Nouvelle station d`une espèce hypogée (rare
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Nouvelle station d`une espèce hypogée (rare
Documents mycologiques Tome Fascicule 103 1996 Picoa carthusiana Tulasne Observation d’une espèce hypogée rare. Patrick LAURENT 26 Route du Repas Société Mycologique des Hautes-Vosges à Wisembach Société Mycologique du Haut-Rhin à Illzach Société Lorraine de Mycologie à NANCY Le 15 novembre 1994, lors d’une prospection sur les hauteurs de mon village, sur le massif Vosgien, au col de Sainte-Marie-aux-Mines faisant limite entre les départements des Vosges et du Haut-Rhin, j’ai pu récolter une espèce hypogée, relativement rare pour la région. Il s’agit de Picoa carthusiana Tulasne (Picoa de la Chartreuse) de la famille des Balsamiaceae. La station donna 9 ascocarpes à l’automne 94 et 7 à l’automne 1995, dans une allée sablonneuse, en bordure d’un escalier en béton situé au milieu d’une forêt de sapins (Abies alba), sur sol gréseux, sablonneux, acidophile, à une altitude de 730 mètres. Les ascocarpes ne sont pas toujours entièrement enterrés et beaucoup sont légèrement découverts en surface, laissant apparaître un cortex à teinte plus ou moins violet foncé. Division : Ascomycotina Classe : Hyménoascomycètes Sous-Classe : Pezizomycetideae Ordre : Tuberales Sous-Ordre : Elaphomycetineae Famille : Balsamiaceae Genre : Picoa Espèce : carthusiana Examen macroscopique : Ascocarpe plus ou moins globuleux, tubéroïde, de 2,5 x 7 cm de Ø, légèrement et irrégulièrement lobé, bosselé, dont le péridium (enveloppe pseudoparenchymatique) d’environ 1mm, est furfuracé-velouté à granuleux-feutré, pourpre très foncé à presque noir, légèrement crevassé par endroit. Les crevasses ou saillies laissent entrevoir une teinte rouge rosé violacé, comme les blessures causées par les petits rongeurs. Pas de mycélium basal distinct (ou non décelé). La gléba non lacuneuse, finement granuleuse, charnue et assez ferme, très aqueuse est crème blanchâtre au début, puis se tache d’une coloration noirâtre non homogène à maturité. A la coupe on observe sous le péridium une zone stérile à coloration rouge rosâtre. Elle exhale une forte odeur très aromatique plus ou moins désagréable et entêtante à la dessiccation dans une salle close. Examen microscopique : La gléba est composée d’un enchevêtrement d’hyphes de 7 à 10 µm de Ø, et à des endroits bien précis de cet enchevêtrement sont distribuées très irrégulièrement des veines stériles. Les asques (Fig. 1) ellipsoïdes, de 80 - 110 µm de long à 65-85 µm de large contiennent 6 à 8 spores, disposées irrégulièrement. Les spores (Fig. 2) (60-75 x 20-35 µm) sont citriformes à brièvement fusiformes (elles font penser à des «yeux» d’où l’ex taxon : L. ophtalmosporum), grosses, à membrane modérément épaisse (2-3 µm), lisses, incolores à brun jaune. Habitat & récoltes : Entre le 15/11/94 et le 2/12/95, et entre le 10/10/95 et le 17/11/95, au col de Ste-Marie, commune de Ste-Marie-aux-Mines (Ht-Rhin), sur le massif Vosgien, altitude de 730 m, sur grès sablonneux, acidophile, à proximité d’Abies alba. Discussion : Ce genre, qui se trouve dans l’ordre des tubérales, est replacé actuellement dans la famille des Balsamiaceae après avoir transité chez les Terfeziaceae et les Eutuberaceae. Les Tuberoïdes comptent des genres divers comme : Picoa, Tuber, Delastria, Pachyphloeus, Stephensia, Leucangium, Balsamia, Choiromyces, Terfezia, Genea, Geopora, Elaphomyces... Picoa Juniperi, plus courant et plus connu sous Genévriers, dans les Landes, en