle ? Ce Britannique de 54 ans, ancien directeur financier
d’UBS, va succéder au duo formé par l’Indo-Britannique Anshu Jain et son homologue allemand Jürgen Fitschen
à la tête de l’institution d’outre-Rhin. Banquier aguerri, il remplace déjà Anshu Jain et sera seul aux commandes
du groupe après le départ de Jürgen Fitschen en mai 2016. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que son job ne
sera pas de tout repos.
Scandales en série
D’abord parce que le géant bancaire est empêtré dans une kyrielle de litiges. On parle de 6.000 dossiers, dont
celui lié au scandale de la manipulation du taux interbancaire londonien (le Libor). Une affaire pour laquelle il
vient d’ailleurs de s’acquitter d’une amende record de deux milliards d’euros, histoire d’éviter un procès.
Ensuite parce que Deutsche Bank, sorte de supermarché financier qui emploie près de 100.000 personnes à
travers le monde et offre toute la gamme des services 24 heures sur 24 sur les cinq continents, est tiraillée
depuis de nombreuses années entre ses envies de grande banque d’investissement — où elle revendique une
place dans le top mondial aux côtés des grandes maisons de Wall Street telles que les Goldman Sachs et autres
JP Morgan Chase — et son enracinement dans la banque de détail en Allemagne.
Nouveau plan
Pour à la fois redorer son blason et réduire sa complexité, le groupe basé à Francfort a annoncé un plan
stratégique en forme de cure d’amaigrissement. Sous la pression de ses actionnaires mécontents des
performances de la banque, qui ont demandé le départ du tandem Jain-Fitschen, Deutsche Bank compte réduire
les coûts à raison de 3,5 milliards d’euros par an d’ici 2020 (année de son 150e anniversaire).
Pour parvenir à ce résultat, le groupe entend à l’avenir être plus sélectif quant à ses clients, ses produits et ses
zones géographiques. Il va ainsi notamment se défaire de sa filiale Postbank et fermer 200 de ses 700 agences
en Allemagne. Il prévoit également de réduire la voilure de ses activités de banque d’investissement. Certes, ces
activités étaient devenues le principal moteur des bénéfices du groupe sous l’impulsion d’Anshu Jain. Mais à
quel prix ! On l’a dit, l’image du groupe est ternie par de nombreux égarements. La division sera donc mise au
pas et amputée de 200 milliards d’euros d’actifs. Last but not least , l’offre numérique et les activités de gestion
de patrimoine seront renforcées. Objectif : une rentabilité d’au moins 10 % (contre 3 % actuellement).
Et à Bruxelles ?
Quel sera l’impact de cette restructuration en Belgique ? Faut-il craindre des suppressions d’emplois, des
fermetures d’agences, etc. ? Non, assure le patron de Deutsche Bank Belgium Alain Moreau dans l’entretien qu’il
nous a accordé à ce propos ( lire l’encadré ). Selon lui, les nouveaux choix stratégiques du groupe ne devraient
pas avoir d’impact négatif sur sa succursale belge. Il est vrai que Francfort n’a pas l’intention d’abandonner les
six pays européens où il déploie avec succès des activités de banque de proximité (Allemagne, Espagne,
Portugal, Italie, Pologne et Belgique : soit plus de 13 millions de clients). C’est écrit noir sur blanc dans le
communiqué officiel relatif à la nouvelle stratégie qui a été diffusé le 27 avril dernier.
Il faut dire aussi que Deutsche Bank Belgium se porte plutôt bien. L’enseigne propose chez nous des services de
retail banking (centrés sur le conseil en investissement à destination des particuliers aisés) et de cash
management (pour les entreprises). Malgré un nombre de clients qui stagne, son business connaît une
croissance régulière. La masse de ses actifs sous gestion a bondi de près de 80 % depuis la crise de 2008.
Ceux-ci s’élèvent actuellement à 25 milliards d’euros (contre 23,5 milliards fin 2014 et 14,1 milliards fin 2008).
Toutes les banques ne peuvent pas en dire autant.
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ENTRETIEN AVEC ALAIN MOREAU : « Nous ne nous attendons à aucun impact
négatif »
Chief country officer de Deutsche Bank Belgium, Alain Moreau est également responsable des produits
d’investissement et d’assurance pour les sept pays où le groupe Deutsche Bank est présent avec du retail
banking (Allemagne, Espagne, Portugal, Italie, Pologne, Belgique et Inde). Selon lui, la filiale belge n’a rien à
craindre de la réorganisation de sa maison mère allemande.
