Les incidences de la loi Dutreil - Marseille
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Les incidences de la loi Dutreil - Marseille
EXPERTISE Dominique Ferré - Avocat associé, FIDAL bnA=rfpdn2f;=t789131dn2f;=t : : Négociations commerciales 2007 Les incidences de la loi Dutreil lll Plus d’une année et demie s’est écoulée depuis l’adoption de la loi Dutreil réformant la loi Galland, et un peu plus d’un an depuis la parution, le 8 décembre 2005, de sa circulaire d’application. La priorité ainsi conférée aux CGV et leur communication à tout acheteur qui en fait la demande répond à l’exigence de transparence de l’offre du vendeur. Cette transparence permet de s’assurer que les acheteurs ne font pas l’objet de traitements discriminatoires injustifiés de la part du vendeur. Bien que non obligatoire, la rédaction de CGV est donc vivement conseillée afin de pallier le risque de poursuites pour discrimination injustifiée entre acheteurs. n Les CGV catégorielles consacrées La possibilité pour les fournisseurs de mettre en place des conditions de vente différenciées selon des catégories de clients est affirmée. Un décret devrait préciser les conditions dans lesquelles sont définies ces catégories “en fonction notamment du chiffre d’affaires, de la nature de la clientèle et du mode de distribution”. En matière de conditions générales de vente catégorielles, en l’attente du décret, la circulaire précise que la doctrine administrative antérieure à la loi continue de s’appliquer “dans la mesure où la loi en confirme les principes”. Ainsi, “un grossiste et un détaillant peuvent se voir proposer des conditions de vente différentes”. DESTINÉE À ASSURER LA MODERNISATION DES relations commerciales, la loi comporte des dispositions visant, pour l’essentiel, à renforcer les conditions générales de vente (CGV), consacrer la différenciation tarifaire, encadrer la coopération commerciale et les autres services, ainsi que les accords de gamme, mais aussi intégrer les marges arrière dans le calcul du seuil de revente à perte (SRP). Elle se traduit également par un renforcement des contrôles et des sanctions. Z n L’autorité des CGV renforcée Les CGV sont annoncées comme constituant le “socle de la négociation commerciale” et comprennent les conditions de vente, le barème des prix unitaires, les réductions de prix et les conditions de règlement. Les CGV voient donc leur autorité renforcée face aux conditions d’achat. 30 :: Tribu n°1 n Les conditions particulières de vente évoquées Les fournisseurs peuvent également établir des conditions particulières de vente (CPV) “justifiées par la spécificité des services rendus” et qui ne sont pas soumises à l’obligation de communication prévue pour les CGV. La prudence s’impose lors de la rédaction de CPV. Il est nécessaire de les fonder sur des services présentant une réelle spécificité. A défaut, le vendeur peut être poursuivi pour discrimination injustifiée entre acheteurs. n La coopération commerciale et les autres services encadrés Le contrat de coopération commerciale est défini, dans un nouvel article L.°441-7 du Code de commerce, comme “une convention par laquelle un distributeur ou un prestataire de services s’oblige envers un fournisseur à lui rendre, à l’occasion de la revente de ses produits ou services aux consommateurs, des services propres à favoriser leur commercialisation qui ne relèvent pas des obligations d’achat et de vente”. Un formalisme lourd et rigoureux doit être respecté quant au contenu et au délai d’établissement de ces accords. Le non-respect de ce formalisme est sanctionné par une amende portée à 75°000 euros (le maximum de l’amende est fixé au quintuple pour les personnes morales). Les services autres que ceux relevant de la coopération commerciale font l’objet d’un encadrement contractuel dont le non-respect est également sanctionné pénalement. …un renforcement des contrôles et des sanctions Au surplus, les distributeurs doivent communiquer annuellement le montant des rémunérations pour les services rendus aux fournisseurs au titre de la coopération commerciale et des services distincts. n Le SRP abaissé en vue d’une baisse de prix à la consommation La loi prévoit un mécanisme complexe de calcul du SRP. Ce seuil, tel qu’il est calculé depuis la loi Galland, est désormais minoré de l’ensemble des “autres avantages financiers” (la marge arrière) consentis par le fournisseur à son distributeur, dès lors que ces avantages excèdent et excédant 15 % du prix unitaire net du produit vendu à compter du 1er janvier 2007 (ce seuil était de 20 % depuis le 1er janvier 2006, étant précisé que le montant minorant le calcul du SRP ne devait pas excéder 40 % du montant total des autres avantages consentis). Les grossistes répondant à la condition d’indépendance posée par la loi bénéficient au surplus d’un SRP abaissé de 10 % par rapport à celui applicable aux autres professionnels. Une évolution vers le triple net, voire la suppression du SRP, est envisagée pour 2008. n Les accords de gamme encadrés Les accords de gamme, quant à eux, sont mentionnés parmi les pratiques pouvant constituer un abus de puissance de vente ou d’achat, et ce conformément à la jurisprudence. Ils peuvent constituer une pratique restrictive engageant la responsabilité civile du fournisseur s’ils entravent “l’accès des produits similaires aux points de vente”. n Les contrôles et des sanctions renforcés Les nombreux contrôles de la DGCCRF, ainsi que les décisions récentes rendues à l’initiative du ministre en première instance contre des grands distributeurs confirment cette orientation. On peut ainsi relever les jugements du Tribunal de commerce de Nanterre du 15 novembre 2005 et celui du Tribunal de grande instance de Strasbourg du 25 novembre 2005 mettant en cause des enseignes de la grande distribution. Plus récemment, le Tribunal de commerce de Créteil a condamné la centrale de référencement d’un distributeur, le 24°octobre dernier, à restituer à des fournisseurs plus de 76 millions d’euros perçus au titre de la coopération commerciale, et à verser une amende civile de 100°000 euros. Le Tribunal a estimé que les services de coopération commerciale en cause étaient inutiles pour les fournisseurs, ceux-ci payant des prestations qu’ils avaient déjà obtenues ou qu’ils assuraient euxmêmes. En matière pénale, les tribunaux sanctionnent principalement le non-respect des règles de facturation (en particulier l’imprécision des dénominations de services de coopération commerciale). Parmi les nombreuses décisions rendues en la matière, on peut citer celle de la Cour d’appel de Riom du 2 mars 2006 sanctionnant un opérateur à une amende de 150 000 euros, celle du Tribunal correctionnel de Nantes du 29 septembre 2005 infligeant une amende de 100 000 euros, ou encore celle du Tribunal de grande instance de Bar-le-Duc du 4 octobre 2005 prononçant une amende de 30°000 euros. Les tribunaux condamnent également les opérateurs pour non-respect des règles de formalisme des contrats de coopération commerciale ou des dispositions relatives à la revente à perte. L’augmentation des sanctions et les risques financiers et commerciaux qui peuvent en découler pour les entreprises doivent donc les amener à la plus grande rigueur dans la mise en œuvre juridique de leurs négociations commerciales 2007. n Tribu n°1 :: 31