France méridionale et en Afrique du Nord, se distingue de P. carthusiana par ses spores globuleuses. Tulasne a découvert l’espèce en septembre, dans le Dauphiné, en hêtraie sapinière. A. Marchand décrit cette espèce comme hôte des bois mixtes, cantonnée à la zone alpine, mais avec des irradiations dans la Forêt Noire, en Hongrie et en Roumanie. Elle est également présente en Amérique du Nord. Cependant les mycologues Allemands ont classé cette espèce dans la catégorie 0, c’est à dire «Espèce non signalée depuis 1950» (Rote liste der gefährdeten Grosspilze in Deutschland). L’aire de distribution connue était circonscrite par A. Knapp entre les 44° et 48° parallèles. L’espèce semble cependant inféodée à Abies alba, bien qu’une étude mycorhizienne n’ait rien donnée. (Insuffisance de récolte de mycélium sur la station). Cet ascomycète découvert en sapinière stricte sur sol sablonneux de grès décomposé semble fidèle à sa station, une allée clairière, située à 730 m. d’altitude, sur le massif Vosgien, au col de Ste-Marie-aux-Mines (Ht-Rhin). Bibliographie : Arora 1986 Mushrooms Demystified (2° éd.) : 854 Fischer in Engler & Harms 1938 Die Natürl. Pfanzenf. 5b, 8 : 36 Fischer 1897 Rabenhort’s Krypt. F1. 1,5 : Forstinger 1986 Beitr. zur Pilsk. Mitteleuropa 2 : 177-178, pl. 1-2 Gilkey 1939 Oreg. St Monogr. Stud. Bot. &(Tub) : 49, pl. 2/36 Irlet 1985 Schw. Z.f.P. 63 (12) : 216-218, pl. fig. 1-4 Kapp 1951 Schw. Z.f.P. 29 : 142, pl. 5/5 Krigelsteiner 1994 Beitr. Kenntn. P. Mitteleuropa 9 : 148 Marchand 1970 Champignon du Nord et du Midi, Tome 4, page 192, pl. 394. Montecchi & Lazzari 1984 Boll. Gr. Myc. Bresadola 27 : 100-116 Montecchi & Lazzari 1993 Atlant. Fotogr. D. Funghi ipogei : 227, pl. : 226 Moser 1963 KKF II a : 81 Paoletti J. 1889 Syllogue Fungorum 8 (Tuberac.): (sub Leucangium ophtalmosporum, n.c.) Quélet 1882 (83) C.R. Ass. Fr. Av. Sci. 11 : 404 pl. 12/2 (sub Leucangium ophtalmosporum , n. sp.) Quélet 1886 Enrichidion Fungorum 259 (sub Leucangium ophtalmosporum) Trappe 1971 TBMS 57 / 89 Tulasne 1862 Fungi Hypogaei (2°éd.) : XXIV (sub P. carthusiana, n. sp.) Fig. 1 Asque (110x75 µm) ellipsoïde, vue de profil, contenant six ascospores. Fig. 2 Spore citriforme (70x32 µm), à membrane épaisse (2,5 µm). Fig. 3 Vue de l’ascocarpe avec son cortex (à gauche) et vue en coupe de la gléba à maturité. Nouvelle station d'une espèce hypogée (rare?) en Alsace. Picoa carthusiana Tulasne 1851 fung. Hypog.:24 Syn. = Leucangium ophtalmosporum Quélet INTRODUCTION : Lors des dernières rencontres mycologiques organisées comme chaque année par la SMS, au Centre International d'Amitié à "La Claquette" ROTHAU Bas-Rhin, nous eûmes l'agréable surprise de retrouver à environ 5 mètres de notre local de détermination, cinq ascomes d'un hypogé qui devient de moins en moins rare en Alsace. La station fut découverte par Pierre Lejais sous un frêne pleureur (cultivar) à quelques mètres d'un épicéa Picea abies, sur un sol argilo-siliceux. Le plus gros des ascomes, 160 g, présentait une surface à peine épigée et a été remarqué en raison d'un léger soulèvement de la terre, craquelée à cet endroit. C'est en fait la troisième station Alsacienne depuis 1994. La première découverte de 1994 en Alsace le fut dans le Haut-Rhin, au Col de Sainte Marie aux Mines (à quelques 70 m des Vosges en limite avec mon village de Wisembach), aux pieds de plusieurs Sapins Abies alba, contre des escaliers menant à un cimetière militaire, dans du sable de grès décomposé. Je la dois à ma petite chienne Gypsi, un Caniche