TRENDS-TENDANCES. Que se passe-t-il chez Deutsche Bank ?
ALAIN MOREAU. Le groupe est en train de se réorganiser. Une nouvelle stratégie a été dévoilée fin avril. Nous
avons aussi un nouveau CEO, un nouveau CFO et un nouveau patron pour la division PBC ( private and
business clients , la banque des particuliers). Sur les huit membres du comité exécutif, trois sont nouveaux. Ce
sont des changements profonds.
Comment voyez-vous l’arrivée de John Cryan à la tête du groupe ?
Il a restructuré UBS entre 2008 et 2011 et siège au board de Deutsche Bank depuis plusieurs années. Il a donc
participé à la réflexion stratégique des derniers mois. Je ne m’attends pas à ce qu’il revienne sur les grands axes
validés juste avant sa nomination début juin. Deutsche Bank va rester une banque globale avec quatre piliers
forts ayant chacun dégagé l’an dernier plus d’un milliard d’euros de profits bruts : la banque d’investissement, la
division GTB ( global transaction banking , la banque d’entreprise), le pôle PBC ( private and business clients ) et
la partie asset management .
Deutsche Bank va donc rester un groupe tiraillé entre la banque d’investissement et la banque de détail ?
La stratégie est de rester une banque globale pour pouvoir aider nos clients qui sont aussi globaux. Ce n’est pas
facile. Il faut s’adapter aux nouvelles règles qui sont devenues plus strictes ( leverage ratio , etc.). Mais il est bien
d’avoir une grande banque en Europe capable d’aider les entreprises à s’exporter dans le monde sans être
obligées de devoir passer par les acteurs américains. Ceci dit, nous ne ferons plus tout, partout. D’où une
réduction de la taille du bilan, le désengagement dans certains pays où la taille critique n’est pas suffisante, la
cession de Postbank en 2016, un allègement de la banque d’investissement et un recentrage de la banque des
particuliers sur son ADN.
A quoi doit-on s’attendre pour la Belgique ?
La réorganisation de la banque des particuliers passent par une digitalisation accrue et un recentrage sur le
conseil en investissement. Nous avons toujours été en Belgique une banque centrée sur la clientèle affluent et
les canaux directs (avec un réseau réduit d’agences). Le groupe part donc dans la direction que nous avons
empruntée depuis des années. C’est rassurant. Nous ne nous attendons à aucun impact négatif sur les activités
belges. Au contraire : nous allons continuer à engager, à ouvrir des agences, etc. Et nous lancerons une
application mobile d’ici la fin de l’année.
Justement, comment se porte Deutsche Bank Belgium ?
Nous avons atteint les 25 milliards d’euros d’actifs sous gestion. Nous nous étions fixé cet objectif pour la fin
2015. Nous avons donc six mois d’avance. Quant aux profits avant impôts, ils continuent de suivre la même
tendance : ils ont été multipliés par trois en 10 ans.
D’où vient cette croissance ?
Notre base de clientèle est relativement stable depuis quelques années : aux alentours de 350.000 clients. C’est
essentiellement le portefeuille moyen par client qui augmente. Notre clientèle centralise de plus en plus ses
avoirs chez nous. Notre offre DB Personal marche très bien : 97 % des clients en sont satisfaits.
Ceci dit, il y a aussi l’effet de marché...
C’est vrai. Il y a un mélange des deux : regroupement des avoirs et hausse des marchés.
Dans quoi sont réinvestis ces avoirs ?
Les dépôts sont gérés de manière centralisée au niveau du groupe. Ils sont réinvestis dans des crédits (ménages
et entreprises), dans des obligations (OLO, par exemple), etc.
Toujours pas d’acquisition en vue pour la branche belge ?
Les banques qui sont à vendre ne sont généralement pas les plus performantes. Vous achetez un passif social,
de la complexité, etc. Aucune banque en Belgique n’arrive à avoir une structure de coûts aussi faible que la
nôtre, ce qui nous permet de redonner de la performance aux clients. Il fallait arriver assez rapidement aux 20
milliards d’euros. C’est une taille critique sur le marché belge compte tenu du poids des réglementations (MiFID
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2, etc.). Les acteurs de plus petite taille seront à l’avenir sous pression suite à la réduction de leurs marges et à
l’augmentation de leurs coûts. Bref, notre croissance future sera organique. Nous sommes en train d’établir un
plan à cinq ans. Mais je ne peux malheureusement pas encore vous en dévoiler les objectifs.
SÉBASTIEN BURON
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