femelle. Cette station donna de nouveaux ascomes l'année suivante, puis rien en 1996. Deux exemplaires en 1997, et plus de 10 cette année. La seconde station, nous la devons à Géraldine Richard, fille du Vice Président de LA SMHR, un vendredi 1er novembre de l'année 1997. (Voir bulletin SMHR N° 14 - 1997, p.28 J.L.M) La station n'est pas précisée, mais il s'agit des environs de Guebwiller Haut-Rhin. Les ascomes furent récoltés sous feuillus : Chênes rouges, hêtres, châtaigniers, Robinier et quelque sapins très jeunes et éloignés, sur un sol sablonneux. On note une espèce pesant 218 g pour 8 cm de . DESCRIPTION : Ascome globuleux, irréguliers, tubéroïdes, de 1,5 à 8 cm de , légèrement et irrégulièrement lobé, bosselé, à péridium (enveloppe pseudo-parenchymatique) épais d'environ 1 mm, furfuracé-velouté à granuleux-feutré, pourpre-violet très foncé à presque noir, légèrement mais très souvent crevassé par endroit laissant entrevoir une teinte rougeâtre à rose violacé, comme les blessures causées par les petits rongeurs (qui sembles en être friants). Pas de mycélium basal observable. Gléba non lacuneuse, finement granuleuse, charnue et assez ferme, plus molle à maturité, très aqueuse, crème blanchâtre dans la jeunesse puis se tachant de noirâtre irrégulier et marbré à maturité. A la coupe on observe, sous le péridium, une zone stérile à coloration rouge rosâtre. Elle exhale une forte odeur très aromatique plus ou moins désagréable et entêtante à la fin et surtout à la dessiccation. Spores 60-80x20-35 µm, citriformes à brièvement fusiformes (elles font penser à des yeux d'où l'ancien nom de Leucangium ophtalmosporum), à paroi épaisse (2-3 µm), lisses, incolores puis brun jaune à maturité. Asques ellipsoïdes, 80-110 x 65x85 µm, à 6 ou 8 spores, disposées irrégulièrement. Herbier : LAURENT P. 9411 59 - 9511 114 - 9810 868 - 9811 ****. Leg. à RIOUSSET de récolte 94. Leg. à Joseph ASTIER de récoltes de 97 et 98. Bibliographie : Arora D. - 1986-Mushrooms Demystified (2° éd.) 959 pp. Astier J. -1998- Truffes blanches et noires, p. 43, pl. n° 190-191 Fischer E. -1897 - Ascomyceten : Tuberaceen und Hemiasceen. In : Dr. L. Rabenhorst's Kryptogamen-Flora von Deutschland, Osterreich und Schweiz. Ed.2, Bd.I, V:131 pp. Fischer E. - 1938- Eumycetes (Fungi). - Klasse : Ascomycetes. In : A. Engler & H. Harms (Eds.) : Die Natürlichen Pflanzenfamilien nebst ihren Gattungen und wichtigeren Arten, Insbesondere den mutzpflanzen. Bd. 5b, VIII. 42 pp. Forstinger H. - 1986- Picoa carthusiana Tul. Und Tyromyces kmetii (Bres)Bond. Et Sing. - Erstnachweise aus Oberösterreich. Beitr. Kennt. Pilz. Mitteleur. 2 : 177-182. Gilkey H.M. - 1939- Tubérales of North America. Oreg. St.Monogr. Stud. Bot. 1 : 1-63. Irlet B. -1985- Picoa carthusiana Tul. - ein seltener hypogaïscher Ascomycet. Schw. Zeitschr.f.Pilzk. 63 (12) : 216-218 Knapp A. -1951- Schw. Zeitschr.f.Pilzk. 29 : 142, pl.5/5 Krieglsteiner G.J. -1994- Beitr. Kennt. Pilz. Mitteleur. 9 : 148 Laurent P. -1996- Picoa carthusiana Tulasne. Observation d'une espèce hypogée rare. In : Documents mycologiques -Tome XXVI- Fascicule n° 103, p. 33, pl. p. 61 Lawrynowicz M. -1988- Workowe (Ascomycetes), Jeleniakowe (Elaphomycetales,Truflowe (Tuberales). In : Grzyby (Mycota) XVIII : 161 pp.+ 27 pl. Marchand A. -1970- Champignons du Nord et du Midi, Tome 4, p. 192, pl. 394. Montecchi A. & Lazzari -1984- Invito allo studio dei funghi ipogei. Boll. Gr. Myc. G. Bresadola 27 : 100-116. Montecchi A. & Lazzari - 1993- Atlante Fotografico di Funghi Ipogei : 490 pp. Paoletti J. -1889- Syllogue Fungorum 8 (Tuberac.) Quélet L. - 1883- Quelques espèces nouvelles ou critiques de la flore mycologique de France. C.R.Ass.Fr;Av.Sci. (La Rochelle 1882) 11 : 387-412 + 2 pl. Quélet L. -1886- Enrichidion Fungorum : 259 Trappe J.M. -1979- The orders, families and genera of hypogeous Ascomycotina. Mycotaxon 9 : 297-340. Tulasne L.R. & Tulasne C. -1862- Fungi Hypogaei (2° éd.) : XXIV. [1ère édition : 1851]. Vittadini C. -1991- & Auguadri A. Lucchini G. Riva A. Testa E. -1991- Funghi ipogei - Monographia Tuberaceum - Tartufi del Cantone Ticino p. 282. Nouvelle station d'une espèce hypogée (rare?) en Alsace Picoa carthusiana Tulasne 1851 fung. Hypog.:24 Syn. = Leucangium ophtalmosporum Quélet par Patrick LAURENT Bull. SMS INTRODUCTION : Lors des dernières rencontres mycologiques organisées comme chaque année par la SMS, au Centre International d'Amitié à "La Claquette" Rothau Bas-Rhin, nous eûmes l'agréable surprise de retrouver à environ 5 mètres de notre local de détermination, cinq ascomes d'un hypogé qui devient de moins en moins rare en Alsace. La station fut découverte par Pierre Lejay sous un frêne pleureur (cultivar) à quelques mètres d'un épicéa Picea abies, sur un sol argilo-siliceux. Le plus gros des ascomes, 160 g, présentait une surface à peine épigée et a été remarqué en raison d'un léger soulèvement de la terre, craquelée à cet endroit. C'est en fait la troisième station alsacienne depuis 1994. La première découverte de 1994 en Alsace le fut dans le Haut-Rhin, au Col de Sainte Marie aux Mines (à quelques 70 m des Vosges en limite avec mon village de Wisembach), aux pieds de plusieurs sapins Abies alba, contre des escaliers menant à un cimetière militaire, dans du sable de grès décomposé. Je la dois à ma petite chienne Gypsi, un caniche femelle. Cette station donna de nouveaux ascomes l'année suivante, puis rien en 1996. Deux exemplaires en 1997, et plus de 10 cette année. La seconde station, nous la devons à Géraldine Richard, fille du Vice-Président de la SMHR, un vendredi 1er novembre de l'année 1997. (voir bulletin SMHR N° 14 - 1997, p.28 J.L.M). La station n'est pas précisée, mais il s'agit des environs de Guebwiller Haut-Rhin. Les ascomes furent récoltés sous feuillus : chênes rouges, hêtres, châtaigniers, robiniers et quelques sapins très jeunes et éloignés, sur un sol sablonneux. On note une espèce pesant 218 g pour 8 cm de Æ . DESCRIPTION : Photo © D. Schott - Journées SMS 1998 Ascomes globuleux, irréguliers, tubéroïdes, de 1,5 à 8 cm de Ø , légèrement et irrégulièrement lobés, bosselés, à péridium (enveloppe pseudo-parenchymatique) épais d'environ 1 mm, furfuracé-velouté à granuleux-feutré, pourpre-violet très foncé à presque noir, légèrement mais très souvent crevassé par endroits, laissant entrevoir une teinte rougeâtre à rose violacé, comme les blessures causées par les petits rongeurs (qui semblent en être friands). Pas de mycélium basal observable. Gléba non lacuneuse, finement granuleuse, charnue et assez ferme, plus molle à maturité, très aqueuse, crème blanchâtre dans la jeunesse puis se tachant de noirâtre irrégulier et marbré à maturité. A la coupe on observe, sous le péridium, une zone stérile à coloration rouge rosâtre. Elle exhale une forte odeur très aromatique plus ou moins désagréable et entêtante à la fin et surtout à la dessiccation. Spores 60-80x20-35 µm, citriformes à brièvement fusiformes (elles font penser à des yeux d'où l'ancien nom de Leucangium ophtalmosporum), à paroi épaisse (2-3 µm), lisses, incolores puis brun jaune à maturité. Asques ellipsoïdes, 80-110 x 65x85 µm, à 6 ou 8 spores, disposées irrégulièrement. Herbier : LAURENT P. 9411 59 - 9511 114 - 9810 868 - 9811 ****. Leg. à Louis-Georges RIOUSSET de récolte 94. Leg. à Joseph ASTIER de récoltes 97 et 98. La Truffe des Vosges Spécial champignons magazine Quand le diamant noir vient du Périgord ou du Var. Quand une truffe blanche du Piémont s’affiche à 41 000 €. Quand la truffe de Bourgogne veut rivaliser avec sa cousine du sud. Quand la truffe de Lorraine fait salon à Pulnoy. Qu’en est-il de la « Truffe » des Vosges ? Le diamant noir, c’est la mélano. Je veux dire Tuber melanosporum. Comprenez, truffe à spores noires. Celle dite de Bourgogne c’est Tuber uncinatum, cependant assez ubiquiste en Europe, tout comme sa cousine dite de Lorraine, Tuber mesentericum. Beaucoup plus rare dans les Vosges, Picoa carthusiana peut se rencontrer dans des région aussi éloignées que l’Oregon et le Maroc. Plusieurs stations sont connues sur le massif des Vosges. Les hypogés sont difficiles à dénicher. Le chien, notre fidèle ami, se révèle fort précieux pour la prospection de ceux-ci. Comme pour les vrais Truffes, cet hypogé dégage des arômes complexes, d’alcool de fruits vieilli, de fromage comté voire de munster affinés. Délicieux en toasts sur jaune d’œuf, saisi préalablement en fines lamelles dans une poêle garnie d’huile d’olive. Champignon à spores géantes, atteignant presque les 100 µ, fait rarissime chez les champignons supérieurs, en forme typique d’yeux égyptiens, d’où son ancien nom Leucangium ophthalmosporum (Etymologiquement : spore en forme d’œil). Contrairement aux vraies Truffes qui ne poussent que sur sol calcaire, d’où leur absence sur le massif vosgien, notre Picoa se contente de sol sablonneux en terrain acide, généralement pauvre. Alors que les autres mycorhizent les chênes et les noisetiers en particulier, celle-ci vit en symbiose avec les sapins, les vrais, Abies alba, vulgairement appelé le sapin des Vosges. Quelle est donc cette étrange boule irrégulière, d’un poids variant de quelques dizaines de grammes à quelques centaines, aux couleurs noirâtre à violet foncé, montrant de frêles fissures rosâtres à rougeâtres à maturité, à la gleba marbrée de blanc à gris noirâtre, aux formes noduleuses évoquant une météorite ? Il s’agit d’un ascome, placé dans l’ordre des Tubérales et la famille des Balsamiacées. Elle doit son nom au massif de la Chartreuse dans les Alpes, d’où son épithète latine Carthusiana. Elle fut décrite par les Frères Tulasnes en 1851 découverte dans le Dauphiné en septembre sous une hêtraie sapinière. Elle a une seule petite sœur, plus courante, Picoa juniperi qui comme son nom l’indique se développe sous les Genévriers, notamment dans le sud. Peu courante chez nous en Europe, où on la signale en Forêt noire, en Suisse, en Autriche, en Hongrie, en Roumanie ou encore en Pologne, mais aussi en Espagne et en Italie Elle est donc réservée aux initiés, qui sauront, du moins j’ose l’espérer, la respecter et respecter ses biotopes, afin que la joie que procure sa découverte puisque égaler les parfums qu’elle exhale et les saveurs qu’elle procure à nos papilles. Son aire de répartition mondiale se situe entre les 47 et 48émes parallèles. Un clin d’œil pour les Vosges. Une perle pour nos montagnes mythiques. Une énigme de plus pour le massif concernant la présence de ce « fruit » de la terre. Les Vosges n’ont pas fini de me surprendre, de me fasciner et de m’offrir des moments intenses. Patrick LAURENT